Les sœurs bénédictines du Monastère Notre-Dame-de-Toute-Confiance sont le pendant féminin de la branche masculine qui fleurit si joliment au monastère de Bellaigue. Implantée depuis plusieurs décennies à Saint-Loup (Lamairé), cette fondation religieuse a bénéficié l’an dernier de l’aide du district de Suisse pour se rapprocher de Bellaigue.
Le Rocher : Ma sœur, il y a un an, les fidèles du district de Suisse n’ont-ils pas répondu généreusement à votre demande d’aide pour votre déménagement à Perdechat ?
Mère Prieure : Oui, et je tiens à remercier les chers fidèles de Suisse qui ont été si généreux. En fait, nous n’avions pas compris tout de suite d’où venait un tel virement, il a fallu aller à la banque pour avoir plus de renseignements et ils nous ont juste dit : « Rickenbach ». Nous ne pouvions en croire nos yeux.
Avec une aide de 80’000.- chf, la Suisse a battu tous les records, que Dieu lui rende au centuple ! Nous devons la grâce de notre déménagement à la bonté de Dieu et à la Providence qui s’est manifestée si clairement depuis l’achat de Perdechat près de Bellaigue et durant ces trois années de travaux, au milieu de bien des difficultés.
Grâce à Dieu, au dévouement inlassable de nos frères bénédictins et grâce aux fidèles, qui sont les instruments de Sa grande Bonté, nous voilà arrivées au but, qui était de nous installer à proximité des moines de Bellaigue.
Le Rocher : Arrivées au but, certes, mais j’imagine qu’un tel événement ne se produit pas sans quelques péripéties. Pouvez-vous nous raconter votre déménagement ?
Mère Prieure : Lors de sa visite à Lamairé le 30 mai 2008, Mgr de Galarreta nous avait dit avec force : « Il faut partir fin août ! ». Nous avons obéit avec joie et organisé le départ. La départ étant fixé, les bras se trouvent plus allègres pour remplir les cartons. Le camion commandé depuis deux mois est arrivé le lundi 25 août 2008. Tous les meubles du monastère attendaient dehors, sous un beau soleil, l’honneur d’être embarqués pour une si belle aventure. Le chargement s’est poursuivit jusqu’à 11h du soir. Le lendemain fut une journée de ménage, de rangement et de grand feu. Il restait cependant encore la moitié des affaires à emporter : le camion devra donc revenir. La journée s’est achevée une fois encore peu avant minuit.
Le Rocher : Le mobilier étant dans le camion, j’imagine qu’il y eut ensuite le départ des religieuses ?
Mère Prieure : En effet, nous sommes parties le mercredi 27 août, laissant le monastère à demi plein, une camionnette en panne et les clés aux parents et amis dévoués venus nous aider à déménager. Nous étions invitées à faire halte à Ruffec, au noviciat des sœurs de la FSSPX, pour le déjeuner. L’accueil y fut chaleureux : les sœurs nous ont chanté la polyphonie « dans le cœur de l’Eglise ma Mère je serai l’Amour ». Cette amitié entre communautés de la Tradition est précieuse et bien consolante dans la crise actuelle.
Le Rocher : C’est d’ailleurs une autre communauté religieuse de la Tradition qui occupe désormais après vous la maison de Laimairé ?
Mère Prieure : Oui, et c’est ainsi que perdure le caractère religieux de cette maison. A la faveur du déménagement, nous avons retrouvé un « inventaire du linge, de la literie et des meubles » de 1932, qui porte en première page : Lamairé, maison fondée en 1892 par M. le curé Linassier ; sœur Elise, + 1917, 1ère supérieure. Cette maison est ensuite devenue école du village, puis a été rachetée par les « Ancelles de Jésus Marie », puis par notre fondatrice en 1980. Depuis octobre 2008, elle est reprise par les sœurs de la Fraternité de la Transfiguration, à l’étroit à Mérigny.
Le Rocher : Vous n’avez fait qu’une halte à Ruffec ; le soir même vous arriviez à Perdechat ?
Mère prieure : Le soir, nous sommes arrivées à Bellaigue pour vêpres et nous avons pu saluer Dom Ange, de loin, par une prière à son tombeau, où nous lui demandâmes de bénir notre arrivée. De l’éternité, il semble commencer à tenir sa promesse : « Je vous serai désormais plus utile du haut du ciel que de la terre ». Le Père Matthieu nous donna sa bénédiction au moment du souper, qu’il trouva un peu original : un pique-nique dans la cour de l’hôtellerie. Mais nous, nous en avons l’habitude.
Le Rocher : Perdechat est une vieille maison à quelques kilomètres du monastère de Bellaigue, et comme toute vieille maison délabrée, elle n’a pas été bien chère à l’achat, mais… on s’en doute, la remise en état coûte beaucoup et en énergie et en finance. Les travaux étaient-ils fini à votre arrivée ?
Mère Prieure : Non, les travaux n’étaient pas achevés. Nous nous sommes donc installées pour quelques mois chez une généreuse dame de Virlet : une chapelle, une cuisine, deux dortoirs compartimentés en cellules grâce à un habile agencement de clous et de draps. Un peu serrées à douze, mais tout est grâce et occasion de rire ! Trois postulantes sont arrivées en septembre (une brésilienne, une néozélandaise, une française) et la gaieté était au rendez-vous.
Le Rocher : En clôture à Lamairé est enterrée votre fondatrice. Avez-vous aussi prévu le transfert de sa dépouille mortelle à Perdechat ? Quand aura lieu ce « déménagement » exceptionnel ?
Mère Prieure : Evidemment que ce transfert a été prévu. Il a d’ailleurs déjà eu lieu, le 24 septembre 2008. Cérémonie simple et touchante, à l’issue de laquelle notre Mère Gertrude de Maissin, depuis un champ un peu en surplomb du monastère, continue de veiller sur nous. C’est le jour du troisième anniversaire de ses funérailles, le 24 novembre 2008, que nous avons pu réellement déménager et recevoir ce si beau cadeau du bon Dieu : un monastère !
Le Rocher : Mgr de Galarreta, qui vous a fortement encouragées à déménager à Perdechat sans attendre la fin des travaux, est-il déjà venu vous visiter ?
Mère Prieure : Bien entendu. Il est venu le 27 septembre pour l’inauguration du monastère et la journée « portes ouvertes ». Il présida d’ailleurs une profession et une vêture. Dans son sermon, il encouraga l’assistance à désirer la sainteté, car « celui qui a le désir de la sainteté a déjà obtenu la plus grande partie de la victoire », et seule la sainteté pourra sauver l’Eglise de cette crise profonde. Le soir, le Père Matthieu bénit les lieux réguliers du monastère, mais il nous fallut repartir car il y avait encore trop de travaux (pas de chauffage, pas d’électricité, sauf celle du chantier, pas de portes dans la cave, etc.).
Le Rocher : Pour la belle fête de Noël, vous étiez donc définitivement installées dans votre nouveau monastère ?
Mère Prieure : Oui, et à l’occasion de ce premier Noël à Perdechat, nous avons déposé dans la crèche nos grands désirs de vie religieuse et les intentions de tous nos bienfaiteurs. Le lendemain, le 26 décembre, notre architecte est présente pour fixer le plan de l’église. Nous avons déposé le permis de construire et espérons commencer les travaux au printemps, si Dieu veut. Comme vous le voyez, l’aventure continue… et ce pour de nombreuses années !
Le Rocher : La vie monastique peut-elle y être véritable quand il y a encore tant de travaux et d’aménagement ?
Mère Prieure : Même si les travaux doivent se poursuivre encore longtemps pour établir un vrai monastère avec clôture, cloître et église, un grand pas est déjà fait, qui nous permet de mener notre vie contemplative, c’est-à-dire une vie tournée vers Dieu dans l’attitude de l’orante et chargée d’offrir à Dieu la louange et l’action de grâces au nom de toute l’humanité. Les Pères de Bellaigue continuent à nous desservir avec beaucoup de charité : messes, conférences, sermons, nous n’en finissons pas de remercier la Providence !
Remerciements de LPL à l’abbé Henry Wuilloud, Supérieur du District de Suisse et à l’abbé Claude Pellouchoud , rédacteur en chef, pour cet entretien qui a paru dans « » n° 58 de mars-avril 2009.