Notre-​Dame de Paris : feu vert au saccage intérieur

Notre-Dame-de-Parie. Crédit photo : Hubert de Thé sur Pixabay

Les membres de la Commission natio­nale du patri­moine et de l’architecture (CNPA) ont ren­du un avis favo­rable au pro­jet de réamé­na­ge­ment inté­rieur de la cathé­drale le jeu­di 9 décembre 2021. Les tur­bu­lences qui secouent actuel­le­ment le dio­cèse de Paris n’auront pas per­mis de tem­po­ri­ser sur un dos­sier pour­tant très controversé.

L’appel solen­nel de cent per­son­na­li­tés – dont Stéphane Bern, Alain Finkielkraut et Pierre Nora – lan­cé conjoin­te­ment dans les colonnes du Figaro et de la Tribune de l’art, le 7 décembre 2021 n’y aura rien fait : les vingt « experts » de la Commission natio­nale du patri­moine et de l’architecture (CNPA) ont déci­dé de vali­der les prin­ci­paux aspects du pro­jet contro­ver­sé de réamé­na­ge­ment inté­rieur de la cathédrale.

Pourtant, les signa­taires de la tri­bune n’avaient pas ména­gé leurs efforts pour ten­ter de faire pen­cher la balance dans le sens du bon goût et du bon sens : « ce que l’incendie a épar­gné, le dio­cèse veut le détruire », ont-​il ten­té, en vain d’expliquer.

Dans le viseur de ces spé­cia­listes de l’art et du patri­moine fran­çais, « le pro­jet de bancs amo­vibles, éclai­rage chan­geant en fonc­tion des sai­sons, pro­jec­tions vidéo sur les murs, etc. Autrement dit les ‘dis­po­si­tifs de média­tion’ à la mode que l’on trouve dans tous les pro­jets cultu­rels “immer­sifs” où bien sou­vent la niai­se­rie le dis­pute au kitsch », dénonçaient-ils.

Et de pré­ve­nir : « res­pec­tons l’œuvre de Viollet-​le-​Duc, le tra­vail des artistes et des arti­sans qui ont œuvré pour nous offrir ce joyau, et les prin­cipes patri­mo­niaux d’un monu­ment historique ».

Quelques jours plus tôt, c’était le Daily Telegraph qui aler­tait contre un « Disneyland poli­ti­que­ment cor­rect ». « C’est comme si Disney entrait à Notre-​Dame », iro­ni­sait l’architecte, urba­niste et cri­tique Maurice Culot, après avoir vu les plans.

« Ce qu’ils pro­posent de faire à Notre-​Dame ne serait jamais fait à l’abbaye de Westminster ou à Saint-​Pierre de Rome. C’est une sorte de parc à thème, très enfan­tin et tri­vial compte tenu de la gran­deur du lieu », déplorait-il.

Autant d’avis d’experts qui n’ont pas réus­si à sen­si­bi­li­ser les membres de la CNPA : « les experts ont ren­du un avis favo­rable au pro­gramme de réamé­na­ge­ment inté­rieur », a annon­cé le 9 décembre der­nier le minis­tère de la Culture, qui cha­peaute la recons­truc­tion de ce monu­ment pari­sien par­tiel­le­ment détruit par l’incendie de sa char­pente, sur­ve­nu le 15 avril 2019.

Maigre lot de conso­la­tion, la Commission du patri­moine a néan­moins émis « deux réserves » : la pre­mière concerne le dépla­ce­ment de sta­tues de saints dans les cha­pelles, et la seconde concerne les bancs à rou­lettes dotés de lumi­gnons « pour les­quels le cler­gé doit revoir sa copie », pré­cise le ministère.

Ecrites en 1831, ces lignes de Victor Hugo – qui montrent com­bien le mau­vais goût n’est pas l’apanage d’une époque, même si le XXIe siècle semble lui vouer son exper­tise – n’ont pas per­du une ride :

« Sans doute, c’est encore aujourd’hui un majes­tueux et sublime édi­fice que l’église de Notre-​Dame de Paris. Mais si belle qu’elle se soit conser­vée en vieillis­sant, il est dif­fi­cile de ne pas sou­pi­rer, de ne pas s’indigner devant les dégra­da­tions, les muti­la­tions sans nombre que simul­ta­né­ment le temps et les hommes ont fait subir au véné­rable monu­ment. » (Notre-​Dame de Paris)

Source : Fsspx.Actualités