La tombe du pêcheur

Par cette enquête réso­lu­ment apo­lo­gé­tique, l’avocat amé­ri­cain John O’Neill rend un double hom­mage à l’histoire de l’Église et aux per­son­na­li­tés du XXème siècle qui ont œuvré pour la mise à jour des restes du corps de saint Pierre, enfouis sous l’actuelle basi­lique du Vatican.

Depuis Luther jusqu’aux ratio­na­listes d’aujourd’hui, nom­breux sont les contemp­teurs iro­niques des récits sup­po­sés « légen­daires » qui affir­maient que saint Pierre, le pre­mier pape, était mort mar­ty­ri­sé à Rome dans le cirque de Néron et avait été ense­ve­li à proxi­mi­té du lieu de son sup­plice. Lorsque Pie XII, pas­sion­né d’archéologie depuis son enfance, qu’il avait pas­sée à Rome, et secon­dé par Mgr Montini, futur pape Paul VI, entre­prend de lan­cer des recherches sou­ter­raines à l’endroit sup­po­sé des restes de saint Pierre, il assume le risque de ne rien trou­ver de pro­bant. En pleine deuxième Guerre mon­diale, il fait creu­ser dans le plus grand secret, dès 1940, le sous-​sol de la basi­lique jusqu’à rejoindre les strates de la période primitive.

John O’Neill pra­tique dans son ouvrage une super­po­si­tion des époques et rap­proche les évé­ne­ments de la per­sé­cu­tion de Néron de celle des Juifs dans les années 1940, sou­li­gnant au pas­sage les secours appor­tés par Pie XII aux per­sé­cu­tés. N’hésitant pas à recou­rir à de nom­breuses répé­ti­tions, il cherche à tout dire sur ses per­son­nages, au risque de noyer le lec­teur dans des excur­sus qui font perdre de vue l’enquête sur la tombe de saint Pierre. Il pré­sente un por­trait sans conces­sion de cer­tains pro­ta­go­nistes des fouilles et réha­bi­lite Margarita Guarducci, géniale archéo­logue, injus­te­ment mépri­sée par l’abbé Ferrrua qui avait été long­temps char­gé des fouilles avant et après la mort de Pie XII. On découvre George Strake, le géné­reux mécène amé­ri­cain qui a finan­cé ce pro­jet pha­rao­nique des fouilles et d’autres encore. On applau­dit à la téna­ci­té récom­pen­sée de Pie XII mais fina­le­ment pas avec les restes ini­tia­le­ment décou­verts en 1942. 

Le récit qui prend pas­sion­né­ment le par­ti des gen­tils et désigne les méchants sans conces­sion n’est pas l’ouvrage d’un his­to­rien et il est des­ser­vi par un tra­duc­teur fâché avec cer­tains pans de la conju­gai­son fran­çaise et par des erreurs d’impression qu’une relec­ture atten­tive aurait évi­tées. Mais l’enquête a le mérite de pré­sen­ter la suc­ces­sion des faits et des évé­ne­ments qui ont conduit aux résul­tats que l’on sait. Elle fait connaître à rai­son le rôle déter­mi­nant de catho­liques dont les com­pé­tences et par­fois incom­pé­tences scien­ti­fiques ont fina­le­ment ser­vi l’honneur de l’Église.

Livre : La tombe du pêcheur – L’extraordinaire enquête sur la décou­verte archéo­lo­gique du tom­beau de saint Pierre, John O’Neill, Editions Artège – 2020, 220 pages – 12 €

Abbé Philippe Bourrat

Source : Le Chardonnet n° 367