Cher Père Marziac
Nous sommes heureux aujourd’hui de nous trouver auprès de vous, en cet anniversaire de votre ordination sacerdotale, afin qu’avec vous, nous puissions rendre grâces à Dieu au cours de cette sainte Messe que vous allez célébrer, sous le signe de la très Sainte Vierge Marie.
Nous allons rendre grâces avec vous, de toutes les grâces que vous avez reçues vous-même. Nous tous qui sommes ici, vos parents, amis, ceux qui également ont reçu par votre intermédiaire des grâces abondantes. Et j’aurais garde d’oublier tous ceux qui ont contribué à la préparation de votre vocation, à la réalisation de votre vocations ; tous ceux qui ont contribué avec vous, à répandre les grâces que le Bon Dieu a voulu donner aux âmes par vos mains.
Et ceux-là sont nombreux. Dieu seul les connaît – même vous, je pense – vous ne les connaissez pas. Beaucoup d’âmes reconnaîtront un jour qu’elles ont reçu par vous, des grâces et s’associeront à votre joie et à la gloire que le Bon Dieu vous donnera, pour les grâces que vous avez données.
Je ne puis pas oublier vos chers parents qui ne sont pas ici aujourd’hui en raison de leur âge ou en raison d’autres circonstances. Je ne puis pas oublier non plus tous ceux qui là-bas en Afrique, Côte d’ivoiriens, Dahoméens, vous ont connu et se réjouissent aujourd’hui de votre anniversaire et le fêtent avec vous de tout leur cœur et dans leurs prières. Que de souvenirs pour vous ; que d’attachement à tous ceux auprès desquels vous avez exercé votre apostolat.
Et je me garderai bien également d’oublier tous ces religieux et religieuses qui sont aujourd’hui dans des monastères ou exercent leur apostolat religieux et qui – dans une certaine mesure – doivent leur vocation à l’appel que vous leur avez donné, aux conseils et aux avis que vous leur avez donnés.
C’est donc un nombre important de personnes et d’âmes qui sont aujourd’hui près de vous et qui veulent avec vous rendre grâces à Dieu.
Rendre grâces à Dieu d’abord parce que vous êtes né dans une famille chrétienne. Et je pense qu’il serait ingrat de ne pas évoquer aujourd’hui le rôle de la famille chrétienne dans la vocation sacerdotale ou religieuse. Nous devons en effet certainement beaucoup de notre vocation à nos chers parents. Ce sont eux qui par leur exemple, par leurs conseils, par leurs prières, je dirai même par leur silence dans leurs dévotions, ont jeté dans nos âmes ce germe de la vocation.
Oui, nous devons souhaiter qu’il y ait beaucoup de familles chrétiennes qui favorisent l’éclosion des vocations et de bonnes vocations, de saintes Vocations.
Et c’est dans votre famille que vous avez entendu cet appel : Magister ad est et vocate : Le Maître est là. Il vous appelle. Et vous avez répondu comme nous le lisions il y a un instant dans l’Évangile ; vous avez répondu comme la Vierge Marie à l’appel de Dieu ; vous avez répondu par fiat : Oui me voici Seigneur ; je veux répondre à votre appel. Et Notre Seigneur vous a dit : Sicut misit me Pater, et ego mitto vos (Jn 20,21) : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ».
Et ce fut l’origine de votre vocation, non seulement missionnaire, mais votre vocation sacerdotale. Car Notre Seigneur a réalisé sa mission ; s’il fut un missionnaire, c’est bien Notre Seigneur Jésus-Christ. Il a été envoyé : Sicut misit me Pater : Le Père m’a envoyé.
Il est donc essentiellement missionnaire. Et si vous avez réalisé votre vocation de missionnaire, en allant porter l’Évangile dans les terres lointaines, c’est parce que fondamentalement, votre mission est sacerdotale et qu’elle se réalise avant tout, dans le Saint Sacrifice de la Messe. Comme la mission de Notre Seigneur s’est réalisée avant tout dans son Sacrifice de la Croix. C’est là l’essentiel de la mission. Notre Seigneur a été envoyé ici-bas, certes pour témoigner de la Vérité, comme Il l’a dit à Pilate :
Ego in hoc natus sum, et ad hoc veni in mundum, ut testimonium perhibeam veritati (Jn 18,37) : Je suis né pour cela et je suis venu pour cela, pour témoigner de la Vérité. Et cette Vérité, c’était précisément l’honneur et la gloire de Dieu qu’il devait rendre sur la Croix.
C’est cela la mission principale, la mission fondamentale du prêtre : Monter à l’autel pour témoigner de la Vérité, témoigner de la gloire de Dieu ; témoigner de l’Incarnation et de la Rédemption faite par Notre Seigneur et continuer sa Rédemption.
Voilà ce qu’est le prêtre. Et cela vous l’avez fait tout au long de ces vingt-cinq années.
Mais puisque le Bon Dieu vous a fait cette grâce – et c’en est une – de partir au loin pour prêcher l’Évangile, vous avez réalisé aussi la parole de Notre Seigneur : Et eritis mihi testes in Jérusalem et in omni Judæa et in Samaria et usque ad ultimum terræ : Vous serez mes témoins, à dit Notre Seigneur aux apôtres, témoins à Jérusalem. Il y en a qui sont restés à Jérusalem comme les prêtres restent dans les milieux de leur famille pour évangéliser leurs concitoyens.
Et omni Judæa et Samaria, et dans tous les pays voisins. Et enfin usque ad ultimum terræ. Il y en a qui sont allés jusqu’aux confins de la terre pour aller prêcher l’Évangile.
C’est une grande grâce. Grâce de détachement en particulier, grâce qui correspond je pense à cette béatitude de la pauvreté : Beati pauperes spiritu : Bienheureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté. Parce que l’esprit missionnaire, pour celui qui part au loin, c’est le détachement, détachement total ; détachement de sa famille, détachement de son pays, détachement de tout ce qu’il a connu, de toute la manière de vivre qu’il a pu connaître. Il se trouve dans un milieu complètement différent, une civilisation totalement différente, une manière de penser totalement étrangère à celle qu’il a connue dans son pays. Et alors il va prêcher l’Évangile à ces populations.
Et c’est une grâce également – je suis sûr, mon Père, que vous ne me contredirez pas, vous l’avez vécu vous-même – c’est une grâce de voir la toute puissance de la grâce de Notre Seigneur dans les âmes.
Précisément parce que ces milieux auxquels vous avez été envoyé n’étaient pas chrétiens – ou du moins l’étaient depuis peu de temps – vous avez vu, de vos yeux, fructifier la grâce du Seigneur.
Et pour nous qui sommes habitués à vivre dans des pays chrétiens, nous avons besoin de prendre conscience de cela. Nous n’estimons pas à sa juste valeur, la grâce que le Bon Dieu nous a donnée par le baptême et par les sacrements. Dans ces pays où le christianisme est récent, nous avons pu constater dans les âmes, ces effets de la grâce.
Des âmes profondément païennes, attachées aux choses de ce monde, plongées dans le péché, ces âmes par la grâce du baptême, trouvent véritablement la vertu, la vertu chrétienne et la mettent en pratique.
Pensons particulièrement à ces catéchistes, ces catéchistes qui non seulement ont reçu la grâce du baptême pour eux, mais eux aussi sont devenus missionnaires et parfois ont offert leur vie pour Notre Seigneur Jésus-Christ, pour témoigner de leur foi.
Vous avez donc reçu ces grâces, grâces de l’appel pour les missions de la Société des Missions Africaines de Lyon, qui a commencé en 1850 et qui a eu ses martyrs. Les premiers pères qui sont partis dans cette Afrique, dans ce golfe de Guinée, ont été massacrés. Certains massacrés par les populations indigènes qu’ils allaient évangéliser, d’autres disparaissaient au bout de quelques mois, tués par la malaria.
Et c’est à la suite de ces martyrs que vous êtes allé, vous aussi dans ce pays de mission. Et vous le savez également, si ces populations acceptent avec générosité la grâce de l’Évangile, elles ont besoin peut-être plus que d’autres encore, et plus que celles qui sont dans un pays chrétien depuis de longues années ; elles ont besoin d’approfondir leur foi. Elles ont besoin d’avoir des racines profondes afin de résister au retour des tentations et de cet attrait qu’exercent sur elles le fétichisme et toutes les habitudes du péché, qui se trouvent dans ces pays.
Alors vous avez pensé à juste titre et vous le pensiez déjà depuis de longues années, puisque je pense que c’est au cours de votre séminaire que vous avez pris contact avec les Pères de Chabeuil qui prêchaient les exercices de saint Ignace. Et vous avez pensé à juste titre que ces exercices de saint Ignace étaient non seulement utiles aux populations déjà chrétiennes comme les nôtres, mais qu’ils seraient utiles là-bas en Afrique aussi. Et je pense que vous avez été un des premiers à réaliser cet apostolat des exercices de saint Ignace en Afrique.
Et cela certainement, est une grâce particulière. Car j’ai pu être le témoin moi-même de l’effet extraordinaire que produisaient ces exercices de saint Ignace en pays africain. Car j’ai eu moi-même l’occasion d’appeler les Pères de Chabeuil pour venir prêcher à Dakar.
Et je souhaite vivement que ces exercices continuent à être prêches dans ces régions pour le grand bien de l’Afrique.
Et voici que par des circonstances providentielles, vous êtes revenu dans votre pays d’origine. Et hélas, voici que maintenant, nous pouvons dire que nos pays sont devenus des pays de mission. Vous avez été missionnaire en Afrique et voici que maintenant vous êtes devenu missionnaire en Europe.
Et vous avez continué ; vous avez persévéré à prêcher ces saints Exercices. Et grâce à cela vous avez pu répandre de nombreuses grâces dans les âmes. Comme je le disais tout à l’heure, il nous est impossible, pour vous, comme pour nous à plus forte raison, de mesurer toutes ces grâces. Le Bon Dieu seul le sait, les connaît.
Mais c’est un exemple, cher Père Marziac, que vous donnez à nos séminaristes et à nos jeunes prêtres. Et si aujourd’hui nous nous réjouissons avec vous et nous rendons grâces à Dieu, eh bien je voudrais que cette cérémonie soit aussi l’occasion pour nos jeunes séminaristes, de suivre votre exemple.
Missionnaires ils le seront. S’ils sont prêtres, ils seront missionnaires puisque Notre Seigneur est essentiellement missionnaire. Le prêtre étant un autre Christ, doit être essentiellement missionnaire. Missionnaires dans leur pays ils le seront vraisemblablement. Missionnaires dans les pays lointains, ils le seront aussi pour beaucoup d’entre eux.
Et je souhaite, mes chers amis, que vous mesuriez le bienfait des exercices spirituels et les grâces qui en découlent ; qui par les faits montrent qu’il y a une grâce particulière de Dieu dans ces exercices. D’abord parce que les papes l’ont dit eux-mêmes maintes et maintes fois. Mais c’est un fait certain, que ceux qui ont suivi ces exercices, en demeurent marqués. Marqués pour de longues années, parfois pour toute leur vie. En particulier ceux qui ont découvert dans ces exercices leur vocation, leur mission spéciale.
Alors je souhaite, mes chers amis, que cette cérémonie soit l’occasion de vous attacher encore davantage à votre vocation. Ceci ce n’est pas moi qui devrais le dire, mais c’est le Père lui-même qui vous le dira peut-être dans quelques instants, lorsque nous serons réunis.
Il dira peut-être que la grâce du sacerdoce est une source de joies. Et que s’il y a des souffrances qui sont normales, puisque nous sommes les disciples d’un Maître qui a souffert et qui est mort sur la Croix, nous ne pouvons pas penser vivre sans souffrances et sans épreuves. Ces épreuves sont des grâces aussi. Mais le sacerdoce donne des joies profondes.
Et nous demandons à la très Sainte Vierge Marie, en terminant, elle qui est la mère du prêtre, de faire en sorte cher Père Marziac, que vous puissiez continuer votre apostolat et que vous puissiez le multiplier et que vous puissiez aider nos jeunes prêtres à comprendre la grande utilité de cet apostolat par les exercices, afin qu’eux aussi puissent se sanctifier, continuer à se sanctifier eux-mêmes en donnant les exercices.
C’est le meilleur moyen de rester des prêtres fidèles. C’est le meilleur moyen, mes chers amis, de garder cette ferveur que vous avez maintenant, que vous aurez encore davantage le jour où vous recevrez l’imposition des mains pour la grâce du sacerdoce.
Et si vous voulez conserver tout au long de votre vie cette ferveur, cette dévotion, cet attachement à Notre Seigneur Jésus-Christ, ce dévouement total à Notre Seigneur Jésus-Christ, c’est en prêchant les exercices aux autres que vous vous sanctifierez ; que vous garderez cette grâce et que vous aurez la joie de constater que cette grâce que vous possédez vous pouvez ainsi la communiquer à d’autres et faire en sorte que ce feu que Notre Seigneur a allumé sur terre se communique aux autres.
Demandons à la très Sainte Vierge Marie aujourd’hui – cette fête nous rappelle le souvenir de Lourdes où Marie a répandu tant de grâces – non seulement en guérissant les corps – mais surtout en guérissant les âmes. En donnant, même aux corps qui ne sont pas guéris, le courage et la grâce de supporter leurs souffrances pour la plus grande gloire de Dieu.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.