Nouvelle chapelle à Lizy-​sur-​Ourcq (77)

La Porte Latine : Monsieur l’ab­bé Lorans, pour­quoi cette nou­velle cha­pelle à Lizy-sur-Ourcq ?

Abbé A. Lorans : Tout d’abord parce que, depuis près de deux ans, la Fraternité Saint-​Pie X n’avait plus la pos­si­bi­li­té de des­ser­vir la cha­pelle du châ­teau de La Trousse où la messe fut célé­brée dès 1981. Ensuite parce que dans le vaste dio­cèse de Meaux nous avons bien une cha­pelle au sud, à Samoreau, près de Fontainebleau, mais rien au centre du dépar­te­ment. Les plus proches lieux de culte tra­di­tion­nel sont Noisy-​le-​Grand en ban­lieue pari­sienne et Reims dans la Marne. Il y avait donc un vide à combler.

D’autant plus qu’après le Motu Proprio, Mgr de Monléon a par­ci­mo­nieu­se­ment concé­dé une messe tra­di­tion­nelle par mois, dans une cha­pelle de Meaux. Là, les plus convain­cus des parois­siens de La Trousse ont décla­ré qu’il était hors de ques­tion pour eux d’être des fidèles de la Tradition à temps par­tiel, et d’aller à la messe moderne trois fois sur quatre.

Nous avons bien essayé, pen­dant plus d’un an, d’obtenir une église de vil­lage, car dans ce dio­cèse, comme par­tout en France, les curés ont sou­vent à des­ser­vir cha­cun une ving­taine ou une tren­taine de paroisses, et beau­coup d’églises sont fer­mées. Des maires nous ont dit qu’ils seraient heu­reux de voir réou­vertes ces églises qu’ils entre­tiennent avec les deniers de leurs admi­nis­trés. Mais l’évêque de Meaux, comme celui d’Amiens, pré­fère une église vide plu­tôt qu’une église qui ser­vi­rait à ce pour quoi elle a été édi­fiée : la célé­bra­tion de la messe tra­di­tion­nelle ! Tel est le fruit de ces 40 der­nières années : plus l’Eglise conci­liaire s’ouvre au monde moderne, plus elle ferme d’églises.

Quel apos­to­lat y a‑t-​il eu à La Trousse ?

Depuis 1981, une à deux fois par mois, la messe était célé­brée dans la cha­pelle de ce châ­teau du Second Empire. Un jour, les pro­prié­taires l’ont ven­du, mais nous avons pu conser­ver l’usage de la cha­pelle pen­dant quelques années grâce à la bien­veillance des nou­veaux co-​propriétaires. Puis il a fal­lu quit­ter les lieux, il y a un peu moins de deux ans.

Nous réunis­sions entre 30 et 50 fidèles de la région et des dépar­te­ments voi­sins. J’ai pu y célé­brer des bap­têmes, des com­mu­nions solen­nelles et des fian­çailles. Mais le fait d’avoir à entrer dans une pro­prié­té pri­vée a dû dis­sua­der plus d’un fidèle. En outre, l’absence d’une messe tous les dimanches ren­dait cette com­mu­nau­té quelque peu volatile.

Qui sera le des­ser­vant de Lizy-sur-Ourcq ?

L’abbé Christophe Legrier qui est pro­fes­seur à l’école Saint-​Bernard de Courbevoie et moi-​même, nous nous par­ta­ge­rons ce minis­tère. Nous espé­rons pou­voir ren­for­cer l’assistance grâce à la régu­la­ri­té domi­ni­cale. Dans ce local loué où nous serons chez nous, il sera plus facile de pro­po­ser des confes­sions, une for­ma­tion pour les enfants de chœur, et peut-​être même du caté­chisme. A La Trousse, nous ne dis­po­sions de la cha­pelle que pour le temps de la messe.

Comment voyez-​vous le déve­lop­pe­ment de la Fraternité ?

Il est cer­tain que mal­gré ou à cause du Motu Proprio, la majo­ri­té des évêques de France ne montre guère d’enthousiasme à favo­ri­ser la célé­bra­tion de la messe tra­di­tion­nelle. Je dis « à cause du Motu Proprio », parce que beau­coup d’évêques voient dans cette déci­sion du pape – comme dans le décret du 21 jan­vier - un recul, une perte des acquis de Vatican II. Aussi ont-​ils ten­dance à s’arc-bouter sur ces pré­ten­dus acquis dont ils ne veulent pas voir qu’ils sont en réa­li­té des pertes en voca­tions, en pra­tique sacra­men­telle, en fré­quen­ta­tion du catéchisme.

Dès lors, la Fraternité doit main­te­nir inchan­gée sa ligne de conduite. C’est une ques­tion de patience : ils ont les églises, et nous avons les fidèles… en nombre tou­jours crois­sant, comme l’ont magni­fi­que­ment mon­tré les 20.000 pèle­rins de Lourdes, l’an pas­sé. Bientôt nous attein­drons un seuil cri­tique, en par­ti­cu­lier pour les voca­tions lorsqu’il n’y aura plus que 5 à 6 000 prêtres pour toute la France. Et ce sera dans quelques années seule­ment. Les évêques le savent et le taisent : c’est la pas­to­rale de l’autruche. Pourtant quelques-​uns d’entre eux ne veulent pas gar­der la tête enfouie dans le sable. Ils la relèvent et ils voient nos cha­pelles, aujourd’hui Lizy-​sur-​Ourcq, bien­tôt la rue Gerbert à Paris. C’est le plus grand ser­vice que la Fraternité puisse rendre à l’Eglise : offrir l’expérience de la Tradition. Chacune de ces cha­pelles prouve que la Tradition est l’avenir, alors que le pro­gres­sisme post-​conciliaire est déjà un pas­sé décomposé.

LPL : Merci à Monsieur l’ab­bé Lorans, dont le temps est comp­té plus que de cou­tume en ce moment, d’a­voir répon­du si gen­ti­ment à nos ques­tions et d’a­voir si fine­ment résu­mé « l’é­tat des lieux » de l’Eglise en France en 2009…