Benoît XVI sort de son silence

Benoit XVI. Crédit : H. Elvir Tabakovic, Can. Reg. via Wikimédia, CC BY-SA 4.0

Voir ici le texte de la Maison Générale

Benoît XVI est sor­ti de son silence. Pour dénon­cer « l’écroulement de la théo­lo­gie morale », trop visible dans les idées comme dans les faits. Et dans Le Figaro de ce ven­dre­di 12 avril, Jean-​Marie Guénois se fait l’écho de ce qu’il pré­sente comme un « réqui­si­toire très sévère ». Sévère, mais, il faut bien le dire, cruel­le­ment impuis­sant, et dou­ble­ment, dans l’analyse et des causes et des remèdes du mal pour­tant décrit avec une cou­ra­geuse luci­di­té. La sin­cé­ri­té et la bonne volon­té du Pape émé­rite ne sont ici nul­le­ment en cause. Mais bien plu­tôt son atta­che­ment indé­fec­tible au dogme sacro-​saint de la liber­té de conscience, enten­due comme le fameux droit de ne pas être empê­ché, par quelque pou­voir humain que ce soit, de « pro­fes­ser et de mani­fes­ter sa reli­gion ou sa foi », et donc sa morale, « aus­si bien en public qu’en pri­vé, dans l’enseignement et dans la pratique » .

Ce faux droit est la cause cachée mais bien réelle de la débâcle déplo­rée par Benoît XVI. C’est au nom de ce nou­veau dogme que, depuis le Concile, les hommes de l’Eglise de ce temps refusent par prin­cipe toute forme de dis­cri­mi­na­tion de la part des pou­voirs publics . Faut-​il alors s’étonner de cette faillite gran­dis­sante, jusque par­mi les membres même du cler­gé ? Le bon ordre de la morale ne dépend pas seule­ment de la bonne volon­té de cha­cun, il dépend sur­tout de l’autorité qui a la charge de le faire régner, et qui a pour cela le devoir d’empêcher l’erreur et le vice, tant il est faux que la véri­té puisse « s’imposer d’elle-même » à l’humanité déchue de sa jus­tice originelle.

Le remède pro­po­sé par le Pape émé­rite en devient déri­soire. « Le contre­poids contre le mal, qui nous menace » – dit-​il, comme le sou­ligne Guénois – ne peut fina­le­ment consis­ter que dans le fait de nous aban­don­ner à cet amour du Christ. C’est le véri­table contre­poids contre le mal ». Mais l’amour de Dieu et de son Christ ne peut régner dans les cœurs s’il ne règne pas d’abord dans les lois, ain­si que le chante toute la litur­gie de la Fête du Christ Roi. C’est pour avoir vou­lu sépa­rer les Etats de l’Eglise que Vatican II s’est pré­pa­ré l’écroulement que dénonce aujourd’hui Benoît XVI.

« S’ils ont tout osé, vous leur avez tout per­mis » lan­çait jadis La Harpe aux res­ca­pés de la Révolution Française. Rescapé de la débâcle du Concile, le pré­dé­ces­seur de François pleure aujourd’hui en vain pour n’être jamais vrai­ment remon­té jusqu’aux racines pro­fondes du mal.

Mais alors, qui serait-​il pour juger ?…

Abbé JM. Gleize, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Source : La Porte Latine du 16 avril 2019

FSSPX

M. l’ab­bé Jean-​Michel Gleize est pro­fes­seur d’a­po­lo­gé­tique, d’ec­clé­sio­lo­gie et de dogme au Séminaire Saint-​Pie X d’Écône. Il est le prin­ci­pal contri­bu­teur du Courrier de Rome. Il a par­ti­ci­pé aux dis­cus­sions doc­tri­nales entre Rome et la FSSPX entre 2009 et 2011.