Démission de la papauté ?

Pape François

Dans une Note offi­cielle du 24 novembre 2024, le Pape François exige que le conte­nu du « Document final » du der­nier Synode soit accep­té comme fai­sant par­tie de son propre Magistère.

1. Dans une Note offi­cielle, signée par lui-​même ce dimanche 24 novembre 2024[1], le Pape François exige que le conte­nu du « Document final » du der­nier Synode soit accep­té comme fai­sant par­tie de son propre Magistère, c’est-​à-​dire de son ensei­gne­ment fai­sant auto­ri­té en tant que suc­ces­seur de Pierre.

2. « Le Document final », écrit-​il en effet, « fait par­tie du Magistère ordi­naire du Successeur de Pierre (cf. CE 18 § 1 ; CEC 892) et, en tant que tel, je demande qu’il soit accep­té. Il repré­sente une forme d’exer­cice de l’en­sei­gne­ment authen­tique de l’é­vêque de Rome qui pré­sente cer­taines nou­veau­tés, mais qui cor­res­pond en fait à ce que j’ai eu l’oc­ca­sion de pré­ci­ser le 17 octobre 2015, lorsque j’ai affir­mé que la syno­da­li­té est le cadre inter­pré­ta­tif appro­prié pour com­prendre le minis­tère hiérarchique ».

3. L’idée cen­trale de ce pro­pos, et qui explique tout le reste est très pré­ci­sé­ment indi­quée par cette der­nière phrase : « la syno­da­li­té est le cadre inter­pré­ta­tif appro­prié pour com­prendre le minis­tère hié­rar­chique ». Le Magistère du Pape doit donc se défi­nir comme le porte-​parole du sen­sus fidei du Peuple de Dieu, tel qu’il s’est mis à l’œuvre à l’occasion de l’Assemblée syno­dale. Et c’est en ce sens que le Document final du Synode doit être reçu comme fai­sant par­tie de ce Magistère du Pape : celui-​ci n’est plus que l’écho de celui-​là. Qu’en conclure, sinon que la pro­tes­tan­ti­sa­tion de la consti­tu­tion divine de l’Église, inau­gu­rée avec la nou­velle ecclé­sio­lo­gie de Vatican II, atteint ici son point d’orgue ? Désormais, plus grand chose ne sépare le minis­tère du suc­ces­seur de Pierre de celui des suc­ces­seurs de Luther et de Calvin.

4. Ce minis­tère porte-​parole ne se don­ne­ra plus pour tâche d’imposer au nom de Dieu les dogmes de la foi catho­lique. Il se fera l’arbitre des débats sus­ci­tés par l’Esprit, au sein des églises. François ne recule pas devant cette consé­quence : « Je reprends ici », écrit-​il encore dans la Note pré­ci­tée, « avec convic­tion ce que j’ai indi­qué au terme du par­cours syno­dal arti­cu­lé qui a conduit à la pro­mul­ga­tion d’Amoris lae­ti­tia (19 mars 2016) : » Toutes les dis­cus­sions doc­tri­nales, morales ou pas­to­rales ne doivent pas être réso­lues par des inter­ven­tions du Magistère. Certes, une uni­té de doc­trine et de pra­tique est néces­saire dans l’Église, mais cela n’empêche pas l’exis­tence de dif­fé­rentes manières d’in­ter­pré­ter cer­tains aspects de la doc­trine ou cer­taines consé­quences qui en découlent. Cela se pro­dui­ra jus­qu’à ce que l’Esprit nous amène à la véri­té com­plète (cf. Jn 16,13), c’est-​à-​dire lors­qu’il nous intro­dui­ra par­fai­te­ment dans le mys­tère du Christ et que nous pour­rons tout voir avec son regard » » (Amoris lae­ti­tia, n° 3) ». Ainsi che­mi­ne­ra tou­jours plus avant, au souffle de l’Esprit, le « Peuple pèle­rin » cher à Benoît XVI, dans ce per­pé­tuel renou­veau de la continuité.

5. Il y a cin­quante ans, Mgr Lefebvre pre­nait la défense intré­pide de la Papauté, dans sa fameuse Déclaration du 21 novembre 1974, fai­sant pro­fes­sion de foi dans cette « Rome éter­nelle » vou­lue par le Christ pour per­pé­tuer sa Royauté ici-​bas. Aujourd’hui, avec François, la nou­velle ecclé­sio­lo­gie de Vatican II risque bien de trou­ver son abou­tis­se­ment fatal : celui d’une véri­table démis­sion de la Papauté, fruit néces­saire de cette entre­prise de la Rome conci­liaire, néo pro­tes­tante, au détri­ment du salut des âmes.

Notes de bas de page
  1. Il s’agit pré­ci­sé­ment d’une Note du Saint Père François, accom­pa­gnant le Document final de la Seizième Assemblée Générale Ordinaire du Synode des évêques, datée du 25 novembre 2024. Cf. https://​press​.vati​can​.va/​c​o​n​t​e​n​t​/​s​a​l​a​s​t​a​m​p​a​/​i​t​/​b​o​l​l​e​t​t​i​n​o​/​p​u​b​b​l​i​c​o​/​2​0​2​4​/​1​1​/​2​5​/​0​9​3​4​/​0​1​8​6​6​.​h​tml[]

FSSPX

M. l’ab­bé Jean-​Michel Gleize est pro­fes­seur d’a­po­lo­gé­tique, d’ec­clé­sio­lo­gie et de dogme au Séminaire Saint-​Pie X d’Écône. Il est le prin­ci­pal contri­bu­teur du Courrier de Rome. Il a par­ti­ci­pé aux dis­cus­sions doc­tri­nales entre Rome et la FSSPX entre 2009 et 2011.