Sermon de Mgr Lefebvre – 30 ans d’épistolat de Monseigneur – 18 septembre 1977

Mes bien chers frères,
Mes bien chers amis

La Providence a des déli­ca­tesses, puisqu’elle a vou­lu que cette nou­velle ren­trée du sémi­naire coïn­cide avec l’anniversaire de mon sacre épis­co­pal, qui a eu lieu le 18 sep­tembre 1947 dans ma ville natale. Et c’est ain­si que sur la demande d’amis, nous avons vou­lu fêter d’une manière par­ti­cu­lière cet anniversaire.

Et ce matin, nous lisons dans le bré­viaire, les leçons de Tobie. Et il était dit que le jeune Tobie, alors qu’il se trou­vait entou­ré de juifs, d’hommes de sa race, qui ado­raient les veaux d’or éta­blis par le roi d’Israël lui-​même, lui, au contraire, fidè­le­ment se ren­dait au Temple et offrait les sacri­fices pré­vus par la Loi, tels que Dieu l’avait deman­dé Lui-​même. Il était donc fidèle à la loi de Dieu.

Eh bien, nous espé­rons que nous aus­si, nous sommes fidèle, fidèle à Dieu, fidèle à Notre Seigneur Jésus-Christ.

Et Tobie fut ensuite emme­né en cap­ti­vi­té à Ninive et là, dit l’Écriture, alors que tous ses com­pa­triotes se sou­met­taient au culte païen qui les entou­rait, lui, éga­le­ment, gar­da la Vérité.

Retinuit omnem veri­ta­tem : « Il a rete­nu toute la Vérité ». Et je crois que c’est une leçon qui nous est don­née par la Sainte Écriture et nous espé­rons que nous aus­si, nous sommes fidèle comme Tobie l’a été. Fidèle dans sa jeu­nesse, fidèle plus tard dans la cap­ti­vi­té. Et n’est-il pas vrai qu’aujourd’hui nous sommes d’une cer­taine manière, dans une cap­ti­vi­té qui nous entoure de par­tout ; une cap­ti­vi­té qui se mani­feste par­tout ; cap­ti­vi­té qui nous est impo­sée par ceux qui se sou­mettent à l’esprit mau­vais dans le monde et à l’intérieur de l’Église ? Ceux qui jugulent la Vérité, qui la tiennent en escla­vage au lieu de la mani­fes­ter, au lieu de la mon­trer. Nous sommes dans un monde esclave, esclave du démon, esclave de toutes les erreurs de ce monde.

Mais, nous vou­lons gar­der la Vérité ; nous vou­lons conti­nuer à mani­fes­ter la Vérité.

Et quelle est donc cette Vérité ? L’avons-nous en mono­pole ? Sommes-​nous à ce point pré­somp­tueux que nous pou­vons dire : nous avons la Vérité, les autres n’ont pas la Vérité ?

Cette Vérité ne nous appar­tient pas ; elle n’est pas à nous ; elle ne vient pas de nous ; elle n’a pas été inven­tée par nous. Cette Vérité elle nous est trans­mise ; elle nous est don­née ; elle est écrite ; elle est vivante dans l’Église ; elle est vivante dans toute l’Histoire de l’Église. Cette Vérité elle est connue ; elle est dans nos livres ; elle est dans nos caté­chismes ; elle est dans tous les actes des conciles ; elle est dans les actes des Souverains Pontifes ; elle est dans notre Credo, dans notre Décalogue. Elle est dans les dons que le Bon Dieu nous a faits du Saint Sacrifice de la messe et des sacre­ments. Ce n’est pas nous qui les avons inven­tés. Nous ne fai­sons que per­sé­vé­rer dans la Vérité.

Car la Vérité a un carac­tère éter­nel. La Vérité que nous pro­fes­sons, c’est Dieu, Notre Seigneur Jésus-​Christ qui est Dieu. Et Dieu ne change pas. Le Bon Dieu demeure dans l’immutabilité. Et c’est saint Paul qui nous le dit : Il n’y a même pas une ombre de vicis­si­tude en Lui, une ombre de chan­ge­ment en Dieu. Dieu est immuable, sem­per idem, « tou­jours le même ». Il est certes lui, la source de tout ce qui change, de tout ce qui se meut dans l’univers, mais il est immuable. Et par le fait même que nous pro­fes­sons Dieu comme Vérité, nous entrons, en quelque sorte, par la Vérité dans l’éternité.

Nous n’avons pas le droit de chan­ger cette Vérité. Elle ne peut pas chan­ger. Elle ne chan­ge­ra jamais. Les hommes sont mis sur terre pour rece­voir un peu de cette lumière de l’éternité, qui des­cend sur eux. Ils deviennent, en quelque sorte, éter­nels eux aus­si, immor­tels, dans la mesure où ils s’attachent à la Vérité de Dieu.

Dans la mesure où ils s’attachent aux choses qui changent, aux choses mou­vantes, ils ne sont plus avec Dieu. Et c’est ce dont nous sen­tons le besoin. Tous les hommes sentent ce besoin, ils ont en eux une âme immor­telle qui est main­te­nant dans l’éternité. Âme qui sera heu­reuse ou mal­heu­reuse, mais cette âme existe et elle ne mour­ra plus. C’est fini.

Les hommes, tous ceux qui sont nés, tous ceux qui ont eu une âme, sont entrés dans l’éternité. Et c’est pour­quoi ils ont besoin de la véri­table éter­ni­té, de l’éternité qui est Dieu, des choses éternelles.

Nous avons besoin de cela. Nous ne pou­vons pas nous en pas­ser. Cela fait par­tie de notre vie et c’est ce qu’il y a de plus essen­tiel en nous. C’est pour­quoi les hommes recherchent la Vérité, recherchent l’éternité. Ils ont un besoin essen­tiel en eux, d’éternité.

Et quels sont ces moyens par les­quels Notre Seigneur nous a don­né l’éternité, nous com­mu­niquent l’éternité, nous fait entrer dans notre éter­ni­té, ici-​bas même ?

Souvent, lorsque je tra­ver­sais ces pays d’Afrique, lorsque l’on nous deman­dait de venir visi­ter les dio­cèses, je choi­sis­sais un thème qui m’était cher et qui d’ailleurs est très simple, que vous avez déjà enten­du maintes et maintes fois, mais qui concré­ti­sait pour ces popu­la­tions simples aux­quelles j’avais à par­ler, à prê­cher la Vérité. Je leur disais : « Mais quels sont les dons que le Bon Dieu nous a don­nés et qui nous font par­ti­ci­per à la vie divine, à la vie éter­nelle, qui com­mencent à nous mettre dans l’éternité ? »

Je disais, « il y a trois dons prin­ci­paux que Notre Seigneur nous a faits : le pape, la très Sainte Vierge et le Sacrifice eucha­ris­tique. Trois dons extra­or­di­naires que Notre Seigneur nous a faits : le pape, la très Sainte Vierge et le Sacrifice eucharistique. »

Et en effet, c’est un don extra­or­di­naire que nous a fait le Bon Dieu, de nous don­ner le pape, de nous don­ner des suc­ces­seurs de Pierre ; de nous don­ner jus­te­ment cette péren­ni­té dans la Vérité qui nous est com­mu­ni­quée par les suc­ces­seurs de Pierre ; qui doit être com­mu­ni­quée par les suc­ces­seurs de Pierre.

Et il semble incon­ce­vable qu’un suc­ces­seur de Pierre puisse faillir, en quelque sorte, à la com­mu­ni­ca­tion de la Vérité qu’il doit com­mu­ni­quer. Parce qu’il ne peut pas sans – je dirai presque – dis­pa­raître de la lignée des papes, ne pas com­mu­ni­quer ce que les papes ont tou­jours com­mu­ni­qué : le dépôt de la foi, qui ne lui appar­tient pas non plus. La Vérité du dépôt de la foi n’appartient pas au pape. C’est un tré­sor qui est mis entre ses mains lorsqu’il est élu Souverain Pontife, suc­ces­seur de Pierre, évêque de Rome et donc suc­ces­seur de Pierre. Il tient dans ses mains le tré­sor de la Vérité qui a été ensei­gné pen­dant vingt siècles et il doit le trans­mettre fidè­le­ment, exac­te­ment, à tous ceux aux­quels il est char­gé de par­ler et de com­mu­ni­quer la Vérité de l’Évangile.

Il n’est pas libre. Et donc, dans la mesure où il arri­ve­rait par des cir­cons­tances abso­lu­ment mys­té­rieuses – que nous ne pou­vons pas com­prendre ; qui dépassent notre ima­gi­na­tion ; qui dépassent notre concep­tion – s’il arrive qu’un pape ou que celui qui est assis sur le siège de Pierre, vienne à obs­cur­cir, en quelque sorte, la Vérité qu’il doit trans­mettre, à ne plus la trans­mettre fidè­le­ment, ou à lais­ser l’obscurité de l’erreur cacher en quelque sorte la Vérité, dans ce cas, nous devons prier Dieu, prier Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, que la lumière se fasse en celui qui est char­gé de la transmettre.

Mais nous ne pou­vons pas chan­ger de Vérité pour autant. Nous ne pou­vons pas tom­ber dans l’erreur. Nous ne pou­vons pas suivre l’erreur, parce que celui qui a été char­gé de nous trans­mettre la Vérité, serait faible et lais­se­rait l’erreur se dis­pen­ser tout autour de lui. Nous ne vou­lons pas que les ténèbres nous enva­hissent ; nous vou­lons demeu­rer dans la lumière de la Vérité.

Et nous demeu­rons dans la fidé­li­té à ce qui a été ensei­gné pen­dant deux mille ans, parce qu’il est incon­ce­vable que ce qui a été ensei­gné pen­dant deux mille ans et qui est – comme je vous l’ai déjà dit – une part d’éternité ; c’est l’éternité qui nous a été ensei­gnée. C’est Dieu éter­nel ; c’est Jésus-​Christ, Dieu éter­nel. Et tout ce qui est fixé en Jésus-​Christ est fixé dans l’éternité et tout ce qui est fixé en Dieu est fixé pour l’éternité.

Jamais on ne pour­ra chan­ger le fait qu’il y ait la Trinité. Jamais on ne pour­ra chan­ger le fait de l’œuvre rédemp­trice de Notre Seigneur Jésus-​Christ par la Croix et par le Sacrifice de la messe. Ce sont des choses éter­nelles, qui appar­tiennent à l’éternité, qui appar­tiennent à Dieu.

Comment quelqu’un ici-​bas, pour­rait chan­ger ces choses-​là ? Quel est le pape qui se sen­ti­rait le droit de chan­ger ces choses-​là, de les modi­fier ? C’est impossible.

Quand nous tenons le pas­sé, nous tenons le pré­sent et nous tenons l’avenir. Parce qu’il est impos­sible, je dirai méta­phy­si­que­ment, divi­ne­ment, impos­sible de sépa­rer le pas­sé du pré­sent et de l’avenir. Impossible, ou Dieu n’est plus Dieu ; ou Dieu n’est plus éter­nel ; ou Dieu n’est plus immuable. Et alors, il n’y a plus rien à croire. Nous sommes dans l’erreur complètement.

C’est pour­quoi, sans nous pré­oc­cu­per de ce qui se passe autour de nous aujourd’hui, eh bien nous devrions fer­mer les yeux sur l’horreur du drame que nous vivons, fer­mer les yeux, répé­ter notre Credo ; répé­ter notre Décalogue ; répé­ter le Sermon sur la mon­tagne qui est notre loi éga­le­ment ; nous atta­cher au Saint Sacrifice de la messe ; nous atta­cher aux sacre­ments, en atten­dant que la lumière se fasse à nou­veau autour de nous. C’est tout.

Voilà ce que nous devons faire et non pas entrer dans des ran­cœurs, dans des vio­lences, dans un esprit qui ne serait plus fidèle à Notre Seigneur ; qui ne serait pas dans la cha­ri­té. Restons, demeu­rons dans la cha­ri­té. Prions, souf­frons, accep­tant toutes les épreuves, tout ce qui peut nous arri­ver ; tout ce que le Bon Dieu, peut nous envoyer comme épreuves. Faisons comme Tobie. Tous les siens avaient aban­don­né ; ils ado­raient les veaux d’or ; ils ado­raient les dieux des païens. Il est res­té fidèle.

Et pour­tant en lui-​même, il devait peut-​être pen­ser que tout seul, dans la fidé­li­té, il ris­quait de man­quer à la Vérité. Mais non ! Il savait que ce que Dieu avait ensei­gné à ses pères, ne pou­vait chan­ger. La Vérité de Dieu exis­tait ; elle ne pou­vait pas changer.

Eh bien, nous aus­si, nous devons nous appuyer sur la Vérité qui est Dieu, qui est hier, aujourd’hui et demain : Jésus Christus heri hodie et in sæcu­la. Et c’est pour­quoi, je dirai, nous devons gar­der la confiance dans la papau­té ; nous devons gar­der la confiance dans le suc­ces­seur de Pierre, en tant que suc­ces­seur de Pierre, en tant qu’il est suc­ces­seur de Pierre.

Mais si d’aventure, il n’était pas par­fai­te­ment fidèle à sa fonc­tion, alors nous devons res­ter fidèles au suc­ces­seur de Pierre et non pas à celui qui ne serait pas le suc­ces­seur de Pierre ; c’est tout, puisqu’il est char­gé de nous trans­mettre le dépôt de la foi.

Et puis, le deuxième don, c’est celui de la très Sainte Vierge Marie ; la très Sainte Vierge Marie, elle, n’a jamais chan­gé. Imaginez que la très Sainte Vierge Marie ait pu chan­ger sur l’idée qu’elle pou­vait se faire de la divi­ni­té de Notre Seigneur Jésus-​Christ, son divin Fils, sur le Sacrifice de la Croix que son divin Fils devait subir, sur l’œuvre de la Rédemption. La très Sainte Vierge a‑t-​elle pu chan­ger d’un iota, dans sa foi ? A‑t-​elle pu à une époque de sa vie avoir des doutes ? A‑t-​elle pu entrer dans l’erreur ? A‑t-​elle pu dou­ter de la divi­ni­té de Notre Seigneur Jésus-​Christ ? A‑t-​elle pu dou­ter de la très Sainte Trinité, elle qui avait été rem­plie du Saint-​Esprit ? Impossible ! Inconcevable !

Elle était déjà ici-​bas entrée dans son éter­ni­té la très Sainte Vierge Marie, par une foi immuable, par une foi pro­fonde, par une foi qui ne pou­vait pas chan­ger ; qui ne pou­vait pas être ébran­lée en aucune manière. C’est évident ! Et cette Sainte Mère, nous devons lui deman­der d’avoir sa fidé­li­té : Virgo fide­lis : « Vierge fidèle ».

Demandons à la très Sainte Vierge Marie d’avoir sa fidé­li­té. Ne nous lais­sons pas entraî­ner par les bruits qui courent, à droite, à gauche : fidé­li­té comme la très Sainte Vierge Marie.

Et j’ajouterai, au sujet de la très Sainte Vierge Marie une chose qui m’apparaît impor­tante pour nous, à notre époque, dans le moment où nous vivons actuel­le­ment. À tout ins­tant, on nous dit : la Vierge a dit ceci ; la Vierge a dit cela ; la Vierge est appa­rue ici ; la Vierge a com­mu­ni­qué tel mes­sage à telle personne.

Nous ne sommes pas contre la pos­si­bi­li­té d’une parole que la très Sainte Vierge puisse adres­ser à des per­sonnes de son choix, évi­dem­ment. Mais nous sommes dans une période telle, actuel­le­ment, que nous devons nous méfier. Et la place de la très Sainte Vierge Marie, dans la théo­lo­gie de l’Église, dans la foi de l’Église est, à mon avis, infi­ni­ment suf­fi­sante pour nous faire aimer la très Sainte Vierge par-​dessus toutes les autres créa­tures, après Notre Seigneur Jésus-​Christ. Et nous faire avoir une dévo­tion envers la très Sainte Vierge, qui est une dévo­tion pro­fonde, conti­nuelle, quotidienne.

Il n’est pas néces­saire pour nous que nous ayons constam­ment recours à des mes­sages dont nous ne sommes pas abso­lu­ment cer­tains qu’ils viennent ou non de la très Sainte Vierge.

Ah je ne parle pas des appa­ri­tions qui sont recon­nues par l’Église et qui sont ouver­te­ment recon­nues par l’Église, mais nous devons être très pru­dents en ce qui concerne les bruits que nous enten­dons par­tout aujourd’hui. C’est à tout ins­tant que je reçois des per­sonnes ou des com­mu­ni­ca­tions qui me sont don­nées de la part de la très Sainte Vierge, de la part de Notre Seigneur, de la part d’un mes­sage reçu ici, reçu là. Nous sou­hai­tons que la très Sainte Vierge soit par­mi nous tous les jours. Mais elle y est. Nous le savons. Elle est avec nous. Elle est pré­sente à tous nos sacri­fices de la messe ; elle ne peut pas se sépa­rer de la Croix de Notre Seigneur Jésus-​Christ. Alors, notre dévo­tion à la très Sainte Vierge doit être pro­fonde, par­faite, mais elle ne doit pas être dépen­dante de quelques mes­sages particuliers.

Et enfin, troi­sième don de Notre Seigneur Jésus-​Christ : le Sacrifice eucha­ris­tique. Dieu, Jésus-​Christ se donne Lui-​même à nous par le Sacrifice eucha­ris­tique. Que pouvait-​Il faire de plus beau ? Et à quoi devons-​nous être plus atta­chés qu’au Saint Sacrifice de la messe ?

Je l’ai dit sou­vent aux sémi­na­ristes : Si la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X a une spi­ri­tua­li­té spé­ciale – je ne sou­haite pas qu’elle ait une spi­ri­tua­li­té spé­ciale —, d’une cer­taine manière, non pas que je cri­tique les fon­da­teurs d’ordres, comme saint Ignace, saint Dominique, saint Vincent de Paul et que sais-​je, enfin ceux qui ont vou­lu don­ner un cachet par­ti­cu­lier à leur socié­té, cachet qui sans doute était vou­lu par la Providence au moment où ils ont vécu, eh bien je pense que s’il y a un cachet par­ti­cu­lier à notre Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X, c’est la dévo­tion au Saint Sacrifice de la messe.

Que nos esprits, nos cœurs, nos corps, soient cap­ti­vés par le grand mys­tère du Saint Sacrifice de la messe.

À mesure que nous com­pren­drons mieux ce grand mys­tère du Saint Sacrifice de la messe et de l’Eucharistie, car ils sont liés : le Sacrifice et le sacre­ment, ce sont les deux grandes réa­li­tés du Sacrifice de la messe ; et dans la mesure où nous appro­fon­dis­sons ces choses, nous com­pren­drons mieux aus­si ce qu’est le sacer­doce, la gran­deur du sacer­doce. Car il est lié inti­me­ment, je dirai méta­phy­si­que­ment, au Sacrifice de la messe.

Par consé­quent, dans la mesure où nous appro­fon­dis­sons le mys­tère, dans cette mesure, nous appro­fon­dis­sons aus­si la gran­deur du sacer­doce. Et c’est très impor­tant aujourd’hui dans l’époque actuelle. Nous avons besoin de cela, mes chers amis. Vous avez besoin d’être pris par la spi­ri­tua­li­té du Saint Sacrifice de la messe. Non seule­ment les prêtres d’ailleurs aus­si, mais tous nos chers fidèles qui sont ici présents.

Nous devons avoir pour le Saint Sacrifice de la messe une dévo­tion plus grande que jamais et, dans la mesure où il est fait de ce Sacrifice un simple repas ; dans la mesure où les idées pro­tes­tantes s’introduisent chez nous, c’est la ruine de notre sainte Religion.

Je n’ose pas vous citer l’exemple de ce qui s’est pas­sé au Chili, pen­dant les trois jours où j’y suis pas­sé. Et cepen­dant, puisque cela me vient à l’idée, je vous le dis tout sim­ple­ment. Mais pour vous mon­trer jusqu’où est allée la dégra­da­tion du Saint Sacrifice de la messe dans les per­sonnes les plus hautes et les plus éle­vées dans la hié­rar­chie catholique.

Pendant les trois jours que nous étions à Santiago du Chili, à la télé­vi­sion, est appa­rue sur l’écran de la télé­vi­sion, une concé­lé­bra­tion pré­si­dée par l’évêque auxi­liaire de Santiago du Chili, l’entouraient, – je ne sais pas, car je n’ai pas vu moi-​même la télé­vi­sion, mais tout cela a été dit par tous ceux qui y ont assis­té —, quinze ou vingt prêtres qui assis­taient et qui concé­lé­braient avec lui.

Pendant cette concé­lé­bra­tion, l’évêque auxi­liaire a expli­qué aux fidèles, donc à tous ceux qui le voyaient à la télé­vi­sion, il a expli­qué que c’était un repas et que par consé­quent, il ne voyait pas d’inconvénient à ce qu’on puisse fumer pen­dant ce repas ! Et lui-​même a fumé pen­dant cette concélébration.

Voilà où l’on en arrive. À quelles dégra­da­tions, à quels sacri­lèges peut arri­ver un évêque ! devant tout son peuple fidèle. C’est inouï, incon­ce­vable ! Il fau­drait faire répa­ra­tion de choses comme cela pen­dant des années. C’est un scan­dale inimaginable.

Mais cela vous montre à quel degré on peut arri­ver, len­te­ment, mais sûrement.

Alors nous devons être atta­chés au Saint Sacrifice de la messe comme à la pru­nelle de nos yeux, à ce qu’il y a de plus cher en nous, de plus res­pec­table, de plus saint, de plus sacré, de plus divin. Aussi soyons atta­chés à ces choses. Et c’est cela ce qu’est le séminaire.

On dira tout ce que l’on vou­dra du sémi­naire, on le cri­ti­que­ra. On le cri­tique à droite, on le cri­tique à gauche ; on le cri­tique en haut ; on le cri­tique en bas ; on le cri­tique de tous les côtés, le sémi­naire est ceci, le sémi­naire est cela. On a déci­dé ceci au sémi­naire, on a déci­dé cela.

On n’a rien déci­dé du tout. On n’a rien chan­gé du tout. Le sémi­naire reste ce qu’il est. Il conti­nue d’être ce qu’il a été et ce pour­quoi il a été fon­dé. Le sémi­naire reste le sémi­naire catho­lique. Et si Dieu me prête vie, le sémi­naire ne chan­ge­ra pas. Je mour­rai plu­tôt que de chan­ger quelque chose à la doc­trine catho­lique qui doit être ensei­gnée au séminaire.

Nous vou­lons gar­der la foi. Nous vou­lons faire des prêtres catho­liques. Je viens de vous l’expliquer, par les trois choses prin­ci­pales de l’Église catho­lique : le pape, la très Sainte Vierge Marie, le Saint Sacrifice de la messe. Ce sont les fon­de­ments de notre dévo­tion ici, à Écône.

Et quoi qu’il arrive, nous ne chan­ge­rons pas, avec la grâce du Bon Dieu. Alors que l’on dise ce que l’on vou­dra ! Vous enten­dez dire à droite, à gauche, le sémi­naire a pris une nou­velle orien­ta­tion ; le sémi­naire a ceci ; le sémi­naire a cela. C’est le diable qui dit cela ! Parce qu’il veut détruire le séminaire.

Évidemment, il ne peut pas sup­por­ter des prêtres catho­liques ; il ne peut pas sup­por­ter des prêtres qui ont la foi.

Et hélas, il faut bien le dire, autour de nous et dans tous les pays, mais par­ti­cu­liè­re­ment en France,

il y a de telles divi­sions par­mi ceux qui veulent gar­der la foi catho­lique que fusent alors les calom­nies, les médi­sances, les paroles exa­gé­rées, des réflexions qui sont faites – insen­sées – qui ne sont pas jus­ti­fiées. Ne nous occu­pons pas de tout cela. Laissons par­ler. Agissons bien selon la volon­té du Bon Dieu, selon la volon­té de l’Église catho­lique, en conti­nuant ce que nos pré­dé­ces­seurs ont fait, ce que nos ancêtres ont fait ; ce que le concile de Trente a deman­dé aux évêques et ce qu’ils ont fait : la for­ma­tion qui a tou­jours été don­née aux prêtres et nous serons dans la sécu­ri­té d’être dans la Vérité. C’est tout. Pas besoin d’écouter ce qui se dit de droite et de gauche. Demeurons dans la séré­ni­té ; demeu­rons dans la foi.

Et si, d’aventure nous n’enseignons pas la foi ici : alors quittez-​moi ! Si je ne vous enseigne pas la Vérité catho­lique ici ; par­tez chers sémi­na­ristes ; ne res­tez pas ici.

Mais si j’enseigne la foi catho­lique, si la foi catho­lique est ensei­gnée ici – véri­fiez ! – vous avez toute la biblio­thèque à votre dis­po­si­tion pour véri­fier si nous don­nons la foi catho­lique ou si nous ne la don­nons pas.

Si nous ne don­nons pas la foi catho­lique ici, alors il faut nous quit­ter. C’est un devoir pour vous.

Mais nous ferons tout pour que la foi catho­lique conti­nue d’être ensei­gnée ici, inté­gra­le­ment, dans son inté­gri­té, afin que vous puis­siez vous aus­si, por­ter cette Vérité. Cette Vérité qui est si féconde en grâces et en vie. Car il n’y a pas seule­ment la Vérité, la Vérité est la source de vie, source de grâces. Nous avons besoin de cette vie, les fidèles la demandent. C’est pour­quoi nous avons des demandes par­tout pour avoir des prêtres, parce que les fidèles ont soif de la Vérité, soif de la grâce de Notre Seigneur, soif de la vie sur­na­tu­relle, soif de cette vie divine, de cette éter­ni­té vers laquelle ils se dirigent. Alors nous fai­sons confiance à ce que l’Église a tou­jours fait.

Pas confiance en Monseigneur Lefebvre. Je suis un pauvre homme comme les autres ; je n’ai pas la pré­ten­tion d’être mieux que les autres, bien au contraire et je ne sais pas pour­quoi le Bon Dieu m’a per­mis d’avoir trente ans d’épiscopat.

Je pense que, si humai­ne­ment par­lant, je jugeais les choses, j’aurais pré­fé­ré res­ter au Gabon, mis­sion­naire dans la brousse du Gabon, iso­lé. Je n’aurais pas eu tous ces pro­blèmes que j’ai eus pen­dant mes trente ans d’épiscopat.

Le Bon Dieu l’a vou­lu. Et le Bon Dieu conti­nue de nous éprou­ver, de nous faire por­ter la Croix. Eh bien, si c’est sa volon­té, qu’elle soit faite. On conti­nue de por­ter la Croix.

Et ce n’est pas parce que le Bon Dieu nous impose des croix, que nous devons L’abandonner. Nous ne devons pas aban­don­ner Notre Seigneur, au contraire ! Nous devons Le suivre. Il nous a dit que nous devions Le suivre si nous por­tions sa Croix.

Alors, mes chers amis, soyez fidèles, soyez fidèles à Notre Seigneur ; fidèles à la très Sainte Vierge, fidèles au Pape ! au pape, au pape suc­ces­seur de Pierre, quand le pape se montre vrai­ment suc­ces­seur de Pierre ! Car, c’est cela qu’il est et c’est cela dont nous avons besoin ; Nous ne sommes pas des gens qui veulent rompre avec l’autorité de l’Église, avec le suc­ces­seur de Pierre.

Mais nous ne sommes pas non plus des gens qui vou­lons rompre avec vingt siècles de tra­di­tion de l’Église, avec vingt siècles de suc­ces­seur de Pierre.

Nous avons choi­si ! nous avons choi­si pour être obéis­sant dans la réa­li­té à tout ce que les papes ont ensei­gné pen­dant vingt siècles et nous ne pou­vons pas croire que celui qui est sur le siège de Pierre ne veut pas ensei­gner ces choses là ! nous ne pou­vons pas l’imaginer. Et si, d’aventure il le fai­sait, Dieu le jugera !

Mais nous nous ne pou­vons pas aller à l’erreur parce qu’il y aurait une espèce de rup­ture dans la chaine des suc­ces­seurs de Pierre.

Nous vou­lons res­ter fidèle au suc­ces­seur de Pierre qui nous trans­met le dépôt de la foi. Et c’est en cela que nous sommes fidèle à l’Église catho­lique et que nous demeu­rons dans l’Église catho­lique et que nous ne ferons jamais schisme ! nous ne pou­vons pas faire schisme, c’est impos­sible ! parce que, dans la mesure où nous sommes atta­ché pré­ci­sé­ment à ces vingt siècles de tra­di­tion de l’Église, à ces vingt siècles de foi de l’Église, nous ne pou­vons pas faire schisme !

C’est cela qui nous garan­ti que nous avons le pré­sent et le futur, comme je vous l’ai dit : Jésus Christus heri hodie et in sæcu­la, impos­sible de sépa­rer le pas­sé du pré­sent et du futur. Nous appuyant sur le pas­sé, nous sommes sûr du pré­sent et du futur.

Alors ayons confiance, deman­dons à la très Sainte Vierge Marie de nous aider dans toutes ces cir­cons­tances, Elle qui a été forte comme une armée ran­gée en bataille ; elle qui a souf­fert le mar­tyre. Reine des mar­tyrs, elle a souf­fert le mar­tyre à la Croix de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Eh bien, est-​ce que nous, nous ne sui­vrons pas notre Sainte Mère ? Est-​ce que nous ne serons pas avec notre Sainte Mère, prêts à souf­frir avec elle aus­si le mar­tyre pour que l’œuvre de la Rédemption se continue ?

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.