Allez à Joseph !

Reni, Guido (1575-1642, Bologne)

En ce mois de mars dédié à saint Joseph, recou­rons plus encore à celui qui se plaît à pro­té­ger l’Église et ses enfants, dans toutes leurs nécessités.

Pourquoi saint Joseph est-​il Patron de l’Église uni­ver­selle ? Tous ses pri­vi­lèges, toute sa puis­sance, viennent de deux titres : il est l’époux de la Très Sainte Vierge Marie, et le père nour­ri­cier de l’Enfant Jésus. Par consé­quent, il est chef de la Sainte Famille. Or, celle-​ci est l’Église en germe. Donc saint Joseph est le chef de l’Église en germe, qui s’est ensuite développée.

Le titre de Patron de l’Église uni­ver­selle convient donc à saint Joseph, et il a été offi­ciel­le­ment décer­né en 1870 par le pape Pie IX, lors de la prise sacri­lège de Rome par les Piémontais révo­lu­tion­naires. A cette occa­sion, le pape a affir­mé la pré­émi­nence de saint Joseph sur tous les saints, hor­mis la Mère de Dieu. Le sou­ve­rain pon­tife dit que tou­jours, dans les heures cri­tiques, l’Église a implo­ré l’assistance de saint Joseph. « Or, dans les temps si tristes que nous tra­ver­sons, l’Église est pour­sui­vie de tous côtés par ses enne­mis. » Pie IX révèle que les évêques, en leur nom et au nom de leurs fidèles, ont prié le pape qu’il daigne nom­mer saint Joseph patron de l’Église uni­ver­selle. Le pape déclare donc solen­nel­le­ment saint Joseph patron de l’Église catho­lique, vou­lant se mettre, lui et tous les fidèles, sous le très puis­sant patro­nage du saint.

Mais pour­quoi est-​ce le patron tout trou­vé pour défendre l’Église de Jésus Christ ? C’est cette fois le pape Léon XIII qui nous répond : « Il est à la fois logique et digne de lui que saint Joseph couvre main­te­nant et défende de son céleste patro­nage l’Église de Jésus Christ, de même qu’autrefois il sub­ve­nait à tous les besoins de la sainte famille de Nazareth et l’entourait de sa reli­gieuse et conti­nuelle protection. »

Saint Joseph est donc patron de l’Église ; il la défend. Par consé­quent, un mot d’ordre s’impose à tout fidèle : « Allez à Joseph ! » Cette injonc­tion est tirée du livre de la Genèse (Ge 41, 55). C’est une parole du pha­raon, concer­nant Joseph, l’un des douze fils de Jacob. Vendu par ses frères, il a été leur sau­veur et celui de l’Égypte. Il fut l’homme le plus puis­sant du pays, juste der­rière le roi. Il a fait mettre du blé en réserve dans les gre­niers pen­dant sept années de récoltes excep­tion­nelles. Et ensuite, quand sept années de séche­resse ont sui­vi, il y avait assez de blé pour nour­rir les Égyptiens et les habi­tants des pays voi­sins. Que fallait-​il faire, cepen­dant, pour obte­nir une ration de blé ? Il fal­lait « aller à Joseph », se pré­sen­ter devant lui et lui deman­der ce dont on avait besoin. Léon XIII dit à ce sujet que c’est une croyance par­ta­gée par nombre de Pères de l’Église et confir­mée par la sainte litur­gie, que Joseph, fils de Jacob ven­du par ses frères, est une figure de saint Joseph. « L’un fit réus­sir et pros­pé­rer les inté­rêts pri­vés de son maître, et bien­tôt ren­dit d’admirables ser­vices à l’ensemble du royaume ; l’autre, des­ti­né à être le gar­dien du chris­tia­nisme, doit être regar­dé comme le Patron et le Défenseur de l’Église, qui est en toute véri­té la mai­son du sei­gneur et le royaume de Dieu sur terre. »

Saint Bernard affir­mait déjà, pour sa part : « Le pre­mier Joseph fit des pro­vi­sions de blé pour lui et pour tout le peuple, le second reçut la garde, pour lui et le monde entier, du pain vivant venu du Ciel. » Ce doc­teur dit aus­si que saint Joseph est le fidèle et pru­dent ser­vi­teur dont parle Notre Seigneur à ses apôtres (Mt 24, 21). « Quel est, pensez-​vous, le ser­vi­teur fidèle et pru­dent que son maître a éta­bli sur ses gens, pour leur dis­tri­buer leur nour­ri­ture en temps conve­nable ? » Notre Seigneur ne parle pas ici direc­te­ment de saint Joseph ; Il parle de tout ser­vi­teur de Dieu ; mais cela convient au plus haut point à son père nour­ri­cier. Heureux ce ser­vi­teur, si son maître, à son arri­vée, le trouve agis­sant ain­si ! En véri­té, je vous le dis, il l’établira sur tous ses biens (Mt 24, 47). Il devien­dra le major­dome, l’intendant universel.

Allons donc à Joseph ! Avons-​nous besoin d’un secours tem­po­rel ? Allons à lui ! L’abbé Berto écri­vait que saint Joseph est le « sur­in­ten­dant des caisses d’épargne. Soyons bien sûr qu’il a don­né ce qu’il fal­lait pour le moment. Et soyons sûrs aus­si qu’il don­ne­ra à mesure ce qu’il fau­dra. » Avons-​nous besoin d’un secours spi­ri­tuel ? Allons à Joseph ! Sainte Thérèse d’Avila enseigne : « Je n’ai pas connu une seule per­sonne, ayant pour lui une dévo­tion vraie et l’honorant d’un culte par­ti­cu­lier, que je ne l’aie vue plus avan­cée dans la ver­tu. Il fait pro­gres­ser d’une manière admi­rable les âmes qui se recom­mandent à lui. (…) Que celui qui n’aura pas de maître pour lui ensei­gner l’oraison prenne ce glo­rieux saint pour guide, et il ne ris­que­ra point de s’égarer. »

S’agit-il d’une affaire dif­fi­cile ? Allons à Joseph, encore et tou­jours. Recourons à l’avocat des causes déses­pé­rées. La prière à Saint Joseph, patron des causes dif­fi­ciles, fait dire : « Vous qui êtes si puis­sant auprès de Dieu qu’on a pu dire : ‘’Au Ciel, Joseph com­mande plu­tôt qu’il ne sup­plie.” » Sainte Thérèse d’Avila affirme encore : « Les autres saints semblent avoir reçu de Dieu le pou­voir de nous assis­ter dans une néces­si­té spé­ciale. Mais ce glo­rieux saint, je le sais par expé­rience, nous assiste dans tous nos besoins. » Il nous assiste jusqu’à notre der­nier souffle. Le père Hugon explique : « Car il se plaît sur­tout à accor­der les grâces de salut, et notam­ment la grâce des grâces, la per­sé­vé­rance finale », car il a ren­du son âme entre les bras de Notre-​Seigneur et de la Très Sainte Vierge Marie.

Saint Joseph est encore patron de toutes les condi­tions. Il est le patron de l’enfance : il a abri­té l’Enfant Jésus sous son man­teau pater­nel. Il est patron des familles chré­tiennes : car il est chef de la plus auguste famille. Il est patron des époux : le pape Léon XIII dit qu’il est par­fait modèle de l’union des cœurs et de la fidé­li­té conju­gale. Il est patron des pères de famille : le même pape enseigne que ceux-​ci ont en saint Joseph la plus belle per­son­ni­fi­ca­tion de la vigi­lance et de la pré­voyance pater­nelles. Il est le patron des ouvriers, lui le char­pen­tier de Nazareth. Il est patron des Vierges et de la vir­gi­ni­té. Il est patron des âmes sacer­do­tales : Joseph et le prêtre ont reçu tous deux la mis­sion de por­ter Jésus-​Christ aux hommes. Le cha­noine Lallement écrit : « Confions-​lui la sain­te­té des prêtres : qu’il leur apprenne à trai­ter avec Jésus ; qu’il leur apprenne à trai­ter Jésus lui-​même, Jésus dans l’hostie, et Jésus dans le corps mys­tique. » Il est encore patron des affli­gés, lui qui a enten­du annon­cer que Jésus serait un signe de contra­dic­tion et que le cœur de Marie serait per­cé d’un glaive de dou­leurs. Il est le patron des exi­lés, lui qui a dû orga­ni­ser la fuite en Égypte. Il est patron de tous les chré­tiens, comme l’écrit saint François de Sale dans une belle prière à saint Joseph : « Ouvrez vos yeux de père sur les inté­rêts de vos enfants. »

Retenons donc ce mot d’ordre : « Allez à Joseph ! » Dom Maréchaux écrit : « Jésus répète à tous les mal­heu­reux de la terre, du haut de son trône éter­nel, la parole que le pha­raon d’Égypte disait à tous ceux qui lui deman­daient du pain : Allez à Joseph ! (…) Le nou­veau Joseph tient à sa dis­po­si­tion les gre­niers de l’abondance divine ; il donne à tous ceux qui l’invoquent, de loin comme de près, secours maté­riels, allé­ge­ment dans les peines, conso­la­tion d’en-haut, grâces de lumière et de récon­fort. Qu’elle n’est pas la clien­tèle de saint Joseph ! »

Le mot de la fin revient encore à sainte Thérèse d’Avila : « Je vou­drais per­sua­der toutes les âmes qu’elles doivent por­ter de la dévo­tion à ce glo­rieux saint. Une longue expé­rience, en effet, m’a mon­tré les grâces qu’il nous obtient de Dieu. (…) Je demande seule­ment, pour l’amour de Dieu, à celui qui ne me croi­rait pas, d’en faire l’épreuve. Il ver­rait par son expé­rience com­bien il est avan­ta­geux de se recom­man­der à ce glo­rieux patriarche et d’avoir pour lui une dévo­tion spéciale. »

Source : Lou Pescadou n° 230