Mort le 1er juin 434 à Lérins.
Saint Honorat [1], jeune néophyte, et son frère aîné, Venance, menaient une vie austère et se dévouaient aux pauvres et au clergé. Mais la réputation de leur vertu amène sur eux des louanges et leur inspire la fuite de leur contrée. Laissant leur bien aux pauvres, ils emmènent avec eux saint Caprais, un vieillard auquel ils se soumettent. Saint Caprais[2] était d’une famille illustre et avait étudié la philosophie et la littérature avant de tout quitter pour le Christ pour une solitude vers les montagnes qui séparaient la Gaule Belgique et Lyonnaise d’avec la Germanie (Jura/Vosges). Certains ont cru qu’il y accepta quelques disciples. Il leur fit visiter les lieux consacrés par le sang des martyrs ou par quelque dévotion des fidèles. Arrivés à Marseille, ils font connaissance avec l’évêque Procule[3] qui essaie de les retenir dans son diocèse. Les trois cénobites s’embarquent vers la Mer Egée, où les côtiers ignorent le latin, afin d’y vivre incognito. A Nicomédie, ils s’adjoignent saint Jacques, un perse nouvellement baptisé. Leur périple les fait enfin accoster en Péloponnèse. Là, à Modon ou Méthone, décède Venance qui n’avait pas les forces pour de tels voyages. Malade, Honorat décide de reprendre la route des Gaules. Ils se font aimer en Italie, mais ils poursuivent jusqu’en Provence où ils se lient d’amitié avec saint Léonce[4], évêque de Fréjus. Pour ne pas s’éloigner de cet homme de Dieu, ils cherchent un lieu isolé : saint Léonce leur propose d’abord une grotte au Cap Roux, mais très vite les solitaires sont sollicités par la population qui se recommandait à leur prière. Saint Léonce les mène alors à l’archipel de Lérins vers l’an 391.
Saint Caprais devait se juger trop âgé pour diriger ce nouveau monastère et il constatait non seulement les progrès dans la vertu de saint Honorat mais aussi sa capacité à gouverner. Ainsi saint Honorat, avec l’accord de saint Léonce, devint l’Abbé-fondateur de Lérins, tandis que saint Caprais continuait à prodiguer des conseils à son nouveau supérieur, notamment pour la rédaction de la Règle, et s’adonnait plus librement à la prière pour la sanctification de la communauté. Honorat s’employa d’abord à détruire le temple au demi-dieu Léro. On ne sait dans quelle mesure le vieillard qu’était saint Caprais put collaborer à la construction de l’église et du monastère, sinon par l’appoint de ses prières et quelques offices, comme les relations avec le continent ou avec les visiteurs venus solliciter des prières. Pour ce qui était de la nourriture, elle consistait, au rapport de saint Césaire, en des herbes et une bouillie cuite pour la semaine. Saint Honorat ayant miraculeusement chassé les serpents de l’archipel, cela ne pouvait échapper longtemps à la connaissance des continentaux qui savaient très bien que l’archipel en était infesté. Ce prodige, et d’autres qu’accomplissait saint Honorat, augmenta le crédit du monastère auprès des provençaux et bientôt de tous les peuples gallo-romains. Les malades ou autres nécessiteux ne tardèrent pas à visiter ces îles favorisées par la grâce. Les jeunes gens attirés par la vie religieuse prirent la direction de ces îlots naturellement séparés du monde. De fait, la charité hospitalière du monastère attira de plus en plus de voyageurs.
Les Burgondes ayant envahi la province Viennoise en 413, saint Honorat emmena quelques moines pour évangéliser les côtes du Rhône et de la Saône. En son absence, on peut penser que saint Caprais assumait la charge d’Abbé jusqu’au retour de saint Honorat vers 420.
Honorat sera pressé par la plupart des Arlésiens, fin 426, de quitter l’île, pour devenir leur évêque. Laissant saint Maxime[5] diriger l’abbaye, saint Honorat, accompagné des saints Jacques et Hilaire, gagne Arles, nouvelle préfecture des Gaules, où saint Honorat et saint Jacques décèderont le jour de l’Epiphanie 429.
Saint Hilaire d’Arles et Théodore, évêque de Fréjus, ayant su que saint Caprais était devenu malade, vinrent le vénérer et se recommander à ses prières. Saint Caprais décéda le 1er juin 434. Son corps était encore conservé sous Louis XV à Lérins. Son nom figure dans les martyrologes depuis celui d’Adon.
St Sidoine Apollinaire écrivit à saint Fauste, successeur de saint Maxime, comme Abbé de Lérins et comme évêque de Riez, le poème « Eucharisticon » dans lequel l’évêque de Clermont rappelle l’accueil qu’il reçut, encore laïc, chez Fauste à Riez : « Tu révèles aux frères quelle fut la sainte vie du vieillard Caprais, du jeune Loup, de quelles grâces fut rempli le vénérable Honorat, ce que fut Maxime dont tu es le successeur à double titre… ».
Abbé Laurent Serres-Ponthieu