Comment apprendre aux enfants à « faire de leur mieux » ?
C’est effectivement un point important de l’éducation : apprendre aux enfants, non seulement à faire ce qu’on leur demande, mais à bien le faire. De quoi se composent nos vies humaines ? D’une succession de petits événements. Comme les millions de grains de sable qui forment une plage, ils paraissent insignifiants. Mis bout à bout, ils constituent la trame de notre vie.
Ces actions que vos enfants font à chaque minute, ces petites réactions de joie ou de colère qu’ils montrent, détiennent une puissance insoupçonnée. La ruine de beaucoup d’âmes a commencé par de petits faux pas : un mensonge pour excuser sa paresse, une heure passée parmi de mauvais camarades… Ce n’est pas si grave, dira-t-on. Mais les habitudes se prennent vite et, si la conscience crie un peu la première fois, elle est bientôt muselée.
Pour la plupart des enfants, il n’y aura pas dans la vie une seule occasion d’héroïsme éclatant. Héroïques, ils pourront pourtant l’être chaque jour, en recommençant les mêmes petites choses. A l’exemple de Notre-Seigneur qui « a bien fait toutes choses » (Mc 1, 37) Comment cela ?
Contemplez ce chef‑d’œuvre de Dieu qui s’appelle la Création. Regardez par exemple ce cristal au microscope, aux teintes vertes miroitantes. Une émeraude ? Non, un simple grain de sucre ! Dieu fait tout à la perfection. Et il veut que nous l’imitions : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » Être parfait avec la matière qu’il a mise dans nos mains : les instants de notre vie.
Agir par charité
Prenons des exemples. Ranger sa chambre parce que maman le veut est une bonne œuvre, « bien la ranger pour faire plaisir » est une œuvre de charité. Apprendre sa récitation parce qu’il le faut est une bonne œuvre, l’apprendre « de son mieux » est une œuvre de charité. Par cette baguette magique qui a pour nom « faire le mieux possible parce que Jésus sera content », les grains de sable des actions quotidiennes sont transformés en pierres précieuses. Ainsi en est-il pour un livre lu attentivement, une bonne attitude à table, une réponse polie à qui interroge… Obéir tout de suite, ne pas bavarder en classe, s’offrir pour un service, ne pas répliquer…, voilà des œuvres de charité.
Notons cependant que les enfants n’ont pas tous les mêmes talents. Ce n’est donc pas nécessairement la perfection matérielle de l’œuvre qu’il faut viser. On proposera à chacun le but atteignable par lui, sans comparer un enfant moins doué au camarade naturellement plus favorisé qui arrive au même résultat sans se donner de peine.
Le dôme de Milan
Bien faire toutes choses, c’est aussi travailler sans chercher de récompense. Notre monde moderne a d’autres critères : « rentabilité », « salaire », « travail vite fini » et non plus simplement « travail fini ». On demanda un jour au sculpteur des magnifiques statues de la terrasse du Dôme de Milan, pourquoi il se donnait tant de peine. Qui verrait donc du sol ces statues ? Il répondit : « Du sol, personne, mais Dieu les verra. » Tel se montre le véritable amour, celui qui ne cherche d’autre récompense que le contentement divin. Cependant, avant d’en être arrivé au point d’agir habituellement « pour faire plaisir à Jésus », l’enfant a besoin que ses efforts soient de temps en temps récompensés, mais sans que cela devienne un dû, ce qui arriverait si toute action bien faite donnait droit à un « salaire ».
Ne nous bandons pas les yeux : l’enfant n’est pas naturellement porté à l’effort, il aime jouir sans retard. Comment lui inculquer le sens du devoir ? La prière peut tout obtenir. Priez et faites prier vos enfants.
D’autre part, il est important qu’ils sachent finir ce qu’ils ont commencé, travail ou jeu, dessin… Finir dans les deux sens du terme, achever et faire avec précision. Ne vous contentez pas d’un résultat « ni fait ni à faire » et ne terminez pas pour lui ce qu’il a abandonné à la première difficulté. Aidez-le au besoin à aller au bout de sa tâche. Il saura peu à peu demander conseil et persévérer : cela requiert patience et humilité. Encouragez-le à reprendre chaque jour les mêmes occupations, et à les faire avec joie. Le but doit être clair : c’est pour Dieu, qui aime les belles choses ! Appuyez-vous sur ce trésor de générosité qui repose dans le cœur de vos petits.
Il y a une joie légitime et bienfaisante à voir son travail fait et bien fait, excellent encouragement pour continuer à agir « de son mieux ». A l’inverse, un travail bâclé laisse, par-delà le lâche soulagement d’être débarrassé d’une corvée, un désagréable sentiment d’in-satisfaction, d’in-achevé. L’âme ne trouve pas sa plénitude dans l’à‑peu-près.
Donnez aux enfants de petites responsabilités au sein de la famille, comme nourrir les poissons rouges, mettre le couvert ou balayer tel escalier. Bien sûr, un petit contrôle sera nécessaire, et l’enfant sera repris s’il a manqué à son devoir, mais dès qu’il aura fait de son mieux, le sourire de contentement de sa mère, ses paroles stimulantes et bienveillantes peuvent faire des merveilles. Les tout-petits doivent vite apprendre que si Papa et Maman sont contents, Jésus est content aussi.
Enfin, retenez ce proverbe qui est une clé du Paradis : « Être un saint ne consiste pas à faire des choses extraordinaires, mais à faire les choses ordinaires extraordinairement bien. »
Source : Fideliter n° 192 – novembre-décembre 2009