La nouvelle messe selon Mgr Lefebvre

On ne parle plus du sacri­fice, on ne parle plus que de l’Eucharistie : c’est très dangereux.

Pour juger de la valeur dog­ma­tique, morale, spi­ri­tuelle de cette réforme litur­gique, il nous faut rap­pe­ler briè­ve­ment les prin­cipes immuables de la foi catho­lique sur ce qui consti­tue essen­tiel­le­ment notre sainte messe. Voici ces dif­fé­rentes pro­po­si­tions qui sont de foi divine catho­lique défi­nie. Ce sont donc des dogmes, si bien que celui qui ne croit pas à cela est héré­tique et par le fait même hors de l’Église.

La pre­mière véri­té c’est qu’à la messe est offert à Dieu un vrai et réel sacri­fice. Nous devons ajou­ter que ce sacri­fice est un sacri­fice pro­pi­tia­toire [1], pour don­ner une pré­ci­sion de plus qui va nous ser­vir dans l’examen de la nou­velle messe. Deuxième dogme : L’hostie ou la vic­time est le Christ lui-​même pré­sent sous les espèces du pain et du vin. Enfin, les prêtres et eux seuls sont les ministres.

Alors, il est évident que ces trois véri­tés fon­da­men­tales sont – en n’étant pas sévère dans le juge­ment du Novus ordo – au moins net­te­ment atté­nuées, et ceci nous pou­vons le prou­ver faci­le­ment tant par des preuves internes que par des preuves externes, c’est-à-dire par l’analyse de l’ordo lui-​même et par ce qui en est dit par des per­sonnes étran­gères et enfin par les faits qui découlent de cette réforme. Mais c’est sur­tout par les preuves internes, c’est-à-dire en étu­diant le Novus ordo lui-​même qu’on arrive à cette conclusion.

La Nouvelle messe et le sacrifice

Il y a deux par­ties pra­ti­que­ment dans le Novus ordo : c’est la litur­gie de la parole et la litur­gie de l’Eucharistie. Il n’y a même plus la litur­gie du sacri­fice. C’est pour­quoi, tout de suite après les paroles rapides, dites de la consé­cra­tion, on arrive à l’Eucharistie, c’est-à-dire à la dis­tri­bu­tion du pain eucha­ris­tique. C’est une dimi­nu­tion de ce qui est le centre de la messe, de ce qui est vrai­ment le sacri­fice de la messe. On a reti­ré du nou­vel ordo, tous les textes qui affir­maient de manière très claire la fin pro­pi­tia­toire, fin essen­tielle du sacri­fice de la messe. Il reste encore une ou deux légères allu­sions, c’est tout. Or ceci a été fait parce que la fin pro­pi­tia­toire est niée par les protestants.

La dimi­nu­tion de la notion du sacri­fice est donc évi­dente dans le nou­veau rite, car le terme lui-​même de sacri­fice est rare­ment employé, et quand il est employé, il l’est à la manière des pro­tes­tants, parce que les pro­tes­tants acceptent le terme de sacri­fice pour la messe, mais uni­que­ment comme sacri­fice de louange ou eucha­ris­tique, mais sur­tout pas propitiatoire.

Il y a deux grandes réa­li­tés dans la messe, qui sont le sacri­fice et le sacre­ment. Ces deux grandes réa­li­tés se réa­lisent au même ins­tant, au moment où le prêtre pro­nonce les paroles de la consé­cra­tion du pain et du vin. Quand il a ter­mi­né les paroles de consé­cra­tion du pré­cieux sang, le sacri­fice de Notre-​Seigneur est réa­li­sé et Notre-​Seigneur est là pré­sent aus­si, le sacre­ment de Notre-​Seigneur est là aus­si. (…) Cette sépa­ra­tion mys­tique des espèces du pain et du vin réa­lise le sacri­fice de la messe. Donc, ces deux réa­li­tés sont réa­li­sées par les paroles de la consé­cra­tion. On ne peut pas les sépa­rer. Et c’est cela qu’ont fait les pro­tes­tants ; ils ont vou­lu seule­ment le sacre­ment sans le sacri­fice. Ils n’ont ni l’un ni l’autre, ni le sacre­ment, ni le sacri­fice. Et c’est le dan­ger des messes nou­velles. On ne parle plus du sacri­fice. On ne parle plus que de l’Eucharistie, on fait une « Eucharistie », comme s’il n’y avait qu’un repas. Il risque bien de ne plus y avoir ni l’un, ni l’autre. C’est très dan­ge­reux. À mesure que le sacri­fice dis­pa­raît, le sacre­ment dis­pa­raît aus­si, parce que ce qui est pré­sent dans le sacre­ment, c’est la vic­time. S’il n’y a plus de sacri­fice, il n’y a pas de vic­time [2].

Source : Le Phare Breton n° 13 

Notes de bas de page
  1. Propitiatoire signi­fie répa­ra­teur. Autrement dit, la messe est un sacri­fice qui nous rend Dieu pro­pice c’est-à-dire agréable[]
  2. Extraits de confé­rences parus dans le livre La messe de tou­jours.[]

Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.