Il fut métamorphosé devant eux [1], dit le texte grec, c’est-à-dire transfiguré.
La Transfiguration de NSJC n’est pas à proprement parler un miracle, mais la cessation momentanée d’un miracle : celui de l’Incarnation du Verbe. En effet, Jésus abdique pour un temps les droits et les prérogatives de sa divinité ; sa personne divine cache sa gloire et se rend volontairement, pendant toute sa vie terrestre, passible et mortel. Il voile sa divinité en vue de sa Passion. Sa Transfiguration, en nous le montrant, un instant, dans l’état glorieux dans lequel il aurait dû être pendant toute sa vie, nous marque mieux encore son Amour pour nous, son ardent désir de souffrir pour nos péchés et, par suite, le mérite infini de tant d’humiliations, d’ignominies, de douleurs ainsi acceptées, voulues et préférées de son plein gré.
L’illumination du mont Thabor prévient le scandale du mont Golgotha. Celui que nous suivrons avec larmes dans toutes les phases douloureuses de la Passion, est vraiment, par sa nature consubstantiel à Dieu son Père, couronné de gloire et d’honneur, le Roi du Ciel, la joie des Anges, le Juge souverain qui viendra un jour, dans tout l’éclat de sa majesté, juger tous les hommes…
- Ce visage, qui sera profané par les coups et les crachats, défiguré, devient sur le Thabor plus brillant que le soleil, transfiguré.
- Ce corps qui sera tout entier meurtri et ensanglanté, est ici resplendissant.
- Ses vêtements, qui seront jetés au sort, ont plus d’éclat que la neige.
- Sur le calvaire, Jésus sera crucifié entre deux larrons ; sur le Thabor, il est entouré de Moïse et Elie.
- Pierre le reniera ; ici il affirme qu’il est bon d’être en ce lieu avec NS.
- Il n’y aura pas de nuée resplendissante au Golgotha, mais des ténèbres car le soleil s’obscurcira.
- La Voix du Père ne se fera pas entendre, au contraire, son Fils bien-aimé sera comme abandonné par son Père : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
Le récit de la Transfiguration doit nous rendre plus généreux pour participer avec un grand esprit de foi aux souffrances de sa Passion, à tout souffrir de bon cœur pour lui et en union avec lui. « Si Jésus-Christ est le Fils bien-aimé du Père, Pierre, ne craignez plus rien. Vous ne devez plus douter de sa toute-puissance, lors même qu’il sera en croix : ni perdre l’espérance de sa résurrection. Si votre peu de foi vous a fait trembler jusqu’ici, qu’au moins la voix du Père vous rassure. Si vous ne doutez point de la toute-puissance du Père, pourquoi doutez-vous de celle du Fils ? Ne craignez donc plus les maux auxquels il va s’exposer volontairement pour nous ». (saint Jean Chrysostome, sur saint Matthieu).
Pas un seul instant, la T S Vierge Marie, malgré les douleurs indicibles de son cœur, et la vision de la Croix, scandale pour les juifs et folie pour les païens, ne doutera de la divinité de son Fils crucifié.
Le deuxième enseignement de la gloire de Jésus transfiguré est qu’elle est un reflet de celle promise à ses élus. C’est une leçon d’espérance. Si nous souffrons avec lui, nous serons glorifiés avec Lui, nous promet Saint Paul, qui nous dit aussi : les souffrances de la vie présente sont sans proportion avec cette gloire qui sera un jour manifestée en nous, dans l’éternité du Ciel.
Concluons avec le pape saint Léon-le-Grand : « Que la foi de tous s’affermisse avec la prédication de l’Évangile, et que personne n’ait honte de la croix du Christ, par laquelle le monde a été racheté. Que personne donc ne craigne de souffrir pour la justice, ni ne mette en doute la récompense promise ; car c’est par le labeur qu’on parvient au repos, par la mort qu’on parvient à la vie. Puisque le Christ a accepté toute la faiblesse de notre pauvreté, si nous persévérons à le confesser et à l’aimer, nous sommes vainqueurs de ce qu’il a vaincu et nous recevons ce qu’il a promis. Qu’il s’agisse de pratiquer les commandements ou de supporter l’adversité, la voix du Père que nous avons entendue tout à l’heure doit retentir sans cesse à nos oreilles : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour ; écoutez-le ! ».
Abbé Bertrand Labouche
- Matthieu 17, 2.[↩]