Sermon de Mgr Fellay à Avignon le 8 sept. 2013 : nous sommes persécutés pour notre fidélité à la foi catholique !


Nous sommes persécutés pour notre fidélité à la foi catholique !

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Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit,

Messieurs les abbés,

Bien chers Membres des Confréries des Pénitents noirs et blancs,

Bien chers fidèles,

Avec une immense joie, nous célé­brons aujourd’­hui, en action de grâces, cet anni­ver­saire de trente ans de la célé­bra­tion de la Messe de tou­jours dans cette magni­fique église. Il me semble qu’il y a un mot qui résume toute cette Fête, c’est le mot : fidé­li­té, fidé­li­té dans toutes les accep­tions du mot. Les membres de l’Eglise, on les appelle fidèles. Et en latin, le terme consa­cré est chris­ti fideles qu’on pour­rait tra­duire par fidèles du Christ, ceux qui ont la foi dans le Christ. Car dans fidé­li­té, vous avez le mot fides, et fides c’est d’a­bord la foi. Donc les fidèles, ce sont ceux qui ont la foi. Et on peut com­men­cer par dire que cette église, si elle a été construite, c’est à cause de la foi. Si on y trouve des mer­veilles – elle est vrai­ment très, très belle – eh bien, c’est que cha­cun de ses tableaux, cha­cun de ses élé­ments qui font sa beau­té ont pour ori­gine la foi. C’est à cause de la foi que cette église a été construite et si, il y a trente ans, elle est reve­nue au culte, c’est encore à cause de la foi, mais aus­si à cause d’une fidé­li­té car dans le mot foi, vous avez aus­si parole don­née. Est fidèle celui qui garde la parole don­née. Et du catho­lique on attend qu’il garde la parole don­née, ce qu’on appelle les pro­messes du Baptême. Et si, il y a trente ans, vous avez fait toutes les démarches pour revi­vi­fier cette église, c’est à cause de cette fidé­li­té à la foi catho­lique et à tout ce qui en découle. Et ce qui est extra­or­di­naire c’est que cette église est belle, mais aus­si, elle a une âme. Et cette âme, c’est la foi, c’est la fidé­li­té. Une fidé­li­té telle que ce qui a ani­mé ceux qui ont fait ces tableaux, ceux qui ont fait cet autel, c’est exac­te­ment la même fidé­li­té que la vôtre. Cette église a été faite pour une Messe, une Messe catho­lique, c’est la nôtre. On l’ap­pelle la Messe de tou­jours parce qu’elle dépasse les temps. Et si, il y a trente ans, vous êtes venus ici, c’est parce que jus­te­ment on a vou­lu enle­ver cette Messe et que vous vou­liez la gar­der. Fidélité.

Trente ans, trente ans de cette fidé­li­té, fidé­li­té dif­fi­cile parce qu’on y retrouve toute notre rela­tion avec l’Eglise. Nous vou­lons être fidèles. Nous main­te­nons que nous sommes catho­liques et nous vou­lons l’être à tout prix et c’est pour ça qu’on vous demande : qui est votre chef ? Eh bien, il s’ap­pelle aujourd’­hui le pape François, suc­ces­seur de Pierre. Nous sommes catho­liques. Nous recon­nais­sons ces auto­ri­tés. Nous prions pour elles. Et en même temps, et au nom de cette foi, et au nom de cette fidé­li­té, nous sommes en conflit avec ces mêmes auto­ri­tés. Ça a été tout le drame de Mgr Lefebvre, c’est le drame de la Fraternité, le vôtre, mais c’est en même temps un magni­fique, appelons-​le, com­bat, le com­bat de la foi et de la fidé­li­té. Nous ne vou­lons aller ni à droite, ni à gauche. S’il y a des choses qui nous font mal dans l’Eglise, aujourd’­hui, néan­moins nous ne vou­lons pas reje­ter cette Eglise. Nous n’a­vons pas le droit. Mais ces choses qui font mal, nous les reje­tons. On nous traite alors de déso­béis­sants, alors que c’est au nom de l’o­béis­sance que nous agis­sons, au nom de cette parole don­née, au nom de la foi de notre Baptême. 

C’est très mys­té­rieux ce qui se passe aujourd’­hui. On voit d’un côté ces mêmes auto­ri­tés dans l’Eglise qui dénoncent les maux que nous dénon­çons. Le pape Jean-​Paul II par­le­ra de l’a­po­sta­sie des nations, une apos­ta­sie silen­cieuse. Les nations autre­fois catho­liques ont per­du la foi. Elles s’en sont allées, jus­qu’à l’apostasie : un terme ter­rible, un désert, un désert de la foi. Ces papes, qu’il s’a­gisse de Paul VI, qu’il s’a­gisse de Jean-​Paul II, qu’il s’a­gisse de Benoît XVI, vont nous dire que l’hé­ré­sie est répan­due à pleines mains dans l’Eglise au point que les catho­liques sont ten­tés non seule­ment par le doute mais aus­si par l’ag­nos­ti­cisme. Ne plus rien recon­naître. Paul VI, vous vous en sou­ve­nez, disait : « par quelques fis­sures, les fumées de Satan sont entrées dans le Temple de Dieu ». Ces paroles sont très fortes. Benoît XVI disait : « le bateau coule ». Benoît XVI voit dans la réforme litur­gique la cause de la crise de l’Eglise. Donc ils le disent. 

Mais, lorsque nous nous oppo­sons, eh bien, on nous traite de schis­ma­tiques, de rebelles, de tout ce qu’on veut. Finalement, le Pape va recon­naître que notre Messe n’a jamais été abro­gée. Cela veut dire que tou­jours les fidèles avaient le droit d’y assis­ter et les prêtres de la célé­brer. C’est donc, mes bien chers frères, la plus haute auto­ri­té de l’Eglise qui vous confirme que vous avez le droit, que vous avez par­fai­te­ment rai­son de vous mettre dans ce com­bat pour défendre toutes ces valeurs, véri­tés, tré­sors de l’Eglise. Et si nous les gar­dons, ce n’est pas pour nous. C’est cer­tai­ne­ment pour nous aus­si, mais c’est pour nos enfants, c’est pour toute l’Eglise. Ce tré­sor que l’on appelle la Tradition, c’est le tré­sor de l’Eglise qui, par un mys­tère invrai­sem­blable, se trouve entre nos mains, comme un dépôt. Un dépôt, lorsque quel­qu’un le reçoit, son devoir, c’est de le conser­ver intact. Pas pour lui-​même, il sait bien que ça ne lui appar­tient pas. Ce tré­sor, c’est le tré­sor de l’Eglise, mani­fes­té ici encore une fois dans ces pierres, dans ces tableaux, dans ces stucs. Et tout, jus­te­ment, nous rap­pelle ce devoir de fidé­li­té. Et un anni­ver­saire, c’est tou­jours, non seule­ment un regard sur le pas­sé, un regard sur tous ceux qui ont ren­du cet anni­ver­saire pos­sible, sur tous ceux qui ne sont plus main­te­nant avec nous aujourd’­hui et qui ont, cha­cun à leur place, contri­bué à main­te­nir cette âme, à main­te­nir ces murs. Ce n’est pas seule­ment un regard sur le pas­sé, pas seule­ment un regard de gra­ti­tude envers tous ceux qui ont contri­bué – ne les oublions pas aujourd’­hui – mais c’est aus­si un regard sur le futur. 

Demain, qu’en sera-​t-​il, de cette Eglise ? Eh bien, encore une fois, il y a un mot qui est la clef, qui résume tout c’est le mot fidé­li­té. Nous n’a­vons pas besoin d’in­no­ver, pas besoin d’inventer. Il suf­fit de conti­nuer. Dans l’Introït de la solen­ni­té que nous célé­brons aujourd’­hui – nous avons célé­bré la fête au cours de la semaine – dans l’Introït donc, ce mot fidé­li­té, fidé­li­té par-​dessus toutes les géné­ra­tions, eh bien, c’est même le Bon Dieu qui se l’at­tri­bue. Dieu est fidèle. On n’ose pas dire Lui aus­si. Il fau­drait dire Lui d’a­bord, Lui le premier. 

Et du mot fidèle, du mot foi, fides, vient encore un autre mot qui est plus qu’im­por­tant aujourd’­hui, c’est le mot confiance devant Celui qui garde la parole don­née. Eh bien, cette fidé­li­té engendre la confiance. Et s’il y a quel­qu’un en qui nous devons avoir confiance, c’est le Bon Dieu, jus­te­ment, en voyant com­bien Il nous a assis­tés, com­bien Il nous aide. C’est la prière de ce jour qui nous dit que Sa Grâce nous pré­vient et qu’elle nous suit. Vous enten­dez bien : elle nous pré­vient et elle nous suit, c’est-​à-​dire qu’elle nous accom­pagne. Le Bon Dieu, il ne faut pas l’ou­blier cela, est tou­jours là, Créateur. Il est d’a­bord Créateur. Qu’est-​ce que cela veut dire ? Créer, c’est faire de rien, nous le savons bien. Nous créa­tures, nous avons été faits de rien, par le Bon Dieu. Mais très sou­vent, ce mot créa­tion, nous ne le com­pre­nons pas exac­te­ment comme il le fau­drait. La plu­part du temps, nous voyons dans le Créateur un peu comme un menui­sier qui a fait une table, qui a fait une chaise. Une fois la chaise faite, le menui­sier peut s’en aller, la chaise, elle, reste. Alors, on pense : le Bon Dieu a fait la Création, Il peut s’oc­cu­per là-​haut d’autres choses. Nous, nous res­tons. Eh bien non, il n’en est pas du tout ain­si. Cette créa­tion à par­tir de rien conti­nue. La conser­va­tion dans l’être néces­site abso­lu­ment l’in­ter­ven­tion conti­nuelle, per­ma­nente du Bon Dieu pour nous faire exis­ter. L’image peut-​être la plus simi­laire que nous pou­vons trou­ver cor­res­pond à ces êtres aux­quels nous pou­vons, nous, don­ner l’exis­tence dans notre tête, nos pen­sées, nos ima­gi­na­tions. Nous sommes capables…- oui, c’est un être un peu fra­gile -, nous sommes capables de créer ces êtres qui passent. Vous pou­vez fer­mer les yeux, vous pou­vez vous inven­ter un arbre. Vous l’a­vez dans votre tête. Il ne sor­ti­ra jamais de là, mais vous arri­vez à vous en faire un. Eh bien, cet arbre n’existe que tant que vous y pen­sez. A l’ins­tant même où vous pas­sez à une autre idée, votre arbre repart de là où il venait, c’est-​à-​dire de rien du tout, de quelques images de votre mémoire.

Nous n’exis­tons, mes bien chers frères, que pour autant que Dieu pense à nous. S’il y avait un ins­tant où le Bon Dieu oubliait de nous regar­der, nous repar­ti­rions dans le néant, tout sim­ple­ment dans le néant. Pour que nous conti­nuions d’exister, il faut abso­lu­ment que le Bon Dieu pense à nous. Autrement dit, toute notre exis­tence, que nous y pen­sions ou non, n’a abso­lu­ment aucune impor­tance, toute notre exis­tence se passe sous le regard de Dieu. 

Saint Augustin va pous­ser plus loin. Il va nous dire que ce regard, c’est un regard d’a­mour. C’est parce que Dieu m’aime que je suis. S’Il nous a créés, c’est parce qu’Il nous aime. Et s’Il nous a créés, c’est parce qu’Il nous veut au Ciel. Et comme le péché des hommes a tout mis par terre, eh bien, Dieu res­taure ce plan par le Sacrifice de Son Fils sur la Croix, par l’Incarnation, par la Rédemption, mys­tère indi­cible, expres­sion de cet amour du Bon Dieu pour nous mais qui dépasse tout. Impossible à com­prendre pour nous. Et quand on voit une telle mani­fes­ta­tion de l’a­mour de Dieu Tout-​Puissant, infi­ni, pour nous créa­tures de rien du tout, mais com­ment se fait-​il que nous hési­tions encore à Lui faire confiance ? Il faut Lui don­ner cette confiance. C’est Lui faire injure que d’en dou­ter. Ce n’est pas une confiance stu­pide, nous sommes libres et donc, le Bon Dieu nous demande de répondre à Ses Commandements. « Celui qui accom­plit Mes Commandements, voi­là celui qui M’aime ». Nous vou­lons une preuve de ce que nous L’aimons ? Eh bien, il suf­fit de Lui obéir. Et si nous n’o­béis­sons pas à Ses Commandements, eh bien, nous ne L’aimons pas. Alors, là, oui, mal­heur à nous.

Confiance. Nous avons des épreuves bien dif­fi­ciles. C’est vrai­ment dans la tri­bu­la­tion que nous fai­sons notre Ciel, mais là encore, n’ou­blions pas que jamais le Bon Dieu ne per­met l’é­preuve sans nous don­ner, sans nous pro­po­ser la grâce pro­por­tion­née. Jamais le Bon Dieu nous tente au-​dessus de nos forces dans le sens où nous par­lons de nos forces accom­pa­gnées de la grâce. Chaque épreuve, la moindre épreuve que le Bon Dieu nous donne, n’est jamais là pour nous faire tom­ber. Elle est tou­jours là pour nous faire gran­dir. Il y en a des épreuves dans une vie. Eh bien, jamais le Bon Dieu ne perd le contrôle, jamais le Bon Dieu ne peut per­mettre que ce soit le mal qui gagne. C’est dif­fi­cile pour nous de com­prendre tout cela mais le Bon Dieu a une bon­té infi­nie et cette Bonté néces­sai­re­ment triomphe, même si nous, nous ne voyons que le côté mau­vais, des­truc­teur de tous les côtés. N’oublions jamais que le Bon Dieu ne peut pas tolé­rer, ne peut pas per­mettre qu’il y ait, à la fin du compte, un quel­conque mal qui ait triom­phé de Lui. Jamais.

Nous, ici-​bas, nous avons des souf­frances, des contra­rié­tés, toutes sortes de choses qui vont de tra­vers. C’est vrai. Eh bien, deman­dons au Bon Dieu qui nous a dit que tout coopé­rait au bien de ceux qui L’aiment, deman­dons vrai­ment que toutes les épreuves, toutes vrai­ment, coopèrent à ce bien, qui fina­le­ment est l’ac­qui­si­tion du Ciel.

Demandons à ce Dieu fidèle, pour nous aus­si, cette grâce – car c’est une grâce et tous les jours il faut la deman­der – de la fidé­li­té. Fidélité à la foi, fidé­li­té à l’Eglise, fidé­li­té à ses com­man­de­ments, aux pro­messes de notre Baptême. Alors, après, avec confiance, oui, conti­nuons, atten­dons les qua­rante ans, les cin­quante ans, tout ce que le Bon Dieu vou­dra. Vraiment, ayons cette confiance. Ne nous lais­sons pas nous river sur les contin­gences du monde. Elles passent. Chaque jour est un peu dif­fé­rent. On nous disait qu’à chaque jour suf­fit sa peine et c’est vrai. Passons au-​dessus. Le Bon Dieu est au-​dessus du temps, comme la Messe, comme la foi. Peu importe ce qui se passe au niveau des hommes. Peu importe ce qui se passe au niveau de l’Eglise aujourd’­hui. L’Eglise, elle, pas­se­ra au-​dessus de cette épreuve parce qu’Elle a la pro­messe du Bon Dieu. Et donc, res­tons fidèles, c’est la meilleure cer­ti­tude de res­ter dans l’Eglise.

Demandons cette grâce pour pou­voir célé­brer bien d’autres anni­ver­saires et sur­tout l’an­ni­ver­saire du Ciel qui est plus qu’un anni­ver­saire puisque c’est l’Eternité. Ainsi soit-il.

Au Nom du Père et du Fils, et du Saint-​Esprit, ain­si soit-il. 

Afin de conser­ver à ce ser­mon son carac­tère propre, le style oral a été maintenu.

Source : La Porte Latine

FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.