N° 15 – Janvier 2008
hère Madame,
Vous avez entendu quelquefois dire et prêcher que dans le paradis terrestre, avant le péché, toutes choses étaient parfaitement en place. Dans cette petite union humaine qui se composait de l’homme et de la femme, qui était déjà si grande, qui était déjà la société humaine, tout était en place. Dans nos premiers parents eux-mêmes, tout était en place à l’intérieur de chacun d’eux : les facultés inférieures obéissaient aux facultés supérieures, la chair était soumise à l’esprit, la sensibilité à la raison.
Le péché est venu y mettre le désordre. On n’a plus obéi à Dieu, et logiquement, toute obéissance a disparu, à l’extérieur comme à l’intérieur. Si vous voulez la rétablir dans la famille, il faut avoir recours à Dieu. Si vous voulez avoir une influence, il faut la rattacher à l’autorité première sans laquelle les puissances inférieures n’ont même plus de nom. Saint Paul nous dit que toute paternité est nommée par rapport à la paternité divine. En ne respectant pas ce rapport avec la paternité de Dieu, les noms sont vides de sens. Il en va de même pour la maternité.
L’enfant sent très bien cela, les inférieurs de toute catégorie le sentent extrêmement bien. Quand des personnes qui ne croient pas en Dieu les commandent, elles ont l’impression de se trouver devant des mots vides de sens. Les mots véritables sont ceux qui signifient quelque chose, qui ont un sens.
Saint Paul a exprimé le fond de cette doctrine dans des mots simples : « Tout pouvoir vient de Dieu ». Tout ce qui est et toutes les choses qui existent ont été ordonnés par Dieu Lui-même. C’est pourquoi, si vous supprimez ce lien logique en vertu duquel tout pouvoir vient de Dieu et retourne à Dieu, il n’y a plus rien, plus de pouvoir, il n’y a plus que la force. Or même dans le cercle étroit de la famille, il peut parfois se rencontrer des cas pénibles où l’on ne le respecte plus, on ne craint que la force, il n’y a plus que la force qui commande et se fait obéir servilement. Il y a des enfants qui ne font pas ceci ou cela uniquement parce qu’ils ont peur. Dès qu’ils n’ont plus peur, ils se disent :« pas vu, pas pris ».
Au sujet du 4ème commandement : « Honore ton père et ta mère », rappelons-nous la grande question, la revendication presque douloureuse de Dieu dans l’Ancien Testament, quand Il s’écrie : « Si je suis Père, où est donc l’honneur qui m’est dû ? Où est mon honneur de Père ? » La paternité de tout père de famille découle de la Paternité de Dieu ; il en est de même pour la maternité qui tire son origine de la paternité. Saint Paul nous l’enseigne :« C’est cette paternité divine qui donne à toute autre paternité et son nom et sa réalité, au ciel et sur la terre »(Ephésiens – ch. 3–15).
J’insiste sur ce sujet car il me semble qu’aujourd’hui ce rôle premier du père et de la mère est pris parfois à la légère. Et c’est pour cette raison que l’on néglige, dès le plus jeune âge, d’apprendre à l’enfant le respect et l’honneur qu’il doit rendre à ses parents et, plus tard, vis-à-vis de Dieu : Il suffit de constater l’attitude des enfants et même de parents, ne serait-ce que dans les églises ou chapelles durant la Sainte Messe ! Bien des choses seraient à dire à ce sujet.
Pour apprendre à votre enfant à vous obéir, et ce, tout petit (je me permets d’insister !), il doit d’abord vous respecter. Si l’enfant ne respecte pas toujours assez son père (et sa mère), c’est souvent parce que le père ne se respecte pas assez lui-même comme père. Combien de fois je vois des pères de familles jouer comme des « gamins » avec leurs enfants. Certes, il est bon que le père s’intéresse aux occupations, aux jeux de sa progéniture, mais sans jamais oublier qu’il reste le père auquel l’enfant doit le respect et même ne pas hésiter à le remettre à sa place si celui-ci dépasse la limite ! Cela suppose que le père doit rester maître de lui et ne pas se laisser entraîner par la passion ! En effet, si l’enfant n’a pas une idée assez haute et assez juste de son devoir envers son père – et aussi envers sa mère – c’est que le père et la mère n’ont peut-être pas assez une idée très haute et très juste de leur dignité, ou plus exactement, de la majesté de ce titre de père et de mère. Donc, respect des parents pour eux-mêmes (et réciproquement entre les époux !), et des enfants à l’égard des parents, mais aussi respect des parents envers les enfants. De ce respect il faut aussi parler. Respect, non pas défiance, respect de ces petits êtres, de ces petits yeux qui voient tout, de ces petites oreilles qui entendent tout, de ces petites intelligences qui s’ouvrent comme des fleurs, et qui souvent comprennent ou du moins soupçonnent plus de choses et beaucoup plus vite que vous ne le pensez.
Un grand homme disait : « On doit à l’enfant un suprême respect ». Il semble que plus l’enfant est petit, plus le respect doit être grand. C’est ce que Saint Augustin nous dit de Dieu : « C’est dans les plus petites choses, qu’Il est le plus grand ». Pensons à l’Enfant-Jésus et à sa divine Présence dans l’Eucharistie.
C’est de vous, Chère Madame, que votre enfant apprendra ce respect. De quelle façon ? N’est-ce pas de vous qu’il apprendra à parler ? Comment vous entend-il parler avec votre mari, son père qui représente l’autorité paternelle ? Votre manière de parler est-elle douce et respectueuse, ou pleine d’irritation, d’impatience, de colère,….que sais-je ? Si très jeune, il ne comprend pas le sens des mots, il saisit l’intonation, la hauteur de voix, etc,.…. Comment vous entend-il parler avec ses frères et sœurs aînés ? Vous n’imaginez peut-être pas à quel point c’est important. C’est vous, par votre comportement, qui lui apprenez à répondre « gentiment » ou « avec colère ».
Parlez-lui avec une douce fermeté, c’est-à-dire, demandez-lui avec bonté mais sans céder à son caprice, et sans jamais revenir sur ce que vous lui demandez. Il faut qu’il comprenne que c’est vous qui le dirigez et non pas lui. Votre fermeté doit lui inspirer le respect et la confiance. Votre faiblesse à lui accorder ce qu’il demande (pour avoir « la paix ! ») vous attirera le mépris (au moins intérieurement quand il est petit ; en grandissant, ce mépris s’exprimera par des réponses insolentes,….. qui viendront toutes seules dans son esprit, croyez-le bien !) et bientôt la méfiance.
Des parents qui se respectent et qui respectent leur enfant en voyant l’image de Dieu dans son cœur de petit baptisé, par leur exemple, lui enseignent comment il doit « se respecter » et « respecter » ses parents, d’abord dans leur manière de se parler, de répondre, de vivre,…..
En ce début d’année, regardons la Sainte Famille. Qui est le père ? Saint Joseph. Qui est la mère ? la Sainte Vierge Marie. Qui est le plus grand ? l’Enfant-Jésus. C’est Lui, le plus Grand de qui il est dit dans l’Evangile : « Et Il leur fut soumis ». Entendez bien : c’est Jésus, le Maître et Créateur de toutes choses qui est soumis à Ses créatures, parce qu’étant enfant, Il montre l’exemple de la soumission parfaite de l’enfant à ses parents. Tel est le modèle que nous devons mettre sous les yeux de nos enfants pour leur apprendre cette vertu si difficile à notre nature blessée par le péché originel : l’obéissance…
Je vous laisse avec cette belle prière de la famille chrétienne que je vous invite à réciter souvent :
« Seigneur Jésus-Christ qui avez, par votre soumission à Marie et Joseph, sanctifié la vie familiale
par la pratique d’admirables vertus, faites qu’aidés par eux et prenant modèle sur votre Sainte Famille, nous méritions d’être admis à partager éternellement sa compagnie ».
(à suivre)
Une Religieuse.