Autocritique

Séance publique d'auto-critique lors de la Révolution culturelle en Chine, en 1967. Wikimédia / Domaine public

La repen­tance infli­gée à l’Église étend à tous la faute de quelques-​uns, selon le modèle du wokisme.

Cours de caté­chisme sur le péché ori­gi­nel. Alors que le caté­chiste explique que nous nais­sons avec ce péché, un enfant s’écrie : « C’est pas moi qui l’ai fait ! »

Il a rai­son de nier toute culpa­bi­li­té per­son­nelle dans le péché ori­gi­nel, parce qu’en effet il n’y est pour rien. Mais il se trompe sur la culpa­bi­li­té, effec­ti­ve­ment trans­mise par géné­ra­tion, de ce péché qui est un péché de la nature humaine[1] et qui, « un par son ori­gine et trans­mis par pro­pa­ga­tion héré­di­taire…, est propre à cha­cun »[2].

C’est le seul cas de péché dans lequel la culpa­bi­li­té d’une unique per­sonne s’étend à d’autres qui n’ont pas com­mis la faute eux-​mêmes. Car pour tout autre péché, l’Ancien Testament affirme déjà le carac­tère per­son­nel des fautes : alors que les israé­lites en exil attri­buent leurs mal­heurs aux fautes de leurs ancêtres, le pro­phète Ezéchiel leur répond de la part de Dieu : « L’âme qui a péché est celle qui mour­ra ; le fils ne por­te­ra pas l’i­ni­qui­té du père, et le père ne por­te­ra pas l’i­ni­qui­té du fils ; la jus­tice du juste sera sur lui, et l’im­pié­té de l’im­pie sera sur lui[3]. » (Ez 18, 19–20)

C’est pour­quoi on peut au moins se poser des ques­tions sur les repen­tances infli­gées à l’Église, y com­pris par le pape lui-​même : « L’Église doit avoir honte et deman­der par­don[4]. » La faute de quelques-​uns n’a pas à être éten­due à tous, même et encore moins sous la pres­sion émo­tive du scan­dale d’abus de membres du cler­gé. C’est la pro­pa­gande contem­po­raine qui, au moyen du mot magique « sys­té­mique », trans­forme des fautes per­son­nelles en désordres de toute l’institution, comme si la struc­ture de l’Église fabri­quait des per­vers. Outre le carac­tère odieux de l’inversion accu­sa­toire (n’est-ce pas plu­tôt le monde avec son éta­lage de tur­pi­tudes qui fabrique le péché, et les membres de l’Église impré­gnés de l’esprit du monde qui mal­heu­reu­se­ment s’y laissent prendre ?), elle inflige à toute l’Église une mau­vaise conscience mal­saine et pié­tine le dogme de la sain­te­té de l’Église.

Sans doute, comme le disait le car­di­nal Journet, la fron­tière entre la cité de Dieu et la cité de l’homme passe par nos cœurs. Reste qu’il revient à cha­cun de confes­ser ses propres fautes, non celles des autres. L’autocritique n’a pas été inven­tée pour les besoins du Synode, mais pour ceux de la Révolution communiste !

Un regard sur les « sept péchés » qui ont fait l’objet de la céré­mo­nie péni­ten­tielle du 1er octobre achève de nous mon­trer que ce Synode est celui de l’Église woke, celle qui prend conscience d’être géné­ti­que­ment et inex­pia­ble­ment cou­pable avant même l’âge de rai­son ! Mais qui sommes-​nous pour juger…

Notes de bas de page
  1. C’est l’explication de saint Thomas, cf. Somme théo­lo­gique, Ia IIae q.81 a.1.[]
  2. Concile de Trente, décret sur le péché ori­gi­nel, 17 juin 1546, canon 3.[]
  3. Pour autant, il faut bien consta­ter que la peine est bien sou­vent par­ta­gée : ne serait-​ce qu’une amende, per­due pour toute la famille ![]
  4. Le 27 sep­tembre 2024 à Bruxelles.[]