La prière demandant quelques efforts, il ne manque pas d’hommes pour avancer des objections leur permettant d’être exemptés de cet exercice.
Certains disent : pourquoi prier, pourquoi faire connaître à Dieu nos demandes, puisqu’il sait tout ? Ne pourrait-il pas nous combler sans prière de notre part ? La réponse du catéchisme du concile de Trente à ce sujet est lumineuse : « Dieu pourrait, à coup sûr, répandre sur nous tous ses dons, sans prières et même sans désirs de notre part. C’est ainsi qu’il en agit avec les animaux privés de raison, à qui II donne tout ce qui est nécessaire à leur existence. Mais ce Père d’une bonté parfaite veut être prié par ses enfants. Il veut qu’en l’invoquant chaque jour, notre prière s’élève chaque jour jusqu’à lui avec une confiance plus grande. Il veut, en exauçant nos prières, affirmer de plus en plus son infinie bonté envers nous. »
Autrement dit : nous ne sommes pas des animaux sans raison, et Dieu n’est pas une abstraction ; c’est une Personne, c’est notre Père. Il est donc normal que nous lui parlions. Et c’est aussi cela la prière : parler à notre Père, lui dire tout l’amour que l’on a pour Lui. Prier, c’est reconnaître qu’en tant qu’enfants, nous attendons tout de notre Père. Si on obtenait de Dieu tout ce dont on a besoin sans aucune demande de notre part, on finirait par oublier la sainte Trinité pour laquelle nous sommes faits. Saint Augustin le dit bien : « Notre cœur est fait pour Vous (mon Dieu), et il est inquiet tant qu’il ne repose pas en Vous. »
Une deuxième objection peut surgir, cette fois-ci sous forme de découragement : A quoi bon prier, je ne suis pas exaucé ? Là encore, le catéchisme tridentin est précieux. Il dit que dans un tel cas de figure, il y a deux possibilités. Premièrement, Dieu agit ainsi pour notre plus grand bien. Il nous refuse alors quelque chose pour nous accorder une plus grande grâce, plus précieuse que celle que nous sollicitons. En ce cas, Dieu ne nous donne pas ce que nous demandons, car cela ne nous est ni nécessaire, ni utile, voire peut s’avérer nuisible. Saint Augustin, qui a le sens de la formule, dit : « Il y a des choses que Dieu refuse dans sa bonté. »
Il se peut aussi, dit le catéchisme, que nous ne soyons pas exaucés parce que nous demandons mal. Par notre négligence, nous semblons prouver que nous ne tenons guère à ce que nous demandons. « Au contraire, quand on prie avec attention et ferveur, on obtient de Dieu beaucoup plus qu’on ne demande. »
Alors, comment bien demander ? Les dispositions pour être plus sûrement exaucé peuvent se résumer à quatre. Il faut d’abord prier avec humilité. Les apôtres saint Pierre et saint Jacques ont le même enseignement : Dieu résiste aux superbes, et II donne sa grâce aux humbles (Jc 4, 6 ; 1 P 5, 5). Le Psaume 101 est tout aussi encourageant : Le Seigneur a regardé la prière des humbles, et II n’a point méprisé leurs supplications (Ps 101, 18). L’Ecclésiastique n’est pas en reste : La prière de celui qui s’humilie pénétrera les nues (Si 35, 21). Celui qui est humble reconnaît qu’il dépend de Dieu pour tout. Donc il le prie pour tout. Celui qui est orgueilleux veut ne dépendre de personne. Donc il se coupe de l’aide de Dieu.
La deuxième disposition pour rendre sa prière efficace est la contrition, le regret sincère de ses péchés. Le catéchisme parle de péchés qui font obstacles à nos prières. Il parle des crimes, bien sûr, mais aussi de la colère, du refus de pardonner, de la dureté par rapport aux pauvres, du non-respect des commandements. Par le prophète Isaïe, Dieu dit qu’il sera comme sourd aux prières des pécheurs. Lorsque vous étendrez vos mains vers moi, je détournerai mes yeux de vous, et lorsque vous multiplierez votre prière, je ne vous écouterai point, parce que vos mains sont pleines de sang (Is 1, 15). Nous devons faire très attention au refus de pardonner : « Prenons garde, poursuit le catéchisme, de rester implacables envers ceux qui ont eu des torts envers nous. » Et de citer Notre Seigneur Jésus Christ Lui-même : Lorsque vous vous présentez pour prier, pardonnez si vous avez quelque chose contre quelqu’un (Mc 11, 25). Si vous ne remettez pas aux hommes leurs fautes, votre Père ne vous remettra point non plus les vôtres (Mt 6, 15).
La troisième disposition est évidente : il faut prier avec foi. Il faut croire en la toute-puissance de Dieu et en sa miséricorde. Il faut parler comme le lépreux de l’Évangile : Seigneur, si vous voulez, vous pouvez me guérir (Mt 8, 2). Il n’a pas dit : si vous pouvez, voulez-vous me guérir ? Car il ne doute pas de la puissance de Notre Seigneur. Ce lépreux nous montre qu’il faut aussi avoir foi au rôle de médiateur de Notre Seigneur. Saint Paul le prêche à l’envi : Jésus Christ qui est mort, qui est ressuscité, qui est à la droite de son Père et qui y intercède pour nous (Ro 8, 34). Il n’y a qu’un Dieu et un seul Médiateur de Dieu et des hommes, Jésus-Christ (1 Tm 2, 5). Il est encore le Pontife miséricordieux et fidèle auprès de Dieu (He 2, 17). C’est la raison pour laquelle le catéchisme nous encourage à prier Dieu par Notre Seigneur : « Dès lors, quoiqu’indignes, cependant à cause des mérites infinis de notre divin médiateur et intercesseur, Jésus Christ, nous devons espérer, avec une confiance entière, que Dieu voudra bien nous accorder tout ce que nous lui demanderons de légitime par son entremise. »
Enfin, la quatrième disposition pour être plus sûrement exaucé est la persévérance. Le catéchisme du concile de Trente affirme : « C’est par là surtout que la prière est efficace. » Notre Seigneur nous l’indique à l’aide de paraboles. Il y a celle du juge inique et de la veuve, qui est introduite par saint Luc de la façon suivante : Il leur disait aussi une parabole, pour leur montrer qu’il faut toujours prier et ne pas se lasser (Lc 18, 1). Il y a aussi la parabole de l’homme qui va réveiller son ami en pleine nuit pour obtenir du pain. Notre Seigneur dit : Et si, de l’intérieur, l’autre répond : Ne m’importune pas ; la porte est déjà fermée, et mes enfants et moi nous sommes au lit ; je ne puis me lever pour t’en donner ; si cependant le premier continue de frapper, je vous le dis, quand même il ne se lèverait pas pour lui en donner parce qu’il est son ami, il se lèvera du moins à cause de son importunité, et il lui en donnera autant qu’il lui en faut (Lc 11, 7–8). Donc, pour être exaucé, il ne faut pas hésiter à « importuner » le bon Dieu. Les versets qui suivent cette parabole sont d’ailleurs encourageants : Et moi, je vous dis : Demandez, et on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez à la porte, et on vous ouvrira (…) Si l’un de vous demande du pain à son père, celui-ci lui donnera-t-il une pierre ? Ou, s’il demande un poisson, lui donnera-t-il un serpent au lieu du poisson ? (…) Si donc vous, qui êtes méchants, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison votre Père qui est dans le ciel donnera-t-il l’Esprit bon à ceux qui le lui demandent (Lc 11, 9–13).
Que Notre-Dame nous aide à bien prier : avec humilité, contrition, foi et persévérance. Qu’elle nous donne le goût et la facilité de la prière, notamment celle du Rosaire qu’elle a tant recommandée à Fatima, lui donnant même, pour notre époque, une « efficacité nouvelle ».
Source : Lou Pescadou n° 223