Liberté, que de crimes on commet en ton nom !

La Constitution de la Ve République française

Libres inter­ro­ga­tions sur une liber­té problématique

C’est donc fait. Le Parlement a ins­crit dans la Constitution de la Ve République « la liber­té garan­tie à la femme d’avoir recours à une inter­rup­tion volon­taire de gros­sesse ». Autrefois acte puni sévè­re­ment par la loi répu­bli­caine comme atteinte à la vie humaine, l’avortement a été dépé­na­li­sé en 1974, pour deve­nir aujourd’hui une « liber­té » impos­sible à remettre en cause sans trans­for­mer la Constitution. Est-​il encore per­mis de s’étonner d’une telle évolution ?

Aujourd’hui, la France a abro­gé la peine de mort. La vie humaine est donc si pré­cieuse, aux yeux de la loi, qu’aucun crime n’est assez grave pour jus­ti­fier la peine capi­tale. La vie d’un cri­mi­nel est donc plus sacrée que celle d’un enfant à naître dont le seul crime est de n’avoir pas été « dési­ré ». Est-​il encore per­mis de s’en scandaliser ?

Aujourd’hui, un acteur est pour­sui­vi en jus­tice pour avoir mis fin acci­den­tel­le­ment à la vie d’un enfant à naître. La loi per­met d’inscrire un enfant mort-​né à l’état-civil. L’enfant à naître est donc recon­nu dans cer­tains cas comme un être humain, et, selon la volon­té de sa mère, peut être consi­dé­ré comme une tumeur à reti­rer par voie médi­cale. Est-​il encore per­mis de s’en affliger ?

Aujourd’hui, la France est signa­taire de la Charte des Droits de l’Enfant, qui sti­pule en son article 1er : « Tout enfant a droit à la vie ». La loi va donc déci­der si un fœtus est un enfant ou non, à dix, douze ou qua­torze semaines, alors que la science nous apprend que l’embryon a son code géné­tique com­plet dès le pre­mier ins­tant, et qu’il est donc un être vivant dis­tinct de tout autre humain – y com­pris sa mère. Est-​il encore per­mis de le déplorer ?

Aujourd’hui, la loi pré­tend lut­ter contre les dis­cri­mi­na­tions et le rejet dont sont l’objet les per­sonnes por­teuses de han­di­cap. Pourtant, la décou­verte d’une infir­mi­té chez un enfant à naître peut jus­ti­fier son éli­mi­na­tion, désor­mais garan­tie par la Constitution, jusqu’au der­nier jour de gros­sesse. Est-​il encore per­mis de s’en plaindre ?

Aujourd’hui, la loi fran­çaise pré­voit une clause de conscience per­met­tant de se sous­traire à des actes jugés contraires à ses convic­tions. La « liber­té garan­tie » par la Constitution risque d’entraîner tôt ou tard une sus­pen­sion de cette clause pour les per­son­nels soi­gnants qui ne veulent pas par­ti­ci­per à un avor­te­ment. Liberté, pas pour tout le monde. Est-​il encore per­mis de s’en alarmer ?

Aujourd’hui, le gou­ver­ne­ment pré­sente la réforme de la Constitution comme un ren­for­ce­ment de la liber­té des femmes – tout en pré­ten­dant relan­cer la nata­li­té. Cependant, nombre de femmes sou­hai­te­raient avoir plus d’enfants et se résignent à l’avortement pour des rai­sons de car­rière, de moyens finan­ciers, voire de pres­sions de leur entou­rage ou d’associations mili­tantes. « Liberté » donc, sauf pour les prin­ci­paux inté­res­sés : l’enfant à naître, et, bien sou­vent, sa mère. Est-​il encore per­mis de s’en offusquer ?

La réponse à ces inter­ro­ga­tions est conve­nue : en démo­cra­tie, la loi est faite par la majo­ri­té, qui cherche à équi­li­brer les opi­nions des uns et des autres, en l’absence de point de repère supé­rieur à la volon­té géné­rale. La res­pon­sa­bi­li­té de ces contra­dic­tions incombe donc aux légis­la­teurs. Mais la « volon­té géné­rale » n’empêchera pas l’existence d’une loi natu­relle, vou­lue par un Législateur bien plus haut, qui sera aus­si un Juge. Celui qui ins­pi­rait à l’un de ses pro­phètes : « Malheur à vous, qui dites que le mal est bien, et que le bien est mal ; qui chan­gez les ténèbres en lumière, et la lumière en ténèbres [1]. » On ne nous empê­che­ra pas de le rappeler. 

Notes de bas de page
  1. Isaïe 5, 20[]