Cent ans après la mort du cardinal de Cabrières, l’Église de France a perdu cette virilité.
À la date du 21 décembre 1921, Mgr Baudrillart a noté : « Le cardinal de Cabrières est mort. C’est une des plus nobles figures ecclésiastiques et françaises qui se put rencontrer ». L’estime et la considération dont il jouit dépassent de loin les seuls milieux catholiques, comme en témoigne son ovation par les manifestants viticoles de 1907, ou encore en 1911, son retour triomphal de Rome alors qu’il vient d’être créé cardinal par saint Pie X.
Et pour cause : une noblesse, une dignité, un sens de l’honneur. « Les honneurs ne sont rien, écrivait-il, l’honneur est tout ». On pourrait dire encore, alors que certains aujourd’hui essaient louablement d’en réhabiliter le sens, qu’il possédait la virilité : le courage non pas tant de faire ou d’agir ; mais d’abord et avant tout le courage d’être. Le courage d’être évêque à l’époque du Ralliement promu par Léon XIII ; au temps de la séparation de l’Église et de l’État, à l’heure enfin de la Grande Guerre.
Sa virilité transparaît dans cet éloge funèbre d’un évêque de combat, que Mgr de Cabrières prononça à Grenoble en 1899 : « Un évêque n’est pas un chien muet qui ne sache pas aboyer quand les loups rôdent autour de son bercail ! Et puisque moi-même, je vois venir, avec la vieillesse, l’heure où, sur ma tombe, on essaiera de résumer ma vie, puissé-je ne pas avoir d’autre ambition que de réaliser cette parole de nos Saints Livres : Ne paveatis, ne tremblez pas, n’ayez pas peur ! Les combats que vous livrez ne sont pas livrés dans votre intérêt, mais dans l’intérêt de Dieu ».
Cent ans après la mort du cardinal, l’Église de France a perdu cette virilité. « L’Église est devenue trop féminine » se lamentait il y a peu un cardinal. Victime de l’esprit du monde avec lequel elle s’est compromise ; victime aussi de la nouvelle ecclésiologie de Vatican II. Les jeunes filles « servantes de messe » n’en sont qu’un malheureux symptôme.
Pourtant Jésus-Christ avait ses raisons lorsqu’il choisit pour apôtres exclusivement des hommes. Des hommes, desquels il pouvait raisonnablement attendre cette virilité nécessaire pour défendre le troupeau, édifier et gouverner l’Église, clamer haut et fort la vérité de l’Évangile.
Source : Apostol n° 158