Ses enfants ont reçu une punition … et c’est maman qui en est toute retournée.
Voilà que Vivien vient de rentrer de l’école avec des lignes à faire parce qu’il avait trop bavardé. Déjà, la semaine dernière, Jean, l’aîné, a été privé de grande sortie. Et hier, Amélie s’est fait confisquer son taille-crayons par la Sœur parce qu’elle jouait avec en classe. Pourtant, ce sont de bons enfants ! Je sais les élever, quand même ! Ce sont toujours les miens qui sont punis, je n’irais pas jusqu’à dire qu’on nous en veut, mais enfin… » Et voilà maman toute retournée.
La première chose à faire quand un enfant rentre de l’école avec une punition, c’est de ne pas s’étonner. Tous les enfants naissent marqués par le péché originel, et donc, nonobstant le baptême, ils ont tous tendance à préférer la paresse au travail, la facilité à l’effort, la dissipation à l’obéissance. Même avec la meilleure éducation du monde, il reste en chacun une pente vers le mal. Nous-mêmes, les adultes, sommes bien encore ainsi, et saint Paul s’en plaignait déjà[1]. L’étonnant, ce serait donc qu’un enfant ne fasse jamais de bêtises, qu’il n’ait jamais de mauvaises notes et qu’il ne soit jamais puni ! Evidemment, les parents préféreraient que leur enfant soit toujours premier de la classe et revienne chaque soir avec le cartable chargé de bons points. Soyons réalistes…
Les risques du métier
Il reste vrai que certains enfants sont punis plus fréquemment que d’autres. Il y a des enfants qui ont un tempérament plus difficile que d’autres, plus remuant, plus bruyant, plus batailleur, plus bavard, et dont les frasques perturbent plus la classe. Ces enfants ne feront pas nécessairement des délinquants plus tard, mais en attendant, ils exercent fortement la patience des éducateurs. Mgr Prosper Augouard, grand missionnaire, surnommé « l’évêque des anthropophages », avait été de tous les chahuts, moult fois puni pour son insolence ; il n’a pas si mal tourné… Comme le disait un petit élève de primaire à son condisciple pour le consoler d’être puni : « T’inquiète pas, ce sont les risques du métier » (anecdote authentique !)
Reste cependant à faire que cette punition contribue à l’amendement du coupable. Et pour cela, le plus efficace est d’aller dans le même sens que le professeur qui a puni.
« Mon pauvre chéri, tu es encore puni, c’est trop injuste, le professeur ne te comprend pas, il ne sait pas s’y prendre avec toi. Tu ne vas pas faire cette punition, d’abord elle est beaucoup trop longue, je vais te faire un mot d’excuse » ; si sa mère réagit de cette manière, il est bien certain que le coupable va profiter de la bonne aubaine : « Je chahute, et en plus, grâce à maman, je passe entre les gouttes ; continuons, c’est vraiment amusant. » Mais si au contraire il entend : « Quoi ? Tu es encore puni ? Tu me fais honte ! » Quand son père prend sa grosse voix, ce n’est pas fréquent, mais c’est plutôt impressionnant. Du coup, le chahut devient nettement moins attrayant, d’autant plus que le papa a décidé en plus une privation de dessert pour ce soir, où il y avait justement de la crème au chocolat. Ce soir, le chahuteur fait le bilan : la punition du professeur, le « savon » de son père, et la privation de dessert, décidément le chahut revient cher… et le voici assagi pour une bonne semaine.
Quand un professeur demande que la punition ou la copie notée zéro soit signée par les parents, c’est une façon de les alerter : il y a un problème, et on ne le résoudra pas en fermant les yeux pour ne pas le voir. Le mieux est de demander un rendez-vous au professeur pour chercher avec lui une solution.
L’hypothèse de l’injustice
Mais voilà Louis qui revient de l’école avec une grosse punition, un long travail supplémentaire bien fastidieux. Il est tout révolté : « Tu comprends, maman, c’est injuste, toute la classe a été punie, et moi je n’ai rien fait, c’est les autres qui ont tout organisé, ce n’est pas juste. » Les enfants ont très vite le sentiment du juste et de l’injuste, et il est certain qu’une punition qui leur semble injuste les blesse profondément. Que dire à Louis ? Lui faire raconter les faits, et voir si, réellement, objectivement, il n’a aucune culpabilité. « Ce sont les autres qui ont organisé le chahut, mais, toi, est-ce que tu n’en as pas profité également un peu ? Si ? Alors tu es moins coupable que les meneurs, mais tu n’es pas complètement innocent, et même si la punition est un peu forte pour toi personnellement, tu es solidaire de toute la classe. Je ne te gronde pas, puisque tu n’as pas fait grand-chose de mal, mais il faut quand même que tu fasses la punition. Allons, courage ! Ta punition d’aujourd’hui vaudra pour toutes les autres fois où tu aurais bien mérité d’être puni et où tu n’as pas été pris. » Thomas est devenu grand ; il se souvient des bêtises de son enfance, et aussi de quelques monumentales punitions qu’elles lui ont values. Ce n’est pas forcément un mauvais souvenir : ces punitions l’ont aidé à devenir un homme…
Source : Fideliter n°239 – Septembre Octobre 2017
- Rm 7, 15–24[↩]