Un catholique digne de ce nom doit se tourner vers le Magistère de l’Église avant de poser tout jugement.
Ce fameux darwinisme, enseigné comme un dogme intangible dans toutes les écoles, représente un « conte de fées pour grandes personnes ».
La question de l’évolution des espèces vivantes, et de ce qu’on appelle usuellement « l’évolutionnisme », pose de multiples et complexes problèmes. Le présent dossier en aborde certains, spécialement ceux liés à la personne et à la doctrine de Darwin lui-même. Ici, je voudrais en soulever brièvement deux.
Concernant la notion d’une (éventuelle) évolution des espèces vivantes, un catholique digne de ce nom doit se tourner vers le Magistère de l’Église avant de poser tout jugement. Or il se trouve que le Magistère certain de l’Église a parlé sur cette question, avec toutes les nuances requises. En 1950, dans son encyclique Humani generis, qui constitue pourtant une sévère mise en garde contre un certain nombre d’erreurs modernes, le pape Pie XII a proposé sur ce délicat sujet une mise au point, dont voici un extrait significatif :
Le Magistère de l’Église n’interdit pas que la doctrine de « l’évolution » (…) soit l’objet, dans l’état actuel des sciences et de la théologie, de recherches et de débats entre savants de l’un et de l’autre parti ; il faut que les arguments soulevés à propos de chaque opinion, par ses partisans ou ses adversaires, soient pesés et appréciés avec le sérieux, la modération et la retenue qui s’impose ; mais que tous soient prêts à se soumettre au jugement de l’Église, qui a reçu du Christ le mandat d’interpréter authentiquement les saintes Écritures et de sauvegarder les dogmes de la foi.
Hélas ! On est loin aujourd’hui, très loin même d’une telle approche mesurée, prudente, respectueuse d’une science solide et avérée, d’une philosophie authentique, et surtout attentive aux enseignements certains de la foi. Sans parler des débats qui agitent les savants dans leurs laboratoires (débats plus animés qu’on ne le croit communément), nous nous trouvons, dans la vie courante, en face de ce qu’on pourrait appeler un évolutionnisme vulgarisé.
Il s’agit d’un mélange de faits scientifiques, de reconstructions plus ou moins hypothétiques, de théories scientifiques souvent mal comprises (on se croit usuellement darwinien, quand on est en réalité lamarckien), et d’une très médiocre et fausse philosophie. Les prétendus schémas explicatifs que l’on trouve dans les journaux et les encyclopédies à bon marché sont représentatifs de cet évolutionnisme de pacotille.
La façon même de s’exprimer traduit clairement qu’on ne se situe pas dans un cadre réellement scientifique. On parle de « darwinisme », « d’évolutionnisme ». Or les mots en « isme » désignent habituellement des doctrines philosophiques, politiques ou religieuses : le libéralisme, le communisme, le christianisme, le platonisme, etc. Mais ce n’est pas la manière de s’exprimer dans les sciences dites « exactes », où les choses restent objectives, universelles et impersonnelles. On n’y parle pas de l’einsteinisme, du pastorisme, du newtonisme, de l’euclidisme. En réalité, ce fameux darwinisme, devenu l’opinion commune, la « pensée unique » en matière de biologie, enseigné comme un dogme intangible dans toutes les écoles, représente ce que le grand et lucide biologiste Jean Rostand désignait comme « un conte de fées pour grandes personnes ».
Malheureusement, cet évolutionnisme vulgarisé ne fait pas seulement office de mythe, parmi bien d’autres, pour les sociétés modernes. Il s’est constitué (et Charles Darwin en était parfaitement conscient) comme une véritable machine de guerre contre la Bible, contre la foi, contre la religion, contre Dieu. Si donc nous devons tenir, en ce qui concerne la possibilité proprement scientifique d’une évolution des espèces vivantes (dans le cadre d’une philosophie vraie et d’une théologie exacte), la position sage et nuancée du Magistère de l’Église, exprimée par Pie XII, nous devons rejeter sans ambages la vulgate évolutionniste actuelle, qui n’est vraie ni scientifiquement, ni philosophiquement, ni théologiquement.
L’épaisseur un peu exceptionnelle de ce dossier est expressive de notre ferme volonté de combattre cette fable du darwinisme qui, en dépit de sa grossièreté, est enseignée comme une vérité incontestée de la pensée actuelle.
Abbé Régis de Cacqueray †, Supérieur du District de France
Source : Fideliter n° 192