Lacordaire a donné, du sublime, cette définition : « L’élévation, la profondeur et la simplicité réunies en un seul jet ». Pontmain, c’est, en effet, l’élévation : une fenêtre ouverte sur le Ciel ; la profondeur : un humble hameau qui ne deviendra commune qu’en 1876 ; la simplicité d’une veillée de prières par un soir d’hiver ; réunies en un seul jet : trois heures d’une seule soirée seulement. Les faits surnaturels de Pontmain sont vraiment sublimes !
Mais la Vierge Marie n’est pas venue par hasard à Pontmain : Elle y était, pour ainsi dire, attendue. En effet, « l’abbé Michel Guérin parvint à faire du pauvre hameau le domaine de Marie, si bien qu’avant même d’apparaître dans le ciel étoilé, la Reine du Ciel régnait dans la cité, et Elle avait fait sa demeure dans le cœur des paroissiens » (Élise Humbert, Notre-Dame de Pontmain et la chaîne d’or).
L’histoire en a conservé la démonstration[1]. La devise de l’abbé Guérin (1801–1872) était : « Rien sans Marie, tout par Marie ». Il avait fait sienne celle de l’école française de spiritualité à laquelle il a été formé durant son séminaire : « À Jésus par Marie ! ».
En 1836, à peine arrivé à Pontmain, grâce à une généreuse donatrice, il fait don d’une Vierge à toutes les familles. Il les invite à « mettre toute confiance dans cette bonne Mère » et à réciter le chapelet tous les jours. C’est ainsi que ses confrères le surnomment « le Curé aux bonnes Vierges ».
En 1837, il introduit, dans sa paroisse, l’Archiconfrérie du très saint et immaculé Cœur de Marie. Elle porte tellement de fruit qu’en 1853, il pourra dire : « J’ai la consolation d’avoir presque toute ma paroisse dans cette confrérie ».
Le 25 mars 1838, il bénit une statue de la Vierge Marie qu’il place dans son église ; en 1846, il instaure le Mois de Marie ; en 1853, un an avant la proclamation du dogme, il reçoit une nouvelle statue de l’Immaculée Conception.
En 1852, non content d’avoir installé la Mère de Dieu dans les foyers et dans son église, il place une statue de la Vierge Marie dans son clocher et s’en explique en ces termes : « Elle est dans vos maisons ; il faut qu’Elle soit la maîtresse et que vous La serviez. Elle est aussi au-dessus de l’église parce qu’Elle est maîtresse de la paroisse. Nous devons Lui obéir et La prier avec confiance ! ». C’est que l’abbé Guérin croit au Règne social de la Vierge Marie.
En 1854, l’abbé Guérin fait vœu d’allumer quatre bougies sur l’autel de la Sainte Vierge pendant les offices et particulièrement durant les vêpres du dimanche, au chant du Magnificat. C’est à cette pratique que l’apparition fera allusion.
L’abbé Guérin éclaire la piété mariale de ses fidèles. Un premier sermon commente une citation des proverbes appliquée à Marie. Un autre, la phrase du Cantique des cantiques : « Vous êtes toute belle… ». Un troisième traite de l’Assomption. Il aime à citer saint Bernard : « Fasse le Ciel, qu’étant sous la protection de Marie, nous ne périssions jamais ! » (Servus Mariae numquam peribit !).
En 1871, en pleine guerre franco- prussienne, la situation de la France est catastrophique (elle a sous-estimé l’ennemi), désespérée (elle a surestimé ses forces) et extrême (l’ennemi triomphe : il est aux portes de la Bretagne). Mais, Pontmain est prête à recevoir la Vierge qui règne déjà dans les cœurs. Elle apparaît 17 janvier au soir.
« Madone de la France en péril », comme l’a souligné Mgr Richaud, Elle exhorte les enfants : « Mais priez mes enfants. Dieu vous exaucera en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher ! ». Les enfants prient et la France obtient, contre toute attente et toute espérance humaine, le salut.
Quoique dans des circonstances bien différentes, notre pays est de nouveau en péril. Il ne nous reste qu’à faire nôtre l’exhortation de Notre-Dame de Pontmain : « Mais priez mes enfants ! ».
Source : Bulletin de la Confrérie Marie Reine des Cœurs n°186
- Source : Michel Guérin, premier curé de Pontmain, 1836–1872[↩]