Illustration : Le Père Maurizio Chiodi, théologien moral récemment nommé à l’Académie pontificale pour la vie
La floraison diabolique d’Amoris laetitia n’en finit pas d’éclore. Après avoir légitimé l’accès aux sacrements pour les soi-disant « divorcés-remariés », cette exhortation hérétique dans bien des domaines devient l’excuse pour autoriser la contraception chez les catholiques.
Bien sûr, sur le site Life Site News, on nous parle d’exception, de circonstances particulières, de responsabilité dans des cas concrets. Mais lorsque le Père Maurizio Chiodi, théologien moral récemment nommé à l’Académie pontificale pour la vie par le pape François, justifie la contraception et en fait même une sorte d’« exigence » dans certains cas, il ne prétend pas vraiment raisonner à la marge mais au nom d’une nouvelle approche de l’enseignement moral.
C’est lors d’une conférence publique organisée à l’Université pontificale grégorienne de Rome, le 14 décembre dernier, que le moraliste a présenté sa théorie selon laquelle la « paternité responsable » peut obliger un couple marié à avoir recours à des moyens contraceptifs artificiels. Et vu les circonstances, vu son invocation d’Amoris laetitia pour étayer son point de vue, il ne s’est pas agi d’une simple contestation d’Humanae vitae comme on en a tant vu depuis la parution de cette encyclique il y a exactement 50 ans. Volens nolens, c’est la logique de l’exhortation post-synodale qui est en cause, et donc l’enseignement du pape François.
Il est vrai que la séance était présidée par l’un des principaux organisateurs de la série de conférences données à la Grégorienne où s’inscrivait cette présentation évidemment hétérodoxe, le père jésuite Humberto Miguel Yanez. Celui-ci n’est pas seulement le directeur du département de théologie morale de cette université, c’est aussi un proche du pape François, qui fut son supérieur en Argentine en tant que Jorge Bergoglio.
Les deux hommes, Chiodi et Yanez, avaient d’ailleurs participé plusieurs mois auparavant, dans la même université, à la présentation d’un nouveau livre sur Amoris laetitia dans lequel Stephan Goertz et Caroline Witting affirment clairement que l’exhortation apostolique constitue un « changement de paradigme » pour l’ensemble de la théologie morale, et spécialement pour ce qui est de l’interdiction pure et dure de la contraception formulée dans Humanae vitae.
Dans sa conférence, intitulée : « Relire Humanae vitae (1968) à la lumière d’Amoris laetitia », le Père Chiodi a déclaré que lorsque les « méthodes naturelles sont impossibles ou irréalisables, il faut trouver d’autres moyens de responsabilité ». Alors, « Une méthode artificielle de régulation des naissances pourrait être reconnue comme un acte de responsabilité qui serait mise en œuvre non pas pour rejeter radicalement le don de l’enfant, mais parce que dans ces situations c’est la responsabilité qui appelle le couple et la famille à d’autres formes d’accueil et d’hospitalité ». Lesquels ? Le prêtre n’en a pas parlé. Restons-en aux conjectures…
Mais ceci est certain : s’exprimant ainsi, le prêtre dit bien qu’un acte intrinsèquement mauvais peut devenir humainement nécessaire et donc bon moralement. Et d’expliquer qu’il s’agit de réfléchir à la question centrale de la théologie morale aujourd’hui : « la relation entre l’objectif et le subjectif ». « Normalement, l’objectif s’identifie à la norme morale connue de la raison et le subjectif s’identifie à la conscience éclairée par la loi », a‑t-il posé. Pour le contester aussitôt : « La relation entre l’objectif et le subjectif n’est pas une relation entre la norme connue par la raison et la conscience » mais « entre l’acte… et la conscience ».
Autrement dit, dans cette nouvelle logique, l’acte reçoit sa valeur de la conscience de celui qui le pose.
Selon Chiodi, il appartient aujourd’hui aux philosophes et aux théologiens de « repenser une théorie de la conscience » qui retrouve « le lien originel entre la conscience et l’acte moral ». Ce n’est pas dit de manière explicite, mais l’idée est bien de relativiser de manière générale la notion de l’acte intrinsèquement mauvais qu’aucune intention ne peut racheter (parce que la fin ne justifie pas les moyens). Ce qui, soit dit en passant, n’a rien à voir avec les circonstances atténuantes qui relèvent de la responsabilité personnelle sans rien changer à la nature d’un acte.
Le P. Chiodi s’est d’ailleurs attaché à mettre en cause l’importance d’Humanae vitae, qui a selon lui toute sa place dans le développement historique du magistère de l’Eglise à propos du mariage, mais dont on comprend que c’est maintenant une affaire du passé. Il a expliqué que cette encyclique est devenue davantage une « affaire symbolique, critiquée ou rejetée par ceux qui ont été déçus par ses conclusions, ou bien considéré comme un vrai pilier de la doctrine morale catholique de la sexualité par d’autres ».
Cette dernière position s’explique selon lui par la référence qui y est faite dans les paragraphes 29 à 34 de Familiaris consortio et plus encore par le classement de la contraception dans Veritatis splendor parmi les actes intrinsèquement mauvais. Manière de dire que Paul VI ne voulait pas aller aussi loin.
Le cours de Chiodi était le troisième d’une série de conférences organisée pour l’année académique par les facultés de théologie morale et de sciences sociales de l’Université Grégorienne. Le but de ces conférences est d’avoir un nouveau et ample regard sur l’encyclique ‘dans le contexte d’un temps de changement’ et de situations ‘plus complexes’.
Ces nouvelles « avancées » surviennent après les révélations confirmant que le Vatican a créé discrètement une commission de quatre membres avec l’approbation du pape, dans le but de ‘promouvoir une étude compréhensive et autorisée’ d’Humanae Vitae qui coïncidera avec son anniversaire. Cette initiative est intervenue après que le pape François a purgé l’Académie pontificale pour la Vie, la nantissant de nouveaux membres (dont le père Chiodi), dont certains ont des positions dissidentes sur Humanae Vitae. Et cela a coïncidé avec l’action pontificale du 8 septembre qui par décret papal a remplacé l’Institut Jean-Paul II avec un nouvel institut destiné à faire avancer l’enseignement d’Amoris Laetitia. »
Toutes ces nouvelles normes qui refusent la théologie morale catholique traditionnelle auxquelles prédispose Amoris Laetitia engendrent plus qu’une unique révolution morale et doctrinale, débutée d’ailleurs sous Vatican II : elles sont une soumission volontaire à la révolution anthropologique, fomentée par les ennemis de la Création divine, qui débuta avec le divorce et se cimenta avec le droit de tuer l’enfant à naître, se prolonge en notre ère post-moderne avec la négation de l’altérité sexuelle de l’idéologie du genre.
Révolution anthropologique révolutionnaire et messianique, qui nie le réel, dénature la famille, détruit le lien social, supprime la filiation, arrache l’Homme à son identité première, son identité naturelle, et ainsi donne un coup mortel à la transmission de la foi catholique aux générations futures. Car sans nature, pas de surnature, la grâce divine se greffant sur la nature humaine.
Mais cette glissade de l’Église post-conciliaire, moderniste et progressiste vers la révolution anthropologique et transhumaniste en cours est-elle si étonnante ? Puisque la nécessité de la grâce est niée lorsqu’on induit l’homme, comme le fait Amoris Laetitia, à se contenter d’œuvres naturelles et à se maintenir dans le péché tout en lui promettant quand même le salut éternel…
L’écrivain anglais Chesterton, converti au catholicisme, dans une de ses formules saisissantes dont il avait le secret a prophétisé cette évolution dramatique :
« Chassez le surnaturel, il ne reste plus que ce qui n’est pas naturel ».
Sources : Life Site News /RITV /abbatah.com