Les saints frères Léonce et Castor sont nés à Nîmes de parents renommés. Ces frères étaient dévots, et généreux en aumônes. Tandis que saint Castor et son épouse entrèrent chacun en religion, Castor fondant le monastère de Mananque près d’Apt, avant d’être élu unanimement évêque d’Apt, saint Léonce devint évêque de Fréjus[1].
Vers l’an 391, saint Léonce reçoit la visite de pèlerins insolites : les saints Honorat, Caprais et Jacques, aspirant à la vie anachorétique, et que, n’ayant pu trouver un désert sur d’autres rivages méditerranéens, la Providence ramène en Provence. Ils se lient d’amitié avec l’évêque de Fréjus. Pour ne pas s’éloigner de cet homme de Dieu, ils cherchent une retraite aux alentours : saint Léonce les amène à l’archipel de Lérins. L’île principale comporte les ruines d’une cité romaine antique, mais ce qui fait l’appréhension de tous les côtiers, c’est qu’elle est envahie de serpents. Honorat conforte ses disciples par ces versets du psaume 90 : Vous marcherez sur l’aspic et le basilic, et vous foulerez aux pieds le lion et le dragon, et de l’Evangile : Voici que je vous ai donné le pouvoir de marcher sur les serpents et les scorpions. Les serpents en effet disparurent de l’île. Saint Léonce voulut ordonner Honorat prêtre pour officier sur cet îlot pacifié, Honorat dut s’y soumettre malgré son humble protestation. La communauté construisit une église et le monastère.
Une nouvelle hérésie commença avec Pélage, dès 405, qui prêchait à Rome, niant tant le péché originel que la nécessité de la grâce de Dieu pour le salut. Entretemps, comme une punition salutaire, les Vandales et les Suèves saccagent la Gaule dès 407, Rome est pillée par les Wisigoths en 408, et les Burgondes envahissent la province Viennoise en 413, comme pour forcer les chrétiens à solliciter la grâce de Dieu. L’hérésie suivant Pélage en Afrique, quatre conciles s’y tinrent pour condamner le pélagianisme entre 412 et 418 ; saint Augustin y participait. Héros, évêque d’Arles, et Lazare, évêque d’Aix, chassés par les barbares, et réfugiés en Palestine, suscitèrent en 415 le concile de Diospolis (ou Lydde, comme il se lit au chapitre IX des Actes de Apôtres), où Pélage se rendit et trompa les quatorze évêques grecs en se démarquant de sa propre hérésie. Saint Augustin, par la suite, aura à cœur de démonter les circonlocutions hypocrites de Pélage. Le pape saint Innocent 1er écrivit une lettre le 27 janvier 417, rappelant la nécessité du baptême pour le salut, même pour les enfants, et excommunia Pélage.
Saint Léonce a la confiance du nouveau pape, saint Boniface 1er, qui lui envoie un courrier traitant des agissements de l’évêque de Valence. Saint Castor, frère de saint Léonce, décède le 2 septembre 420. Cassien, Abbé de St-Victor de Marseille, dédia ses dix premières Conférences à saint Léonce vers l’an 423. Saint Honorat devenant archevêque d’Arles en 426, après près de 35 ans d’abbatiat, St Maxime de Château-Redon [2] devient le nouvel Abbé de Lérins. Les saints Honorat et Jacques décèdent le 16 janvier 429 à Arles.
Tandis qu’en 431, le pélagianisme est condamné en Orient au concile d’Ephèse, le nouveau pape, Saint Célestin 1er, écrit à saint Léonce une lettre contre l’hérésie qu’on appellera semi-pélagienne, pélagianisme atténué, qui atteint Cassien à Marseille, et bientôt Faustus, anglais entré à Lérins en 420~30, qui en deviendra l’Abbé en 434 [3]. Le semi-pélagianisme, plus subtil, sera plus long à dissiper : Faustus reconnaît la nécessité de la grâce pour être sauvé, mais il prétend que Dieu attend le vouloir du pécheur pour le purifier, alors que l’Eglise enseigne, comme l’a exposé saint Augustin, que Dieu est à l’origine de la conversion du pécheur. L’erreur de Faustus ne sera condamnée qu’en 529, au concile d’Orange.
De nos jours, on entend certains modernistes, nouveaux semi-pélagiens, surestimer le mérite de l’homme, et sous-estimer la nécessité de la grâce…
Quant à saint Léonce, martyr selon certains, il s’est endormi dans le Seigneur le 1er décembre 432, ayant dirigé le diocèse de Fréjus plus de quarante ans. Théodore lui succède. L’église cathédrale de Fréjus est dédiée à saint Léonce qui est le patron du diocèse de Fréjus-Toulon.
Abbé L. Serres-Ponthieu