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La sainte messe n’est pas un spectacle

Tout le monde sait que la sainte messe n’est pas un spec­tacle, mais après ces semaines de confi­ne­ment à assis­ter à une messe en ligne, avec des prêtres en 2D, il est peut-​être bon de se sou­ve­nir de la sain­te­té de la liturgie.

On ne peut conce­voir l’Église catho­lique sans sa litur­gie, et on ne peut conce­voir la litur­gie sans le sacri­fice de la messe. La messe ordonne toute la litur­gie et toute la vie de prière de l’Église.

Au sujet de prêtres en pan­ta­lon et che­mise se pré­pa­rant à dire la nou­velle messe, le saint Padre Pio avait pleu­ré. Vois-​tu ces bou­chers ? avait-​il souf­flé à un frère qui lui deman­dait pour­quoi il pleu­rait. Scandalisé par les relâ­che­ments dans le res­pect dû au saint sacri­fice qu’avait intro­duits la litur­gie du concile Vatican II, il avait aus­si eu ces paroles : Nous assis­tons à la sainte messe car elle est le Calvaire même sur lequel Jésus nous a rache­tés ; ne des­cen­dons pas de cette sainte mon­tagne lorsque la sainte messe est ter­mi­née comme si nous avions assis­té à un spec­tacle quel­conque, mais imi­tons les saintes femmes, ain­si qu’il est écrit dans l’Évangile, qui des­cen­dirent de cette mon­tagne en se frap­pant la poi­trine après que Jésus eut expi­ré. Si le prêtre ne peut être à l’autel le fonc­tion­naire du culte pré­si­dant l’assemblée, le fidèle ne peut consi­dé­rer la messe comme un spectacle.

Comprendre ce qui se passe à l’autel

Monseigneur Lefebvre, expri­mant la grâce spé­ciale de la Fraternité à ses sémi­na­ristes, disait : La litur­gie a été faite par Notre-​Seigneur lui-​même, ce n’est pas l’Église qui a inven­té la litur­gie, c’est Notre-​Seigneur qui nous a don­né le sacri­fice de la messe. Sans doute, il y a des rites dif­fé­rents, ça n’a pas d’importance du tout les rites dif­fé­rents : il y a des rites orien­taux, il y a des rites même occi­den­taux qui ne sont pas tous sem­blables ; mais ce qui est abso­lu­ment indis­pen­sable, ce qui est abso­lu­ment essen­tiel dans tous les rites, pour qu’ils soient vrai­ment des rites catho­liques, c’est qu’il y ait la réa­li­té du sacri­fice de la messe, que tout exprime le sacri­fice de la messe, le sacri­fice de la Croix, conti­nué, repro­duit, renou­ve­lé sur le saint autel ! 

Assister à la messe est alors un évè­ne­ment fon­da­men­tal dans la vie chré­tienne. Toute la vie de l’Église est atta­chée à cela : et c’est pour­quoi Luther a vou­lu détruire cela, il n’a pas vou­lu de sacri­fice. C’est aus­si pour­quoi le démon s’acharne après la des­truc­tion du sacri­fice pour en faire un repas, en faire une com­mu­nion, en faire une Eucharistie… Il ne veut plus du sacri­fice, parce que toutes les grâces que nous rece­vons viennent du sacri­fice de la Croix et toute la spi­ri­tua­li­té de l’Église vient du sacri­fice de la Croix. S’il n’y a plus la spi­ri­tua­li­té du Sacrifice, s’il n’y a plus la spi­ri­tua­li­té d’oblation comme vic­time, il n’y a plus d’Église catho­lique qu’est-ce que vous vou­lez, c’est fini ! 

Le Christ est bien évi­dem­ment le seul vrai prêtre ; chaque matin, à chaque messe, le prêtre, ordon­né pour per­pé­tuer le sacri­fice de la Croix d’une façon non san­glante, ne dit pas Ceci est le Corps de Notre Seigneur Jésus-​Christ, mais dit : Ceci est Mon Corps. Ses lèvres et sa langue sont emprun­tées par Notre-​Seigneur qui est le vrai prêtre… lui n’est qu’instrument du Rédempteur. Le prêtre de Jésus doit confor­mer sa vie à cet acte fon­da­men­tal. Mais le fidèle qui assiste à la messe doit aus­si com­prendre ce qui s’y passe. Le Christ donne l’exemple du sacri­fice que le fidèle doit repro­duire en déve­lop­pant cet esprit sur­na­tu­rel d’oblation avec Notre-​Seigneur dans sa vie.

Historiquement, le saint sacri­fice de la messe, remar­quait Monseigneur, est deve­nu un peu secon­daire dans la dévo­tion sacer­do­tale et dans la dévo­tion des fidèles. Il sem­blait qu’on avait presque plus de dévo­tion à aller à une béné­dic­tion du Saint-​Sacrement que d’assister à une sainte messe… la beau­té des chants, l’ambiance à l’exposition du Saint-​Sacrement, excitent un peu plus la dévo­tion sen­sible très aimée des fidèles… Il ne fau­drait pas qu’ils en oublient la gran­deur et l’importance du saint sacri­fice de la messe. Le sacre­ment de l’Eucharistie vient du saint sacri­fice de la Croix, vient du sacri­fice de la messe… La pré­sence de Notre-​Seigneur dans l’Eucharistie, c’est la pré­sence de la vic­time, vic­time qui s’offre tou­jours et qui s’est offerte à la Croix… cer­tai­ne­ment que c’est une nour­ri­ture – mais nous nous nour­ris­sons de la vic­time qui a été offerte, de Notre-​Seigneur sur la croix. 

L’autel de notre chapelle nous manque-t-il ?

En excluant la réa­li­té du Sacrifice, le Nouvel ordo a éva­cué cette pos­si­bi­li­té du divin dans notre vie, cette pos­si­bi­li­té de por­ter à notre tour la Croix de Jésus avec Jésus. Et ce sacré qui exis­tait autre­fois dans le minis­tère du sacri­fice est deve­nu tout dou­ce­ment un repas : éva­cué le Sacrifice, éva­cuée la Croix de Notre Seigneur.

Habemus altare ! Nous avons un autel ! s’écrie saint Paul. J’espère que l’autel de notre cha­pelle vous manque, car cela veut dire que vous avez com­pris ce qu’est la vie chré­tienne. Avoir un autel est un ines­ti­mable bien­fait de Dieu. La nature de l’homme exige, nous dit le concile de Trente, qu’il y ait un sacri­fice visible comme centre de toute la reli­gion. Nous avons un autel ! nous avons un sacri­fice ! nous avons une vic­time, qui résume en elle toute la prière de l’homme-Dieu pour son Père et tout l’amour de Dieu pour les hommes.

Ab. V. Bétin, prieur du prieu­ré de Lyon (69)

Source : L’aigle de Lyon n°358 de mai 2020