L’Église catholique a condamné de manière presque immédiate toute forme de franc-maçonnerie, soupçonnant une stratégie cachée à laquelle les membres adhèrent en se liant par un pacte inviolable et secret, autour de principes suspectés d’être en opposition avec la foi chrétienne.
De Clément XII à Benoît XIV, les reproches portent sur le secret, le serment, la suspicion des états temporels, le soupçon d’hérésies, et l’indifférentisme religieux compte tenu de la variété des participants. Après la Révolution, les accusations pontificales deviennent plus graves, y ajoutant la subversion politique à des erreurs théologiques comme le naturalisme ou encore le syncrétisme, et cela du pape Pie VII à Léon XIII inclus.
Une condamnation presque immédiate et dure par l’Église catholique
En cette même année 1738, le Pape Clément XII publia le premier document de l’Église catholique sur ce nouveau mouvement et ce fut immédiatement une bulle d’excommunication. Le document du Pape critiquait ceux qui « se lient entre eux par un pacte aussi étroit qu’impénétrable » et s’engagent par serment « à couvrir d’un silence inviolable tout ce qu’ils font dans l’obscurité du secret » ajoutant que « s’ils ne faisaient point de mal, ils ne haïraient pas ainsi la lumière ». Invoquant divers motifs et « d’autres causes justes et raisonnables de Nous connues », « de science certaine et après mûre délibération », le pape « conclu et décrète de condamner et d’interdire » par ce texte « valable à perpétuité » toute forme de franc-maçonnerie. Tout ceci « sous peine d’excommunication de laquelle nul ne peut être absous » par un autre que le Pape lui-même, si ce n’est à l’article de la mort.
Benoit XIV confirma en 1751 cette condamnation « à perpétuité », « pour des raisons justes et graves » avec cette précision : « dans ces sortes de sociétés se réunissent des hommes de toute religion et de toute secte, et l’on voit assez quel mal peut en résulter pour la religion catholique ».
Ensuite, après la Révolution française de 1789, vont s’ajouter d’autres motifs de condamnation plus graves, de Pie VII (1821) à Léon XIII (1884) qui vont progressivement décrire la Franc-Maçonnerie comme organisation opposée à la foi chrétienne, dont les principes parfaitement inconciliables avec ceux de l’Église catholique liguent contre elle, au moyen d’une stratégie cachée tous ses adhérents. Ces nombreuses condamnations papales, pourtant sans équivoque, n’ont pas empêché les loges de se développer, dans le monde anglo-saxon, à l’époque très majoritairement protestant, mais aussi dans la France restée encore très catholique, où les bulles des papes ont été largement ignorées.
En France, les bulles papales concernant la franc-maçonnerie ont été ignorées jusqu’en 1802
Ces prises de position très fermes eurent un effet important partout, mais elles ne furent curieusement pas appliquées en France, où selon la pratique définie dans le Concordat de 1514 avec Léon X, les bulles papales devaient être présentées au Parlement de Paris pour entrer en application dans le Royaume. Or celle-ci ne le fut jamais, le cardinal Fleury (gouvernant au nom de Louis XV) expliquant que ces sociétés secrètes ne se réunissaient plus en France parce que cela déplaisait au roi, et ce mensonge pas très pieux permit à la franc-maçonnerie de se développer sans tenir compte du Pape.
La suspicion des États temporels
Avant la première condamnation pontificale quelques gouvernements s’étaient inquiétés déjà de l’existence de la « société » des francs-maçons. Par exemple, les états généraux de Hollande le 30 novembre 1735, le conseil de Genève en novembre 1737 et le conseil du roi de France en mars 1737 sous l’influence du Cardinal Fleury, premier ministre de Louis XV, interdirent les réunions de francs-maçons.
Pour la France il y eut même un arrêt du tribunal du Châtelet le 14 septembre 1737. Les deux motifs concernaient à chaque fois le serment et le secret. Pour la France s’y ajoutait une considération purement politique. Les premières loges apparues en France, étant écossaises, donc Stuartistes, Fleury craignit de mécontenter le roi d’Angleterre régnant alors, un Hanovre, protestant, allié de la France. Mais par la suite, considérant que ses craintes n’étaient pas fondées, il ne présenta jamais la bulle « In eminenti » comme celle qui suivit au Parlement de Paris.
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