Nihilisme ecclésiastique

Ruines de l'abbaye d'Ourscamp (Oise). Crédits photo : domaine public via Wikimedia Commons

Les auto­ri­tés de l’Eglise travaillent-​elles pour sa vie ou pour sa disparition ?

Le supé­rieur d’une com­mu­nau­té contem­pla­tive sur le déclin, invi­té à l’anniversaire d’abbatiat d’un de ses confrères, voyant com­ment la com­mu­nau­té est, elle, jeune et nom­breuse, iro­nise : « Nous sommes vieux et vous êtes jeunes ; nous sommes peu et vous êtes nom­breux ; qu’est-ce qui ne va pas chez vous ? » Il est vrai que cette com­mu­nau­té adopte de plus en plus de pra­tiques tra­di­tion­nelles. Ladite com­mu­nau­té pro­pose son aide pour revi­vi­fier une com­mu­nau­té sur le point de fer­mer. Réponse : « Plutôt mou­rir que de vous deman­der de l’aide ! »

Un évêque explique à ses dio­cé­sains ses orien­ta­tions pour orga­ni­ser la vie des paroisses en l’absence de prêtre. Décrivant les assem­blées domi­ni­cales entre laïques, il ajoute : « Et si par mal­heur un prêtre se trou­vait pré­sent, il serait pré­fé­rable qu’il ne se mani­feste pas. »

Un autre évêque, confiant à un de ses prêtres le soin d’assurer la messe dans le rite tra­di­tion­nel dans une cha­pelle du dio­cèse, ajoute : « Surtout, veillez à ce que la com­mu­nau­té ne se déve­loppe pas. »

« Dieu a créé les choses pour qu’elles soient », dit le livre de la Sagesse (1, 14), et des plus humbles aux plus com­plexes, tous les êtres cherchent à se conser­ver. Il n’y a que l’homme qui, depuis sa chute et sur­tout depuis son éman­ci­pa­tion révo­lu­tion­naire, se laisse fas­ci­ner par l’idée de se sup­pri­mer : honte de sa civi­li­sa­tion, dégoût de la nata­li­té, avor­te­ment, sui­cide et eutha­na­sie, etc.

Cette ten­dance mor­bide a appa­rem­ment atteint l’Église puisqu’on y per­sé­cute les com­mu­nau­tés flo­ris­santes. Pour les pour­fendre plus triom­pha­le­ment, on les dis­si­mule sous des cibles faites sur mesure[1] :

  • Le zèle pour une litur­gie expri­mant adé­qua­te­ment le mys­tère de la foi et entre­te­nant la crainte révé­ren­tielle conve­nable pour le culte divin, c’est du rubri­cisme et une cris­pa­tion inin­tel­li­gente dans de vieux usages, la marque d’un esprit dérangé.
  • Le mili­tan­tisme de la foi est cari­ca­tu­ré en triom­pha­lisme et en pro­sé­ly­tisme (chose que per­sonne ne par­vient à défi­nir clairement).
  • L’idéal de chré­tien­té est gri­mé en ambi­tion politique.
  • L’attachement à l’expression exacte et inté­grale de la doc­trine catho­lique est désor­mais une manière arro­gante de pré­tendre pos­sé­der la vérité.
  • L’intransigeance sur la morale est bien sûr un relent de jan­sé­nisme possessif.

Bref, vou­loir vivre de sa vie chré­tienne est une atti­tude mor­bide à com­battre ! Vivre peut engen­drer des mala­dies graves, mais rassurez-​vous, les auto­ri­tés veillent sur votre santé…

Que le Saint Esprit veuille éclai­rer les car­di­naux pour don­ner à l’Église un Pontife qui ren­verse cette culture de mort !

Notes de bas de page
  1. Le père Jérôme Kiefer (1907–1985), moine cis­ter­cien de l’abbaye de Sept-​Fons, avait consta­té dès les années 50 la déca­dence de l’esprit contem­pla­tif dans son Ordre, et dénon­cé cette méchante petite musique qui l’accompagnait déjà : « Quand, dans les milieux reli­gieux, on parle contre la fausse dévo­tion, neuf fois sur dix c’est pour décou­ra­ger la vraie. Dans nos monas­tères, la fausse mys­tique n’est pas fré­quente. Il n’est pas besoin de tant batailler contre elle ! » Père Jérôme, Valeurs, Ad solem, 2025, p.29.[]