Dans les ténèbres qui nous enveloppent de plus en plus, avec leur cortège de confusion et d’effroi, reposons-nous dans la lumière du Christ.
Dans les ténèbres qui nous enveloppent de plus en plus, avec leur cortège de confusion et d’effroi, reposons-nous encore dans la lumière du Christ, puisqu’il est notre repère et notre consolation, le phare qui nous désigne le port du salut.
Jésus est le Saint des saints, il est la sainteté même. Toute autre sainteté est « participée », contenue dans la sienne comme l’effet dans sa cause. Comme homme, sa sainteté est une sainteté créée, et comme Dieu, elle est incréée. Fils de Dieu, il est héritier d’une sainteté incomparable. Mais en tant qu’il possède aussi une nature humaine, Jésus s’est acquis une sainteté qui lui est propre. Un prince né dans une famille immensément riche peut gagner à son tour une grande fortune par lui-même, par son application, sa vertu et son génie. Ainsi de Jésus, il a « appris, tout Fils de Dieu qu’il est, l’obéissance par les choses qu’il a souffertes, et, après avoir été élevé à la perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent cause du salut éternel » Hébreux, 5, 8–9.
La nature humaine de Jésus a dû frémir devant la sainteté infinie de sa Personne divine. Pourtant, et avec quel héroïque courage, Jésus dans son humanité n’a pas renoncé à l’abîme de grandeur : « non pas ma volonté mais la tienne ». Tout à la fois, mêlé à l’humanité ordinaire, il aurait pu là encore être pris de vertige. Les péchés des hommes devaient être intolérables à son exquise sainteté, et sa sensibilité humaine a bien dû subir cet effroyable voisinage. Son âme a dû, comme aucune autre, supporter la présence du mal, pour ainsi dire universelle, elle qui était sans cesse en présence de la pureté infinie et unie à elle dans l’unique Personne du Fils.
Existence tragique s’il en fut, puisque Jésus s’est donné avec une intelligence supérieure et une volonté sans faille au salut du monde, alors que les siens ne l’ont pas reçu, ne l’ont pas compris. Dans l’accomplissement de sa mission, sa sainteté dévore son humanité comme le feu : « je me sanctifie moi-même afin qu’ils soient saints eux aussi » S. Jean, 17, 19. La résistance humaine et l’aveuglement qui lui font face n’auront raison ni de son humilité ni de sa douceur et elles s’affermiront au contraire jusqu’au bout : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ». La force du Christ et sa patience sont pour ainsi dire inépuisables ! Dès le début de son existence terrestre, il ne se refuse pas à la compagnie des hommes et c’est ce contact familier avec leur petitesse qui lui permet de les gagner et de les délivrer. Voyez entre autres Nicodème, la Samaritaine, ou Zachée. Et tout à la fois il demeure aimanté par la compagnie de son Père, et il la chérit, la nuit surtout, sur le Lac de Tibériade, la montagne, ou le Jardin des Oliviers. Dans ces lieux qu’il aime, il refait ses forces, il prolonge et accroît inlassablement sa patience et sa force.
En lui pas de combat intérieur entre le bien et le mal, ni aucune passion déréglée à corriger. Sa vie n’est pourtant pas un idéal abstrait et il a fait la preuve de toutes les vertus humaines qu’il a vécues au degré le plus héroïque qui fût jamais. S’il n’avait aucun combat intérieur à livrer, il livra le plus grand combat extérieur qu’il fut donné à un homme de vivre : réaliser la grande œuvre du salut décrétée par la sainte Trinité au beau milieu de tant d’ignorance, d’étroitesse d’esprit, de préjugés et de péchés ; partager la condition sociale de tant d’hommes pécheurs pour les conduire à la noblesse d’enfants de Dieu. Jésus est immense par son origine, sa destinée, sa prédestination même, et à la fois « tout petit » par cette immersion sociale dont il fit ses délices. Voyez comme en parle la sainte Écriture ! « Lorsqu’il [le Seigneur Dieu] traçait l’horizon à la surface de l’abîme, chargeait de puissance les nuages dans les hauteurs et maîtrisait les sources de l’abîme, lorsqu’il imposait à la mer ses limites, pour que les eaux n’en franchissent pas les rivages, lorsqu’il établissait les fondements de la terre, j’étais à ses côtés comme un maître d’œuvre. J’y trouvais mes délices jour après jour, jouant devant lui à tout instant, jouant sur toute la terre, et trouvant mes délices avec les fils des hommes. » Proverbes, 8.
Exquise simplicité du Christ qui fraye avec les pécheurs, les appelle à le suivre, prend ses repas avec eux. N’est-il pas venu chercher tout le monde et sauver tout le monde ? Il a gagné le cœur des natures les plus grossières et les a disposées à gagner le ciel. Il perce ses proches au cœur comme il se laisse percer. Ce contact direct, franc et généreux entre la plus haute sainteté et la plus grande médiocrité humaine donne à la personnalité du Christ un charme exquis, capable de lui gagner tous les cœurs et de lui susciter des émules. Il se laisse trouver, comprendre et aimer, sans jamais forcer la main en écrasant les âmes avec son excellence.
Jésus est un homme vivant et plein de couleurs. Ce n’est pas un homme abstrait. Même les pierres sur lesquelles son ombre se projetait gagnaient le pouvoir de toucher le cœur. Ainsi de nous dans notre rapport aux âmes qui nous entourent, si le Christ vit en nous.
Prière. Seigneur Jésus, donnez-nous d’être tellement remplis de vous que nous ne puissions jamais désespérer de notre salut ni de celui de quiconque. Vous avez déployé votre bras avec une force qui ruinera tous vos ennemis. Nous ne serons donc pas confondus. Ne permettez pas que nous soyons comme écrasés sous les menaces, mais donnez-nous une confiance plus grande. Nous croyons Seigneur, mais augmentez notre foi !
Chers fidèles, jusqu’à Bethléem, sainte marche à tous ! Regardez bien la Reine du Ciel, montée sur son petit âne. Elle porte le Sauveur du monde pour le moment encore caché, bien nourri et abrité dans son sein virginal. Elle est protégée elle-même par un homme fort, saint Joseph. Désormais nous n’avons plus d’autre souci que de faire bon accueil à toute la sainte Famille, et de la soutenir de toutes nos forces.
Source : Bulletin Sainte-Thérèse-de-l’Enfant-Jésus n° 211