Jean d’Ormesson, Simone Veil, La Croix et les muets évêques de France…

Le jeu­di 18 mars, l’Académie fran­çaise a reçu à son trei­zième fau­teuil Madame Simone Veil, le ministre de la Santé qui fit léga­li­ser l’avortement en France le 17 jan­vier 1975.

Ce n’est pas en ver­tu d’une pro­duc­tion lit­té­raire que la haute ins­ti­tu­tion, jadis garante de la pure­té de la langue et de l’honneur de la France, l’a accueillie en son sein. C’est bien en rai­son de son enga­ge­ment poli­tique qui reste étroi­te­ment lié à la loi à laquelle elle a lais­sée son nom, celle qui, depuis trente-​cinq ans, tue près de 300 000 enfants dans le ventre de leur mère chaque année.

Entre ces inno­cents indus­triel­le­ment mas­sa­crés parce que l’arbitraire leur a dénié le sta­tut d’être humain et les puis­sants qui, à la suite des tyrans d’autres temps, ont des­po­ti­que­ment déci­dé que cer­taines exis­tences ne valaient pas la peine d’être vécues, nous devons en conscience venir au secours des vic­times du caprice contem­po­rain. Aucune situa­tion d’exception ne sau­rait légi­ti­mer la mort d’une per­sonne sans défense.

Dans ces condi­tions, les hymnes chan­tés à la gloire de cette recon­nais­sance suprême de l’avortement par ceux-​là même qui devraient la dénon­cer, consti­tuent un scan­dale :

Entendre Jean d’Ormesson, accueillant au siège qu’occupait son oncle, ancien ambas­sa­deur auprès du pape Pie XII, par­ler de « vic­toire his­to­rique » à pro­pos de la loi léga­li­sant l’avortement est un scan­dale. Utilisant sa nais­sance, son nom et son intel­li­gence pour défendre le meurtre et pour faire de sa nou­velle « consœur » une héroïne ; condam­nant l’Église au tra­vers de l’affaire si média­ti­sée et si tron­quée de Recife, l’écrivain a par­ti­ci­pé à la décon­si­dé­ra­tion de sa mai­son.

Lire dans le jour­nal La Croix, organe offi­cieux des évêques de France, des extraits [1] du dis­cours de Jean d’Ormesson sans qu’aucun émoi de la rédac­tion ne soit mani­fes­té à l’égard de ceux qui sont depuis des années pure­ment et sim­ple­ment assas­si­nés consti­tue éga­le­ment un scan­dale.

Enfin consi­dé­rer que la Conférence des évêques de France a obser­vé un silence abso­lu alors que Simone Veil s’est elle-​même féli­ci­tée de la com­pli­ci­té silen­cieuse de leurs pré­dé­ces­seurs en 1975 est un nou­veau scan­dale de la part de ceux qui devraient nor­ma­le­ment défendre la vie que Dieu confère aux hommes.

Ainsi expliquait-​elle :

« Avec l’Eglise catho­lique, les choses se sont mieux dérou­lées que j’au­rais pu le craindre. […] je me suis entre­te­nue avec le pré­lat en charge de ces pro­blèmes au sein de la hié­rar­chie catho­lique. Il n’a pas ten­té de me dis­sua­der. Il expri­mait le vœu que la liber­té de conscience soit assu­rée dans la loi et que nul ne puisse obli­ger un méde­cin ou un soi­gnant à pra­ti­quer une IVG. Il est vrai qu’à cette époque, l’Eglise de France était très ouverte ».

C’est pour­quoi, en accueillant au fau­teuil de Paul Claudel l’auteur de cette loi infan­ti­cide aux côtés du chef d’État qui l’a signée, l’Académie fran­çaise endosse le plus hon­teux des dis­cré­dits.

Oubliant sa fon­da­tion par le car­di­nal de Richelieu, insul­tant les grandes figures qui, de Bossuet à Albert de Mun, lui avaient confé­ré son aura et son hon­neur, la cou­pole maza­rine s’apparente désor­mais à l’antichambre de celle du Panthéon.

Face à la masse de vies déli­bé­ré­ment inter­rom­pues, le titre d’immortel n’en devient que plus pathé­tique.

La Porte Latine

[1] « C’est une joie, Madame, et un hon­neur de vous accueillir dans cette vieille mai­son ».