Le nouveau Code de 1983 est le fruit de deux sources : une évolution légitime de la discipline et les principes novateurs qui déjà se faisaient ressentir avant le concile Vatican II.
Évolution de la discipline
M. l’abbé Coache, docteur en Droit canonique, a publié en 1986 le fruit de ses études sur le Droit canon en deux parties : Initiation au Droit canonique, déjà publié entre 1958 et 1960, et Commentaires sur le Nouveau Code (de 1983). Voici les motifs pour lesquels il jugeait nécessaire une révision du Code de 1917.
« Car il fallait une mise à jour du Droit canon ; c’est bien évident, l’Église est vivante et la discipline doit se modifier en fonction des temps, des lieux et de l’évolution de l’humanité. (…) Le Père Jésuite Regatillo avait publié en 1953 un gros ouvrage de 720 pages pour interpréter (après réponses officielles de Rome), compléter ou corriger un grand nombre de canons depuis la parution du Code. Annotant moi-même cet ouvrage, de 1953 à 1965, je l’ai complété sur un grand nombre de pages en raison des lois nouvelles, décrets divers et précisions des Congrégations romaines parus pendant ces douze ans. Pie XII, à lui seul, a largement fait avancer le droit par ses discours et ses décrets, en matière liturgique par exemple. Il convenait donc qu’un jour ou l’autre le Code soit mis à jour.
« En outre, le Code de droit canonique, malgré l’excellence du travail accompli sous saint Pie X et Benoît XV et en dépit de ses remarquables qualités, n’est pas parfait. Il contient des obscurités, quelques contradictions de détail, et surtout une bien trop grande complexité au regard surtout des empêchements canoniques du mariage et des peines ecclésiastiques ; une simplification était donc souhaitable » (Abbé Coache, Le Droit canon est-il aimable ? pp. 218–219).
Les principes novateurs
La raison principale de la refonte du Code, est à chercher dans le concile Vatican II. Nous lisons en effet dans la Constitution Apostolique promulguant le Codex Iuris Canonici de 1983 :
« – Ce qui constitue la nouveauté essentielle du concile Vatican II dans la continuité avec la tradition législative de l’Église, surtout en ce qui concerne l’ecclésiologie, constitue également la nouveauté du nouveau Code (§ 21). »
« – Parmi les éléments qui caractérisent l’image réelle et authentique de l’Église, il nous faut mettre en relief surtout les suivants :
« – la doctrine selon laquelle l’Église se présente comme le peuple de Dieu (cf. Const. Lumen gentium, 2) et l’autorité hiérarchique comme service (cf ibid 3) ;
« – la doctrine qui montre l’Église comme une communion et qui, par conséquent, indique quelles sortes de relations réciproques doivent exister entre l’Église particulière et l’Église universelle et entre la collégialité et la primauté ;
« – la doctrine selon laquelle tous les membres du peuple de Dieu, chacun selon sa modalité, participent à la triple fonction du Christ : les fonctions sacerdotale, prophétique et royale. A cette doctrine se rattache celle concernant les devoirs et les droits des fidèles et en particulier des laïcs ;
« – et enfin l’engagement de l’Église dans l’œcuménisme (§ 22). »
« – Il reste à souhaiter que la nouvelle législation canonique devienne un moyen efficace pour que l’Église puisse progresser dans l’esprit de Vatican II (§ 27). »
Œcuménisme
Hors de l’Église, des moyens de salut
Selon les principes de Vatican II, il existe, en dehors de l’Église catholique des structures et des moyens salvifiques (voir article précédent).
« Cette Église, constituée et organisée en ce monde comme une société, subsiste dans l’Église catholique gouvernée par le successeur de Pierre et les Évêques en communion avec lui » (Code de 1983, can. 204 § 2).
Or « cette Église » est, d’après le premier paragraphe de ce canon 204, le peuple de Dieu : « Les fidèles du Christ (…) sont constitués en peuple de Dieu ». Les fidèles du Christ et donc l’Église du Christ subsisteraient dans l’Église catholique et ne lui seraient pas identiques ! C’est l’une des erreurs majeures du Concile.
Par suite les protestants et les orthodoxes, comme il est dit en divers lieux du Code (par ex. can. 844 et 1124 cités plus bas) n’auraient d’autre reproche à se faire que de n’être pas « en pleine communion » avec l’Église catholique. S’ils ne sont pas dans l’Église catholique, ils ne seraient pas en dehors de l’Église du Christ. La raison en serait que « des éléments nombreux de sanctification et de vérité subsistent hors de ses structures, éléments qui, appartenant proprement par don de Dieu à l’Église du Christ, appellent par eux-mêmes l’unité catholique » (Vatican II, Lumen Gentium 8).
Que reste-t-il du dogme de foi : « Hors de l’Église catholique pas de salut » ? Quel chemin peuvent prendre ceux qui se soumettent à cette loi nouvelle ?
Autour des sacrements
L’Église, fidèle à la tradition, a toujours refusé de donner les sacrements à ceux qui ne sont pas catholiques. Ils doivent auparavant rejeter leurs erreurs : « Il est interdit d’administrer les sacrements de l’Église aux hérétiques et aux schismatiques, même s’ils sont de bonne foi et les demandent, avant que, ayant rejeté leurs erreurs, ils soient réconciliés avec l’Église » (Code de 1917, can. 731).
Tout autre est l’esprit du nouveau Code : aucun rejet préalable du schisme ou de l’hérésie n’est demandé. Il suffit de tenir pour vraie la doctrine de l’Église catholique concernant tels sacrements et y être bien disposé. Mais comment tenir pour vraie la doctrine de l’Église si on n’a pas la foi catholique ? Comment être surnaturellement bien disposé – ce qui est nécessaire au salut – sans la foi fondement de toute vie surnaturelle ? Par ailleurs avoir la « foi » uniquement sur ces sacrements sans croire toutes les vérités qu’enseigne l’Église comme révélées de Dieu, c’est mettre en doute et rejeter l’autorité de Dieu qui révèle ces vérités ; c’est demeurer dans la voie de la perdition. En outre, permettre la réception des sacrements dans ces conditions ouvre la porte à tous les sacrilèges. Lisons : « En cas de danger de mort ou si, au jugement de l’Évêque diocésain ou de la conférence des Évêques, une autre grave nécessité se fait pressante (porte ouverte à toutes les fantaisies), les ministres catholiques peuvent administrer licitement ces mêmes sacrements (pénitence, Eucharistie et onction des malades), aussi aux autres chrétiens (c’est-à-dire orthodoxes et protestants) qui n’ont pas la pleine communion avec l’Église catholique, lorsqu’ils ne peuvent pas avoir recours à un ministre de leur communauté et qu’ils le demandent de leur plein gré, pourvu qu’ils manifestent la foi catholique sur ces sacrements et qu’ils soient dûment disposés » (Code de 1983, can. 844 § 4).
Il faut noter la même brèche à la foi dans l’autre sens : les catholiques ont toute facilité pour recevoir les sacrements de ministres non catholiques.
C’est l’œcuménisme du concile Vatican II appliqué dans le concret de la vie quotidienne. Toutes ces lois officielles conduiront peu à peu à la perte de la foi. Quelle responsabilité devant Dieu pour ceux qui les ont promulguées et pour ceux qui les appliquent !
Dans le mariage
L’Église est attentive au bien de la foi qui est premier ; il passe avant le bien du mariage et le fonde : « L’Église, est-il dit dans le Code de 1917, interdit partout très sévèrement qu’un mariage soit conclu entre deux personnes baptisées dont l’une est catholique, l’autre inscrite à une secte hérétique ou schismatique » (mariage mixte). Et relevant l’importance de la foi pour le salut, ce canon poursuit : « S’il y a danger de perversion du conjoint catholique et des enfants, une telle union est également prohibée par la loi divine elle-même » (can. 1060). Dieu même interdit ces mariages dès qu’il y a danger pour la foi !
Le Code nouveau ne connaît plus cette interdiction divine : le mariage mixte est seulement « interdit sans la permission expresse de l’autorité compétente ». La raison en est que la partie non catholique n’est plus un danger pour la partie catholique, puisqu’il lui manque seulement « la pleine communion avec l’Église catholique » (can. 1124).
L’Église, cependant, peut donner une dispense à ce genre d’union. Le Code de 1917 y pose des conditions précises et exigeantes : il faut des raisons « urgentes », « justes et graves » ; le conjoint acatholique doit donner « la garantie d’écarter le danger de perversion du conjoint catholique » et les deux conjoints doivent donner « celle de baptiser tous leurs enfants et de leur assurer la seule éducation catholique » ; il faut en outre « la certitude morale que ces garanties seront exécutées » ; celles-ci doivent être écrites (can. 1061).
Le nouveau Code n’exige les promesses que de la partie catholique et encore faiblement : « La partie catholique déclarera qu’elle est prête à écarter les dangers d’abandon de la foi et promettra sincèrement de faire son possible (pas plus !) pour que tous les enfants soient baptisés et éduqués dans l’Église catholique ». L’autre partie sera seulement « informée à temps de ces promesses que doit faire la partie catholique, de telle sorte qu’il soit établi qu’elle connaît vraiment la promesse et l’obligation de la partie catholique » ; rien n’est exigée d’elle ; tenue à rien, qu’imposera-t-elle ?… (can. 1125).
Cela vaut pour les mariages avec disparité de culte (avec un musulman par exemple) (can. 1129) !
Quand on mesure l’importance de la foi pure de tout alliage pour l’éducation des baptisés au sein des familles, on découvre combien ce nouveau Code s’oppose à la foi catholique et à l’honneur dû à Dieu. Il précipite les âmes dans le chemin de la perdition…
Démocratie
À Vatican II, les novateurs ont défini l’Église comme « peuple de Dieu ». Cette idée les obsède si l’on en juge par l’insistance à considérer chaque partie de l’Église comme peuple de Dieu : le diocèse, la prélature (ou l’abbaye) territoriale, le vicariat (ou la prélature) apostolique et l’administration apostolique sont chacun « une portion déterminée du peuple de Dieu » (Code de 1983, can. 369 à 371).
L’esprit égalitaire et démocratique tend à diminuer la différence entre clercs et laïcs, entre pape et évêques, entre évêques et prêtres, entre homme et femme. Ce qui suit le fera voir.
L’Église est « peuple de Dieu »
Ce ne sont pas seulement des mots.
- Des pouvoirs sont donnés au peuple. Puisque l’Église est peuple de Dieu, chaque membre participe au triple pouvoir donné par Jésus Christ aux apôtres (enseigner, baptiser, commander) : « Les fidèles du Christ sont ceux qui, en tant qu’incorporés au Christ par le baptême, sont constitués en peuple de Dieu et qui, pour cette raison, faits participants à leur manière à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, sont appelés à exercer, chacun selon sa condition propre, la mission que Dieu a confiée à l’Église pour qu’elle l’accomplisse dans le monde » (204 § 1).
En contradiction avec toute la tradition, pouvoirs et mission sont donc donnés d’abord au peuple et non en premier (et exclusivement) à la hiérarchie. Il n’est pas vrai que les fidèles ont la charge d’exercer « la mission que Dieu a confiée à l’Église » ni qu’ils ont reçu les pouvoirs à cette fin. Jésus Christ n’a pas dit à tous mais aux seuls Apôtres : « Tout pouvoir m’a été donné sur la terre. Allez, enseignez toutes les nations, baptisez-les …, et apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé » (Mt 28, 19).
Par conséquent, la hiérarchie, mise en second rang, est diminuée, oblitérée. On le montre encore comme il suit.
- La hiérarchie est issue du peuple. En effet, après les normes générales, le Code commence un second livre intitulé : « Le peuple de Dieu ». Celui-ci traite d’abord des fidèles du Christ, de leurs droits et obligations. C’est seulement en troisième partie qu’il traite des clercs ou ministres sacrés. Le Code de 1917 ordonne les choses à l’endroit : dans le livre « Des personnes », après les règles générales les concernant, le Code traite d’abord des clercs, puis des religieux et en dernier des laïcs. Le nouveau Code renverse la pyramide.
- De plus les clercs sont pris « parmi les fidèles », sans doute en raison d’une « institution divine », mais il reste qu’on pose d’abord l’égalité entre les deux : « Par institution divine, il y a dans l’Église, parmi les fidèles, les ministres sacrés qui en droit sont appelés clercs, et les autres qui sont appelés laïcs » (can. 207).
En somme, les fidèles sont constitués en peuple de Dieu, muni de pouvoir et chargé de mission (can. 204) ; les clercs sont pris parmi les fidèles (can. 207) ; enfin en raison du baptême, il existe entre tous les fidèles « quant à la dignité et à l’activité, une véritable égalité en vertu de laquelle tous coopèrent à l’édification du Corps du Christ, selon la condition et la fonction propres de chacun » (can. 208).
Il est évident que toute la loi va se ressentir de cet égalitarisme. Cet esprit faux infecte tout le Code et le vicie à la racine.
C’est pourquoi, R. Paralieu peut tranquillement écrire : « en traitant, sous un même titre, des chrétiens en général, les fidèles puis les clercs, il y a déjà dans le nouveau droit canonique un renversement des perspectives ecclésiologiques » (Guide pratique du Code de droit canonique, Tardy, 1985, p. 93).
Et chose grave pour la vie de l’Église, cet égalitarisme pose un obstacle au passage de la grâce. En effet, de par l’institution divine, la grâce passe par la hiérarchie et descend jusqu’aux fidèles. Si l’on renverse la pyramide, par où la grâce pourrait-elle passer ? (Conférence de Mgr Lefebvre à Écône en 1986) Se soumettre à ce Code ne serait-il pas suicidaire ?
Droits des fidèles et dignité de l’homme
- Les droits des fidèles sont fort nombreux comme il se doit dans une société démocratique : droit à l’activité missionnaire propre (can. 211 et 216) ; de donner leur opinion sur le bien de l’Église (can. 212) ; aux biens spirituels (can. 213) ; de rendre le culte selon leur rite et de suivre leur forme propre de vie spirituelle (can. 214) ; à l’éducation chrétienne (can. 217) ; de revendiquer leurs droits devant l’autorité ecclésiastique (can. 221) ; etc.
- Les laïcs ont des fonctions fort étendues. Les laïcs sont invités à acquérir et enseigner les sciences sacrées (can. 229). Ils sont admis aux ministères de lecteur et d’acolyte, peuvent « présider aux prières liturgiques », baptiser (can. 230) et assister aux mariages (can. 1112). Ils (femmes non exclues) peuvent donner la communion ou la porter aux malades (can. 230, 910 et 911). Un laïc peut exposer le Saint Sacrement (can. 943) et même faire partie des tribunaux ecclésiastiques (can. 1421) (même une femme, puisque le Code ne l’exclut pas) ! Les laïcs peuvent prêcher (can. 230 et 766). Ceci est à l’opposé de l’ancien Code qui l’interdisait (can. 1342).
- Les droits de la personne humaine font partie de la doctrine à enseigner. L’Église doit enseigner les principes de la morale et « porter un jugement sur toute réalité humaine, dans la mesure où l’exigent les droits fondamentaux de la personne humaine ou le salut des âmes » (can. 747). Et les droits de Dieu ? Les prédicateurs de la parole divine « communiqueront aussi aux fidèles la doctrine qu’enseigne le magistère de l’Église sur la dignité et la liberté de la personne humaine » (can. 768).
Collégialité
Le Code reprend l’erreur du Concile sur la double tête (pape et collège) comme sujet du pouvoir suprême : « Le Collège des Évêques dont le chef est le Pontife Suprême et dont les Évêques sont les membres en vertu de la consécration sacramentelle et par la communion hiérarchique entre le chef et les membres du Collège, et dans lequel se perpétue le corps apostolique, est lui aussi en union avec son chef et jamais sans lui, sujet du pouvoir suprême et plénier sur l’Église tout entière » (can. 336).
Démocratie dans la messe
Sans reprendre la définition si contestée de la nouvelle messe, le nouveau Code va dans le même esprit démocratique : « Dans la Synaxe eucharistique, le peuple de Dieu est convoqué en assemblée sous la présidence de l’Évêque ou du prêtre sous l’autorité de l’Évêque, agissant en la personne du Christ, et tous les fidèles qui y assistent, clercs ou laïcs, y concourent en prenant une part active, chacun selon son mode propre… » (can. 899 § 2).
Démocratie dans le mariage
Le nouveau Code définit le mariage comme « une communauté de toute la vie » ordonnée principalement « au bien des conjoints » et seulement « ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants » (can. 1055). Le Code de 1917, précis, dit : « La fin première du mariage est la procréation et l’éducation des enfants ; la fin secondaire est l’aide mutuelle et le remède à la concupiscence » (can. 1013).
En insistant davantage sur le bien des conjoints que sur la génération, il n’est pas difficile à ce Code d’affirmer que l’égalité des conjoints s’étend à toute la communauté de vie conjugale : « Chaque conjoint possède devoir et droit égaux en ce qui concerne la communauté de vie conjugale » (can. 1135). Ceci n’est pas du tout conforme à la tradition exprimée par le Code de 1917. Ce dernier ne reconnaît l’égalité qu’en ce qui concerne les actes conjugaux : « Un droit et un devoir égal appartiennent dès le début du mariage à chacun des conjoints en ce qui concerne les actes propres à la vie conjugale » (can. 1111). Pour le reste la femme est soumise à son mari : « À moins qu’il n’en soit statué autrement par un droit spécial, la femme devient participante de l’état du mari, pour tous les effets canoniques » (can. 1112).
Quant aux peines
À ce sujet, l’abbé Coache met en évidence le changement d’esprit du nouveau Code : le passage du primat de l’objet au primat du sujet.
« Si le Droit précédent se trouve beaucoup moins large que le nouveau, il faut dire, rappeler et souligner qu’il se trouve tout aussi miséricordieux ; la différence vient de la méthode qui nous paraît vraiment défectueuse dans le Droit moderne, et toujours en raison du même esprit : amoindrissement du sens de l’autorité, du péché, besoin constant de défendre l’homme contre la loi pour prétendre sauvegarder sa dignité. Le Droit traditionnel établit la loi – et donc, en droit pénal, la loi pénale – avec netteté, objectivité ; la loi marque et précise les sanctions pour les délits commis, en expliquant d’une manière assez nette quelles sont les causes extérieures qui peuvent excuser de la peine (par exemple l’âge inférieur à la puberté, l’ébriété en certains cas, la violence extérieure…) ou même les causes intérieures facilement jugeables (par ex. l’ignorance de la loi ou de la peine) ; le Droit traditionnel est donc objectif ; mais à côté de cela il multiplie les règles, les principes et les conseils qui portent à l’indulgence dans l’interprétation ou l’application de la loi (ex. canons 2218, 2219, 2223, etc.).
« Au contraire le nouveau Droit, pour libérer – à tort – le sujet de la loi ou de l’intervention (même bienveillante) du Supérieur, multiplie les cas ou les situations où le délinquant se trouve à l’abri de la peine, mais de façon tellement subjective que la loi ne peut plus s’y retrouver (« crainte grave relative », « influence d’une nécessité », « grave inconvénient », « hasard que l’on n’a pu prévoir » (sic) ou encore « croyance que l’une de ces circonstances se présente » !) ; il n’y a plus de jugement possible ; ce n’est plus du Droit, c’est du roman ou de la guimauve ! Avec de tels principes il n’y a plus de sanctions applicables ; ce n’est plus de la bonté ni de la miséricorde, ni même de la bienveillance à l’égard du coupable, mais paradoxalement de la moquerie si ce n’est de la complicité. » (Abbé Coache, Le Droit canon est-il aimable ? pp. 299–300)
Jugements
De M. l’abbé Coache
« Il y a un Nouveau Droit canon comme il y a une Nouvelle Religion, des Nouveaux Prêtres et une Nouvelle Messe. Ce Nouveau Droit canon, publié en 1983, est l’émanation de la Nouvelle Religion dans ce qu’elle a d’officiel ; apparemment il freine ou réprouve les excès de tout un esprit post-conciliaire ; cependant il cristallise également tout un esprit sorti du concile Vatican II, rassemblant et codifiant les autorisations, lois et décrets publiés depuis le Concile. » (Le Droit canon est-il aimable ? p. 215)
« Ce nouveau Droit canon oblige-t-il ? Certainement pas, en vertu même de ce principe que l’erreur n’a aucun droit et qu’il « vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes ». Un document comme celui-là, fût-il officiel, quand il est vicié d’un bout à l’autre par un esprit évidemment faux et par un certain nombre de lois qui contredisent la Foi et la Tradition, n’a aucune valeur juridique. Ce ne peut être un document d’Église puisque l’Église ne peut se déjuger dans sa Vérité éternelle ; il n’y a pas là, dans ce jugement de notre part, « libre examen », mais simple constatation de la raison humaine ; les chefs de l’Église, le pape lui-même, sont tenus par la Foi et la Tradition ; s’ils y dérogent, ils se condamnent eux-mêmes et leurs actes sont sans valeur. C’est une constatation et une conclusion. Les théologiens eux, essaieront d’expliquer. » (Le Droit canon est-il aimable ? p. 315)
« Le nouveau Code est fait pour faire passer en langage légal, canonique, l’ecclésiologie conciliaire. (…)
« Et donc le but du nouveau Droit Canon, c’est de faire (…) passer l’esprit du concile Vatican II. Et cet esprit du concile Vatican II est dominé par cet œcuménisme, car l’ecclésiologie nouvelle est construite, est forgée sur les idées protestantes pour éviter les objections des protestants. Les protestants ne peuvent pas supporter la primauté du pape, alors on a essayé de noyer la primauté du pape, la supériorité du pape, dans la collégialité. Et vous avez maintenant deux sujets de pouvoir suprême. Allez comprendre quelque chose… Comment peut-il y avoir deux sujets de pouvoir suprême ?… » (Mgr Lefebvre, Écône, 18 janvier 1983)
« Alors il nous faudra garder l’ancien Droit Canon, en en prenant les principes fondamentaux et comparer avec le nouveau Droit Canon pour juger le nouveau Droit Canon. De même que nous prenons la Tradition pour juger aussi les nouveaux livres liturgiques. » (Mgr Lefebvre, Écône, 14 mars 1983)
« Il nous est impossible d’accepter en bloc le Droit Canon tel qu’il a été édité, parce qu’il est précisément dans la ligne de Vatican II et dans la ligne des réformes de Vatican II. Le pape lui-même le dit. Il est dans cette nouvelle ecclésiologie qui ne correspond pas à l’ecclésiologie traditionnelle et donc qui, indirectement touche notre foi, et risque de nous entraîner, au moins dans un certain nombre de points essentiels du Droit, dans des hérésies, favorise l’hérésie, comme la réforme liturgique qui favorise l’hérésie aussi. C’est pour cela que nous refusons la réforme liturgique aussi. (…) C’est la même chose pour les catéchismes, les nouveaux catéchismes. Nous refusons les nouveaux catéchismes parce qu’ils diminuent notre foi. »
Pour fonder son jugement, Mgr Lefebvre cite le professeur Michiels et en conclut : « Le fondement de la vie surnaturelle qui est donné en charge à l’Église, confié à l’Église, son fondement, c’est la foi. Alors on s’aperçoit que le devoir donc du Droit ce sera de déterminer tout ce qui regarde la foi. Donc le Droit (…) fera donc que la foi soit prêchée, expliquée, fera voir comment elle doit être reçue, par les catéchumènes en particulier, déterminera l’exercice de la foi, la profession extérieure de la foi, la défense de la foi et sa vengeance en quelque sorte, sa défense par rapport à ceux qui attaqueraient la foi. Tout cela, le Droit doit le faire, les Canons doivent l’exprimer. » (Mgr Lefebvre, Écône, 15 mars 1983)
Décisions pratiques au sein de la Fraternité Saint-Pie X
Ce nouveau Code, pour le moins douteux, n’oblige pas. On s’en tient donc pour les principes (doctrine et mœurs) au Code de 1917. Cependant, en certains domaines particuliers, comme les censures canoniques et les empêchements de mariage, certaines mesures du nouveau Code sont retenues. Elles sont retenues, non en raison de leur appartenance à ce Code qui n’oblige pas, mais pour des motifs extrinsèques, comme le sont une évolution légitime de la discipline (signalée par l’abbé Coache) et le bien des âmes.
Soyons donc profondément attachés à la loi de Dieu et non aux divagations des novateurs : « Heureux l’homme qui ne marcha pas dans le conseil des impies, qui ne se tient pas dans la voie des pécheurs et qui ne s’assied pas dans la chaire de pestilence, mais dont la volonté est dans la loi de Dieu, et qui la médite jour et nuit (Psaume 1) ».
Abbé Olivier du Chatelet+, prêtre de la FSSPX
Source : Le Combat de la Foi n° 171 de décembre 2014