Mes bien chers amis,
Voici venu pour vous, le jour où vous allez faire le pas. À la demande de l’évêque, vous allez faire ce pas qui signifie le choix définitif que vous faites de vous attacher à Notre Seigneur Jésus-Christ et de vous orienter vers son autel et vers son Sacrifice.
C’est une étape, vous le savez bien et vous y avez réfléchi sans doute pendant les jours de la retraite. C’est une étape très importante dans votre vie.
Et il me semble, que de la part de l’Église, c’est pour vous, un appel à la sainteté, un appel vibrant, un appel pressant à la sainteté.
Qu’est-ce que la sainteté, sinon devenir un vrai disciple de Notre Seigneur Jésus-Christ ? Et à ce propos, je voudrais vous rappeler la parabole de Notre Seigneur qui se trouve au chapitre quatorze de saint Luc (Lc 14, 16–26). Notre Seigneur exprime à l’occasion de cette parabole, l’appel qu’il adresse à tous ceux qu’il invite dans son Royaume, qui est signifié par le festin auquel sont invitées certaines personnes, par le Seigneur qui donne le festin. Et vous le savez, ceux qui sont invités s’excusent. L’un a acheté une paire de bœufs ; l’autre a acheté une villa ; le troisième s’est marié et ils ne peuvent pas venir.
Ils ne peuvent pas venir, c’est-à-dire qu’ils refusent d’entrer dans le royaume des Cieux. Pourquoi ? Parce qu’ils sont préoccupés des choses de la terre. Et alors, le Seigneur dit à ses serviteurs d’aller chercher les pauvres, les boiteux, les aveugles et de remplir la salle. C’est-à-dire ceux qui en définitive ne sont pas attachés à ce monde, ne possèdent rien, ont l’esprit de pauvreté et les fait venir dans son Royaume.
Et Notre Seigneur s’explique auprès de ses apôtres, de cette parabole. Il leur dit : Si quelqu’un ne renonce à tout ce qui l’entoure, à toute sa famille, à tous ses amis, ses parents et à lui-même : Si quis venit ad me, et non odit patrem suum et matrem et uxorem et filios et fratres et sorores, adhuc autem et animam suam, non potest meus esse discipulus : « Si quelqu’un vient à moi, et ne hait pas son père et sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple ».
Et Il ajoute par des comparaisons : Celui qui doit mener une bataille, réfléchit avant d’aller à la bataille, avant d’aller à la guerre, si ses troupes sont suffisantes par rapport à celui qu’il va affronter. Et s’il ne croit pas pouvoir vaincre, alors il va faire des propositions de paix. Notre Seigneur veut montrer par là la prudence, la vertu de prudence.
Et Il ajoute ensuite : Celui qui ne renonce pas à tout, ne peut pas être mon disciple : Qui non renuntiat omnibus, quæ possidet, non potest meus esse discipulus (Lc 14, 33).
« Si le sel de la terre s’affadit, à quoi servira-t-il. Il n’y a plus qu’à le jeter » (Lc 14, 34–35).
Et voilà. Je pense, mes chers amis, dans cette parabole, dans ces comparaisons que prend Notre Seigneur, Notre Seigneur nous dit, d’une manière impérative : Nous devons nous détacher.
Alors, évidemment, les gens du monde, les gens qui ont l’esprit du monde, ils ne comprennent plus. Dieu a créé le monde, nous a mis dans ce monde, mais c’est pour vivre de ce monde. C’est que ce monde est bon et que nous pouvons en jouir ; que nous pouvons en profiter. Mais Notre Seigneur, s’il a prononcé ces paroles et en a inspiré l’Écriture, c’est que (maintenant) les événements ont changé. C’est que l’homme est désormais déséquilibré, déstabilisé par le péché originel. Et alors, les biens de ce monde l’entraînent vers le péché ; l’entraînent vers l’éloignement de Notre Seigneur Jésus-Christ.
J’ai acheté des paires de bœufs ; j’ai construit une maison ; je me suis marié, je ne puis pas venir. Je ne puis pas m’attacher à vous. Je n’ai pas le temps.
Et voilà. Et c’est pourquoi Notre Seigneur demande que nous haïssions. Quand Notre Seigneur emploie ce terme odit, je pense qu’il signifie surtout : se détacher. Que le cœur se détache, que nos cœurs se détachent des biens de ce monde dont peut-être au moins, dans une certaine mesure, nous pouvons les utiliser, il faut vivre dans ce monde. Mais si, encore une fois, nous les utilisons – nous avons des contacts avec notre famille, avec nos amis, avec nos biens, avec ce que nous sommes – nous devons avoir le cœur détaché de ces choses-là, prêts à nous en séparer et en être séparés d’affection, d’attachement.
Alors au moment où l’Église, mes chers amis, va vous donner des pouvoirs vraiment extraordinaires, car en définitive, vous montez cette fois à l’autel, à l’autel qui est le Christ – dans quelques instants, le pontife va vous le rappeler – altare Christus est. À l’autel, où les linges qui entourent l’autel – et dont vous aurez la charge et le soin – représentent les membres du Corps mystique de Notre Seigneur Jésus-Christ et l’Église vous donne le pouvoir de lire désormais l’Écriture publiquement pour sanctifier les âmes, pour les purifier, pour les préparer, pour les préparer à recevoir Notre Seigneur Jésus-Christ dans leur âme, dans leur cœur.
Vous allez également toucher les vases sacrés. C’est vous qui allez porter à l’autel les vases sacrés et les oblations, les oblats. Vous participez donc d’une manière beaucoup plus intime au Sacrifice de la messe et vous vous préparez, un jour, à offrir le Saint Sacrifice.
Alors l’Église vous rappelle la nécessité de vous sanctifier et elle vous demande de garder le célibat.
Toutes ces choses ne sont plus comprises aujourd’hui et bien souvent, elles ne sont plus appliquées. Alors, vous vivez dans un temps où vous trouverez la contradiction. Il vous faudra donc être convaincus de ce que vous faites ; être convaincus de cette nécessité de la séparation, de ce détachement, de cet éloignement, sinon vous vous laisserez peu à peu, vous aussi, attirer, par les choses du monde et dire : après tout pourquoi pas, puisque maintenant on n’est plus dans la conception de l’Église d’autrefois, mais on a une autre vue des choses de ce monde, une autre appréciation des choses de ce monde. Pourquoi pas ? Pourquoi ne pas les utiliser ? Et vous vous éloigner par le fait même de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Cette conception est fausse. Notre Seigneur Jésus-Christ nous demande de nous détacher des choses de ce monde, parce qu’il sait pertinemment que ce sont des choses auxquelles nous nous attachons et qui nous font tomber dans le péché. Or le péché, est le grand mal de nos âmes et le mal de toutes les âmes.
Alors, vous qui allez désormais monter à l’autel, être l’exemple de la vertu pour les fidèles, il est normal que l’Église vous demande d’être des saints, de vous sanctifier. Et au cours des prières qui sont dites à votre sujet par le pontife, l’Église demande que le Saint-Esprit descende dans votre âme, avec tous ses dons. Vous serez donc à nouveau, reconfirmés en quelque sorte, dans la grâce du Saint-Esprit comme vous l’avez été au jour de votre baptême et au jour de votre confirmation. En ce jour, vous allez recevoir la grâce du sous-diaconat, vous serez reconfirmé dans la grâce de l’Esprit Saint.
Et qu’est-ce que la grâce de l’Esprit Saint sinon la charité de Notre Seigneur Jésus-Christ dans nos cœurs ?
Hier, à l’occasion du premier vendredi du mois, nous avons relu cette Épître magnifique de saint Paul, qui magnifie la charité de Notre Seigneur Jésus-Christ et qui souhaite que nous ayons la science de la charité de Notre Seigneur Jésus-Christ (Ep 3,16–19).
Eh bien, demandons aussi, à tous ceux qui nous ont précédés et qui sont dans le Ciel, tous les prêtres, tous les saints Prêtres qui nous ont précédés, de nous donner cet amour, cet amour de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Et le pontife va aussi prononcer une parole très importante, très grave, à votre sujet, qui est comme tout un programme, en disant que vous devez avoir la foi, une foi profonde, forte. Parce que tout ce qui n’est pas de la foi – c’est la parole même qui est prononcée – est péché ; tout ce qui n’est pas de la foi est péché. Voilà qui est très important, qui est très grave.
C’est-à-dire tout ce qui ne se rattache pas à la foi en Notre Seigneur Jésus-Christ est péché. Parce que Notre Seigneur Jésus-Christ est tout désormais. Il est Dieu, Il est Rédempteur, Il est sanctificateur, Il sera le Glorificateur. Il est notre tout. Et cela pour tous les hommes. Par conséquent, tous ceux qui d’une manière ou d’une autre, refusent ces réalités, refusent le règne de Notre Seigneur, refusent sa qualité de Dieu, ceux-là sont dans le péché, péché d’infidélité à Notre Seigneur Jésus-Christ.
Voilà encore une parole très importante qui vous est adressée et qui est tout un programme de vie, tout un programme d’apostolat, parce que vous aurez à répandre la foi. Vous aurez à prêcher Notre Seigneur Jésus-Christ, pour que l’on s’y attache, parce qu’il est la Voie, la Vérité et la Vie.
Remplissez donc, mes chers amis, vos intelligences, vos volontés, vos cœurs, vos âmes de Notre Seigneur Jésus-Christ. Vous avez peu de temps maintenant, en définitive, avant le sacerdoce, quelques mois qui vous séparent encore du sacerdoce. Un peu plus d’un an avec la grâce de Dieu.
Alors profitez de ces mois de séminaire pour vous pénétrer de cet idéal : Notre Seigneur JésusChrist. Qu’il soit vraiment votre lumière ; qu’il soit votre charité ; qu’il soit votre tout, afin que vous compreniez mieux la nécessité de pratiquer les vertus que le Bon Dieu vous demande de pratiquer.
Pensez à saint Paul, saint Paul qui persécutait Notre Seigneur et qui a été sur le chemin (de Damas) illuminé par Notre Seigneur Jésus-Christ Lui-même : « Que voulez-vous que je fasse ? » dit saint Paul.
Aujourd’hui aussi, demandez vous-même à Notre Seigneur : Que voulez-vous que je fasse ? – Eh bien, viens et suis-moi. – C’est en définitive ce que Notre Seigneur a dit à saint Paul. Et alors Notre Seigneur, d’une manière absolument incroyable, a choisi cet homme d’une manière toute particulière, pour en faire un apôtre exceptionnel, en l’instruisant Lui-même. C’est saint Paul lui-même qui dit : « Je n’ai même pas eu de contact avec tous les apôtres, sinon rapidement avec Pierre et Jacques. Mais tout m’a été donné par la Révélation de Notre Seigneur Jésus-Christ ».
Tout lui a été révélé, pendant les années qu’il a passées dans la solitude et dans le désert. Un peu comme ici, vous dans le séminaire, dans cette solitude du séminaire, eh bien le Bon Dieu se révèle à vous.
Et saint Paul a encore eu cette grâce extraordinaire de pénétrer dans le Ciel et d’y voir des choses que les hommes ne sont pas capables de prononcer, ne sont pas capables de dire. C’est cela l’apôtre. L’apôtre est celui qui, dans une certaine mesure, voit. Bien sûr c’est la foi qui nous fait voir, puisque nous n’avons pas la vision. Mais par sa foi, par sa foi vive, voit en quelque sorte la réalité de Notre Seigneur Jésus-Christ. C’est-à-dire la réalité de Dieu, la réalité de la Sainte Trinité, car en Jésus se trouve le Père et le Saint-Esprit et toute l’œuvre que Jésus-Christ a réalisée et à laquelle vous êtes appelés à contribuer. Quelle chose magnifique, mes chers amis, quelle grâce extraordinaire le Bon Dieu vous fait ! Quelle joie profonde pour vos âmes, malgré les difficultés, malgré les épreuves auxquelles vous aurez à répondre et que vous aurez à subir.
Eh bien ayez confiance ! Demandez à la Vierge Marie qui n’a eu qu’une pensée, un amour : son divin Fils ; elle n’a jamais pensé à autre chose ; elle n’a jamais voulu autre chose ; elle n’a jamais désiré autre chose que son divin Fils, son Règne. Elle le manifeste encore par toutes les apparitions qu’elle a faites ici-bas pour le règne de son divin Fils.
Demandez à la très Sainte Vierge Marie de vous donner un peu de sa science de Notre Seigneur Jésus-Christ, elle qui l’avait d’une manière magnifique, puisqu’elle était remplie du Saint-Esprit, remplie de science. Sans doute elle n’avait pas la vision béatifique comme son divin Fils, mais elle en approchait.
Alors, demandez-lui de vous faire participer à sa science, afin de vous faire participer aussi à son amour pour Notre Seigneur et son service pour le règne de Jésus.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.