Sermon de Mgr Lefebvre – Christ-​Roi – Diaconat – 29 octobre 1978

Mes bien chers amis
Mes bien chers frères,

Comme chaque année, en cette fête du Christ-​Roi, nous avons la joie de confé­rer l’ordination du dia­co­nat à quelques-​uns de nos étudiants.

Et cette année, cette joie est par­ti­cu­liè­re­ment grande, parce que, par la grâce de Dieu, leur nombre est impor­tant et qu’à eux sont venus éga­le­ment s’ajouter les Sous-​Diacres qui viennent de Bédouin et de la Fraternité de la Transfiguration. Nous sommes heu­reux de faire en sorte que ce dia­co­nat qui com­porte tant de grâces pour ceux qui vont le rece­voir, puisse s’étendre, s’étendre tou­jours davan­tage pour le plus grand bien des âmes.

Mes chers amis, dans quelques ins­tants vous allez donc rece­voir Spiritum Sanction ad robur, l’Esprit Saint avec le don de force en par­ti­cu­lier. Vous allez rece­voir l’Esprit Saint pour bien rem­plir votre office. C’est ce que va dire l’évêque au milieu de la pré­face, par la for­mule sacramentelle.

Un carac­tère plus pro­fond, plus signi­fi­ca­tif encore, va mar­quer vos âmes du sacre­ment de l’ordre. Devant Dieu, devant l’Église, devant les saints Anges, devant toute la cour céleste, vous serez désor­mais des Diacres pour l’éternité.

Et si l’on en juge d’après les moni­tions qui sont don­nées par l’évêque aux Diacres, avant de leur confé­rer l’ordre du dia­co­nat, cette fonc­tion est très importante.

La fonc­tion du Diacre, dit la moni­tion, est de « ser­vir à l’autel, de bap­ti­ser et de prê­cher ». Servire adal­tare, bap­ti­zare et præ­di­care.

Servir à l’autel. Mais ser­vir à l’autel, d’une manière toute proche de celle du prêtre. Désormais le Diacre pour­ra por­ter les vases sacrés qui contiennent le Saint-​Sacrement. Désormais même, d’une manière extra­or­di­naire, il pour­ra dis­tri­buer la Sainte Eucharistie.

Il approche donc d’une manière plus près de ces saints Mystères, de ces grands mys­tères de notre sainte Religion : le Saint Sacrifice de la messe, la Sainte Eucharistie. Le grand sacre­ment dans le rayon­ne­ment duquel doit vivre le prêtre et dans le rayon­ne­ment duquel aus­si, mes chers amis, vous devez tou­jours vivre d’une manière plus intense.

Servir à l’autel, bap­ti­ser et prê­cher. Et la Sainte Église, dans la moni­tion qu’elle demande à l’évêque de pro­non­cer avant l’ordination, vous donne comme exemple saint Étienne. Exemple admi­rable que ce diacre dont il est dit, dans les Actes des Apôtres, qu’il a été choi­si parce qu’il était rem­pli de la grâce et du Saint-Esprit.

Plenus gra­tia et Spiritus Sancti.

Et un peu plus loin, dans les mêmes Actes des Apôtres :

Plenus gra­tia et for­ti­tu­dine : « Plein de grâce et de force ».

S’il y a un exemple que vous devez suivre, un exemple et un modèle, c’est bien celui de saint Étienne, puisqu’il vous est don­né par­ti­cu­liè­re­ment par l’Église.

En effet, saint Étienne, rem­pli de la grâce du Saint-​Esprit a prê­ché. Et les Actes des Apôtres, le montrent d’une manière écla­tante, d’une manière mani­feste. À tel point que les audi­teurs de sa pré­di­ca­tion étaient stu­pé­faits. Et voyaient en lui comme un ange du Ciel. Il rayon­nait de la splen­deur de l’éternité.

Et mal­gré cela, ses juges n’ont pas vou­lu accep­ter ses paroles et n’ont pas vou­lu rece­voir sa prédication.

Alors, en ter­mi­nant ses objur­ga­tions, saint Étienne avec force leur fait com­prendre qu’ils ne sont pas autres que ceux qui les ont pré­cé­dés et qui ont tué les Prophètes. Les Prophètes qui annon­çaient la venue du Juste.

Vos pères les ont tués et vous êtes sem­blables à eux, car vous avez tué le Juste lui-même.

Et enten­dant ces paroles de saint Étienne, les Actes des Apôtres disent que leur rage était à son comble et qu’ils grin­çaient des dents – ce sont les termes mêmes de la Sainte Écriture – et qu’ils se pré­ci­pi­tèrent sur saint Étienne pour le lapider.

Entre temps, avant qu’ils ne l’emmènent, saint Étienne, a vu les Cieux s’ouvrir et la gloire de Dieu. Et dans la gloire de Dieu, Notre Seigneur Jésus-​Christ, pré­sent dans la gloire de Dieu.

Et il leur dit : « Je vois les Cieux ouverts et je vois la gloire de Dieu et Jésus à la droite du Père céleste. »

Eh bien, mes chers amis, je crois que c’est là un exemple admi­rable pour nous tous. Aujourd’hui, en par­ti­cu­lier, en la fête du Christ-​Roi, vous devez avoir cette contem­pla­tion, cette vision en quelque sorte, de la royau­té de Notre Seigneur Jésus-​Christ, comme saint Étienne L’a vu, dans le Ciel, Notre Seigneur pré­sent dans le Ciel, le Roi du Ciel. Et non seule­ment le Roi du Ciel, mais le Roi de la terre.

Et c’est pour­quoi saint Étienne ne crai­gnait pas de par­ler avec force de la royau­té de Notre Seigneur Jésus-​Christ et du devoir d’obéir à Notre Seigneur Jésus-​Christ, ce que refu­saient les Scribes et les Pharisiens qui avaient tué Notre Seigneur. Et c’est pour­quoi ils le lapidèrent.

Eh bien, vous aus­si, vous allez bien­tôt, avec la grâce de Dieu, espérons-​le, deve­nir prêtre et exer­cer d’une manière encore plus pleine, cette fonc­tion de Diacre pen­dant votre sacerdoce.

Mais déjà, avant de rece­voir le sacer­doce, vous pour­rez prê­cher, lorsque l’occasion s’en pré­sen­te­ra et vous devez vous y pré­pa­rer. Dans cette pré­di­ca­tion, vous prê­che­rez la royau­té de Notre Seigneur Jésus-​Christ. Car ce n’est pas autre chose que le prêtre a à prê­cher. Vous prê­che­rez cette royau­té d’abord par la prière, par l’exemple de la pié­té, par l’amour de l’autel, par l’amour du Saint Sacrifice auquel vous êtes désor­mais atta­ché pour toujours.

Vous mani­fes­te­rez cet atta­che­ment au Sacrifice de Notre Seigneur par le res­pect des Choses saintes, afin d’encourager les fidèles à les res­pec­ter eux aus­si et à com­prendre que ces grands mys­tères doivent être la source de notre sanctification.

Vous prie­rez donc, car c’est par la prière et par le sacri­fice que Notre Seigneur a sau­vé le monde. Et vous ne le sau­ve­rez pas autre­ment, que par la prière et par votre sacrifice.

Vous prê­che­rez Notre Seigneur Jésus-​Christ et sa royau­té, par l’exemple de vos ver­tus, par votre habit sacer­do­tal, par votre atti­tude, par votre bon­té et par votre cha­ri­té, par votre zèle, dans vos conver­sa­tions, dans toutes les occa­sions que vous aurez d’approcher les fidèles et les infi­dèles, vous prê­che­rez Notre Seigneur Jésus-​Christ. Et Dieu sait si aujourd’hui le monde a besoin de cette prédication.

Saint François d’Assise, emme­nant le frère Léon avec lui dans les rues d’Assise, disait : « Allons prê­cher Notre Seigneur Jésus-​Christ ». Et le frère Léon l’accompagnant, après avoir tra­ver­sé les rues d’Assise et saint François retour­nant à son couvent et n’ayant pas pro­non­cé une parole, le frère Léon lui dit : « Mais com­ment avons-​nous prê­ché Notre Seigneur Jésus-​Christ ? » – « Mais par notre exemple, par notre habit, nous avons prê­ché Notre Seigneur Jésus-​Christ ». Et le monde a besoin de cet exemple, le monde a besoin de cette prédication.

Vous prê­che­rez aus­si Notre Seigneur Jésus-​Christ par la parole. Et vous sau­rez qu’en face de ce règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ que nous devons éta­blir, et que Notre Seigneur Jésus-​Christ a deman­dé que nous éta­blis­sions, envoyant ses soixante-​douze dis­ciples prê­cher l’Évangile, Notre Seigneur n’a pas dit autre chose : Allez prê­cher le règne de Dieu. Le règne de Dieu – Regnum Dei – ce règne de Dieu, c’est son règne, car il est Dieu. C’est notre Dieu. Nous n’avons pas d’autre Dieu que Notre Seigneur Jésus-​Christ. C’est donc le règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ qu’ont prê­ché ses disciples.

C’est le règne de Dieu aus­si, que Notre Seigneur pen­dant les qua­rante jours qui ont sui­vi sa Résurrection – avant son Ascension – c’est ce qu’il a prê­ché éga­le­ment. C’est ce que l’Évangile dit : « il entre­tint les apôtres du règne de Dieu ».

C’est donc le règne de Dieu qui pré­oc­cu­pait Notre Seigneur, son propre règne en défi­ni­tive. Si Notre Seigneur était si pré­oc­cu­pé de ce règne, alors nous aus­si qui sommes ses dis­ciples, nous devons être pré­oc­cu­pés tou­jours du règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ. Règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ sur nous-​mêmes, règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ sur les indi­vi­dus, sur les per­sonnes, règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ sur les familles, règne de Notre Seigneur Jésus-​Christ sur les Sociétés.

Mais vous n’oublierez pas qu’en face de ce règne de Notre Seigneur, il y a le règne de Satan. Et jamais peut-​être comme aujourd’hui, le règne de Satan n’a été – aus­si – éten­du et a péné­tré par­tout, dans tous les domaines. Il nous entoure de partout.

Or qu’est-ce que le règne de Satan ? Le règne de Satan, c’est le règne du scan­dale. Et le scan­dale pris dans son vrai sens ; dans le sens de ceux qui nous amènent au péché et, par consé­quent, qui nous conduit en enfer. C’est cela le scan­dale. Le scan­dale est ce qui mène au pèche. Ce qui attire dans le péché.

Eh bien, ce monde est vrai­ment le règne du scan­dale. Tout est scan­dale autour de nous. Tout est contraire à la loi de Dieu. Dans le monde désor­mais, même les Commandements de Dieu, non seule­ment sont igno­rés, mais ils sont atta­qués publi­que­ment, offi­ciel­le­ment. Des lois sont por­tées qui vont à l’encontre des lois de Dieu. Tout cela est léga­li­sé, offi­cia­li­sé. On oblige les magis­trats, les méde­cins à faire des choses qui sont contraires à la loi de Dieu ; qui sont injustes, qui sont hor­ribles, abo­mi­nables. Et tout cela dans un temps où l’on croit que notre civi­li­sa­tion n’a jamais été aus­si grande, n’a jamais été aus­si belle.

Bien au contraire, cette civi­li­sa­tion porte la marque de Satan, porte la marque de l’enfer.

Alors, vous dénon­ce­rez ces scan­dales pour évi­ter que les âmes se dirigent vers l’enfer. Vous n’aurez pas peur de dénon­cer tout ce qui peut entraî­ner les âmes dans le péché.

Et pour avoir ce cou­rage et cette force, vous deman­de­rez par­ti­cu­liè­re­ment cette grâce à la très Sainte Vierge Marie. Vous savez, mes chers amis, Marie est notre Mère média­trice ; elle est média­trice de toutes les grâces.

La grâce que vous allez rece­voir dans quelques ins­tants, par l’imposition de la main de l’évêque et par les paroles sacra­men­telles qui vont être pro­non­cées, cette grâce du Saint-​Esprit, va vous être don­née par l’intermédiaire de notre Bonne Mère du Ciel.

Demandez à Marie, demandez-​lui, à notre Mère, demandez-​lui de vous don­ner cette grâce en abon­dance. Que vous soyez vrai­ment des Diacres selon son cœur ; que vous soyez plus tard des prêtres selon son cœur, comme l’a été son Divin Fils. Et elle vous aide­ra. Elle vous aide­ra à être des apôtres du royaume de Notre Seigneur et du règne de Dieu.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.