Bulletin du Tiers-Ordre séculier pour les pays de langue française
Editorial de Monsieur l’abbé Louis-Paul Dubroeucq,
aumônier des tertiaires de langue française
Cher frère, Chère sœur,
S’il est un Mystère pour lequel l’Ordre du Carmel a quelque prédilection, c’est bien celui de l’Incarnation. Elle se manifeste notamment par la dévotion au Saint Enfant Jésus. La neuvaine en Son honneur figure parmi les cinq grandes neuvaines placées dans le manuel du Tiers-Ordre du Carmel. Quant aux statues de l’Enfant Jésus, qui ne connaît celles de Prague ou de Beaune en Côte-d’Or, appelé le Roi de Grâce, sans compter celles des multiples fondations de sainte Thérèse d’Avila.
Pourquoi cet attrait dans l’Ordre du Carmel pour ce mystère de Jésus enfant ? C’est qu’il manifeste l’esprit propre à sa spiritualité. La vie carmélitaine est faite de solitude, de silence, de contemplation, d’abnégation, de détachement des créatures, de pauvreté… Elle trouve dans la vie cachée de Notre-Seigneur, dans les mystères de Son enfance, un idéal à poursuivre : ne disposer de rien en propre, vivre dans une totale dépendance : c’est l’enseignement de l’Enfant de la crèche à l’âme carmélitaine. La piété du Carmel envers sa Reine et son protecteur saint Joseph trouve aussi dans ce mystère matière à contempler et à imiter afin de vivre, comme Jésus, sous le regard et dans la dépendance de la Vierge Immaculée et de saint Joseph. C’est la raison pour laquelle sainte Thérèse d’Avila a voulu que la fête de la naissance du Sauveur revête une solennité particulière dans ses monastères. Saint Jean de la Croix rayonnait en ce jour de fête :
« Lui, si grave d’ordinaire, exultait et se laissait aller à une joie extérieure qui s’exprimait en paroles, en chants, en jeux spirituels. » [R.P. Marie-Eugène de l’Enfant Jésus, Sermon pour la vigile de Noël 1948, in Jean de la Croix, Présence de Lumière, Éd. du Carmel, 1991, p. 292].
Cet amour pour l’Enfant Jésus est concrétisé par la présence, dans chaque monastère de la réforme de sainte Thérèse, d’une petite statue de l’Enfant Jésus, précieux souvenirs de la sainte Mère, selon Les Annales des Carmes de France. La sainte Réformatrice communiquait à ses filles sa dévotion envers le mystère de l’enfance du Sauveur par le don de ces statues comme par ses poèmes ou chants, où elle dépeint la pauvreté et l’humilité de l’Enfant Dieu, qui S’est incarné pour le salut des hommes ; ainsi dans les deux premières strophes de cette poésie sur Noël :
O pasteurs qui veillez Il vient pauvre et méprisé,
A la garde de votre troupeau, Mettez-vous donc à le garder,
Considérez qu’il vous est né un Agneau. Car le loup vous le ravira
C’est le Fils du Dieu souverain ! Avant que vous ayez pu en jouir…
[sainte Thérèse d’Avila, in Opuscules de la Sainte, Éd. de la Vie Spirituelle, Desclée & Cie, 1929, poésie 12, p. 297].
La contemplation de la pauvreté du mystère de Noël nous permet d’accepter que le triomphe de Dieu en nous soit accompagné d’anéantissement. C’est dans la faiblesse de l’homme que la puissance de Dieu se manifeste pleinement. [II Cor. 12, 9]. « Regarder alors l’Enfant Jésus éclaire. Dans l’impuissance, il y a tout l’horizon de la divinité, de l’infini. » [R. Règue, Père Marie-Eugène de l’Enfant Jésus, Maître spirituel pour notre temps, Éd. du Carmel, 1978, p. 23]. Dans le mystère du Verbe de Dieu fait homme, il y a le commencement de tous les autres mystères : la Rédemption, la Très Sainte Eucharistie, l’Église.
La première infirmité de Jésus est celle de l’enfance. C’est tout d’abord un état d’anéantissement. Abaissement de la Divinité, tout d’abord. Quel est ce petit enfant dans la crèche ? « C’est le Verbe éternel qui se tait ; c’est la sagesse infinie qui bégaye, la lumière éternelle qui se voile, la béatitude qui pleure et crie ; c’est l’éternel qui vient de naître, l’immense réduit à la petite taille d’un enfant, le Tout-Puissant qui ne peut se soutenir, ni faire un pas. C’est la Providence qui gouverne le monde et qui se laisse manier par une faible femme ; c’est la vie infinie qui nourrit tous les êtres et qui a besoin du sein de sa mère. » [Ch. Sauvé, Jésus intime, s.d., t. 2, p. 137].
La Sainte Humanité s’abaisse elle aussi. Elle avait le droit de manifester tout de suite avec éclat au monde les trésors de science infuse et béatifique qui sont en elle. Et cependant, durant neuf mois, Jésus vit caché dans le sein de Sa Mère. Et si nous pénétrons dans Son Cœur, nous y verrons des abaissements plus profonds encore, les abaissements de l’humilité,
« car il se regarde comme chargé et, pour ainsi dire, coupable de tous les péchés du monde ; et il s’humilie autant que l’exigent ces iniquités. » [Ch. Sauvé, ibid., p. 139].
Prenant un jour un petit enfant, et le plaçant au milieu de ses apôtres, Jésus leur dit : « Celui qui se sera fait comme ce petit enfant, celui-là sera le plus grand dans le royaume des cieux. » Cet enfant n’était qu’une image, l’image de l’Enfant qui nous a été donné, qui est notre perfection, qui S’est abaissé Lui-même pour nous entraîner dans les abîmes de son humilité. [cf. st Ambroise, in Luc, n. 58]. Quand Jésus disait ces paroles, ne pensait-il pas au petit Enfant qui avait été donné comme modèle au monde ?
« Oui il semblait dire : celui qui, à mon exemple, se sera fait petit, qui se sera abaissé en prenant la forme de l’esclave, est celui-là qui entrera au royaume des cieux. » [st Jérôme, in Math.]. « Faisons donc servir cet enfant, qui est né pour nous et qui nous a été donné, au but pour lequel il est né et nous a été donné, dit saint Bernard. Servons-nous, pour notre avantage de ce qui est à nous ; servons-nous du Sauveur pour opérer notre salut… Appliquons-nous à devenir semblables à cet enfant, afin que ce ne soit pas inutilement que Dieu s’est fait petit. » [Hom. 3, in Missus est, n. 14].
Bien d’autres vertus nous sont enseignées dans Jésus enfant ; signalons-en encore une que dans ses écrits publiés sous le titre Jésus-Christ est le Fils de Dieu, sœur Marie Aimée de Jésus, ocd, décrit ainsi ;
« Qui pourra dire ou expliquer ce que la grâce peut opérer quand la vertu de simplicité émane de celle de Jésus enfant. Se faisant toute à tous, si le prochain a quelque défaut de nature, d’éducation, si des habitudes anciennes le rendent moins sympathique, si même des aspérités de caractère rendent pénibles les rapports avec lui, cette âme s’en rapprochera, car elle regardera comment Jésus agissait avec les pauvres et les petits ; elle découvrira sous une écorce parfois un peu rude, la simplicité des bergers préférés de Jésus…» [Éd. Téqui, 5ème éd., vol. I, t. 2, p. 27].
Lorsque sainte Thérèse parcourait les chemins caillouteux de Castille et d’Andalousie pour fonder de nouveaux monastères, elle tenait sur ses genoux
« une statuette de l’Enfant Jésus recouvert d’un vêtement brodé avec amour… La statue la guidait vers le mystère de l’amour infini du Verbe éternel, et son cœur virginal soupirait après l’immolation totale pour cet Amour fait homme. » [Sœur Giovanna della Croce, ocd, L’Enfant Jésus au Carmel, Histoire et Spiritualité, Éd. du Carmel, Toulouse, 2005, p. 23].
Elle était heureuse quand elle avait Son image devant les yeux. C’est ce que rapporte son premier biographe, le Père Ribera :
« cette statue, dit-il, l’aidait à élever constamment son âme vers Dieu, comme si elle avait été chez elle ou dans son monastère. » [cf. sr Giovanna della Croce, op. cit., p. 24].
Sœur Anne de l’Incarnation, dans sa déposition lors de procès de béatification de la sainte, déclare que la Mère fondatrice avait dit :
« Pour fonder un monastère il ne me faut qu’une petite cloche, une maison en location, l’Enfant Jésus et saint Joseph. C’est aux véritables fondateurs des Carmels de s’occuper de tout le reste. »
Un jour, la vénérable sœur Marguerite du Saint-Sacrement, du Carmel de Beaune, a vu
« notre sainte Mère Thérèse toute pénétrée du Verbe éternel et pleinement possédée de façon divine. Elle voyait le Verbe divin comme Parole du Père se communiquer à notre sainte Mère et se livrer totalement à elle pour être sa vie, son esprit, son maître et sa parole. Il s’était choisi cette sainte comme le seul et unique organe par lequel il accomplirait de nombreux miracles. Elle reconnut par là comment notre sainte Mère Thérèse avait été instruite par le Verbe et qu’en Lui et par Lui elle avait reçu d’abondantes illuminations et inspirations célestes. Et elle comprit qu’elle avait reçu de Lui l’esprit de l’Ordre, un esprit de solitude, de silence, de prière intérieure et de rupture avec le monde. C’est ainsi qu’elle vit le Verbe divin se faire chair et devenir petit enfant dans la crèche ; Il lui montra qu’en Lui était l’esprit et la grâce de notre saint Ordre et qu’Il en était la source et l’origine. Ce Verbe a révélé à notre sainte Mère que l’Ordre ne pouvait subsister que dans l’esprit de la crèche, esprit d’humilité et de total renoncement, hors du monde, dans le silence et la prière contemplative. » [sr Giovanna della Croce, op. cit., p. 31–32].
Dans la contemplation des mystères de l’Enfance de Jésus, apprenons à l’école de la Reine du Carmel et de saint Joseph, et par leur intercession, à vivre plus parfaitement et fidèlement dans l’esprit de l’Ordre.
† Je vous bénis.
Abbé L.-P. Dubroeucq †
Activités du Tiers-Ordre du carmel
Prochaine récollection : janvier 2008
La première récollection de l’année 2008 se déroulera à Paris, en l’église St-Nicolas-du-Chardonnet, le jeudi 24 janvier, à partir de 9h30. Pour des raisons évidentes d’organisation matérielle, nous vous demandons d’informer Sœur Marie du Cœur Eucharistique et de la Sainte Face (Mme Trouillet) suffisamment à l’avance de votre présence et de lui indiquer si vous prenez ou non le repas de midi. Nous vous saurions gré de votre délicatesse à penser à la prévenir en cas de désistement.
Retraite annuelle 2008
Afin que nous puissions, dès à présent, prévoir les dispositions qui nous seraient nécessaires à nous rendre disponibles, notre Directeur nous invite à noter que l’été prochain, du lundi 21 au samedi 26 juillet 2008, il prêchera, à l’intention des tertiaires francophones, une retraite qui se déroulera dans l’Est de la France, à Éguelshardt, au cœur de la futaie vosgienne, sur le domaine de L’Étoile du Matin (57230 Bitche)..
Les inscriptions se font auprès de :
Madame Claude-Marie Trouillet, Auxiliaire Sr Marie du Cœur Eucharistique et de la Sainte Face
Villa Saint-Martin
Allée des Chalets
F- 37100 TOURS, France
Tél/Fax : (00 33) 2 47 42 92 41