Voilà bien le mot d’ordre des ennemis de l’Église depuis la fondation de notre Sainte-Mère.
Bien évidemment, le principal but de cette incarcération est d’enrayer, d’arrêter, si cela était possible, l’expansion de l’Église, le royaume de Jésus-Christ dans les âmes par sa grâce. Pour cette fin, le grand et puissant moyen sera d’empêcher de parler, de prêcher au Nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, bref, de transmettre la foi. En leur temps, les Apôtres avaient déjà reçu cet avertissement du Sanhédrin : « Mais afin que la chose ne se répande pas davan-tage parmi le peuple, défendons-leur avec menace de parler désormais en ce Nom-là. » (Actes des Apôtres 4/17)
Pour mettre en échec le salut des âmes, les ennemis du Christ s’attaquent donc à la foi, principe de toute vie chré-tienne. « Or sans la foi, il est impossible de plaire à Dieu » (Héb. 11/6) Mais aussi, en bonne logique diabolique, ces mêmes ennemis s’en prendront aux moyens de propagation de la foi, le premier étant le souverain pontife. Saint Pierre étant par sa profession de foi, « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant », le fondement de l’Église « sur cette pierre je bâtirai mon Église » (St Matthieu 16/16), ses successeurs participent à cette charge pétrinienne de garder la foi catholique, de confirmer leurs frères dans la foi, pour continuer d’élever l’Église de Jésus-Christ. Par ce fait-là, le Saint Père se trouve dans cette guerre en première ligne. De surcroît, l’Église, comme toute société, a pour principe d’unité son chef. Le chef incarne la société qu’il dirige. Détruire donc le chef, anéantir le pape, c’est annihiler du même coup, la société qu’il gouverne. Voilà le plan diabolique tramé contre l’Église, et donc contre son chef visible. Notre-Seigneur avait bien prévenu Saint Pierre de cela : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ;… » (St Luc 22/31) Ainsi en sera-t-il de tous les temps, jusqu’à la consommation des siècles.
Le premier à avoir expérimenté cet emprisonnement fut bien évidemment Notre-Seigneur, Fondateur de l’Église, mis en prison afin d’être ensuite crucifié pour avoir affirmé sa divinité devant Caïphe. En vrai disciple, Saint Pierre suivra le divin Maître et subira le même sort. Saint Pierre fut mis deux fois en prison à Jérusalem par le sanhédrin, et une troisième fois par le roi Hérode, nous disent les actes des apôtres « voyant que cela faisait plaisir aux juifs ». (12/3) Rien de nouveau sous le soleil… Le premier pape terminera sa vie dans la prison Mamertine de Rome avant son glorieux martyr.
Bien évidemment, toujours pour enrayer l’expansion de l’Église naissante, la prison suivie du martyr sera le lot de nombreux successeurs de Saint Pierre pendant les siècles de persécutions. Pensons entre autres, au pape Saint Marcel 1er, fêté le16 janvier, qui mourut de mauvais traitements sous l’empereur Dioclétien qui l’avait attaché au service de ses écuries.
Même après la reconnaissance et la li-berté donnée à l’Église en 313 par l’Empereur Constantin, les pontifes romains auront souvent à batailler pour maintenir leurs droits et la liberté de l’Église. Les princes temporels, même chrétiens, verront fréquemment d’un mauvais oeil la place prépondérante réservée au pouvoir spirituel dans le plan divin. Dans le cours de l’histoire, l’opposition menée par les princes temporels contre le rayonnement politique de la papauté, glissera petit à petit vers une confrontation idéologique et doctrinale pour éclater au grand jour au moment de la Révolution « dite française », selon le juste mot du Pape Pie XII.
Ainsi, au XVIII siècle, ce sera au tour du pape Pie VI de subir l’emprisonnement. Ayant refusé de retirer sa condamnation de la constitution civile du clergé, le Saint Père vit ses États envahis par les armées françaises. Puis, par les révolutionnaires, il subit la déportation à Valence, en Dauphiné, où il mourut en 1799.
Après Pie VI, ce sera le tour de Pie VII de goûter, lors d’un exil en France, les geôles de l’Empereur Napoléon pour avoir résisté un peu trop aux idées des temps modernes. Dans ses tractations avec Rome pour une révision du concordat de 1801, Napoléon trouve insuffisantes les concessions du pape Pie VII. Alors, pour amener le souverain pontife à un meilleur dialogue, toujours à sens unique, et à souscrire à tou-tes les prétentions de l’empereur, celui-ci fait transporter Pie VII à Fontainebleau le 19 juin 1812. Ce n’est que le 10 mars 1814 que Pie VII retrouvera sa pleine liberté et retournera dans ses terres romaines.
Ainsi, en ces temps de persécution, les vicaires du Christ qui se succédaient sur le trône de Pierre, bien convaincus de leur charge, résistaient à la pression de l’idéologie révolutionnaire. Ces saints pontifes, voulant garder la foi sans tache et immaculée, s’opposaient énergiquement aux principes de 1789 et les dénonçaient publiquement « Urbi et Orbi ». Malgré tous les moyens mis en œuvre par ses ennemis, l’Église résiste. Ses persécuteurs, faisant fi de l’enseignement du Christ : « Les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre Elle », ne comprennent pas que l’Église est une institution divine dont l’une des caractéristiques est l’indéfectibilité. Mûs par un entêtement digne de pharaon, ils ne saisissent toujours pas que la grâce est « ce levain mêlé dans deux trois mesures de farine et fait lever la pâte ». Le Christ a beau leur susurrer à l’oreille les mêmes paroles dites à Saint Paul sur le chemin de Damas : « Il t’est dur de regimber contre l’aiguillon » (Acte des Apôtres) rien à faire, l’aveuglement demeure et la rage fait rage.
Alors, devant cette indéfectibilité de l’Église, va naître, au début du XIXème siècle, à l’esprit des membres des sectes maçonniques, geôliers de nos papes, l’idée d’une autre prison, bien plus redoutable que celle faite de pierres et de barreaux : « un pape selon nos besoins ». Ils veulent le « triomphe de l’idée révolutionnaire par un pape » (Ils L’ont découronné, page 146–148.)
Voilà le nouveau plan des loges, particulièrement de la Haute-Vante italienne. L’Église est une société et, comme toute société, le chef, principe d’unité, incarne sa société. Nous comprenons donc qu’avoir « un pape rallié à nos besoins », c’est du même coup le ralliement de toute sa société aux idées des sectes occultes. Le pape prisonnier des idées du siècle des lumières, c’est toute l’Église qui sera prisonnière des idées du monde moderne. Entrées dans l’Église, ces erreurs recevront le nom de modernisme par Saint Pie X. Ce sera la sécularisation de l’Église par son chef visible, tant désirée par ses ennemis multiséculaires, mais condamnée par le Pape Pie IX dans le Syllabus : « Le Pontife romain peut et doit se réconcilier et transiger avec le progrès, le libéralisme et la civilisation moderne ». (proposition condamnée n°80)
Le même saint Pontife parlera d’ailleurs en juin 1868 à ses cardinaux de ce plan des sectes maçonniques, un des coups de maître de Satan : « … détruire le centre de l’unité catholique, afin d’y établir le centre de l’abomination. » (Pie IX par Y. Chiron, p381)
Ce plan diabolique commencera sur le terrain, au milieu du XIX siècle, par une guerre ouverte et sans merci des partisans de l’unité italienne contre le pape Pie IX. Contre toute justice, ces derniers remettent en cause le pouvoir temporel du pape sur ses États. Privée de tout pouvoir temporel, l’Église se trouve du même coup bien affaiblie, c’est sa liberté qui est menacée. Le Pape Pie IX n’était pas dupe, il ne séparait pas la guerre faite à son pouvoir temporel de celle faite à l’Église. « Dans son esprit tout était lié : sa souveraineté temporelle, politique, était la condition d’un exercice libre de sa mis-sion spirituelle… » (Pie IX par Y. Chiron, P379)
Par la perversité des hommes, d’un Victor-Emmanuel II et d’un Napoléon III, et par permission divine pour un plus grand bien, cette spoliation des États pontificaux se conclura en 1870 par l’entrée des troupes de Garibaldi dans Rome. Le gouvernement temporel de Pie IX sera réduit à 42 hectares. Il devient alors le premier prisonnier du Vatican.
« Un pape selon nos besoins », telle est bien notre situation depuis le dernier concile, par lequel nous avons effectivement assisté au « triomphe de l’idée révolutionnaire par un pape ». Le pape Paul VI n’a-t-il pas explicitement affirmé, dans son discours de clôture du concile le 7 décembre 1965, cette sécularisation de l’Église, cet humanisme chrétien, lorsqu’il déclare : « La religion du Dieu qui s’est fait homme s’est rencontrée avec la religion (car cela en est une) de l’homme qui s’est fait Dieu. Qu’est-il arrivé ? Un choc, une lutte, un ana-thème ? Cela pouvait arriver ; mais cela n’a pas eu lieu » ? Et un peu plus loin : « … nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de l’homme ». Ainsi se réalise l’avertissement de Saint Paul : « Tous ceux qui veulent gagner les bon-nes grâces des hommes, ce sont ceux-là qui vous contraignent à vous faire circoncire, à l’unique fin de n’être pas persécutés pour la croix du Christ. » (Galat. 6/12) Les conséquences de tout cela sont fatales : « De fait, depuis 1970 envi-ron, le pape n’agit plus comme pape. L’Église est atteinte d’u-ne sclérose généralisée, le démocratisme libéral, qui Lui fait perdre sa liberté d’action et sa force de frappe. » (Cent ans de modernisme P. 11.) Dans cet emprisonnement doctrinal des papes depuis Jean XXIII, il est très certain que les sociétés occultes ont oeuvré, mais la première responsabilité vient des hommes d’Église eux-mêmes. « L’Église a sciemment et de plein gré ligoté son propre pilote : le pape règne mais ne gou-verne plus » (Cent ans de modernisme P. 13)
Cette prison de l’esprit, de l’intelligence papale est d’autant plus redoutable qu’elle laisse le Saint Père libre de ses mouvements pour annoncer au monde entier cette « bonne nouvelle » moderne, assaisonnement 1789. Ici, nous pensons bien évidemment aux nombreux voyages du Pape Jean-Paul II parcourant les cinq continents.
Devant cette situation désastreuse, devant cet emprisonnement sans précédent des papes dans l’idéologie révolutionnaire, le modernisme étant la version ecclésiastique, plusieurs réactions ont été émises : la première, c’est la thèse des sédévacantistes. Puisque le pape erre dans la foi, il perd sa juridiction universelle et donc ne peut plus être considéré comme pape. C’est une opinion théologique, mais qui, bien examinée, pose plus de problèmes à la théologie qu’elle ne donne de solution. La deuxième réaction est d’aller en prison avec le Saint Père, puisqu”« il faut suivre le pape ». C’est un adage bien connu, comme celui d’ailleurs des catholiques à teinte traditionnelle : « Je préfère me tromper avec le pape, que d’être dans la vérité contre le pape » ! Là sont les thèses des conciliaires et des instituts ralliés, à l’exemple des autruches.
Encore ! Aller en prison avec le pape pour l’en sortir, c’est, il est vrai, une thèse assez chatoyante et attrayante, surtout pour les commandos, fanatiques de coups-de-main. Aller en prison avec lui, oui, mais pour que la chose soit envisageable deux choses nous semblent préalablement nécessaires. La première condition, c’est que le prisonnier veuille bien sortir, et là, visiblement, une telle bonne nouvelle n’est pas encore à l’ordre du jour. La seconde, qui s’ajoute à la précédente, c’est que ce commando inédit ait la volonté absolue de faire sortir le noble prisonnier.
Ici, nous voyons l’incompréhensible position du clergé rallié. Celui-ci, bien conscient de certains aspects de la crise de l’Eglise, a rejoint la prison pontificale, puisqu”« il faut suivre le pape ». Il s’est fait prisonnier avec le Saint Père, adoptant publiquement les faux principes de 1789 émis et installés dans l’Église par les novateurs lors du dernier concile. Ici nous reconnaissons et vérifions la vraie finalité du décret « Ecclesia Dei » du 1er juillet 1988, faire goûter et avaler aux traditionnalistes les principes et les fruits empoisonnés du concile.
Les instituts ralliés gardent cette malheureuse intention de ne pas faire sortir le pape de sa prison, parce que, bercés par l’illusion libérale, ils sont imbus d’un pacifisme déconcertant pour des membres de l’Église militante. « Aimant la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu. » (St Jean 12/43), ils ne comprennent pas la situation actuelle. Ils ne saisissent pas cette opposition radicale, cette guerre sans merci, entre l’Église de toujours et le monde, monde pour qui Notre-Seigneur n’a pas prié. (Saint Jean 17/9) Leur manque de principes leur fait adopter ce mauvais choix. Ne pourrions-nous pas appliquer au monde rallié, et d’ailleurs pas à lui seul, les paroles du Pape Pie XII en 1951, au sujet de la prise du pouvoir par les révolutionnaires en France : « Faute de principes doctrinaux, précis et fermes, le monde intellectuel, surtout depuis la fin du XVIIIème siècle, était mal préparé à découvrir les infiltrations dangereuses, à réagir contre leur pénétration insensiblement progressive » ? (PQR p. 123) Par cette position, il est aisé de comprendre que ces mêmes instituts ralliés n’ont aucune effi-cacité, bien au contraire, pour une contre-révolution et une restauration de l’Église. Après avoir passé en revue les agents de la Révolution, Jean Ousset, dans son livre « Pour qu’Il règne », réserve un chapître à une cinquième colonne : « Après ceux qui se proclament cyniquement adversaires du christianisme qui agissent en ennemis déclarés de l’ordre chrétien, il ne faut pas oublier ceux qui, dans la place même, se comportent perfidement en agents très efficaces de la cause ennemie, d’autant plus redoutables qu’il sont plus difficiles à démasquer et continuent à se dire catholiques. Agents plus ou moins conscients – dont il n’est pas question de préciser le degré de responsabilité, victimes, très souvent des idées fausses qui obscurcissent plus que jamais l’atmosphère intellectuelle du monde entier et que nous voudrions ici beaucoup plus éclairer que combattre, afin de les ramener au seul servi-ce du Christ-Roi,- agents non moins réels cependant, de la Révolution universelle qui toujours eut soin de favoriser au sein du peuple chrétien tous les éléments possibles de désagrégation. »
Il nous faut bien nous persuader que la Révolution, dans les sociétés civiles comme dans l’Église, « est une doctrine, un ensemble de doctrines, en matières religieuse, philosophique, politique et sociale » (Mgr Freppel cité par PQR p.122). La Révolution qu’elle est-elle ? Lui laissant la parole pour se définir elle-même, Mgr Gaume disait : « Je ne suis ni l’émeute, ni le changement de la monarchie en république, ni le trouble momentané de l’ordre public, ni … ni … Je suis la haine de tout ordre que l’homme n’a pas établi et dans lequel il n’est pas roi et Dieu tout ensemble. » (PQR p.122) Véritable relent du péché originel, voilà la vraie problématique, l’état de la question bien posée : Qui est roi de la création et de toute société, Dieu ou l’homme ? Il en va de-même pour la Révélation : est-ce Dieu qui se révèle aux hommes, ou l’homme qui se révèle à lui-même ?
Toute révolution étant donc une doctrine, fusse-t-elle conciliaire, la seule solution est d’opposer doctrine à doctrine. Envisager une autre solution, comme les instituts ralliés le font naïvement, c’est se risquer à recevoir cette invective de Jean Jaurès lancée aux catholiques libéraux après les débats sur la séparation de l’Église et de l’État : « Nos adversaires ont-ils opposé doctrine à doctrine, idéal à idéal ? Ont-ils eu le courage de dresser contre la pensée de la Révolution, l’entière pensée catholique, de réclamer pour le Dieu de la Révélation chrétienne, le droit non seulement d’inspirer et de guider la société spirituelle, mais de façonner la société civile ? Non, ils se sont dérobés, ils ont chicané sur des détails d’organisation. Ils n’ont pas affirmé nettement le principe même qui est comme l’âme de l’Église. » (La conjuration antichrétienne de Mgr H. Delassus p. 308.)
Alors devant cette catastrophe, cet emprisonnement de notre père, que nous faut-il faire, membres de la hiérarchie ou fidèles ?
Pour sortir le pape de prison, trois choses à faire sont explicitement révélées.
La première, prier. « Alors que Saint Pierre était ainsi gardé dans la prison, l’Église ne cessait d’adresser pour lui des prières à Dieu ». (Actes Apôtres 12/5) Ensuite, la deuxième chose à faire, toujours révélée dans les Saintes Écritures, « prêche la parole, insiste à temps et à contretemps » ; et cela partout où des oreilles de bonne volonté, ou prudemment présumée telle, fussent-elles romaines, voudront bien écouter. Nous reconnaissons ici les propos de Saint Paul à son fidèle disciple Timothée (2ème lettre 4/2) : « reprends, menace, exhorte en toute patience et doctrine ».
Nous l’avons dit, le problème étant doctrinal, sa solution est doctrinale. Ainsi la Fraternité Saint Pie X a bien raison de placer la cognée à ce niveau-là avant toute chose.
Un exemple tiré de l’histoire de France nous fera bien comprendre la ferme position de la Fraternité vis-à-vis de la Rome moderniste et nous confortera dans ses vues.
En 1814, la Restauration voit le jour en France. Louis XVIII monte sur le trône. Mais, influencé par les sociétés de pensée qui détenaient effectivement le pouvoir, le souverain laisse dans la constitution française les principes de la pensée libérale. Le pape Pie VII s’en plaindra. Le pontife romain adressera ces mots à l’évêque de Troyes lors de l’avènement et des compromis de Louis XVIII : « Notre étonnement et notre douleur n’ont pas été moindres quand Nous avons lu le 23ème article de la constitution, qui maintient et permet la liberté de la presse, liberté qui menace la foi et les moeurs des plus grands périls et d’une ruine certaine. … C’est un fait pleinement constaté : cette liberté de la presse a été l’instrument principal qui a premièrement dépravé les moeurs des peuples, puis corrompu et renversé leur foi, enfin soulevé les séditions, les troubles, les révoltes ».
Charles X fera la même erreur que son frère. Lui-même reconnaîtra celle-ci, mais trop tard, et finira par dire, après avoir cédé sur un point puis sur un autre : « Je suis confirmé dans la foi de toute ma vie : toute conces-sion aux libéraux est inutile ». (La conjuration antichrétienne P. 228–229) Effectivement, le monarque voulant réglementer la liberté de la presse le 25 juillet 1830, la secte des maçons déclenchera une Révolution au mois de septembre de la même année. La seule solution pour Charles X sera d’abandonner le pouvoir. Quelques décennies plus tard, Napoléon III ayant abdiqué, le Comte de Chambord est contacté par le pouvoir occulte pour reprendre les rênes de notre pays avec, comme forme du gouvernement, une monarchie constitutionnelle. En toute lucidité, ce prince catholique bien né veut imprégner toute la constitution de son pays de la loi de Dieu. « Je dois faire tous les efforts pour que Dieu règne dans ce royaume, pour que mes commandements soient subordonnés aux siens, pour que mes lois fassent respecter ses lois ». (La conjuration antichrétienne P. 275) Il résumera sa pensée souveraine par ses mots : « Faire rentrer Dieu en Maître dans la société, afin que lui-même pût y régner en roi. »(ibidem) Tout était dit, et bien dit. Ces vues n’étant pas du goût du pouvoir occulte du moment, ce grand prince, tirant les leçons du passé, éconduira les avances des réels décideurs de l’époque. La même réponse fut faite en 1918 par l’Empereur Charles 1er de Habsbourg, empereur d’Autriche-Hongrie, aux mêmes personnes. Cela lui vaudra l’exil avec sa femme Zita et leurs enfants. Honneur et gloire à ces géants !
Devant la Rome moderniste, c’est bien la même attitude et la même fermeté qu’adoptera Monseigneur Lefebvre. Le prélat ne voit, malheureusement, pour sa Fraternité que la possibilité d’une illégalité canonique, illégalité apparente mais dont le motif est de rester catholique. La raison qu’il donne est très simple. Les autorités officielles du moment, la hiérarchie romaine actuelle, les lois et le droit canon agissent et sont faits pour soutenir les modernistes contre les catholiques, contre la tradition (Mgr Lefebvre dans COSPEC cassette 29‑b). Ainsi la Fraternité, comprenant l’enjeu de la situation et ne voulant, pour le bien de l’Église, aucune compromission avec l’erreur, expose depuis plus de 40 ans à la Rome moderniste les raisons de son invariable conduite : « Faire régner intégralement Jésus-Christ en Maître absolu dans son Église ». La situation est en faite très simple et n’admet pas d’alternative. On ne participe pas à la construction d’un édifice avec un architecte avec lequel on n’est pas d’accord sur les principes et les lois de la physique et des mathématiques, comme deux plus deux font quatre. On ne joue pas au Monopoly avec un roublard, surtout si ce dernier joue le rôle du banquier.
Enfin, la troisième chose toujours révélée dans les Saintes Lettres pour sortir le Saint Père de sa prison, c’est encore Saint Paul qui nous en donne l’exemple : « Mais lors-que Céphas vint à Antioche, je lui résistai en face, parce qu’il était digne de blâme. » (Galat 2/11) Il nous faut donc dénoncer les erreurs et les fauteurs d’erreurs quels qu’ils soient.
Tout mutisme est impossible. Mgr Castro-Mayer, dans une de ses lettres pastorales de 1953, nous avertit des conséquences d’une telle attitude : « Et si, pour éviter de telles dis-cussions, les bons font cesser l’opposition, plus grand encore est le triomphe de l’enfer qui peut, à l’intérieur même de la Cité de Dieu, planter son étendard et développer rapidement et facilement ses conquêtes. » (PQR p. 258)
C’est donc seulement avec ces trois principes, joints une grande fermeté, que l’espoir d’une sortie de prison nous est permis, avec ses conséquences inéluctables : la renaissance de la société chrétienne.
Soyons bien convaincus que Dieu aura son heure, mais aussi, à nous d’y coopérer droitement et saintement. Alors, quand il plaira à Dieu, quand les deux chaînes du libéralisme et du modernisme tomberont des mains du souverain Pontife pour lui rendre sa vraie liberté, quand la voix intégrale du bon Pasteur par l’entremise des successeurs de Saint Pierre retentira à nos oreilles, croyons qu’un miracle est toujours possible. Alors dans notre joie, et après avoir suffisamment « éprouvé les esprits s’ils viennent de Dieu » selon le mot de Saint Jean (1ère Epî. 4/1) puisque « Satan lui-même se déguise en ange de lumière. » (II Cor. 11/14), alors dans cette joie indicible n’oublions pas de lui ouvrir notre porte (Actes Apôtres 12/14) .
Abbé Nicolas Jaquemet, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X
Source : La Sainte Ampoule n° 233 de septembre-octobre 2015