En mai dernier, Mgr Aupetit avait menacé d’aboyer si la célébration publique de la messe n’était pas rendue aux catholiques. On n’avait rien entendu. Ce sont des associations traditionalistes (dont la Fraternité Saint-Pie X) qui avaient obtenu la reprise du culte. Mais ça y est, l’archevêque de Paris a lancé son « coup de gueule ».
C’était le 17 novembre sur les ondes de Radio Notre-Dame (où il ne risque pas la contradiction : c’est la radio du diocèse et Marie-Ange de Montesquieu qui l’interroge est d’une complaisance qui tourne à la flatterie).
Mgr Aupetit n’a pas eu un mot d’encouragement pour les catholiques demandant en manifestant la reprise de la messe : la présentatrice les exécute en une phrase (« ça s’est pas mal agité sur les parvis ») qu’il ne relève pas. En revanche, il s’est emporté contre ceux qui communient sur la langue et contre les prêtres qui tolèrent un tel affront sanitaire. L’on a entendu aucune protestation de sa part contre les abus de l’Etat alors que, comme l’a relevé le juriste Grégor Puppinck, il méprise sa propre loi pour priver les catholiques de la messe. Mais contre ceux qu’il accuse avec finesse de « faire leur petit business dans leur coin », en revanche, quelle fermeté ! L’archevêque de Paris menace :
Donc maintenant il va falloir être sérieux. En plus, des prêtres qui ont promis obéissance le jour de leur ordination, il faudrait qu’ils s’en rappellent aussi, c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas de dire « Je promets obéissance à vous et à vos successeurs » et de faire n’importe quoi.
Les motifs invoqués ?
C’est eux qui nous ont plombé. Le ministère de l’intérieur le jour du Conseil d’Etat avait amené des vidéos qui montraient que dans certaines paroisses et sans doute y compris de Paris (et même je le sais de Paris) on communiait sur la langue parce que c’était comme cela qu’il fallait communier selon la messe de toujours. (On voit que les gens ne connaissent pas bien l’histoire, c’est au 6e siècle que l’on a communié sur la langue.) Et puis ils n’avaient pas de masques etc. ils nous ont dit voyez vous n’êtes pas capables de tenir vos troupes.
Sans revenir sur l’histoire de la communion sur la langue et le sens de ce rite, permettons-nous quelques remarques :
- Le Conseil d’Etat s’est appuyé sur le manque de respect de « la distanciation entre les fidèles » et du « port du masque par les officiants » pour motiver sa décision, sans aborder la question du rite de communion. Les vidéos furent celles de messes (y compris d’ordination par l’évêque du lieu) à Bayonne et Fort-de-France. Il est sans doute moins risqué de s’attaquer ainsi à ses fidèles ou à son propre clergé plutôt que de faire des reproches à ses « frères dans l’épiscopat ».
- Jamais l’archevêque de Paris ne remet en cause la fonction que s’octroie désormais l’Etat de déterminer les conditions d’exercice du culte et son éventuelle restriction : rôle qui revient à l’Eglise seule. Selon lui, la soumission irait jusqu’à la détermination du rite de communion ? Quel servilisme !
- Médecin de formation, Mgr Aupetit prend pour assuré que la communion sur la langue est plus dangereuse que la communion dans la main. Est-ce si évident ? Non. Rien ne l’a démontré. « Il semble en effet contradictoire d’insister sans relâche sur la nécessité de désinfecter fréquemment les mains, tout en imposant simultanément la communion dans la main. Certes, il est demandé aux fidèles de désinfecter leurs mains à l’entrée de l’église, mais ce geste ne les empêchera pas de toucher beaucoup d’objets ou de parties de leurs corps, potentiellement contaminés, entre le moment de la désinfection et celui de la communion. S’il est vrai que la communion dans la bouche comporte un risque potentiel lié au contact, toujours possible, avec la langue ou les lèvres du fidèle, cette manière de distribuer la communion évite en revanche totalement les risques liés au contact avec les mains des fidèles. Les mesures décidées par de nombreux évêques prescrivent donc un mode de communier dont il n’est pas vraiment certain qu’il soit plus sûr du point de vue sanitaire, et qui pourrait même être moins sûr que la communion sur la langue[1] ».
Grâce à Mgr Aupetit, nous sommes prévenus : peut-être les cérémonies publiques pourront-elles reprendre bientôt, mais ce sera dans les conditions les plus drastiques, confinant à l’insupportable. L’Etat n’aura pas à insister : l’épiscopat français sait prendre les devants pour être le bon élève du nouvel ordre sanitaire. « Evêque, c’est par vous que je meurs ! », s’écria saint Jeanne d’Arc avant de mourir le 30 mai 1431. Qui sont les évêques Cauchon de nos temps ?
- C.J. Kruijen (auteur « conciliaire conservateur », « A propos de l’interdiction de la communion donnée sur la langue », in Sedes Sapientiae n°153[↩]