Vive le Christ-Roi !

Il y a une rigou­reuse obli­ga­tion de recon­naître notre roi, Jésus-​Christ, et de nous sou­mettre à ses lois.

Jésus-​Christ est Roi des nations, les preuves en sont nom­breuses. Notre foi qui se fonde sur la véra­ci­té de Dieu, se fonde donc sur sa parole, sur les deux sources de la Révélation — l’Écriture Sainte et la Tradition. A toutes les pages de l’Écriture Sainte, nous lisons que Jésus-​Christ est Roi.

Prophètes, évan­gé­listes, apôtres assurent à Jésus-​Christ sa qua­li­té et ses attri­bu­tions de Roi. Il sera appe­lé le “Dominateur” qui doit sor­tir de Jacob, Roi que le Père a éta­bli sur Sion, sa mon­tagne sainte pour rece­voir en héri­tage les nations, et comme domaine, les extré­mi­tés de la terre. Déjà annon­cé comme Roi par les pro­phètes Isaïe et Daniel, Zacharie sera le pro­phète du Roi très doux qui, assis sur une ânesse, entre dans Jérusalem, accla­mé par le peuple comme un juste et un Sauveur. Lors de l’Annonciation, ne lit-​on pas en saint Luc : « Il régne­ra cet enfant, sur la mai­son de Jacob et son règne n’au­ra pas de fin. Le Seigneur Dieu lui don­ne­ra le trône de David son Père. » Si le pape Pie XI a vou­lu ins­ti­tuer, en 1925, une fête spé­ciale à la royau­té du Christ, c’est qu’il vou­lait sou­li­gner que le Christ conti­nue à régner sur les hommes et les ins­ti­tu­tions comme au temps où les Mages venaient l’adorer à Bethléem.

Après le bap­tême où le Père déclare que Jésus est son Fils bien-​aimé, celui sur lequel repose et demeure l’Esprit Saint, celui à qui le Père a remis toute chose, le Christ inau­gure sa pré­di­ca­tion, et que dit-​il ? « Le royaume de Dieu est proche. Convertissez-​vous. Le royaume de Dieu est par­mi vous. »

Quand Jésus nous enseigne à prier, Il nous invite tout aus­si­tôt à deman­der “Que votre règne arrive”, et il a conscience de sa mis­sion : “Tout m’a été remis par mon Père”. Mais de quelle royau­té s’agit-il ? Celle des hommes, à la manière humaine, en fai­sant sen­tir sa force, sa puis­sance, en s’élevant pour s’imposer ? Non. Il refuse cette royau­té d’où que vienne la pro­po­si­tion. A la mul­ti­pli­ca­tion des pains, la chance humaine atteint son som­met. Il doit régner. Ne serait-​ce pas le moment ? Non, Il refuse cette royau­té. Quand donc proclamera-​t-​Il sa royau­té ? Durant sa Passion : enchaî­né, bafoué, mépri­sé, trai­té de fou et affu­blé avec déri­sion de vête­ments royaux, d’une cou­ronne d’épines, d’un sceptre fra­gile comme un roseau. Lui qui ailleurs refuse le titre royal, Il le reven­dique ici avec force, au péril de sa vie, car devant le Sanhédrin, c’est une audace blas­phé­ma­toire — Dieu seul est Roi —, devant Pilate, c’est une pro­vo­ca­tion, un sou­lè­ve­ment contre l’ordre éta­bli. Et pour­tant, à la ques­tion de Pilate “Vous êtes donc Roi ?”, Notre Seigneur affirme là, durant sa Passion, avec auto­ri­té “Je suis Roi”. Et ce titre de roi, nous le ver­rons affi­ché, écrit sur le bois de la croix à la vue de toutes les nations. Il est accu­sé et il ose dire : « D’ailleurs, je vous le déclare : désor­mais, vous ver­rez le Fils de l’homme sié­ger a la droite de Dieu et venir sur les nuées du ciel. » Devant Pilate, il affirme que sa royau­té donne tout son sens à sa vie. Ce titre de Roi était déjà écrit dans le ciel. Plus tard, avant de remon­ter au ciel, il enver­ra ses apôtres en mis­sion : “Allez donc et ensei­gnez toutes les nations”, par cette phrase, Il donne à cette mis­sion un carac­tère public, un carac­tère social. Le Cardinal Pie s’exprimait ain­si : « Comme Dieu envoyait les anciens pro­phètes vers les nations et vers leurs chefs pour leur repro­cher leurs apos­ta­sies et leurs crimes, ain­si le Christ envoie ses apôtres et son sacer­doce vers les peuples, les empires, les sou­ve­rains, les légis­la­teurs pour ensei­gner à tous sa doc­trine et sa loi. Leur devoir, comme celui de saint Paul, est de por­ter le nom de Jésus-​Christ devant les nations et les rois. » Ainsi Jésus-​Christ donne à ses apôtres, la mis­sion offi­cielle de prê­cher son règne social. Il veut aus­si que ce règne soit pro­cla­mé par tous les fidèles ; chose que nous fai­sons chaque jour en réci­tant le Notre Père. Qu’y demandons-​nous ? Que son nom soit sanc­ti­fié, que son règne arrive, que sa volon­té soit faite sur la terre comme au ciel ; trois demandes qui conden­sées en une, résument la demande du règne public social de Jésus-​Christ. En effet, le nom de Dieu ne peut être sanc­ti­fié plei­ne­ment s’il n’est pas recon­nu publi­que­ment. La volon­té de Dieu n’est pas accom­plie sur terre comme au ciel, si elle n’est pas accom­plie publi­que­ment et socialement.

Voyez. Il y a là, dans le Notre Père, une invi­ta­tion pres­sante pour cha­cun de nous, à ne pas nous enfer­mer dans notre petit monde, dans notre sacris­tie, pour­vu que nous sau­vions nos âmes. Non, les affaires ici-​bas nous inté­ressent, doivent nous pré­oc­cu­per. C’est encore le car­di­nal Pie qui s’exprime en ces termes : « Le chré­tien, c’est un homme public et social par excel­lence. Il est catho­lique, ce qui signi­fie : uni­ver­sel. » Quand nous réci­tons le Notre Père et ces trois demandes, nous rendons-​nous compte qu’il nous appar­tient de faire avan­cer, de favo­ri­ser ce règne de Dieu sur la Terre ?

Combien de fois éga­le­ment sommes-​nous cou­pables par notre iner­tie, notre paresse, notre pusil­la­ni­mi­té, notre res­pect humain, de retar­der, voire d’empêcher, ce règne de Dieu sur la Terre.

« Il n est pas un chré­tien, digne de ce nom, dit le car­di­nal Pie, qui ne s’emploie acti­ve­ment dans la mesure de ses forces à pro­cu­rer ce règne tem­po­rel de Dieu et à ren­ver­ser ce qui lui fait obs­tacle. » Et tra­vailler à ce règne tem­po­rel n’est pas une chi­mère ; même si tout semble aller aujourd’hui à l’encontre, nous ne pou­vons renon­cer à ce que ce règne voit le jour.

Jésus-​Christ est donc Roi des nations. Mais quels sont ses titres à la royau­té ?
Le Christ est Roi au sens propre du mot. Comme Dieu, Notre Seigneur Jésus-​Christ est le Tout Puissant ; Il a avec le Père, en ses mains, puis­sance et gloire éter­nelle. Jésus-​Christ étant Dieu et Roi, sa royau­té est consé­quence de sa divi­ni­té. Cette royau­té est donc fon­dée sur sa nature divine. Que cer­tains le veuillent ou non, qu’ils déclarent “nous ne vou­lons pas qu’il règne sur nous”, peu importe, Il est roi, au titre de Fils de Dieu et de Rédempteur du monde.

Jésus-​Christ étant Dieu, Il était Roi de toute éter­ni­té. En entrant dans le monde, Il appor­tait donc avec Lui, déjà, la royau­té. Cette royau­té est fon­dée sur l’union hypo­sta­tique, à savoir l’union, de la per­sonne du Verbe, de la nature divine, et de la nature humaine. Du fait de cette union, le Christ a puis­sance sur toutes les créa­tures, bien qu’il n’ait pas vou­lu, durant sa vie ter­restre user de ce pou­voir. Comme Fils de Dieu, lui appar­tient la sou­ve­rai­ne­té divine. Mais, et cela doit par­ti­cu­liè­re­ment tou­cher nos cœurs, il est Roi par conquête, étant notre Rédempteur. En effet, nous avons été rache­tés par son sang. Par sa rédemp­tion, le Christ a ver­sé son sang pour les hommes. Il les a conquis. La royau­té est le prix de sa conquête, par une vie de dou­leurs et une mort atroce. Il faut donc que toutes les formes de la vie fami­liale, sociale, éco­no­mique et poli­tique soient éle­vées et trans­fi­gu­rées dans la lumière du Notre Seigneur Jésus-​Christ Sauveur. Notre Seigneur est Roi par sa souf­france et par sa mort, et ceux qui veulent le suivre, peuvent seuls com­prendre le sens, la valeur de la souf­france et de la mort. Ils acceptent l’une et l’autre avec amour et c’est dans la joie sur­na­tu­relle d’aimer Dieu que se peuvent unir, à l’exemple du Christ, la souf­france et la joie. C’est par là que Jésus-​Christ a acquis son empire.

« Le Christ est mort, et il est res­sus­ci­té, dit saint Paul aux Romains, à cette fin d’acquérir l’empire sur les morts et sur les vivants. » Et aux Philippiens, il écrit : « ils s’est humi­lié Lui-​même, se ren­dant obéis­sant jusqu’à la mort de la croix. Or voi­là pour­quoi Dieu L’a exal­té et Lui a don­né un nom qui est au-​dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou flé­chisse, au ciel, sur la terre et dans les enfers. » Donc comme rédemp­teur, Il a sur nous les droits du conqué­rant et du vain­queur. Saint Paul insiste bien, c’est à cause de cela, parce qu’il a accep­té la mort de la croix, abs­trac­tion faite du nom, du rang et de l’empire que Lui assu­rait son ori­gine céleste, à cause de cela, Dieu L’a exal­té, en L’établissant à un titre nou­veau, celui de conquête, roi, Maître et Dominateur suprême. Et quand il faut qu’au nom de Jésus, tout genou flé­chisse, Dieu n’a point lais­sé la place à l’exception, c’est tout genou, que ce soit l’homme indi­vi­duel­le­ment, le chef de famille, le simple citoyen et l’homme public qui doivent la sou­mis­sion et l’hommage à Jésus Roi.

Enfin, le carac­tère de cette royau­té, c’est l’amour.
Le plus bel attri­but de la royau­té, c’est la misé­ri­corde, et le carac­tère de la bon­té de l’autorité chré­tienne est un reflet de la bon­té du Roi Jésus-​Christ. On a d’ailleurs appe­lé avec rai­son cette royau­té de Jésus-​Christ, royau­té du Sacré Cœur, c’est-à-dire royau­té d’amour. C’est par son cœur, en effet, c’est-à-dire par son amour que le Christ gagne­ra à la cause de son règne les gou­ver­nants et les gou­ver­nés.
Roi des cœurs à cause de sa cha­ri­té et de sa bien­fai­sante dou­ceur. Il veut régner sur nos cœurs par son amour.

Roi des Cœurs, c’est le titre qu’on Lui décerne dans la 13ème invo­ca­tion des lita­nies du Sacré Cœur : “Cœur de Jésus, Roi et centre de tous les cœurs”. Avec cette invo­ca­tion, on signi­fie bien que sa royau­té effec­tive sur nous, vient du cœur et s’exerce ensuite sur le cœur. Notre Seigneur veut exer­cer, sur nous, cette royau­té de nature et de droit, non par coac­tion mais libre­ment, comme le demande d’ailleurs notre condi­tion d’être intel­li­gents et libres. Parmi ses mul­tiples signi­fi­ca­tions, le cœur en a une qui est pre­mière et prin­ci­pale, celle d’être la source des affec­tions, la source de nos choix, la source de la dona­tion de nous-​même. Dire que Jésus est le Roi de nos cœurs, c’est dire que sa cha­ri­té et sa dou­ceur nous ont atti­rés à Lui, nous ont conquis, nous ont fait connaître et accep­ter joyeu­se­ment et libre­ment ses droits à régner sur nous.

Un der­nier point ne pour­rait être élu­dé, l’attitude des nations par rap­port à la royau­té du Christ.
Une lourde indif­fé­rence et jusqu’à une ter­rible aver­sion pèsent sur nos nations, s’installent chez de nom­breux catho­liques au sujet de l’établissement du règne social de Notre Seigneur Jésus-​Christ. Tout catho­lique conscient désire natu­rel­le­ment le règne du Christ sur les consciences indi­vi­duelles, tout catho­lique conscient estime comme idéal divin que tous les êtres acceptent et vivent la foi catho­lique, authen­tique expres­sion du mes­sage de Jésus-​Christ. Malheureusement beau­coup pensent à une sou­ve­rai­ne­té ou à un règne du Christ sur les nations et les États, mais sans aucune dif­fé­rence d’avec le règne qu’il a ou doit avoir sur les indi­vi­dus. Ils refusent alors concrè­te­ment cette sou­ve­rai­ne­té qui consiste dans le fait que L’État comme tel rende un culte à Dieu, se sou­mette aux normes reli­gieuses et morales dic­tées par l’Église pour régler la conduite poli­tique des gou­ver­nants et des gou­ver­nés. Ils refusent cette sou­ve­rai­ne­té qui consiste dans le fait que l’État comme tel consi­dère un devoir, non seule­ment de s’abstenir de toute action contraire aux inté­rêts spi­ri­tuels que l’Église pro­meut, mais encore de créer et de garan­tir les condi­tions favo­rables à sa mis­sion sanc­ti­fi­ca­trice. Impressionnés par le plu­ra­lisme reli­gieux du monde entier et par l’inertie spi­ri­tuelle déri­vant du maté­ria­lisme et de l’hédonisme régnant, beau­coup de catho­liques ont per­du le sens du pro­sé­ly­tisme catho­lique, pro­sé­ly­tisme pour­tant sanc­tion­né par Jésus-​Christ quand II char­geait ses apôtres de la conquête du monde.

Ayant per­du cette saine illu­sion, voi­là qu’ils prennent le par­ti de la sépa­ra­tion des deux pou­voirs. Apostolat de témoi­gnage, d’exemplarité, disent-​ils, mais non plus de pré­di­ca­tion ver­bale. Laïcité, neu­tra­li­té de l’État qui garan­tisse à toutes les confes­sions égale liber­té reli­gieuse, disent-​ils encore, mais non un État catho­lique. Voilà les for­mules qu’ils jugent en accord avec l’esprit du temps et les plus pro­fi­tables aujourd’hui.

Eh bien, non ! La sou­mis­sion et l’hommage de toute créa­ture, telle est la consé­quence de la royau­té de Jésus-​Christ. Il y a une rigou­reuse obli­ga­tion de recon­naître notre roi, Jésus-​Christ, et de nous sou­mettre à ses lois. Cette obli­ga­tion atteint les indi­vi­dus, mais aus­si les peuples et par consé­quent leurs chefs en tant que chefs.

« Venez Ô patries des peuples, chante David, venez appor­ter au Seigneur, l’honneur et la gloire, venez lui offrir la gloire due à son nom. »

Il faut tirer les consé­quences de la doc­trine de la royau­té sociale du Christ :

  • les chefs des peuples sont les man­da­taires du Christ et tiennent de Lui et de lui seul, leur auto­ri­té, même s’ils ignorent, même s’ils sont élus démo­cra­ti­que­ment, et même si impies, ils gou­vernent pour notre châtiment.
  • Légiférant en lieu et place du Christ, ils doivent veiller à ce que les lois qu’ils édictent, ne soient jamais en oppo­si­tion avec celles de Dieu.
  • L’État qui est le plus agréable à Dieu, est donc l’État catho­lique parce qu’il est dans son prin­cipe res­pec­tueux des droits de Jésus-​Christ Roi.
  • Proclamer qu’un État est laïque et que la sou­ve­rai­ne­té réside dans le peuple, c’est atten­ter aux droits que Jésus-​Christ tient de son Père, et c’est insul­ter Dieu Lui-même.

Prions donc, com­bat­tons pour l’avènement de ce règne social de Notre Seigneur Jésus-​Christ Roi, en vivant le pré­cepte que saint Pie X inti­mait à tous les catholiques.

« Et c’est pour­quoi le but vers lequel doivent conver­ger tous nos efforts, c’est de rame­ner le genre humain à l’emprise du Christ. Toutefois, pour que le résul­tat réponde à nos espé­rances, il faut par tous les moyens et au prix de tous les efforts, déra­ci­ner entiè­re­ment cette mons­trueuse et détes­table ini­qui­té propre au temps où nous vivons et par laquelle l’humain se sub­sti­tue à Dieu. »

Puisse la devise de saint Pie X être notre mot d’ordre et la règle de toutes nos acti­vi­tés, de toute notre vie : “Instaurer toute chose dans le Christ”.

Source : L’Acampado n°175