Le prêtre, manifestation de la miséricorde de Dieu

Photo de la rentrée 2022 au Séminaire de Flavigny

Lettre sur les voca­tions n°31 d’a­vril 2023.

Le mot du supérieur du District

Jusqu’au bout il faut veiller, il faut tenir. C’est la grande leçon de saint Paul, le légat par excel­lence du Christ. C’est l’instruc­tion de tous les prêtres depuis la Résurrection de Notre Seigneur Jésus-​Christ qui a inau­gu­ré les der­niers temps. Ces temps sont mar­qués mais ne sont pas en­core accom­plis. Nous vivons cette ère der­nière ; elle a été inau­gu­rée mais elle est lais­sée à notre déci­sion, à notre conver­sion. Et nous avons besoin des prêtres pour len­te­ment s’ache­miner vers la der­nière heure, non pas sim­ple­ment la nôtre, mais celle du monde entier. Les prêtres sont indis­pen­sables pour ache­ver la pré­pa­ra­tion à l’avène­ment défi­ni­tif du Christ-​Roi. Ils sont des Christs conti­nués. Ils n’ont d’autres sou­cis que d’acheminer l’ensemble du peuple chré­tien, et même tous les hommes, vers ce « Jour du Christ », comme l’appelle saint Paul, qui clô­tu­re­ra l’histoire et sera la réa­li­sa­tion accom­plie du plan créa­teur de Dieu. En com­mençant sa pre­mière lettre aux Thessaloniciens l’apôtre rap­pelle l’essentiel de toute prédi­cation : « Vous vous êtes conver­tis à Dieu aban­don­nant les idoles pour ser­vir le Dieu vivant et véri­table, dans l’attente de son Fils qui vien­dra des cieux, qu’il a res­sus­ci­té des morts, Jésus, qui nous délivre de la colère à venir » (I Thess. 1, 9–10).

Le prêtre qui, dans son habit, tra­verse le monde, témoigne de sa confiance en Dieu Sauveur qui a com­men­cé en nous le salut et l’achèvera.

Face à l’inconstance, face à l’en­nui, face à la vaine inquié­tude du monde, le prêtre conti­nue de témoi­gner que « Dieu ne nous a pas réser­vés pour sa colère, mais pour acqué­rir le salut par Notre-​Seigneur Jésus-​Christ, qui est mort pour nous afin que, éveillés ou morts (à l’heure de son Avè­nement) nous vivions unis à lui » (I Thess. 5, 9–10). Le prêtre trans­met cette espé­rance qui est la hâte de ren­con­trer et sur­tout de pos­sé­der une per­sonne, Jésus : « Nous serons avec le Seigneur tou­jours » (I, Thess. 4, 17). Saint Paul nous convie tous à cette joie inef­fable qu’il a entre­vue sur le che­min de Damas : cette inti­mi­té avec le Christ.

N’est-​ce pas tout sim­ple­ment la réponse du curé d’Ars au ber­ger Antoine Grive : « Tu m’as mon­tré le che­min d’Ars, je te mon­tre­rai le che­min du Ciel ».

Si Jésus-​Christ est mort pour nous, c’est afin que nous vivions avec lui. Ce face à face avec Jésus qui a sai­si saint Paul est pour nous tous, si nous sui­vons la voie jus­te­ment indi­quée par les prêtres et que nous pre­nons les moyens que ceux-​ci nous offrent pour s’y tenir droi­te­ment : la vie sacra­men­telle est la seule et unique façon de par­ve­nir au terme.

Le prêtre mani­feste que l’espé­rance chré­tienne n’est pas seule­ment un espoir ou un pari sur l’avenir, mais une espé­rance glo­rieuse, une cer­ti­tude de vic­toire, une assu­rance de bon­heur éter­nel. Mais nous ne joui­rons de ce triomphe que par une participa­tion totale de nous-​mêmes à la gloire du Christ qui nous est ré­ellement com­mu­ni­quée par le sa­crement de l’Eucharistie que seul le prêtre donne. Saint Paul insiste même sur le carac­tère exclu­sif de la divine pré­sence : se sau­ver c’est être ré­uni à Jésus. Nous atten­dons ferme­ment, appuyés sur la puis­sance divine, la com­mu­nion in­time et l’étroite so­ciété de vie avec la sainte Trinité, par Notre-Seigneur.

De même que le prêtre vit d’amitié avec son Sauveur par la prière litur­gique et la médita­tion, il veut pour ses ouailles un rap­port au moins iden­tique. Être avec le Christ dans la socié­té du Père est bien le but suprême de tous mais sous l’égide du prêtre, guide des âmes. Encore un mot de saint Paul : « A l’Église de Thessalonique qui est en Dieu le Père et dans le Seigneur Jé­sus-​Christ ». Belle for­mule qui résume cette marche as­cendante d’un trou­peau vers la consom­ma­tion de l’unité et de la réa­li­té divine : en Dieu et dans le Seigneur. Quelle dif­fé­rence entre le païen qui se fabrique néces­sairement une idole pour gar­der un prin­cipe de vie ter­restre et cette attente pas­sion­nante du chré­tien auquel son Seigneur tend sans cesse les bras comme le Père de l’Enfant pro­digue dans le tableau magni­fique de Rembrandt. Sur les tombes des pre­miers chré­tiens, il n’est pas rare d’y voir une ancre et l’inscription : « Vivas in Deo » (Que tu vives en Dieu). Si notre cœur est encore inquiet de cette ren­contre inef­fable, il suf­fit de lire encore saint Paul : « Le Seigneur, au signal don­né, par la voix de l’archange et la trom­pette de Dieu des­cen­dra du ciel et les morts qui sont dans le Christ res­susciteront en pre­mier lieu après quoi, nous les vivants, nous qui se­rons encore là, nous serons réunis à eux et empor­tés sur les nuées pour ren­con­trer le Seigneur dans les airs, ain­si nous serons avec le Seigneur pour toujours ».

Ici-​bas le prêtre guide notre veille, notre vigile, notre prépa­ration active à la com­mu­nion défi­ni­tive à Dieu, un peu comme durant la nuit pas­cale. Il porte le flam­beau qui répand la lumière sur ceux qui le suivent. Avec la Résurrection du Christ les der­niers temps sont arri­vés mais ils ne sont pas encore con­sommés et le temps nous est don­né pour une par­faite con­version, pleine et entière. Il y a dans notre vie per­son­nelle une ten­sion conti­nuelle que le mi­nistre du Christ qui dis­pense la grâce, germe de gloire, aide à résoudre. Nous appar­te­nons à deux mondes comme deux hommes. L’ancien dont nous por­tons les traces, le péché ori­gi­nel et ses suites néfastes, et le nou­veau plein de charme ca­ché, la grâce. La ten­ta­tion est constante et le temps nous est at­tribué pour apai­ser la confron­ta­tion. Un orage pas­sionnel peut à tout moment com­pro­mettre le don de soi fait à Dieu.

On l’a dit le jour du bap­tême et on le renou­velle la nuit sainte de Pâques : nous renon­çons à Sa­tan, à ses pompes et à ses œuvres. Il est vrai, mais le Christ sait notre fra­gi­li­té et nous invite régulière­ment au tri­bu­nal de la Pénitence.

Le ministre ap­plique comme un baume les mérites de son Maître qui nous octroie le pardon.

Il reste que nous pou­vons bien être inquiets dans l’attente d’une telle béa­ti­tude quand on voit le monde aus­si per­vers et hos­tile à Dieu en lequel il nous faut vivre.

Mais la rage sata­nique qui s’acharne contre les chré­tiens n’est pas nou­velle. Les nou­veaux Thessaloniciens étaient em­preints d’angoisse à cette triste vi­sion. Il est vrai que le Christ a vain­cu le monde par sa croix et sa résur­rec­tion, mais il n’empêche que la vic­toire du chré­tien est dans l’espérance. Elle ne se gagne que dans le com­bat. Les tri­bu­la­tions sont le lot du chré­tien et il nous faut les sup­por­ter avec la « constance du Christ » (I Thess. 1, 3). Nos épreuves sont les tri­bu­la­tions du Christ et son ministre est le conso­la­teur dont l’âme a besoin au temps de l’épreuve. Même si le prêtre lui-​même n’est pas à l’abri des pièges de Satan et le curé d’Ars est un exemple fa­meux, sa confiance en Dieu, son espé­rance théo­lo­gale sont pour tous une ancre qui retient tout esquif, amar­ré au ciel : « Il est impos­sible que Dieu nous mente, nous avons une conso­la­tion puis­sante nous qui sommes réfu­giés dans l’ac­qui­si­tion de l’es­pé­rance qui nous a été offerte, que nous re­tenons pour notre âme comme une ancre sûre et ferme, et qui pénètre jusqu’au-dedans du voile où Jésus, comme un pré­cur­seur, est entré pour nous ayant été fait pon­tife pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech » (Heb. 6, 18–20).

Alors quelle n’est pas la gran­deur du prêtre, Christ en terre, sup­port des affli­gés, consola­teur des oppri­més, mais sur­tout dis­pen­sa­teur de Dieu lui-​même, preuve vivante de la miséri­corde de Notre Seigneur venu en ce monde pour sau­ver les hommes et les incor­po­rer à sa propre vie divine.

Lire l’in­té­gra­li­té de la Lettre sur les voca­tions 2023

Image de la Croisade des vocations 2023

Neuvaine des enfants du 5 au 13 mai 2023

FSSPX Supérieur du District de France

L’abbé Benoît de Jorna est l’ac­tuel supé­rieur du District de France de la Fraternité Saint Pie X. Il a été aupa­ra­vant le direc­teur du Séminaire Saint Pie X d’Écône.