Lettre d’information de la Fraternité Saint-Pie X
DICI numéro 454
Éditorial de M. l’abbé Alain Lorans
Flagrant déni d’incohérence
Le 10 février 2025, François a adressé aux évêques des États-Unis une lettre dénonçant « le lancement d’un programme de déportations massives » qui « se déroule aux États-Unis », du fait du président Donald Trump. Le pape y manifestait son « désaccord » et invitait les catholiques américains à faire de même, en vivant « en solidarité et fraternité ».
Le principal conseiller de Donald Trump sur la question migratoire, Tom Homan, lui-même catholique, a ironiquement fait remarquer : « Le pape veut nous attaquer parce que nous assurons la sécurité de nos frontières ? Mais il y a bien un mur autour du Vatican, n’est-ce pas ? », rappelant que des remparts protègent la basilique Saint-Pierre contre les incursions étrangères, depuis le IXe siècle – une protection récemment renforcée par des mesures législatives très strictes.
En effet, le décret n° DCCX du 19 décembre 2024 prévoit que « tout non-résident qui entre sur le territoire de l’Etat de la Cité du Vatican où le libre accès n’est pas autorisé, sans détenir le permis prescrit délivré par le Gouvernorat, conformément aux articles 9 et suivants de la Loi sur la citoyenneté, est soumis à une amende de 10 000 à 25 000 euros », et qu’une « peine d’un an à quatre ans d’emprisonnement et une amende allant de 10 000 à 25 000 euros sont infligées à quiconque pénètre sur le territoire de l’Etat de la Cité du Vatican avec violence, menace ou tromperie ». [Voir DICI n° 453, février 2025, pp. 8–9]
Et pourtant sur la place Saint-Pierre, depuis le 29 septembre 2019, se dresse une sculpture en bronze, grandeur nature, dénommée Les anges inconscients, en référence au verset : « N’oubliez pas l’hospitalité ; quelques-uns en la pratiquant ont, à leur insu, logé des anges » (Hb 13, 2). Cent-quarante migrants se tiennent côte à côte, blottis sur un radeau, et du centre de ce groupe émergent les ailes d’un ange… Un angélisme philanthropique contredit, de manière flagrante, par le juridisme romain.
Comment concilie-t-on au Vatican la sculpture, le décret et la lettre du pape aux évêques américains ? On a l’impression que l’accueil du prochain est inconditionnel médiatiquement, à condition que ce prochain ne soit pas trop proche géographiquement. Le pape demande d’ouvrir les frontières des États-Unis, mais il ferme les siennes aux illégaux.
C’est aussi contradictoire, mutatis mutandis, que de dire : « A l’occasion de l’Année sainte tous doivent être reçus à bras ouverts, todos ! todos ! ». Tous, sauf les prêtres et fidèles catholiques attachés à la Tradition bimillénaire. Un mur est dressé entre l’Église de toujours et celle qui se réclame de Vatican II. Traditionis custodes tient à l’écart les défenseurs de la messe tridentine décrétée illégale dans la Rome d’aujourd’hui.
Mais, un jour que Dieu connaît, se réalisera vraiment le souhait de saint Paul : « N’oubliez pas l’hospitalité ; quelques-uns en la pratiquant ont, à leur insu, logé des anges ». Ce jour-là, un pape que Dieu connaît aussi, accueillera à bras ouverts la Tradition bimillénaire.
Source : DICI n° 454, mars 2025