Nous connaissons tous l’histoire bien réelle de la tentation de Notre-Seigneur au désert. Nous entendons son récit chaque année. L’Église nous rappelle alors que notre vie, pour atteindre à la gloire céleste, doit imiter celle de Jésus-Christ.
À Satan qui l’éprouve, Jésus- Christ répond : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » Et pourquoi donc ? Tout simplement parce que « la fin de l’univers est le bien de l’intelligence. Ce bien c’est la vérité. Celle-ci est donc la fin ultime de tout l’univers ». Et saint Thomas ajoute : « C’est à la considérer que la Sagesse doit avant tout s’attacher. Aussi bien est-ce pour manifester la vérité que la divine sagesse s’est fait chair et a déclaré : « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. » »
La surabondance actuelle de fausses doctrines obscurcit l’espace vital intellectuel. Nous vivons, nous nous mouvons dans un brouillard épais d’erreurs. Et s’il est vrai que l’on constate moins facilement la déviation d’un esprit que la dégénérescence d’un comportement, une doctrine fausse a un pouvoir générateur beaucoup plus profond et bien plus étendu qu’une dépravation morale même avérée. Car nous n’agissons jamais qu’en suivant nos appréhensions intellectuelles. Et en fin de compte, vivre c’est penser. Voilà bien tout l’enjeu de ce qu’on appelle à juste titre la crise actuelle ! Les erreurs philosophiques sont le soubassement de « l’esprit du concile ». Saint Pie X le disait déjà en 1907 dans l’encyclique Pascendi dominici gregis.
Notre perfection humaine naturelle autant que chrétienne s’achève dans la contemplation de la vérité, aussi bien naturelle que surnaturelle. Toute la sagesse consiste à dire la vérité et surtout la vérité divine ; et la dire après l’avoir méditée. Et comme nous ne sommes pas des anges, la parole nous est donnée pour communiquer cette vie intellectuelle. Notre parole devrait être le signe de notre pensée et celle-ci l’image de la réalité. Mais le monde factice d’aujourd’hui, impressionnant, nous pousse dans cette belle illusion que l’homme est la mesure de toutes choses. Affreuse présomption de l’homme qui s’estime indépendant de tout autre. Mais nous sommes de Dieu et pour Dieu. Et tout l’univers n’est que voie de retour à Dieu. Il faut lire saint Paul : « La colère de Dieu éclate du haut du Ciel contre toute impiété et toute injustice des hommes qui, par leur injustice, retiennent la vérité captive. »
Non seulement nous avons à nous garder de l’erreur, poison de l’intelligence, mais nous avons nécessairement aussi à réprouver les fauteurs de trouble, selon nos moyens, qui que nous soyons, où que nous soyons. Notre vie doit manifester notre cohérence intellectuelle. Notre discours doit être parole de sagesse.
Force nous est de nourrir notre intelligence de vérité. La « parole de Dieu » est fondamentale. Autrefois le magistère de l’Église nous la transmettait dans toute son acuité. Les encycliques des papes, celles de Léon XIII, de saint Pie X, de Pie XII sont encore la source inaltérable d’une vie chrétienne stable et le lieu privilégié où puiser la réponse aux difficultés actuelles. Par ailleurs ces enseignements pontificaux maintiennent les esprits dans une saine attitude réceptrice de vérité.
Mais nous ne sommes pas dispensés d’un effort intellectuel. Ce labeur très astreignant est indispensable aujourd’hui. Saint Thomas nous en donne la raison :
Les mahométans et les païens ne s’accordent pas avec nous pour reconnaître l’autorité des Écritures, grâce à laquelle on pourrait les convaincre. Force nous est de recourir à la raison naturelle à laquelle tous sont obligés de donner leur adhésion.
L’effort que nous demande la Providence est celui des héros et des saints. La victoire est assurée. N’oublions jamais que notre Ciel est justement la vision béatifique, la contemplation éternelle de la sagesse divine.
Abbé Benoît de Jorna†, Supérieur du District de France de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X
Sources : Fideliter n° 246 de novembre-décembre 2018