Chers parents, ayez pitié de vos enfants, ne les écrasez pas sous le poids de vos soucis, de vos peines, de vos responsabilités : leur âme n’est pas assez mûre pour le porter.
La famille Dupont part en excursion. Tout à la joie, Pierrot saisit le premier l’un des sacs du pique-nique. Maman encourage le bon mouvement du garçon d’habitude un peu porté à la paresse, mais elle connaît bien les limites du petit : discrètement, elle allège le sac à dos d’une grande bouteille quelle glisse dans son propre sac. Et chacun étant chargé selon ses forces, la famille passe une excellente journée. Dans quelques années, il est bien sûr que Pierre, devenu grand, saura porter des sacs autrement lourds que celui du pique-nique, mais en attendant, ce serait l’écraser sous un poids disproportionné.
Chers parents, ayez pitié de vos enfants, ne les écrasez pas sous le poids de vos soucis, de vos peines, de vos responsabilités : leur âme n’est pas assez mûre pour le porter.
Petites épaules et lourdes charges
Il est des sujets qu’il ne faut pas aborder avec ou devant les enfants.
Les plus jeunes des enfants Martin savent qu’on n’est pas très riche à la maison, et donc qu’il faut être soigneux avec ses affaires ; d’ailleurs, dans une famille simple et unie, on est heureux avec peu de chose. Les plus grands, eux, savent vaguement que papa a de grosses difficultés et qu’il leur faudra participer aux frais de leurs études en travaillant l’été. Ce n’est que devenus adultes qu’ils ont vraiment appris comment l’entreprise de papa a sombré à cause d’un escroc, etc. Enfants heureux, ils n’ont su des ennuis financiers de leurs parents que ce que leurs petites épaules en pouvaient porter pour les aider à grandir dans l’esprit de pauvreté.
Faire de son enfant le confident de ses difficultés matrimoniales ne peut que produire des catastrophes chez lui.
Après une séparation, Maman est restée seule avec le petit Henri. Souvent, elle lui a raconté les griefs accumulés contre son père. Ce garçon, n’ayant entendu parler de son papa qu’en mal, dépourvu de modèle masculin, est devenu un adulte incapable de prendre des responsabilités.
Autre exemple. Mélanie est partie en pension, l’adaptation s’est très bien faite, mais quand elle reçoit une lettre de la maison, une grande tristesse l’envahit soudain, provoquant migraines et autres malaises : c’est que, dans chaque lettre, Maman raconte ses dernières difficultés. Maman s’est confiée à Mélanie, mais Mélanie, elle, à qui pourra-t-elle bien confier la lourde peine de la mésentente de ses parents ? Pourquoi s’étonner de son caractère taciturne et méfiant ?
Anne est d’un tempérament assez fort. Elle aussi, elle reçoit les confidences de Maman restée seule. Alors, adolescente, elle a pris les choses en main, parle à Maman d’un ton protecteur, dirige la maison, commande aux petits frères et sœurs qui le vivent fort mal, sait tout sur tout. Quelle épouse fera-t-elle demain ?
Protéger les jeunes âmes
Les épreuves peuvent être bien réelles, bien lourdes à porter, mais ce n’est pas aux enfants qu’il faut les confier. C’est auprès de Notre-Seigneur sur la croix, à la messe, dans la prière, qu’on trouvera le réconfort. Ensuite c’est à un prêtre qu’on aura recours, à un adulte de la famille, à un ami en qui on a confiance. C’est dans un certain silence que se trouve la force.
Attention aussi aux discussions fréquentes devant les enfants sur la crise financière, la situation internationale tendue, la politique désastreuse, les hommes d’Église scandaleux, tel ménage en situation irrégulière, les problèmes d’un tel et d’un tel, etc. Les enfants n’ont pas le sens des proportions, ils ne comprennent pas bien ce qui est dit, sinon que ça va mal, que papa et maman sont inquiets, que c’est grave… et ils angoissent devant des questions qui les dépassent. Laissez vos petits grandir sous le soleil du bon Dieu au rythme de la nature et de la grâce. Donnez-leur vos épaules de papa, de maman, pour qu’ils puissent y poser leur tête, y déposer leurs questions et leurs soucis d’enfants, y trouver réconfort et sécurité. C est vous qui êtes les confidents de vos enfants et non l’inverse : à chacun son sac à dos…
Source : Fideliter n°208, juillet-août 2012.