Depuis cinq ans, Thérèse Hargot s’est imposée dans le champ médiatique, elle est devenue célèbre à l’occasion de la publication de son livre « Une jeunesse sexuellement libérée (ou presque). » Le succès de ce livre se fait sentir chez les catholiques conservateurs, et jusque dans le milieu de la Tradition. Que penser de cette « sexologue », décrite comme à contre-courant de la vision du corps soixante-huitarde et du médiatiquement correct ?
1. Un nouveau phénomène
Depuis quelques cinq ans, Thérèse Hargot s’est imposée dans le champ médiatique : elle possède son site (theresehargot.com), avec son blog. On trouve sa fiche sur Wikipédia. La presse en parle. La grande presse en général : Le Temps du 5 avril 2016 [1] ; Le Figaro des 22 mai 2015 [2] et 5 février 2016 [3]; Le Point du 20 février 2016 [4] . La presse catholique en particulier : La Croix du 9 mars 2015 [5] ; Famille chrétienne du 6 mai 2015 [6] ; La Vie du 5 février 2016 [7] ; Le Pèlerin du 4 février 2016 [8] ; Aleteia du 11 février 2016 [9]. Et même une certaine frange de la presse hostile à des positions jugées « puritaines », comme par exemple sur Inrockuptibles du 2 mars 2016 [10]. Du côté de la mouvance dite « traditionaliste » (au sens très élargi du terme), la revue La Nef (n° 280 d’avril 2016) est quasiment la seule à avoir jusqu’ici relayé le phénomène, en essayant d’en donner une rapide appréciation critique [11], répercutée le 1er avril 2016 par le blog Le Salon beige [12].
2. De fait, Thérèse Hargot, déjà connue dans un cercle plutôt restreint, est devenue brusquement célèbre à l’occasion de la publication de son livre Une Jeunesse sexuellement libérée (ou presque) paru en février 2016, aux éditions Albin Michel. Ce livre a défrayé la chronique : tous les titres accrocheurs qui émaillent les quelques articles de presse que nous avons indiqués le montrent suffisamment. A première vue, il semblerait que ce livre bouleverse les préjugés issus de la révolution de Mai 68, remette en cause tous les acquis de la prétendue « libération sexuelle », qui ne serait en définitive qu’un esclavage, ou tout au moins un conformisme de plus : la pornographie impose ses codes ; la « libération sexuelle » a accompli un asservissement, la contraception est un scandale, la jouissance est une norme et un devoir, l’éducation sexuelle a manqué son but, la libération sexuelle est un mensonge.
3. De fait encore, le succès de ce livre se fait sentir jusque dans le milieu de la Tradition. Les quelques échos qui nous parviennent suscitent un certain intérêt mêlé d’une part de bienveillance, car il est quand même heureux d’entendre dire « des choses fortes »[13], fortes parce qu’elles dérangent les bien-pensants de la révolution. Mais les choses fortes ne sont pas forcément toujours des choses vraies, et c’est pourquoi le succès du livre est aussi accompagné chez nous d’une certaine part d’interrogation. Et la grande question qui brûle bien sûr toutes les lèvres est finalement de savoir « ce qu’il faut en penser ». Certains auront un peu honte de la poser, et le conditionnement médiatique (surtout quand il est issu du milieu dit « catho ») pourra même conduire à n’y voir que du scrupule, ou un reste d’obscurantisme, hérité de la mentalité du « il faut ». Mais il n’y a en réalité dans cette question qu’un très bon réflexe : réflexe catholique qui se sait foncièrement allergique au libre examen, car dépendant de Dieu et de son Église. L’examen du livre de Thérèse Hargot ne sera donc pas pour nous un « libre examen », mais bien plutôt un examen libre, c’est à dire un examen qui va nous rendre libres de penser correctement, en nous arrachant aux entraves des influences médiatiques. Et la liberté de cet examen va nous venir de la vérité, c’est à dire de la lumière et des conseils que nous donne l’enseignement de l’Église – et donc de la théologie – pour tâcher d’y voir clair.
4. Nous commencerons par donner un bref aperçu de l’auteur et de son livre. Nous dégagerons ensuite l’idée maîtresse de l’auteur et du livre. Moyennant quoi, nous serons en mesure d’évaluer le phénomène, et cette évaluation sera double : premièrement, nous dirons ce qu’il faut penser de l’idée maîtresse et de la démarche qu’elle inspire ; deuxièmement, nous dirons aussi ce qu’il vaut mieux faire et ne pas faire, en pratique, à l’égard de Thérèse Hargot.
2. Qui est Thérèse Hargot ?
5. Pour commencer, elle ne s’appelle pas Thérèse Hargot ! Thérèse Hargot est en réalité Madame Jacob, née Hargot. Comme c’est souvent le cas, le nom de jeune fille a servi de nom de plume. Pour faire bref, nous l’appellerons quant à nous TH.
6. TH voit le jour en 1984 dans une famille belge très croyante. Elle est la quatrième de huit enfants. Ses parents sont tous deux assistants sociaux et sont installés dans un quartier défavorisé de Bruxelles. À l’âge de 15 ans, la jeune fille, bien que réceptive à l’éducation chrétienne, perd la foi. Malgré tout, elle décide de vivre « joyeusement » selon les propositions de l’Église. « La virginité, le mariage ont pour moi un sens, basé sur la réflexion humaine », résume-t-elle. A 19 ans, elle épouse un français, ce Monsieur Jacob, auquel elle donnera trois enfants.
7. Au début des années 2000, elle commence une formation en philosophie à Paris, qu’elle suit jusqu’au master ; en parallèle, elle prépare un autre master, en Belgique, en sciences de la famille et de la sexualité. À la fin de ses études, elle exerce à New York. À partir de 2013, elle intervient comme sexologue au collège catholique Stanislas, dans le 6e arrondissement de Paris, aussi bien pour des interventions en groupes, à destination des collégiens, lycéens et étudiants de classes préparatoires, qu’en permanence individuelle. De plus, elle jouit de la faveur de plusieurs mouvements catholiques qui, en l’invitant à s’exprimer sur différents sujets, souhaitent approfondir la sagesse humaine de l’Église, sans tomber dans un discours moralisateur. C’est ainsi qu’elle fut amenée à intervenir au Vatican, lors du Colloque international et interreligieux qui se tint du 17 au 19 novembre 2014 [14].
8. Enfin, depuis la publication de son livre, TH fait le tour des diocèses de France, où elle est officiellement invitée par les représentants de la hiérarchie catholique à prendre la parole devant le grand public des fidèles, par exemple le 31 mars 2016 à Angers [15] ou le 7 juin à Metz [16]. Tout se passe donc comme si son livre avait conféré à TH sinon le statut canonique du moins les lettres de noblesse d’une diaconesse au sein de l’Église, la fonction principale du diaconat étant justement celle de la prédication.
9. Mais TH nous-prêche-t-elle l’Évangile ? C’est la question qu’il faut à présent nous poser.
3. Que dit son livre ?
10. A la première lecture, on pourrait ressentir l’impression décevante d’un discours très décousu, où dix chapitres correspondent chacun à une problématique différente. Cependant, nous tenons une clef de lecture grâce à la réponse que TH donne à Aude de Beaux-Songes, dans un entretien paru sur le site de Aleteia. La journaliste lui demande : « Vous dénoncez et posez des questions. Mais pourquoi ne pas proposer de solutions ? ». TH répond : « Ce livre n’est pas un guide pratique, il n’est pas à ranger dans le rayon Psychologie-développement personnel, mais dans le rayon Essai de société. Je partage et dénonce une situation que j’estime alarmante. J’essaie d’aborder le débat sous un autre angle et je lance des défis. L’objet de ce livre n’est pas d’expliquer ce qu’il faut dire aux jeunes ou à ses enfants ». La journaliste réplique : « Les conseils concrets seront donc pour votre prochain livre ? ». Réponse : « Je ne suis pas certaine d’aborder ce point sous la forme d’un livre grand public, mais plutôt dans mes interventions futures et j’ai même déjà commencé à former des éducateurs. Mon rôle se rapproche de celui du philosophe : un rôle de réflexion sur notre société » [17]. C’est d’ailleurs ce que TH déclare dès l’Introduction de son livre : « Par cet essai, je veux simplement vous entraîner à regarder notre société au travers de mes trois postes d’observation. […] Par le biais de témoignages et d’histoires toutes véridiques, je voudrais vous faire voir ce que j’ai vu, vous faire entendre ce que j’entends, vous faire partager ce que j’ai vécu, pour vous permettre, au moins le temps de la lecture, de sortir du moule dans lequel nous avons grandi pour l’observer différemment » (p. 17).
11. TH aurait donc tenté une sociologie du sexe, la sociologie étant la science, ou plutôt le procédé, qui se contente de décrire les faits, pour dire tout au plus ce qu’ils représentent d’avantageux ou de nuisible pour la société, mais sans proposer de jugement de valeur pour les apprécier ni de solutions pour les modifier. L’explication est tentante, mais elle est trop simple. Car, comme c’est très souvent le cas, derrière la sociologie, derrière un constat qui se voudrait seulement factuel, il y a déjà une philosophie, il y a une explication. Et d’ailleurs, TH se présente bien comme une philosophe. Sa sociologie est donc purement tactique. Le tout est de découvrir quelle est sa philosophie.
12. Nous allons le faire en donnant tout d’abord un résumé synthétique de sa réflexion, en trois points. Ce qui nous conduira logiquement à notre troisième partie où il s’agira de mettre en évidence ce qui pourrait bien être l’idée maîtresse.
Résumé systématique de la réflexion : dans la forêt des problématiques
13. Les problématiques soulevées par TH sont données (apparemment) en vrac. Si on y réfléchit un peu, elles peuvent se ramener à trois têtes de chapitre : a) le sexe pour le sexe (chapitres I, III et V [18]) ; b) le sexe et la santé ou l’hygiène (chapitres IV, VI, VII [19]) ; c) le sexe dans la relation homme-femme (chapitres II, VIII, IX, X [20]). Dans le livre, la réflexion de fond est diluée au fil des témoignages et n’est pas toujours facile à mettre en évidence. En revanche, ce qui est très intéressant et éclaire bien la lecture du livre, ce sont les différentes déclarations de presse où TH condense toutes les idées maîtresses de son livre. La fiche de Wikipédia a su les exploiter avec intelligence. A partir de ces trois sources d’information, il est assez facile de restituer les grands axes de la réflexion.
a) Le sexe pour le sexe
14. A travers l’accès libre à la pornographie (chapitre I) et la liberté des expériences (chapitre V), la jouissance recherchée comme un idéal absolu a fini par faire l’objet d’un devoir et par devenir une tyrannie [21]. A tel point que la personne finit par se réduire à la sexualité, comme le montre bien le fait que l’hétérosexualité ou l’homosexualité soient devenues des identifications sociales (chapitre III) [22]. Pour contrecarrer cette tyrannie, TH répond que la personne humaine ne se réduit pas à la sexualité [23] : « La sexualité n’est pas une identité »[24]. […] « La sexualité est une des facettes de la personnalité, elle ne la résume pas »[25]. C’est donc la personne qui prime sur le sexe.
b) Le sexe et la santé ou l’hygiène
15. TH se livre à une condamnation sans appel de la pilule, c’est à dire de la contraception chimique et hormonale (chapitre VI)[26] . La même condamnation frappe aussi le recours à la protection masculine (chapitre IV) [27]. Cette condamnation repose sur deux motifs. Le premier motif est d’ordre sanitaire : la pilule est nuisible à la santé et diminue chez les femmes l’instinct sexuel, au point de les rendre frigides[28]. Sans compter l’asservissement de la personne au contrôle pharmaceutique [29]. Le second motif est d’ordre sociologique ou philosophique et entend dénoncer un pseudo-féminisme, qui empêcherait le vrai : la pilule n’est que l’un des aspects de l’asservissement sexuel de la femme à l’égard de l’homme[30]. Elle entretient aussi la peur de l’enfant, considéré comme une menace pour l’épanouissement personnel [31] . Quant au recours aux protections masculines, TH y voit un manque de confiance et d’amour, car il faut aimer pour faire confiance [32] . Tout cela déshumanise la sexualité. C’est pour ce même motif que l’avortement est lui aussi objet de contestation (chapitre VII) [33].
c) Le sexe dans la relation homme-femme
16. La relation de couple (chapitre II) est aujourd’hui faussée car on y voit une relation d’ordre seulement sexuel ou émotionnel [34]. Le féminisme égalitariste (chapitre VIII) est un échec, car on n’échappe aux vraies différenciations que pour tomber dans des faux stéréotypes[35]. La libération sexuelle dans le couple empêche le vrai dialogue constructif entre les parents et les enfants (chapitre IX) [36] . La libération de la femme (chapitre X) débouche sur l’impasse d’une déshumanisation[37]. La réponse à toutes ces problématiques est la même : c’est de retrouver le sens de l’identité et le respect de la dignité qu’elle entraîne. L’identité n’est pas celle d’un être sexuel, mais c’est celle d’une personne. Cette individualité de la personne appelle le respect.
4. Quelle idée maîtresse se dégage du livre ?
17. La fiche de Wikipédia, qui ne fait que reprendre les propos rapportés par Le Temps, résume bien les choses : « La principale thèse de Thérèse Hargot est que la pensée actuelle de la sexualité est une pensée hygiéniste et utilitariste : se protéger et jouir. Elle propose de remplacer ce formatage par un questionnement philosophique qui remette la personne au centre ».
18. En d’autres termes, le trait commun qui se dégage aux trois types de problématiques mis en évidence dans notre deuxième partie, c’est la solution proposée pour sortir du problème posé. Et la solution reste la même dans les trois cas, car le problème est toujours le même. C’est le problème d’une aliénation, qui se présente sous trois variantes : d’une manière ou d’une autre, le sexe sert de prétexte pour réduire la personne à l’état de consommateur ou de consommé, dans une logique de jouissance. Dans les trois cas, il s’agit d’une aliénation de la personne, qui entraîne une perte de sa dignité. La solution consisterait à ne pas réduire l’être à la sexualité, et de retrouver le vrai sens de la dignité, qui est le sens de la personne.
19. Ce constat, ce n’est pas nous qui l’inventons. Car TH le fait elle-même, lors-qu’elle résume sa pensée en ces termes : « Je travaille surtout à enfin réaliser le plan initial de la révolution sexuelle : vivre librement sa vie d’homme et de femme ! Je souhaite que chaque personne connaisse sa valeur et soit consciente de son importance au-delà de ses performances sexuelles. Ainsi, le sexe ne sera plus anxiogène, il (re) deviendra joyeux, car le bien-être humain ne dépendra pas uniquement de lui » [38] . Nous avons là une affirmation très importante, car cette affirmation est précisément une réponse. Et la question posée était la suivante : « Vous travaillez donc à une refondation morale de la société ? ». Hé bien non, pas du tout ! TH ne s’oppose pas à la révolution sexuelle. Au contraire, elle veut la faire vraiment aboutir. Et pour cela, elle veut nous la faire vraiment comprendre. Parce qu’on ne l’a pas encore comprise. On ne l’a pas comprise d’abord parce qu’on l’a refusée au nom d’un discours moralisateur et ensuite parce qu’on l’a détournée de son but au nom d’un discours hygiéniste : « Dans les quarante dernières années, le discours moralisateur auquel a succédé un discours hygiéniste est passé à côté de l’essentiel » [39]. Autant de fausses normes qui ont paralysé le plan initial. « Autrefois, la norme était donnée par une institution, principalement religieuse, aujourd’hui, elle est donnée par l’industrie pornographique » [40].
20. Finalement, que veut nous dire TH ? Qu’il faut sortir de la problématique du devoir pour entrer dans celle de la liberté. Nous n’y sommes pas encore parvenus car « nous sommes simplement passés du devoir de procréer à celui de jouir » [41]. Au delà du devoir, au delà de la procréation et de la jouissance, il y a l’appel à « vivre librement sa vie d’homme et de femme », qui va de pair avec un appel à ce que chaque personne « connaisse sa valeur et soit consciente de son importance ». Pour sortir de la fausse problématique et entrer dans la bonne, il faut donc mettre la personne au centre. C’est bien cela.
21. Nous tenons la réponse à notre question (posée au n° 10). TH ne nous prêche pas l’Évangile. Elle nous prêche le personnalisme. Essayons à présent de voir lequel.
5. Qu’en penser ?
22. Pour être juste, essayons d’évaluer séparément les points positifs et les points négatifs, avant de donner une appréciation globale.
Les points positifs
23. Les points positifs se retrouvent pratiquement tous au niveau des conclusions pratiques. TH n’a pas froid aux yeux et elle constate avec une certaine part de lucidité les effets dévastateurs de l’après Mai 68. Elle veut nous obliger à sortir du moule, pour nous ouvrir les yeux. Elle veut nous arracher à l’emprise socio-médiatique, qui nous empêche de réagir. Sa réaction, ce sont tous ces cris d’alarmes qu’elle pousse devant nous, face au triomphe de la pornographie, de la pilule et aussi face au mal être des couples en général et des femmes en particulier. A tel point que, remarque la journaliste du Temps : « face à ces assertions musclées, on pense avoir affaire à une conservatrice forcenée, tendance illuminée » [42] . Une autre journaliste va même lui reprocher « son puritanisme savamment dissimulé sous un prétendu néo-féminisme » [43]. Pour résumer les choses, disons que nous avons affaire, du moins apparemment, à un discours non-conformiste, qui semblerait briser une certaine conspiration du silence. Ce qu’un lecteur du Figaro a pu résumer ainsi : « Enfin une bouffée d’oxygène dans la pestilentielle atmosphère ambiante ». Mais la bouffée d’air que TH veut nous faire respirer est-elle aussi saine qu’il y paraît ?
Les points négatifs
24. TH nous dit « des choses fortes » [44], fortes parce qu’elles dérangent les bien-pensants de la révolution Est-ce tout ? Malheureusement, oui. Ne soyons pas dupes, à force d’être trop enthousiastes. La journaliste du Temps l’a d’ailleurs parfaitement compris et, si elle nous le dit, c’est parce que TH elle-même le lui a dit en répondant à sa question : « Thérèse Hargot, 31 ans, trois enfants et une blondeur de printemps, n’aspire pas à une refondation morale de la société » [45]. C’est déjà un premier point négatif : les cris d’alarmes de TH resteront insuffisants, et même impuissants, du fait même qu’ils excluent le recours à une morale. C’est d’ailleurs ce qui fausse sur quasiment tous les points la critique iconoclaste. Pour faire bref, nous allons nous en tenir à deux exemples. Mais n’oublions pas qu’on pourrait les multiplier en revenant de manière exhaustive sur tout le livre.
25. Premier exemple, pour TH, le scandale de la pilule, c’est qu’elle rend les femmes malades … et non pas qu’elle soit contraceptive. Elle le dit d’ailleurs très clairement : « C’est le moyen qui est remis en question, pas la fin » (p. 124). La fin qu’elle ne remet pas en question, c’est le fait même de la contraception, le fait même d’empêcher intentionnellement la procréation, indépendamment de toute référence à une morale. Le fait que cet empêchement puisse (dans son esprit) être seulement temporaire n’y change rien. Car le seul critère invoqué en guise de norme, c’est de « préserver la santé des femmes ». Ne soyons pas dupes : lorsque TH prône le recours aux méthodes naturelles, ce qu’elle prône en réalité n’a rien à voir avec la traditionnelle régulation des naissances, enseignée par l’Église catholique. Ce qu’elle désigne du même nom est autre chose. La grande différence entre la contraception (qu’elle soit permanente ou temporaire) et la régulation des naissances réside en ce que la première est l’œuvre exclusive de la liberté de l’homme, affranchie de la volonté divine, tandis que la seconde est l’œuvre de sa prudence, dans la dépendance de la volonté divine. TH nous propose seulement une contraception bio, « plus naturelle et moins technicienne » (p. 134–135), afin d’éviter les inconvénients signalés qui sont : les effets secondaires nuisibles à la santé, la chute de la libido, l’asservissement au contrôle pharmaceutique. Mais nulle part TH ne dénonce l’usage de la pilule comme étant contraire à la fin première du mariage. Dans son esprit, si la pilule est contraire à quelque chose, c’est à la liberté.
26. Autre exemple de critique décalée : l’homosexualité. C’est le problème d’une angoisse (un « champ anxiogène », p. 74), angoisse de savoir si on est homosexuel ou si on ne l’est pas, qui correspond finalement à l’angoisse du déterminisme sexuel. C’est aussi le problème d’une honte ou d’un déni social. C’est surtout le problème d’une identification sexuelle. Ce que TH conteste, c’est que la pression sociale conduise les gens à croire qu’ils « sont » homosexuels. Alors qu’en réalité, chacun devrait plutôt « vivre librement sa vie d’homme et de femme ». On n’est pas sexuellement prédéterminé, on vit librement sa sexualité. L’essentiel est que « chaque personne connaisse sa valeur et soit consciente de son importance au-delà de ses performances sexuelles ». Nulle part TH ne dénonce l’homosexualité comme quelque chose de contraire à la loi naturelle. Elle se propose seulement de remettre la sexualité à sa juste place dans la vie humaine : « Ainsi, le sexe ne sera plus anxiogène, car le bien-être humain ne dépendra pas uniquement de lui ». La problématique de l’homosexualité n’est donc qu’un aspect relatif d’une problématique plus vaste, qui est celle de la dignité humaine. Ce qui importe est de ne pas réduire l’être à la sexualité, et de rester libre au-delà de ses expériences sexuelles, toutes libres. « Je ne vous ai pas parlé d’homosexualité. Je m’alarme seule-ment que la quête existentielle repose sur les expériences sexuelles. Je m’alarme que les désirs et les comportements sexuels s’expriment avec le verbe être et s’affichent comme une identité. Je m’alarme que notre société ne soit pas capable d’avoir un vrai débat sur les différentes pratiques sexuelles, coincée dans son incapacité philosophique à distinguer la personne de ses actes » (p. 77).
27. Nous tenons là quelque chose de très important. Cette citation de TH exprime toute l’essence de son personnalisme. Philosophiquement parlant, on distingue en effet entre l’être et l’agir et donc entre la personne et ses actes. Et on distingue donc aussi entre deux sortes de dignité pour l’homme : il y a premièrement la dignité qui lui vient du fait qu’il est ce qu’il est, c’est à dire une personne humaine, c’est à dire encore un être qui a la capacité de réfléchir et de se décider librement ; il y a deuxièmement la dignité qui lui vient du fait qu’il se décide librement, conformément à ce qu’exige la droite raison, c’est à dire d’une manière qui est moralement bonne. La première dignité est la dignité ontologique (ou qui se tire de l’être pur : c’est le sens du mot grec « ontos »). La deuxième est la dignité morale (ou qui se tire des actes : c’est le sens du mot latin « mores »). Le personnalisme est une erreur philosophique qui réduit l’homme à son être, indépendamment de son agir, et qui donc réduit la dignité de l’homme à la seule dignité ontologique. Lorsque TH reproche à la société « son incapacité philosophique à distinguer la personne de ses actes », elle veut dire très précisément que la valeur suprême, dont la société devrait tenir compte, c’est la personne et non ses actes. Elle reproche à la société de définir la personne en fonction de ses actes, au lieu de la définir en fonction de son être, qui est celui d’une liberté. C’est bien là l’essence même du personnalisme : une philosophie qui refuse de prendre en compte la valeur des actes pour s’en tenir uniquement à la valeur de l’être. Ce qui compte est ce que nous sommes (nous sommes des êtres libres), non pas ce que nous agissons (nous agissons selon tel ou tel type de sexualité). Si l’on prend en compte la valeur des actes, on aboutit à une morale. Et c’est justement ce que TH veut éviter : elle ne veut pas d’une « une refondation morale de la société ». Pour une appréciation globale : deux conceptions inconciliables.
28. Nous sommes dans une logique totalement différente du catholicisme et de l’Église, totalement différente aussi de la simple loi naturelle. Et nous disons bien : une logique, c’est à dire un ensemble cohérent, où tout se tient de A jusqu’à Z, parce que chacune des rouages de l’ensemble fonctionne de pair avec tous les autres. Il est bien possible que, sur tel ou tel point isolé, certaines prises de position, certaines conclusions pratiques, certains diagnostics de TH coïncident matériellement ou selon la lettre avec ce que nous affirmons nous aussi. Mais la ressemblance, toute extérieure, s’arrête là. Nous ne contestons pas la pornographie, la pilule, l’homosexualité et toutes les déviances actuelles pour les mêmes raisons profondes. Et nous ne prônons pas non plus le recours aux méthodes naturelles ou la protection de l’enfance face à la génération internet pour les mêmes motifs. Et donc, même si elle pénètre chez nous, TH n’est pas des nôtres. En un mot, nous n’avons pas la même conception de ce que TH appelle la « sexualité » et que la théologie morale traditionnelle désigne en d’autres termes.
a) L’usage du mariage, selon la doctrine catholique
29. Ce que TH désigne comme la « sexualité » correspond, d’un point de vue très matériel, à l’usage, chez l’homme, des organes génitaux. Et sur ce point, l’enseignement de l’Église tient en deux principes absolument capitaux.
30. Premier point. L’usage de ces organes est celui que réclame la nature, conformément au plan du Créateur. Ce plan s’exprime dans une loi, la loi divine naturelle. Notre raison humaine peut et doit la connaître pour s’y conformer. La morale n’est pas autre chose : elle se définit comme l’accomplissement des actes humains (dont font partie les actes par lesquels l’homme use de ses organes génitaux) conformément à ce que la raison peut connaître de la loi, en vue du but que Dieu leur assigne et que la nature réclame. Par définition, les actes humains s’inscrivent dans une morale, et cela veut dire qu’ils sont bons ou mauvais, selon qu’ils respectent la loi de Dieu, pour pouvoir atteindre le but de la nature, fixé par Dieu. L’usage des organes génitaux n’échappe donc pas à la morale. Et son but est double. Le but principal est la transmission de la vie et le but second est l’affection mutuelle des époux. Ces deux buts ne peuvent être atteints que dans le lien indissoluble du mariage. Et ils sont hiérarchisés entre eux, puisque l’affection mutuelle découle de la transmission de la vie. Et d’autre part, dans les deux cas, l’obtention du plaisir n’est jamais voulue pour elle-même : elle est seulement là pour faciliter les deux fins du mariage, qui sont la procréation et l’affection. Ajoutons que la fin première du mariage, qui est la procréation, est le bien de l’espèce humaine, le bien de la nature. Il y donc, inscrite, au cœur même de l’usage des organes génitaux, une priorité de la nature sur la personne, une priorité de l’espèce sur l’individu. L’usage des organes génitaux fait partie d’un bien commun et c’est pourquoi la liberté de l’homme n’en a pas la maîtrise absolue.
31. Deuxième point. L’usage de ces organes est profondément vicié à cause du péché originel. Il y a à ce niveau le désordre de la concupiscence. Ce désordre est mystérieux, car il est la conséquence d’une réalité que seule la révélation nous fait connaître. Il consiste en ce que l’homme subit une inclination déréglée, qui le pousse à user de ses organes génitaux dans la recherche déraisonnable du plaisir qui lui est attaché. Cette inclination déréglée est la véritable cause, la raison profonde, mais cachée et mystérieuse, de toute « libération sexuelle ». Il y a aussi d’autres facteurs qui peuvent intervenir, comme par exemple le libre accès généralisé à la pornographie sur internet, mais ce ne sont plus des causes ; ce sont des occasions. Si on supprime l’occasion, on ne supprime pas la cause et celle-ci peut toujours trouver le moyen de produire ses mauvais effets : la pornographie a toujours existé, même avant l’internet. Tandis que si on maîtrise la cause, on maîtrise les effets. C’est justement l’Église, et elle seule, qui nous donne le moyen de traiter le mal au niveau le plus profond qui est celui de la cause : avec la grâce donnée dans les sacrements, la prière et la pénitence, la prudence et le combat spirituel. La fuite des occasions est nécessaire mais ne suffit pas. Ce qui sera toujours suffisant, c’est la vertu et il s’agit ici de la vertu de tempérance. Celle-ci se définit comme la maîtrise de l’inclination sexuelle, dans ce qu’elle a de déréglé. Et sans la grâce, il est impossible de l’acquérir.
b) La sexualité selon TH et son personnalisme
32. Elle tient elle aussi en deux points, qui sont la correspondante négative des deux points auxquels se résume la doctrine catholique. Et nous en ajouterons un troisième.
33. Premier point : ce que TH appelle la « sexualité » est l’usage d’une liberté. Et la liberté, c’est la dignité de l’homme. La sexualité fait abstraction de la morale. Tout au plus, TH parle-t-elle juste à une seule reprise dans tout son livre (p. 208) de « la différence des sexes » en disant qu’elle est « cette capacité à engendrer la vie » et qu’elle « impose des limites ». Mais pour autant, n’allons pas trop vite en conclure à une volonté implicite de réintroduire la morale. La capacité à engendrer la vie n’impose ses limites que si elle correspond à une sexualité librement vécue. En ce sens, le passage du livre évoque les limites imposées par la liberté des femmes à la société patriarcale, celles du féminisme et non celle d’une quelconque morale.
34. Deuxième point : TH ignore totalement la réalité de la concupiscence héritée du péché originel. Les solutions qu’elle propose de réduisent à prendre conscience du danger, à limiter l’usage de l’internet, au niveau politique. « Idéalement, les États devraient intervenir pour limiter cet accès. Mais, vu la difficulté de cette option, je préconise le dialogue dans les classes dès la primaire, de sorte à ce que les élèves aient au moins des outils pour décoder ces images et les remettre à leur juste place » . Mais si le péché originel n’existe pas, autant croire au Père Noël. Prisonnière de sa fausse philosophie, TH ne peut qu’ignorer les véritables causes du problème. A cet égard, son plus grand handicap ne serait-il pas d’avoir perdu la foi à l’âge de 15 ans ? Il en résulte que pour elle le mariage a un sens « basé sur la réflexion humaine ». Mais nullement sur la foi, qui seule peut nous indiquer toute l’ampleur du phénomène sexuel.
35. Troisième point : il y a chez TH confusion entre devoir et devoir. Elle englobe en effet dans la même réprobation le devoir de procréer et le devoir de jouir [46], par opposition à la liberté de vivre sa sexualité. Pour éclairer la question – et démonter le sophisme – il vaudrait mieux parler de « nécessité ». On peut ensuite distinguer entre la nécessité naturelle, qui est l’épanouissement normal des êtres libres et la nécessité violente, qui va à l’encontre de la liberté. Le « devoir de procréer » est une nécessité naturelle, et elle incombe à l’espèce humaine, pour que celle-ci se maintienne dans son existence : elle se situe au fondement de la liberté, car elle l’oriente vers son vrai but. En revanche, le « devoir de jouir » (du moins tel qu’on l’entend aujourd’hui) est une nécessité violente ou une manipulation, et donc une aliénation, qui est la conséquence du péché : elle se situe au fondement du vice, qui est la négation même de la liberté. TH pense que « autrefois, la norme était donnée par une institution, principalement religieuse, aujourd’hui, elle est donnée par l’industrie pornographique »[47]. Peut-être. Mais il ne s’agit pas du tout de la même « norme ». La première est l’expression de la loi de Dieu, et elle est la sauvegarde de la liberté, tandis que la seconde n’est que la loi de l’esclavage du péché. Englober les deux dans la même réprobation, c’est méconnaître la vraie nature de la liberté.
6. Comment réagir ?
36. Il est toujours très difficile de juger les intentions, car nous les connaissons mal. Il est donc vain de se demander si le personnalisme de TH relève d’une conviction personnelle et d’une vraie réflexion, ou seulement d’une stratégie. S’agit-il d’une philosophie ou d’une simple offensive ? Bien fin qui pourra le deviner. Quant à la démarche, elle est surtout d’une très grande naïveté. Nous n’avons pas affaire, c’est bien évident, à quelqu’un de pervers, mais à quelqu’un qui essaye de conserver un minimum de santé au milieu de l’épidémie qui nous gangrène de partout. Il y a donc chez TH, au moins quelque part, un bon réflexe de survie et une saine colère. Saine, mais malheureusement point sainte. Car les lacunes sont bien réelles et importantes. Même si elles peuvent avoir l’excuse de l’ignorance (ce que nous pouvons présumer, à défaut de pouvoir le vérifier), elles restent ce qu’elles sont et elles nous obligent à dire que la réflexion de TH est insuffisante. Et même plus encore : qu’elle n’est pas exempte d’un certain danger.
37. Nous retrouvons ici le même genre de démarche que dans la théologie du corps, à ceci près que le personnalisme qui sert de base à toute la réflexion n’a plus rien de chrétien. Chez Yves Semen et ses émules, la carence philosophique reste quand même en partie neutralisée dans ses effets immédiats par la référence à une autre morale, morale personnaliste, certes, morale faussée dans ses fondements modernistes, mais morale tout de même, dont les effets se font sentir sur le plan pratique. La théologie du corps véhicule encore la référence aux commandements de Dieu, aux lois de l’Église, avec l’idée d’un devoir auquel nous sommes tenus en conscience, avec une certaine idée du péché et de la grâce. Jean-Paul II insistait sur l’urgence d’une « paternité responsable ». Tout cela est faussé, comme nous l’avons montré, car tout part de la personne, au lieu de partir de la nature. Mais finalement, tout aboutit encore à un certain ordre moral, et tout aboutit aussi encore à une certaine idée de Dieu. Ce qui explique que la théologie du corps demeure à mi-pente sur le chemin de la décadence.
38. Chez TH, il ne reste plus grand chose de tout cela. L’idée même de morale a disparu, et avec elle l’idée de loi, l’idée de devoir. Tout est centré sur la liberté et sur la personne, c’est à dire que tout part de la personne et tout y revient, par la médiation de la liberté. Il n’y a plus aucun ordre moral. N’oublions pas quelle est l’idée maîtresse de TH : « Je travaille surtout à enfin réaliser le plan initial de la révolution sexuelle : vivre librement sa vie d’homme et de femme ». Alors ? …
39. L’aspect positif du livre de Thérèse Hargot (s’il fallait lui en trouver un) est qu’elle « déconstruit les déconstructeurs »[48]. Elle dénonce les contradictions internes au système, pour en ébranler la crédibilité. Elle suscite des questions pertinentes, qui n’ont rien de médiatiquement correct. De ce point de vue, et de ce point de vue seulement, le livre comporte un aspect certainement bienfaisant. Oui, sans doute : il est décapant.
40. Mais prenons garde, car le livre présente un danger tout aussi certain. Et il est tout un, dans la lecture que nous en faisons. C’est pourquoi, nous n’irons pas jusqu’à nous réjouir, comme le fait La Nef de ce que Thérèse Hargot « ouvrira des horizons à contre-courant de la culture médiatique ». Les horizons qu’elle nous ouvre sont malheureusement ceux d’une sinistre impasse, l’impasse d’un personnalisme qui ne compte plus grand chose de moral et où les références vraiment chrétiennes et catholiques sont totalement absentes. La « sexologie » de Madame Jacob ne s’intéresse qu’au bien-être et à l’épanouissement humain des personnes, à travers leur sexualité. C’est peut-être de l’art pour l’art, mais ce n’est plus de la morale. Personnalisme amoral, donc qui n’évite pas le risque d’en redevenir immoral, par un autre biais. Sur Radio Notre-Dame, Thérèse Hargot a avoué qu’elle n’était pas à l’aise avec le « discours moralisateur de l’Église ». Selon elle, ce discours provoquerait des tensions, qui elles-mêmes créeraient des névroses et donc des passages à l’acte encore plus fréquents, en matière de pornographie par exemple. Même si elle peut paraître choquante, la réaction de dame Hargot n’a ici rien de bien étonnant. Quelqu’un qui n’a pas la foi ne peut pas comprendre comment il est possible de tenir devant les exigences mises si haut par la morale catholique, qui est la morale de l’Évangile et donc celle de la charité. En effet, il est possible de répondre aux exigences de cette morale, mais cette possibilité découle d’un moyen, et ce moyen c’est la grâce, c’est le secours tout-puissant que le Fils de Dieu nous a mérité. Faute de croire à l’existence de ce secours, on ne peut qu’être mal à l’aise, en effet. Mais c’est le malaise de Félix et Drusille devant saint Paul (Actes, XXIV, 25).
41. Même s’il est décapant, ce livre est donc insuffisant et même, il faut bien le dire, dangereux. Et il est dangereux, parce qu’il est insuffisant. Vouloir se couper de l’éclairage que nous donne l’Église, vouloir échapper à sa direction maternelle, c’est se priver des vraies solutions et de la vraie intelligence du problème. La sexologie ne peut pas exister en tant que philosophie. Ce qui existe, c’est la médecine, qui est l’art de préserver la santé des organes. Et ce qui existe aussi, c’est la théologie morale, qui est la science à laquelle il revient de décider quel est le bon usage de ces organes. La sexualité est l’usage du mariage et le mariage est une institution divine. C’est pourquoi, il appartient à l’Église de définir les principes d’après lesquels doit se régler une authentique « sexualité ». Ces principes sont ceux de la morale surnaturelle, ceux que le Christ nous a révélés. C’est pour avoir délibérément voulu les ignorer que Thérèse Hargot s’est privée – et prive ses lecteurs – des vraies réponses.
42. Que son livre circule et puisse ébranler chez quelques-uns les certitudes trop tranquilles de l’après Mai 68 est une chose. Mais qu’il soit le nouveau bréviaire de ceux qui veulent « choisir la vie » en est une autre. Cette lecture, pas si spirituelle que cela, n’est donc pas forcément à mettre entre toutes les mains. Et on lui préfèrera toujours l’irremplaçable Catéchèse catholique du mariage du Père Barbara.
Abbé Jean-Michel Gleize, professeur de théologie au séminaire d’Ecône
Source : Courrier de Rome n°633
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand.[↩]
- « Thérèse Jacob-Hargot : La pornographie impose ses codes aux adolescents », entretien avec Stéphane Kovacs.[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié.[↩]
- « Thérèse Hargot : Quel féminisme transmettons-nous à nos filles ? » par Hélène Bonhomme.[↩]
- Rubrique Portrait : « Thérèse Hargot. Au cœur de l’intime », par France Lebreton.[↩]
- « La contraception, le plus grand scandale du siècle ! », entretien vidéo avec Alexandre Meyer.[↩]
- « Thérèse Hargot : Aujourd’hui, la norme, c’est le devoir de jouissance », propos recueillis par Sixtine Fourneraut.[↩]
- « Thérèse Hargot : Education sexuelle : on est passé à côté de l’essentiel », entretien avec Marie-Christine Vidal.[↩]
- « Thérèse Hargot : Je veux rétablir la vérité face au mensonge de la libération sexuelle », propos recueillis par Aude de Beaux-Songes.[↩]
- « Elle est partout. Thérèse Hargot a sorti Une Jeunesse sexuellement libérée il y a quelques semaines, et depuis cette jeune sexologue écume plateaux et journaux pour affirmer que la sexualité des jeunes ne serait pas beaucoup plus libérée qu’avant mai 1968. Mais partout, on oublie de pointer son puritanisme savamment dissimulé sous un prétendu néo-féminisme » (par Adélaïde Ténaglia).[↩]
- « Limites de la sexologie » par l’abbé Laurent Spriet.[↩]
- « Quelques réserves sur l’ouvrage de Thérèse Hargot », par Michel Janva.[↩]
- Pour reprendre la remarque de M‑P Genecand, dans Le Temps : « Thérèse Hargot dit des choses fortes ».[↩]
- Organisé, à l’issue de la première partie du Synode sur la famille, par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, et les conseils pontificaux pour la Famille, pour le Dialogue interreligieux et pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens, ce Colloque a regroupé des représentants religieux et des universitaires venus du monde entier. Le Pape François a lui-même prononcé le discours d’ouverture après un mot d’accueil du préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le cardinal Müller. Parmi les intervenants venus du monde entier figuraient l’ancien grand rabbin du Royaume-Uni, Lord Jonathan Sacks, le primat de l’Église anglicane du Nigéria Nicholas Okoh, l’universitaire chiite iranien Rasoul Rasoulipour, le juriste marocain Abdelouhab Maalmi, professeur à l’université de Bordeaux, et bien sûr les responsables des dicastères concernés ainsi que l’archevêque de Philadelphie, Mgr Charles Chaput.[↩]
- Conférence organisée par les AFC du diocèse (Associations familiales catholiques) : « Thérèse Hargot, sexologue : Notre sexualité est-elle vraiment libérée ? ». Jeudi 31 mars, 20h30, Angers. Annonce parue sur le site du diocèse d’Angers.[↩]
- Conférence organisée par le CCIF (Centre catholique de Consultation et d’Information Familiale) pour présenter le livre Une jeunesse sexuellement libérée (ou presque), le mardi 7 juin, à 20h15 au Grand Séminaire de Lorraine. Annonce parue sur le site du diocèse de Metz.[↩]
- « Thérèse Hargot : Je veux rétablir la vérité face au mensonge de la libération sexuelle », propos recueillis par Aude de Beaux-Songes.[↩]
- Respectivement intitulés : I : « La tyrannie du porno » ; III : « Être ou ne pas être homosexuel, telle est la question à ne pas se poser » ; V : « Mon corps m’appartient, à vous aussi ».[↩]
- Respectivement intitulés : IV : « Sortez couverts ou l’éducation aux dangers » ; VI : « Contraception, je t’aime, moi non plus » ; VII : « Avortement : service après-vente de la contraception ».[↩]
- Respectivement intitulés : II : « Le couple : la nouvelle idole des jeunes » ; VIII : « Retour des stéréotypes de genre au temps de l’égalité » ; IX : « Parent copain, parent absent » ; X : « Être une femme libérée, tu sais ».[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « Si la norme a changé, notre rapport à la norme lui est le même : nous restons dans un rapport de devoir. Nous sommes simplement passés du devoir de procréer à celui de jouir. Du il ne faut pas avoir de relations sexuelles avant le mariage à il faut avoir des relations sexuelles le plus tôt possible. Autrefois, la norme était donnée par une institution, principalement religieuse, aujourd’hui, elle est donnée par l’industrie pornographique »[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « L’affichage du coming out interroge beaucoup les adolescents qui se demandent comment fait-il pour savoir s’il est homosexuel, comment savoir si je le suis ? L’homosexualité fait peur, car les jeunes gens se disent si je le suis, je ne pourrais jamais revenir en arrière. Définir les gens comme homosexuels, c’est créer de l’homophobie »[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « Il ne faut pas apprendre aux adolescents à s’épanouir sexuellement. Il faut apprendre aux jeunes à devenir des hommes et des femmes, les aider à épanouir leur personnalité. La sexualité est secondaire par rapport à la personnalité. Il faut créer des hommes et des femmes qui puissent être capables d’être en relation les uns avec les autres. Il ne faut pas des cours d’éducation sexuelle, mais des cours de philosophie ! »[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « La sexualité n’est pas une identité. Ma vie sexuelle ne détermine pas qui je suis »[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016 : « Je pense qu’il faut remplacer le verbe être par le verbe avoir pour ne pas figer l’individu et surtout l’ado dans une identité définitive. Pour moi, avoir une attirance homosexuelle ne fait pas d’un individu un homosexuel. Encore une fois, la sexualité est une des facettes de la personnalité, elle ne la résume pas »[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016 : « Oui, pour moi, la pilule est une des grandes escroqueries de la révolution sexuelle ! Je trouve scandaleux que des femmes en bonne santé soient obligées de prendre un médicament pour soi-disant garantir leur liberté ».[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « Le sida, les MST, les grossesses non désirées : nous avons grandi, nous, petits enfants de la révolution sexuelle, dans l’idée que la sexualité était un danger. A la fois on nous dit que nous sommes libres et en même temps que nous sommes en danger. On parle de safe-sex, de sexe propre, on a remplacé la morale par l’hygiène. Culture du risque et illusion de liberté, tel est le cocktail libéral qui règne désormais, aussi, dans la sexualité. Ce discours hygiéniste est très anxiogène, et inefficace : de nombreuses MST sont toujours transmises ».[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016 : « Les effets secondaires sont d’une gravité qui peut aller jusqu’à la mort et, avant cette extrémité, il est établi que la pilule réduit la libido et la fertilité ».[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016 : « Il existe des méthodes naturelles basées sur la connaissance du corps qui sont tout aussi efficaces et qui donnent les pleins pouvoirs aux femmes sans l’intervention du médecin prescripteur et de l’industrie pharmaceutique ».[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016 : « Je critique moins la pilule que le discours féministe et médical qui entoure la contraception. On en a fait un emblème du féminisme, un emblème de la cause des femmes. Quand on voit les effets sur leur santé, leur sexualité, il y a de quoi douter ! Ce sont elles qui vont modifier leurs corps, et jamais l’homme. C’est complètement inégalitaire. C’est dans cette perspective que les méthodes naturelles m’intéressent, car elles sont les seules à impliquer équitablement l’homme et la femme. Elles sont basées sur la connaissance qu’ont les femmes de leurs corps, sur la confiance que l’homme doit avoir dans la femme, sur respect du rythme et de la réalité féminines. Je trouve cela beaucoup plus féministe en effet que de distribuer un médicament à des femmes en parfaite santé ! En faisant de la contraception une seule affaire de femme, on a déresponsabilisé l’homme » ; « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016. Cf. p. 126–127 du livre. « Les femmes vantent les vertus d’une pilule diminuant leur puissance sexuelle et elles pensent naïvement que ça leur donne un pouvoir sur les hommes. D’ailleurs, je n’ai jamais compris comment parler de liberté dès lors que la pilule implique un lien de dépendance envers son prescripteur, le médecin, et le propriétaire, l’entreprise pharmaceutique ».[↩]
- Cf. p. 130–132 du livre. « C’est le point crucial : la perception de l’enfant comme une menace pouvant déséquilibrer le bien-être d’une femme de par son extrême dépendance issue de son extrême fragilité. C’est cela l’insupportable : être soumis à un autre. […] La peur de perdre son indépendance est plus forte que toutes les autres dans notre société individualiste où liberté rime aussi avec égoïsme, l’égoïsme étant la condition de la préservation de son bien-être ».[↩]
- Cf. p. 91–92 du livre[↩]
- Cf. p. 159–160 du livre. « Sans le féminisme combat-tant pour le droit à l’avortement et à la contraception, le raisonnement idéologique de la gestation pour autrui n’aurait pas été possible. Il a donné ses armes et ses outils à une logique libérale incontrôlable. Pour en arriver là, il a fallu opposer puis détacher le corps de l’esprit, dénigrer les expériences charnelles au profit de l’expression toute puissante de la volonté. En réduisant la reproduction à son caractère animal, niant l’expérience humaine et spirituelle qu’elle porte en germe et peut devenir. Elle a perdu son caractère sacré. […] L’aboutissement de ce féminisme qui est passé à côté de l’essentiel se retourne aujourd’hui contre les femmes elles-mêmes : la fascinante victoire de la volonté laisse entrevoir un monde déshumanisé où la valeur d’une personne ne dépend que de son utilité ».[↩]
- Cf. p. 60–61 du livre. « Ce que j’observe en consultation, c’est que les problèmes de couple sont en fait pour la quasi-totalité des problèmes personnels qui rejaillissent sur le couple. C’est un accompagnement individuel dont l’un et l’autre ont besoin pour être capables d’aimer et de se laisser aimer. […] La véritable question est celle de l’identité : Qui suis-je ? Nous devons les aider à trouver une réponse à cette question, à développer leur personnalité, à déployer leur individualité pour qu’ils soient capables, un jour, qui sait – parce que ce n’est pas une fin en soi – de vivre une relation conjugale durable. Celle-ci requiert l’existence de trois entités distinctes : toi, moi et notre couple, pour être capable de vivre son désir de communion et ne pas rester dans la fusion ».[↩]
- Cf. p. 178–179 du livre. « A force de belles idées sur l’égalité enter les hommes et les femmes, nous sommes tombés dans l’égalitarisme idéologique. Ce souci d’indifférencier le traitement fait aux garçons et aux filles en espérant que la culture et l’éducation puissent les libérer de ces modèles oppressants a tout faussé et est devenu lui-même oppressant. Le contraire est arrivé, on les a angoissés ; ils n’ont jamais autant été aliénés à leur caricature ».[↩]
- Cf. p. 192–194 du livre. « L’enfant n’a pas besoin que ses parents lui parlent de l’amour. Il a besoin de se sentir aimé pour s’assurer qu’il a une raison d’exister, qu’il mérite d’être respecté, qu’il a une dignité ».[↩]
- Cf. p. 208 : « Nous héritons d’un féminisme qui se retourne aujourd’hui contre les femmes elles-mêmes parce qu’au lieu de modifier la société patriarcale, il s’y est totalement soumis en encourageant les femmes à modifier leur propre corps afin de s’y adapter. […] Ce sont aux femmes à s’adapter à un monde d’hommes, régi par des hommes, pensé pour des hommes. Pour y arriver, a‑t-on d’autres solutions que de contourner temporairement la différence des sexes, c’est à dire cette capacité à engendrer la vie, puisque c’est elle qui impose des limites ? » ; p. 209 : « Servir la cause des femmes ne devrait-il pas aussi consister à valoriser ce qui n’est pas de l’ordre de l’efficacité, de la performance, de la productivité ; ce qui est de l’ordre de la relation, de l’attention aux autres et des soins, brefs, de toutes ces choses nécessaires à l’humanité ».[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016.[↩]
- « Thérèse Hargot : Education sexuelle : on est passé à côté de l’essentiel », entretien avec Marie-Christine Vidal dans Le Pèlerin du 4 février 2016.[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016.[↩]
- Adélaïde Ténaglia dans Inrockuptibles du 2 mars 2016.[↩]
- Pour reprendre la remarque de M‑P Genecand, dans Le Temps : « Thérèse Hargot dit des choses fortes ».[↩]
- « L’illusoire liberté sexuelle des adolescents » par Marie-Pierre Genecand dans Le Temps du 5 avril 2016.[↩]
- « Thérèse Hargot : La libération sexuelle a asservi les femmes » par Eugénie Bastié dans Le Figaro du 5 février 2016[↩]
- Ibidem.[↩]
- « Limites de la sexologie » par l’abbé Laurent Spriet dans La Nef n° 280 d’avril 2016.[↩]