La fête de Notre-Dame des Sept Douleurs nous invite à contempler la participation de Marie à la Passion. Extraits de l’encyclique Ad Diem Illum de Saint Pie X.
Aussi, entre Marie et Jésus, perpétuelle société de vie et de souffrance, qui fait qu’on peut leur appliquer à égal titre cette parole du Prophète : Ma vie s’est consumée dans la douleur et mes années dans les gémissements [1]. Et quand vint pour Jésus l’heure suprême, on vit la Vierge debout auprès de la croix, saisie sans doute par l’horreur du spectacle, heureuse pourtant de ce que son Fils s’immolait pour le salut du genre humain, et, d’ailleurs, participant tellement à ses douleurs que de prendre sur elle les tourments qu’il endurait lui eût paru, si la chose eût été possible, infiniment préférable [2].
La conséquence de cette communauté de sentiments et de souffrances entre Marie et Jésus, c’est que Marie mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l’humanité déchue [3], et, partant, la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang.
Certes, l’on ne peut dire que la dispensation de ces trésors ne soit un droit propre et particulier de Jésus-Christ, car ils sont le fruit exclusif de sa mort, et lui-même est, de par sa nature, le médiateur de Dieu et des hommes.
Toutefois, en raison de cette société de douleurs et d’angoisses, déjà mentionnée, entre la Mère et le Fils a été donné à cette auguste Vierge d’être auprès de son Fils unique la très puissante médiatrice et avocate du monde entier [4].
La source est donc Jésus Christ : de la plénitude de qui nous avons tout reçu [5] ; par qui tout le corps, lié et rendu compact moyennant les jointures de communication, prend les accroissements propres au corps et s’édifie dans la charité [6]. Mais Marie, comme le remarque justement saint Bernard, est l’aqueduc [7] ; ou, si l’on veut, cette partie médiane qui a pour propre de rattacher le corps à la tête et de transmettre au corps les influences et efficacités de la tête, Nous voulons dire le cou. Oui, dit saint Bernardin de Sienne, elle est le cou de notre chef, moyennant lequel celui-ci communique à son corps mystique tous les dons spirituels [8]. Il s’en faut donc grandement, on le voit, que Nous attribuions à la Mère de Dieu une vertu productrice de la grâce, vertu qui est de Dieu seul. Néanmoins, parce que Marie l’emporte sur tous en sainteté et en union avec Jésus-Christ et qu’elle a été associée par Jésus-Christ à l’œuvre de la rédemption, elle nous mérite de congruo, comme disent les théologiens, ce que Jésus-Christ nous a mérité de condigno, et elle est le ministre suprême de la dispensation des grâces. Lui, Jésus, siège à la droite de la majesté divine dans la sublimité des cieux [9]. Elle, Marie, se tient à la droite de son Fils ; refuge si assuré et secours si fidèle contre tous les dangers, que l’on n’a rien à craindre, à désespérer de rien sous sa conduite, sous ses auspices, sous son patronage, sous sa protection [10].
Ces principes posés, et pour revenir à notre dessein, qui ne reconnaîtra que c’est à juste titre que Nous avons affirmé de Marie que, compagne assidue de Jésus, de la maison de Nazareth au plateau du Calvaire, initiée plus que toute autre aux secrets de son cœur, dispensatrice, comme de droit maternel, des trésors de ses mérites, elle est, pour toutes ces causes, d’un secours très certain et très efficace pour arriver à la connaissance et à l’amour de Jésus-Christ ? Ces hommes, hélas ! nous en fournissent dans leur conduite une preuve trop péremptoire qui, séduits par les artifices du démon ou trompés par de fausses doctrines, croient pouvoir se passer du secours de la Vierge. Infortunés, qui négligent Marie sous prétexte d’honneur à rendre à Jésus-Christ ! Comme si l’on pouvait trouver l’Enfant autrement qu’avec la Mère !
Saint Pie X, Encyclique Ad Diem Illum pour l’anniversaire de la définition de l’Immaculée Conception, 2 février 1904.
- Psaume XXX, 11[↩]
- S. Bonaventure, I Sent., d. 48, ad Litt., dub. 4[↩]
- Eadmer, De Excellentia Virg. Mariæ, c. IX[↩]
- Pie IX, in Bull. Ineffabilis[↩]
- 1ère Épitre de St Jean, 16[↩]
- Épître aux Éphésiens, IV, 16[↩]
- Serm. de temp., in Nativ. B. V., » De Aquæductu « , n. 4[↩]
- S. Bernardin de Sienne, Quadrag. de Evangelio æterno, Serm. X, a. III, c.3[↩]
- Épître aux Hébreux I, 3[↩]
- Pie IX, in Bull. Ineffabilis[↩]