Rome, Naples, Amalfi, Mont-Cassin, Gaeta… sites chargés d’art et d’histoire, aujourd’hui lieux touristiques, mais pas seulement. Ce sont surtout des hauts lieux de la chrétienté, des lieux de pèlerinages ! C’est l’itinéraire emprunté du 23 au 28 août par un petit groupe de 30 pèlerins accompagnés par Monsieur l’abbé Alain Lorans, aumônier, et Sophie Magerand, guide-conférencière, sur les pas de sainte Philomène.
Jour 1 – Vendredi 23 août 2013
Partis tôt en ce vendredi matin 28 août, l’arrivée à Rome se fait dans les meilleures conditions : avion à l’heure, beau temps, coordination parfaite pour rejoindre l’hébergement situé chez les Sœurs dominicaines de Saint-Sixte, premier couvent fondé par saint Dominique dans la Ville Eternelle.
La Messe est célébrée en fin de matinée dans la salle du chapitre du couvent où repose Sœur Marie Lalia, fondatrice de l’ordre actuelle des dominicaines de Saint-Sixte. Elle œuvra sa vie entière à l’unité de l’Eglise en priant particulièrement pour la conversion des Orthodoxes.
Après un bon plat de pâtes et autres spécialités locales dans la trattoria Romulus e Remus, le groupe est prêt à affronter le cœur battant de l’Empire romain. Nous voici partis pour une promenade en direction du Palatin. Les restes impressionnants des palais impériaux font oublier que l’histoire de l’Urbs commença là au VIIIème siècle av. J.-C. avec un regroupement de quelques villageois qui vivaient dans des cabanes de bois. Le forum est quant à lui toujours encombré d’une foule déambulant au gré de la Voie Sacrée entre les basiliques, le comitium, la curie et les arcs triomphaux ! Au pied de l’arc de Titus se dessine le destin remarquable de cette cité. Elle sut réunir en une seule entité les deux rives de la Méditerranée et fut l’instrument du plan de Dieu dans l’anéantissement de la religion juive. Les bas reliefs montrent en effet les trophées rapportés par l’empereur vainqueur et destructeur du Temple en 70 ap. J.-C .
Ensuite, le Colisée impressionnant par ses dimensions laisse imaginer les spectacles dont raffola la populace antique : commençant par la grande pompe qui présentait les animaux sauvages capturés aux quatre coins de l’empire, le défilé présentait ensuite les condamnés à mort, puis les fameux gladiateurs ! On s’imagine aisément le sort des premiers chrétiens condamnés ad bestias. Affublés de colifichets, ils singeaient les personnages de la mythologie tel Icare tombant du ciel : ils étaient précipités dans le vide du haut d’une estrade ; ils étaient aussi jetés en pâture aux bêtes féroces ou présentés à une vachette déchaînée…
Le retour à Saint-Sixte permet de conclure la journée par la récitation du chapelet. Ensuite, soirée pizza chez Romulus e Remus ! Ambiance assurée : la glace est rompue et chacun y va de son commentaire sur la nouvelle sorte de pizza apportée, le flux étant incessant !
Jour 2 – Samedi 24 août 2013
Les visites de la veille ont permis de s’immerger dans le monde antique et de comprendre le système politique et religieux de Rome et de son Empire ; système unique et universel qui servit de terreau à l’avènement du christianisme. Cette journée de visites nous incite à voir la continuité entre la Rome impériale et la Rome chrétienne.
La découverte des fouilles sous la basilique Saint-Pierre nous mène au plus près des restes de l’Apôtre. Rarement accessible, la descente dans les entrailles du cœur de la Chrétienté permet de comprendre davantage le terme traditio, c’est-à-dire transmission. En effet, après des fouilles commanditées par Pie XII, la nécropole et la tombe du premier chef de l’Eglise Universelle furent mises au jour. La coupole baroque, le baldaquin du Bernin et l’autel actuel sont à l’aplomb parfait de la tombe de l’Apôtre, alors que celle-ci avait été ensevelie par le terrassement des fondations de la basilique constantinienne, il y a plus de 1600 ans !
A quelques mètres des ossements de saint Pierre, l’émotion est palpable et la prière fervente : quelle grâce de pouvoir s’approcher si près des restes du premier Pape. C’est du concret, c’est du réel. En ressortant directement dans le chœur de la Basilique, les inscriptions qui courent sous les corniches confirment ce que Notre-Seigneur avait dit : « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise » ! Le martyre de saint Pierre ne fut que le premier d’une longue série.
Les périodes de persécutions se sont en effet succédées jusqu’au début du IVème siècle. La dernière grande persécution initiée par Dioclétien au début du IVème siècle ne se termina que sous Galère. Moribond, il reconnut l’inutilité de condamner les chrétiens en publiant un édit leur enjoignant de « prier pour lui et le salut de l’Empire ». Puis en 312 Constantin décréta la religion chrétienne comme religio licita, suite à sa victoire au Pont Milvius.
C’est durant la dernière grande persécution initiée par Dioclétien que Philomène subit le martyre. Lorsque sa tombe fut mise au jour au début du XIXème siècle, on ne savait rien d’elle. Seule la plaque fermant le loculus mentionnait ‘Pax tecum Filomena’, tandis que les restes de la jeune fille étaient assortis d’une fiole conservant son sang, au cœur des catacombes de Priscilla.
Dans ces catacombes situées Via Salaria, en s’engouffrant dans le dédale des galeries bordées de milliers de loculi (tombes creusées dans la roche), nous nous rendons directement dans un hypogée. La Messe est célébrée à proximité de la tombe de la sainte martyre. Moment de grâce et de recueillement qui permet aisément de s’imaginer les actes héroïques de ces premiers chrétiens : plutôt mourir que d’apostasier. Attitude incompréhensible de la part des autorités païennes qui s’attaquaient aux Miles Christi non pas tant parce qu’ils étaient chrétiens –après tout la religion païenne autorisait tous les cultes- mais parce qu’ils ne se conformaient pas à la religion de leurs ancêtres, à la coutume de la Cité, ce qui les mettaient de facto en marge de la société.
Réunis devant la tombe de saint Philomène, le groupe prie sous la direction de M. l’abbé Lorans. Tous sont venus la remercier ou lui demander son intercession pour demander des grâces personnelles. C’est d’ailleurs sur quoi a insisté Monsieur l’abbé pendant son sermon. Il faut demander, beaucoup demander, mais ne pas demander des biens matériels. Demander des grâces, des grâces pour croître spirituellement, pour que chacun trouve ou tienne sa place, là où Dieu veut.
La visite des catacombes est assurée par une Sœur bénédictine dont l’ordre est en charge de ce lieu sacré. Nous passons devant des centaines de tombes et des chambres funéraires. Certaines conservent de très belles peintures paléochrétiennes dont la plus ancienne représentation de la Sainte Vierge à l’Enfant en présence du prophète Balaam, lui qui avait prédit : « de Jacob monte une étoile, d’Israël surgit un sceptre » (Nb 24, 17) !
Jour 3 – Dimanche 25 août 2013
En ce dimanche matin, la Messe des Anges est chantée dans la chapelle et une sœur de la communauté des dominicaines de Saint-Sixte nous accompagne à plein poumon ! Le latin est encore une langue universelle contribuant à l’unité de la Chrétienté, preuve en est !
Alors qu’un orage terrible refroidit l’atmosphère, nous prenons la route en direction du sud, vers la Campanie, vers cette région d’Italie occupée dans l’Antiquité par des comptoirs grecs florissants. Nous touchons du doigt toute cette transmission opérée au cours des âges et dont nous sommes les humbles héritiers.
De fait, la pensée rationnelle grecque naquit en partie dans ce sud de la péninsule italique au cours du premier millénaire avant J.-C. Cette pensée qui permit de passer du mythe fondateur à la philosophie, à la science et à la politique. Or, ce sont certains de ces philosophes grecs, amants de la sagesse, qui intuitivement avaient compris l’existence d’un dieu unique. C’est la pensée d’Aristote qui sera reprise par Cicéron, puis par saint Augustin, avant de connaître son aboutissement avec saint Thomas d’Aquin.
Or, c’est saint Augustin qui organisa le premier une vie cénobitique en Afrique. Cette organisation communautaire arriva ensuite en Italie par l’intermédiaire de Paulin de Nole, avant d’être développée par saint Benoît au Mont-Cassin.
Bien que le monastère ait été en partie détruit pendant la guerre, la reconstruction à l’identique permet d’admirer la majesté des lieux. Les soubassements conservent le souvenir de la cellule de saint Benoît dans laquelle il priait, travaillait et se reposait. Fondateur de cet ordre encore aujourd’hui florissant, saint Benoît créa une vie religieuse parfaitement équilibrée dont le résumé se retrouve dans la devise : « Ora et Labora ».
Le souvenir de saint Thomas d’Aquin est par ailleurs vivace au Mont-Cassin. Il y fut envoyé dès l’âge de cinq ans avec cette question aux lèvres : « qu’est-ce que Dieu ? ».
En milieu d’après-midi, notre groupe de pèlerins arrive au but de son voyage : le sanctuaire de sainte Philomène à Mugnano. Lors du trajet nous avons appris un hymne composé par le saint Curé d’Ars en l’honneur de sa chère petite sainte et mis en musique par M. l’abbé Rebourgeon (les Toulonnais sont également venus à Mugnano l’an dernier !).
Nous sommes en Campanie, derrière le Vésuve, dans une région peu développée et en dehors des sentes touristiques. C’est là que la Providence permit que les restes de la sainte martyre soient conservés. Au début du XIXème siècle, le curé de la paroisse Don Lucia se mit en quête de rapporter de Rome pour son église les reliques d’un martyr. On lui proposa à Rome les ossements d’un martyr parfaitement inconnu, retrouvés dans les catacombes de Priscilla. Il les rapporta à Naples, puis à Mugnano et de nombreux miracles s’opérèrent durant le voyage.
C’est ensuite grâce à Pauline Jaricot, miraculeusement guérie suite à un pèlerinage au sanctuaire, que le Pape Pie IX s’intéressa à cette sainte et permit sa béatification. Le recteur de la basilique, Monseigneur Braschi, nous accueille chaleureusement. A la manière de Philomène, la basilique est simple et dépouillée.
Sur le bas côté droit, une châsse au-dessus d’un autel privilégié renferme les restes de la martyre. C’est devant cet autel que Monseigneur Braschi va consacrer les enfants du groupe à la protection de sainte Philomène : Faustine, Colombine, Joseph, Philippine et Caroline.
Après le chapelet et des dévotions privées, nous quittons Mugnano, mais pour mieux y revenir le lendemain !
Jour 4 – Lundi 26 août 2013
C’est en ce lundi matin que notre petit groupe de pèlerins, fidèles dévots de sainte Philomène, assiste à la Messe célébrée par M. l’abbé Lorans sur l’autel miraculeux à droite de l’autel privilégié. Lors de sa construction, l’artisan rompit la table d’autel qui se recolla miraculeusement.
Puis le recteur insiste pour que la dévotion à sainte Philomène soit mieux connue, mais dans le cadre du sanctuaire. Un couple de jeunes mariés (50 ans de vie conjugale !) est particulièrement ému : depuis plusieurs années, ils obtiennent de nombreuses grâces et leur famille leur a offert le pèlerinage à Mugnano ! Ils nous remettent à tous une image d’une photo de statue de la sainte qu’ils ont restaurée.
L’après-midi, nos pas nous mènent dans le centre historique de Naples où sainte Philomène réalisa de nombreux miracles également. Nous commençons par la cathédrale dédiée à saint Janvier. Evêque de Bénévent, il subit le martyre sous Dioclétien et ses restes sont en partie conservés dans des chasses d’argent de toute beauté. Sur le bas-côté, nous découvrons également un baptistère très ancien (IVème-Vème siècle) dont la voûte est recouverte de mosaïque aux couleurs encore très vives.
En sortant, nous pénétrons dans les entrailles de la capitale du Royaume des Deux-Siciles : les monuments du quartier Spaccanapoli sont le témoin des fastes de la cour des rois d’Anjou, des Aragons et des Bourbons ! La ville fut dotée de splendides palais et églises entre le XIVème et le XIXème siècle.
L’église dédiée à saint Dominique, maintes fois remaniée, abrite la chasse du corps de saint Tarcisius, premier martyr de l’Eucharistie. Dans cette église un dominicain vient à notre rencontre et nous montre l’image du Crucifix ayant parlé à saint Thomas d’Aquin : « Tu as bien parlé de moi Thomas, que souhaites-tu ? – Rien d’autre que vous, Seigneur ».
Le Père dominicain insiste ensuite sur la prière et la prière en réparation des crimes de l’avortement. Il parle de condamnés à mort sans jugement. Tous les soirs, il récite avec quelques personnes un rosaire à cette attention.
Puis une promenade panoramique permet d’admirer le Golfe de Naples au fond duquel émerge le Vésuve. Semblant inoffensif, c’est
pourtant lui en 79 ap. J.-C. qui ensevelit toute la région de Pompéi et Herculanum sous ses nuées ardentes et ses pluies de matières volcaniques. Ce qui ne nous empêche par de retrouver notre hôtel à Pompéi où nous logeons depuis la veille. En toute quiétude !
Jour 5 – Mardi 27 août 2013
Matinée consacrée à la visite de la cité de Pompéi. Recouvert par 6 mètres de matières volcaniques, le site fut redécouvert à partir du XVIII ème siècle.
En grande partie dégagée, une promenade dans ses rues nous permet de mieux comprendre la vie quotidienne d’une petite cité marchande de l’Empire romain. On y trouve des trottoirs, des passages surélevés pour les piétons, des thermopilia qui ne sont rien d’autres que les comptoirs de snacks ouverts sur la rue. Les thermes sont remarquables d’ingéniosité, tandis que l’amphithéâtre retentit presque encore des cris de la foule déchaînée. La foule est d’ailleurs présente dès que nous atteignons le forum avec notre guide Ranieri qui parle aussi vite en français qu’en italien. Il est rapidement surnommé le guide « mitraillette » !
En sortant, nous passons en dehors des remparts le long de mausolées qui rappellent le culte rendu aux morts chez les Anciens, gage de vie éternelle. Toujours ce sentiment religieux extrêmement fort.
Nous-mêmes nous rendons au sanctuaire du Rosaire de Pompéi où le Padre Pio aimait à venir prier. La Messe est célébrée dans une des chapelles par M. l’abbé Lorans.
L’après-midi, excursion sur la côte amalfitaine. Sauvage, la montagne se jette dans la mer, laissant à peine une route serpenter entre les cultures d’agrumes. Les points de vue sont superbes et les acrobaties du chauffeur sont dignes d’être mentionnées ! Nous arrivons à Amalfi, véritable petit village de crèche accrochée à flanc de montagne et en bord de mer. La cathédrale est un pur joyau de l’art arabo-normand ! Dans sa crypte, elle conserve jalousement les restes du saint apôtre André.
Tous les jours, nous avons la grâce de nous recueillir devant les restes de ces hommes de foi qui n’hésitèrent pas à témoigner leur attachement au Christ en donnant leur vie.
Est également évoquée l’origine de l’Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean : le fondateur était un marchand amalfitain qui créa le premier hôpital de Jérusalem au temps des Croisades. C’est le seul ordre qui existe encore de nos jours, aujourd’hui communément appelé Ordre de Malte.
Retour à Pompéi. L’hôtel qui nous héberge nous réserve un dîner d’adieu avec un splendide gâteau en dessert !
Jour 6 – Mercredi 28 août 2013
Dernier jour… Le départ se fait après la Messe. Nous remontons vers Rome en longeant la côte. Un arrêt à Gaeta permet de se recueillir dans les sanctuaires de la Rocca Spacata.
La tradition rapporte qu’au moment de la mort de Notre-Seigneur, ce cap qui domine la mer se sépara en trois, coupé de failles profondes. Saint Philippe Néri aimait y venir s’y recueillir au XVIème siècle.
Après un pique-nique bien mérité, en surplomb de la mer, la route continue vers Fossanova. Abbaye cistercienne du XIIème siècle, celle-ci se situe en retrait des Marais Pontins. Très bel exemple d’architecture romane, les portes sont pourtant fermées à notre arrivée… Toutefois, nous admirons l’extérieur et apercevons la chambre où saint Thomas d’Aquin expira le 7 mars 1274. Lui qui avait été formé par les Bénédictins du Mont-Cassin mourut dans un monastère de bénédictins réformés !
En rejoignant le Latium, nous faisons un arrêt en surplomb de la vie éternelle.
Dernier coup d’œil sur Saint-Pierre…
« Rome, ô noble cité, souveraine du monde,
Toi, la plus excellente entre toutes les villes,
Rouge du sang vermeil de tes martyrs,
Blanche par les lis immaculés des vierges,
Nous te disons : salut pour toutes tes merveilles
Et nous te bénissons, salut dans tous les siècles. »
Ô Roma nobilis (Hymne des pèlerins chanté depuis le VIIIème s.)
La conclusion permet de récapituler tous les lieux et surtout tous les saints dont nous avons parlé pendant six jours. Ce pèlerinage a été l’occasion de comprendre le plan de Dieu pour l’avènement de son divin fils, l’Empire gréco-romain servant de réceptacle.
C’est toute la pensée de Péguy, chantée dans son poème « Eve » :
« Les pas des Légions avaient marché pour Lui, …
Les pas d’Alexandre avaient marché pour lui, …
Les pas de César avaient marché pour Lui, …
Les rêves de Platon avaient marché pour Lui … et Il était venu comme un voleur de nuit…
Il allait hériter d’un monde déjà fait, Il allait pourtant tout jeune le refaire,
Il allait procéder de la cause à l’effet, comme le Fils procède en descendant du Père. »
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