La messe de Luther

Martin Luther. Crédit : Wikipédia, domaine public

La messe est ce qu ’il y a de plus beau et de meilleur dans l “Eglise […] Aussi le démon a‑t-​il tou­jours cher­ché au moyen des héré­tiques à pri­ver le monde de la messe.

Saint Alphonse de Liguori

A l’opposé d’une telle pen­sée, Luther ne mas­quait pas son rejet vigou­reux de la messe :

« Quand la messe sera ren­ver­sée, je pense que nous aurons ren­ver­sé la papau­té ! Car c’est sur la messe comme sur un rocher que s’appuie la papau­té tout entière, avec ses monas­tères, ses évê­chés, ses col­lèges, ses autels, ses ministres et sa doc­trine… Tout s’écroulera quand s’écroulera la messe sacri­lège et abo­mi­nable »[1]

Au-​delà de la viru­lence du pro­pos, ce der­nier mani­feste l’abîme sépa­rant la concep­tion luthé­rienne de la doc­trine catho­lique au sujet de la messe.

Cette oppo­si­tion semble avoir été consi­dé­ra­ble­ment dimi­nuée par la réforme du mis­sel romain opé­rée par Paul VI en avril 1969. Dès le mois de mai 1969, le pro­tes­tant Max Thurian de la com­mu­nau­té de Taizé affir­mait pla­ci­de­ment : « Avec la nou­velle litur­gie, des com­mu­nau­tés non-​catholiques pour­ront célé­brer la Sainte Cène avec les mêmes prières que l’Église catho­lique. Théologiquement c’est possible ».

Comment expli­quer un tel chan­ge­ment ? Le nou­veau rite se serait-​il rap­pro­ché de la posi­tion pro­tes­tante ? Ou seraient-​ce les pro­tes­tants qui auraient changé ?

Deux avis, l’un éma­nant d’un catho­lique, l’autre d’un pro­tes­tant, favo­risent la pre­mière interprétation.

Mgr Bugnini, prin­ci­pal arti­san de la réforme litur­gique, eut l’étonnante sim­pli­ci­té de l’avouer : « [dans la réforme litur­gique] l’Église a été gui­dée par l’amour des âmes et le sou­ci de tout faire pour faci­li­ter à nos frères sépa­rés le che­min de l’union, en écar­tant toute pierre qui pour­rait consti­tuer ne serait-​ce que l’ombre d’un risque d’achoppement ou de déplai­sir »[2].

Les termes employés sont révé­la­teurs « « tout faire », « l’ombre », « d’un risque », « d’achoppement ou de déplai­sir ». Pour évi­ter ce genre d’ombre de risque, Mgr Bugnini n’a rien négli­gé. Six pas­teurs pro­tes­tants ont ain­si été appe­lés pour l’aider à conce­voir cette nou­velle messe.

Le second avis pro­cède d’un pro­tes­tant. En 1984, à la suite de l’indult du pape Jean-​Paul II auto­ri­sant la célé­bra­tion de la messe de saint Pie V à cer­taines condi­tions, le jour­nal Le Monde insé­ra dans le cour­rier des lec­teurs le texte sui­vant, signé du Pasteur Viot[3] :

« La réin­tro­duc­tion de la messe de saint Pie V (…) est beau­coup plus qu’une affaire de langue : c’est une ques­tion doc­tri­nale de la plus haute impor­tance, au cœur des débats entre catho­liques et pro­tes­tants, débats que pour ma part, je croyais heu­reu­se­ment clos. (…) Beaucoup de nos ancêtres dans la foi réfor­mée selon la Parole de Dieu ont pré­fé­ré mon­ter sur le bûcher plu­tôt que d’entendre ce type de messe que le pape Pie V offi­cia­li­sa contre la Réforme. Aussi nous étions-​nous réjouis des déci­sions de Vatican II sur le sujet et de la fer­me­té de Rome à l’égard de ceux qui ne vou­laient pas se sou­mettre au Concile et conti­nuaient à uti­li­ser une messe à nos yeux contraire à l’Évangile ».

La pen­sée est claire, le lan­gage franc : l’irréductibilité de la doc­trine pro­tes­tante et de la messe tra­di­tion­nelle demeure.

Le chan­ge­ment de posi­tion ne pro­vient donc pas des pro­tes­tants, mais du rite catho­lique. Telle est la conclu­sion qu’il reste à étayer sur des bases plus solides.

L’étude de la messe de Paul VI n’est donc pas d’un mince inté­rêt. Ajoutons d’emblée, pour évi­ter toute équi­voque auprès de nos lec­teurs du Chardonnet, que l’examen de ce rite ne por­te­ra que sur le texte offi­ciel de 1962, et non sur d’incroyables adap­ta­tions mal­heu­reu­se­ment récurrentes.

Pour abor­der la réforme du mis­sel litur­gique, nous pro­cé­de­rons de la manière suivante :

  1. Quelques rap­pels sur la doc­trine catholique.
  2. Le paral­lèle avec la messe de Luther.
  3. Les défi­ciences doc­tri­nales de la messe de Paul VI.
  4. Ses auteurs.
  5. Le déli­cat pro­blème de sa validité.
  6. Conséquences morales sur l’assistance à la messe de Paul VI.

Rappels de doctrine catholique

Avant de se pen­cher sur le rite de Paul VI, il convient de pro­cé­der à quelques rap­pels sur la doc­trine de la messe et du sacer­doce, des rites des sacre­ments et enfin de l’hérésie.

1. La doctrine de la messe et du sacerdoce

La doc­trine tra­di­tion­nelle de la messe est la suivante :

  • La messe est un vrai et authen­tique sacrifice.
  • La fina­li­té du sacri­fice est qua­druple : latreu­tique (rendre gloire à Dieu), eucha­ris­tique (le remer­cier), impé­tra­toire (lui deman­der des grâces), et pro­pi­tia­toire (expier nos péchés).
  • Le Christ est pré­sent, vrai­ment, réel­le­ment, et sub­stan­tiel­le­ment sous les espèces du pain et du vin.
  • Cette pré­sence est réa­li­sée par la transsubstantiation.

Quant au prêtre,

  • Il agit à la messe pre­miè­re­ment in per­so­na Christi, c’est-​à-​dire comme tenant la place du Christ et non comme repré­sen­tant des fidèles.
  • Son sacer­doce est de nature dif­fé­rente de celui des fidèles.

2. Les rites des sacrements

Tout rite sacra­men­tel com­porte deux par­ties : une par­tie essen­tielle et une par­tie accidentelle.

La par­tie essen­tielle cause direc­te­ment l’effet sacra­men­tel. Sans elle il ne sau­rait y avoir de sacre­ment (dans la messe, c’est la consé­cra­tion, dans le bap­tême, c’est l’ablution d’eau avec la pro­non­cia­tion de la for­mule : « Je te bap­tise au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit »). La par­tie acci­den­telle entoure la par­tie essen­tielle et a pour but de rehaus­ser la solen­ni­té du culte ren­du à Dieu, pré­ci­ser l’intention du ministre, dis­po­ser les âmes des fidèles à bien par­ti­ci­per à ce culte et en recueillir les fruits spi­ri­tuels. Cette pré­pa­ra­tion des fidèles vise tout spé­cia­le­ment à for­mer leur foi et à exci­ter leur dévotion.

Par exemple, le confi­teor du début de la messe aide le prêtre et les fidèles à entrer dans les dis­po­si­tions vou­lues pour assis­ter à la messe. La gra­vi­té des gestes impo­sés au prêtre au moment où il pro­nonce les paroles de la consé­cra­tion indique clai­re­ment qu’il ne s’agit pas d’un pur récit mais d’une action liturgique.

L’enseignement don­né par le rite de la messe est très impor­tant pour le com­mun des fidèles car leur foi est gar­dée, ins­truite ou défor­mée par la litur­gie, comme le disait très jus­te­ment le car­di­nal Journet : « La litur­gie et la caté­chèse sont les deux mâchoires de la tenaille avec laquelle on arrache la foi ».

Imaginons un ins­tant un rite qui ne com­por­te­rait aucune men­tion du péché et de la répa­ra­tion à faire du péché, aucune allu­sion à une néces­saire péni­tence, aucun geste de péni­tence (comme le bat­te­ment de coulpe) et que pen­dant des années, les fidèles assistent à ce rite, l’idée du péché ris­que­rait fort d’être relé­guée au fond d’une conscience jamais réveillée ni inquiétée.

À l’inverse, si un rite demande aux fidèles (prêtres et laïcs) de faire une génu­flexion devant le taber­nacle, de se mettre à genoux pour rece­voir l’hostie des mains d’un prêtre qui tient ses pouces et index joints une fois les paroles de la consé­cra­tion réci­tées, de tels fidèles sont à même de savoir et sai­sir l’enseignement de l’Église au sujet de la pré­sence réelle.

Lex orandi, lex credendi

Ce rap­port entre rite et foi est si vrai que dans l’Antiquité le pape saint Célestin 1er usa d’une expres­sion qui devait avoir une noto­rié­té mul­ti­sé­cu­laire et que bien d’autres papes ont reprise (Benoît XIV, Léon XIII, Pie XI, Pie XII).

« Legem cre­den­di sta­tuat lex sup­pli­can­di, lex cre­den­di legem sta­tuat sup­pli­can­di », que l’on peut tra­duire ain­si : « la loi de la prière déter­mine la loi de la foi, la loi de la foi déter­mine la loi de la prière », for­mule reprise de manière syn­thé­tique : Lex oran­di, lex credendi.

En d’autres termes, la litur­gie est le véhi­cule d’une doc­trine et on ne sau­rait mieux faire pour chan­ger la doc­trine d’un peuple que de lui chan­ger sa liturgie.

Ce point est essen­tiel, car tout sacre­ment consti­tue ain­si une pro­fes­sion publique de la foi[4]. Assister à la messe catho­lique est une pro­fes­sion de cette foi, assis­ter à une messe équi­voque tient lieu de cau­tion à une pro­fes­sion de foi douteuse.

La licéité du changement

L’Église a reçu du Sauveur une cer­taine liber­té quant aux rites des sacre­ments. Elle est libre de façon­ner un rite acci­den­tel et plus ou moins libre de tou­cher aux par­ties essentielles.

Toutefois, le chan­ge­ment litur­gique doit conduire au pro­grès dans l’expression de la foi, la solen­ni­té du culte, ou la pié­té des fidèles, mais assu­ré­ment pas dans l’appauvrissement du culte ou de la foi des fidèles. Comme le disait Mgr Lefebvre lui-même :

« Nous n’avons jamais refu­sé cer­tains chan­ge­ments, cer­taines adap­ta­tions qui témoignent de la vita­li­té de l’Église. En matière litur­gique, ce n’est pas la pre­mière réforme à laquelle assistent des hommes de mon âge : je venais juste de naître quand saint Pie X se pré­oc­cu­pa d’apporter des amé­lio­ra­tions, spé­cia­le­ment en don­nant plus d’importance au cycle tem­po­ral, en avan­çant l’âge de la pre­mière com­mu­nion pour les enfants et en res­tau­rant le chant litur­gique qui avait connu un obs­cur­cis­se­ment. Pie XII, par la suite, a réduit la durée du jeûne eucha­ris­tique en rai­son des dif­fi­cul­tés inhé­rentes à la vie moderne, auto­ri­sé pour le même motif la célé­bra­tion de la messe l’après-midi, (…) Jean XXIII a fait lui-​même quelques retouches, avant le concile, au rite dit de saint Pie V. Mais rien de cela n’approchait de près ou de loin ce qui a eu lieu en 1969, à savoir une nou­velle concep­tion de la messe »[5].

Et le grand arti­san de la nou­velle messe, Mgr Bugnini le recon­nais­sait lui-même :

« Il ne s’agit pas seule­ment de retouche à une œuvre d’art de grand prix, il faut par­fois don­ner des struc­tures nou­velles à des rites entiers (sic). Il s’agit d’une res­tau­ra­tion fon­da­men­tale, je dirais presque d’une refonte et, pour cer­tains points, d’une créa­tion nou­velle »[6].

3. L’hérésie

Il existe deux types d’hérésies : la posi­tive et la néga­tive, la franche et la sournoise.

L’hérésie posi­tive consiste à nier ouver­te­ment une véri­té de foi. Ainsi du pro­tes­tant qui enseigne clai­re­ment que le sacri­fice de la messe n’est pas un sacri­fice propitiatoire.

L’hérésie néga­tive, qui est plus pré­ci­sé­ment le che­min vers l’hérésie posi­tive ou carac­té­ri­sée, consiste pre­miè­re­ment à taire inten­tion­nel­le­ment une véri­té de foi sans la contre­dire ouver­te­ment pour quelle tombe petit à petit dans l’oubli.

Pie VI condam­na ain­si une pro­po­si­tion d’un « synode » de l’Assemblée jan­sé­niste tenue par l’évêque de Pistoie en 1794 pour la simple rai­son quelle omet­tait de men­tion­ner le mot « trans­sub­stan­tia­tion »[7].

Cette manière sour­noise d’induire l’hérésie consiste éga­le­ment à orien­ter l’esprit dans un sens contraire à la foi. Ainsi, en bai­sant le coran, le pape Jean-​Paul II a clai­re­ment inci­té les catho­liques à consi­dé­rer le coran comme un livre sacré et nul­le­ment contraire à la foi catholique.

Cette néga­tion sourde des mys­tères et cette nou­velle orien­ta­tion doc­tri­nale par des silences inten­tion­nels appa­raissent clai­re­ment dans la messe de Paul VI si on les com­pare avec la cène luthérienne. 

La messe de Luther

Zélé défen­seur de la messe tra­di­tion­nelle, Mgr Lefebvre n’hésitait pas à qua­li­fier le NOM[8] de « messe de Luther ». Exagération rhé­to­rique ou réa­li­té doc­tri­nale ? Un rapide paral­lèle entre les deux répond à la question.

1. La doctrine protestante

La doc­trine pro­tes­tante de la « messe » est fon­dée sur trois prin­cipes clefs : la trans­sub­stan­tia­tion, le sacer­doce minis­té­riel (du prêtre) et le sacri­fice de la messe sont des inven­tions, sinon du diable, du moins des hommes.

  • La pré­sence réelle : dans l’hostie, il y a une pré­sence réelle mais pure­ment spi­ri­tuelle. Il n’y pas de trans­sub­stan­tia­tion, c’est-​à-​dire de conver­sion du pain en corps, sans que rien ne reste du pain que les appa­rences, mais le pain demeure et Jésus-​Christ y vient spi­ri­tuel­le­ment par la foi des fidèles et n’y demeure que le temps de la cène ;
  • Le sacer­doce catho­lique est une pré­ten­tion injus­ti­fiée. Tout bap­ti­sé est prêtre. Celui qui tient le rôle du prêtre n’a tout au plus qu’un rôle de pré­sident d’assemblée, afin que celle-​ci offre un sacri­fice de louange, c’est-​à-​dire une prière, avec ordre et dignité.
  • Le sacri­fice de la messe est une abo­mi­na­tion. La cène ou l’eucharistie est un pur mémo­rial, une louange de Dieu et une pré­di­ca­tion faite aux hommes, mais non pas un sacri­fice où serait immo­lé le Christ, a for­tio­ri en expia­tion de nos péchés. L’offertoire qui exprime cette dimen­sion sacri­fi­cielle et expia­toire est donc la pre­mière prière à supprimer.

2. La tactique de Luther

Voulant déra­ci­ner dans l’âme des Allemands le sens de la messe, Luther com­prit qu’il fal­lait pro­cé­der avec habi­le­té. « Pour arri­ver plus sûre­ment au but, disait-​il, il faut conser­ver cer­taines céré­mo­nies de l’ancienne messe pour les faibles qui pour­raient être scan­da­li­sés par le chan­ge­ment trop brusque ». Par voie de consé­quence, Luther conser­va cer­taines prières, cer­tains chants (le Kyriale) pour faire bas­cu­ler en dou­ceur les fidèles vers l’hérésie.

Conseil qui ne fut pas oublié du père Mortimart, une des che­villes ouvrières du pré­ten­du pro­grès litur­gique : « Si l’on décide des modi­fi­ca­tions plus radi­cales, on pour­rait conser­ver les vieux usages, les anciens chants, les for­mules qui ont char­mé notre sacer­doce, dans les monas­tères et dans cer­taines églises, qui, par leur carac­tère ne sont pas fré­quen­tées par un public popu­laire ; la cha­pelle Sixtine, les abbayes n’attireront jamais qu’une élite acces­sible aux chefs‑d’œuvre de la prière et de l’art »[9].

En somme, une messe pour les esthètes et une autre pour le peuple ! Pour y arri­ver, il fal­lait pro­cé­der avec méthode, en dosant un cer­tain nombre de sup­pres­sions et d’ajouts, que l’on retrouve jus­te­ment dans la messe de Paul VI.

3. Suppressions de la cène protestante identiques à celles du NOM

  • la men­tion de la vir­gi­ni­té per­pé­tuelle de la Vierge Marie ;
  • la men­tion des saints,
  • la génu­flexion avant la consé­cra­tion tan­dis que celle qui suit était lais­sée. En effet, pour les pro­tes­tants, c’est la foi des fidèles qui fait la pré­sence sui­vant la parole du Christ : « Lorsque deux ou trois sont ras­sem­blés en mon nom, je suis là, au milieu d’eux ». Ainsi, le Christ n’est pré­sent qu’une fois que l’hostie a été mon­trée au peuple et non avant. Or, dans le NOM, le prêtre ne fait une génu­flexion qu’a­près avoir éle­vé l’hostie ;
  • l’offertoire ;
  • le canon ;
  • le taber­nacle, etc.

4. Ajouts de la cène protestante identiques à ceux du NOM

  • une prière universelle ;
  • une aug­men­ta­tion de la « litur­gie de la parole ». « Le culte s’adressait à Dieu, comme un hom­mage, disait Luther, il s’adresse désor­mais à l’homme pour le conso­ler et l’éclairer. Le sacri­fice occu­pait la pre­mière place, le ser­mon va le sup­plan­ter. »[10] ;
  • l’acclamation après le Pater ;
  • la double communion ;
  • la pré­sen­ta­tion à haute voix des oblats et du Canon ;
  • l’usage de la langue vernaculaire ;
  • la célé­bra­tion tour­née vers le peuple, etc.

Voici pour ter­mi­ner le récit d’une cène pro­tes­tante du temps de Luther :

« La plus grande anar­chie régnait par­mi les prêtres. Chacun disait main­te­nant la messe à sa guise. Le conseil débor­dé réso­lut de fixer une litur­gie nou­velle des­ti­née à réta­blir l’ordre en consa­crant les réformes.

On y réglait la façon de dire la messe. L’Introit, le Gloria, l’Épître, l’Evangile, le Sanctus étaient conser­vés, sui­vait une pré­di­ca­tion. L’Offertoire et le Canon étaient sup­pri­més. Le Prêtre réci­te­rait sim­ple­ment l’institution de la Cène, dirait à haute voix et en alle­mand les paroles de la Consécration, et don­ne­rait la com­mu­nion sous les deux espèces. Le chant de l’Agnus Dei, de la com­mu­nion et du Benedicamus Domino ter­mi­nait le service.

Luther s’inquiète de créer de nou­veaux can­tiques. (…) Luther ménage les tran­si­tions. Il conserve le plus pos­sible de céré­mo­nies anciennes. Il se borne à en chan­ger le sens. La messe garde en grande par­tie son appa­reil exté­rieur. Le peuple retrouve dans les églises le même décor, les mêmes rites, avec des retouches faites pour lui plaire, car désor­mais on s’adresse à lui beau­coup plus q’au­pa­ra­vant. Il a davan­tage conscience de comp­ter pour quelque chose dans le culte. Il y prend une part plus active par le chant et la prière à haute voix. Peu à peu le latin fait place défi­ni­ti­ve­ment à l’allemand.

Le peuple a davan­tage conscience de comp­ter pour quelque chose dans le culte. »

La consé­cra­tion sera chan­tée en alle­mand. Elle est conçue en ces termes : « Notre Seigneur dans la nuit qu’il fut tra­hi prit du pain, ren­dit grâces, le rom­pit et le pré­sen­ta à ses dis­ciples en disant : “Prenez et man­gez, ceci est mon corps qui est don­né pour vous. Faites ceci, toutes les fois que vous le ferez, en mémoire de moi”. De la même manière il prit aus­si le calice après le sou­per et dit : “Prenez et buvez en tous, ceci est le calice, un nou­veau tes­ta­ment, dans mon sang qui est ver­sé pour vous et pour la rémis­sion des péchés. Faites ceci, toutes les fois que vous boi­rez ce calice, en mémoire de moi” ».

Ainsi se trouvent ajou­tées les paroles quod­pro vobis tra­de­tur “qui est don­né pour vous” » et sup­pri­mées mys­te­rium fidei et pro mul­tis dans la consé­cra­tion du vin »[11].

On com­prend ces remarques du R. P. Calmel sur la tac­tique du moderniste :

« La manière directe d’un quel­conque réfor­ma­teur com­ba­tif et fana­tique, mais loyal, répugne à son per­son­nage tout pétri de men­songe. Son jeu est autre­ment sub­til. Il sait fort bien que pour faire évo­luer l’Église il faut avant tout chan­ger la Messe. Mais il faut aus­si dans une entre­prise d’une telle enver­gure évi­ter autant que pos­sible de don­ner l’éveil. La dif­fi­cul­té serait réso­lue si l’on arri­vait à for­ger une Messe qui, d’une part, serait encore accep­table pour ceux qui n’ont pas varié dans la foi catho­lique et apos­to­lique, et d’autre part ne répu­gne­rait pas à ceux qui ont une foi beau­coup plus large ; c’est-à-dire à ceux qui n’ont pas de foi du tout. De fait la dif­fi­cul­té des moder­nistes à for­ger une Messe qui puisse demeu­rer encore une Messe, bien quelle soit équi­voque, et quelle tende à l’abolition de la Messe, bref la dif­fi­cul­té de men­tir avec une habi­li­té suprême a été fina­le­ment réso­lue. (…) Quels moyens sont mis en œuvre pour rui­ner le Canon romain, pour faire régner l’équivoque et l’indévotion dans une ordon­nance rituelle qui n’était jusqu’ici que véri­té et pié­té ? Ces moyens sont les dépla­ce­ments, les ajouts et sur­tout le silence intentionnel. (…)

Disons pour conclure le bref exa­men des nou­velles Preces que rien n’y est lais­sé au hasard. Tout est cal­cu­lé. Tout s’infléchit dans une direc­tion pré­cise »[12].

Paul VI recon­nais­sait lui-​même la por­tée « péda­go­gique » de la réforme liturgique :

« … la nou­velle péda­go­gie reli­gieuse, que veut ins­tau­rer la pré­sente réno­va­tion litur­gique, s’insère pour prendre la place de moteur cen­tral dans le grand mou­ve­ment ins­crit dans les prin­cipes consti­tu­tion­nels de l’Église de Dieu.” »[13]

De profondes déficiences doctrinales

Le plus grand reproche fait au mis­sel de Paul VI touche la pro­fes­sion de la foi catho­lique. Le rite lui-​même, dans ses gestes et ses paroles, dans l’ensemble comme dans le détail, altère la foi catho­lique. Il ne la contre­dit pas fron­ta­le­ment, il l’escamote, il la tait, il la noie.

1. Quant au mystère chrétien

Le rite a pour tâche d’instruire prêtres et fidèles et de les dis­po­ser au culte de Dieu par ce rap­pel des véri­tés de foi. Or, le nou­veau rite s’accompagne d’un appau­vris­se­ment consi­dé­rable de ces rap­pels. Nombre de véri­tés sont alté­rées et mises sous le bois­seau moyen­nant la sup­pres­sion de prières qui ne sont pas remplacées :

Le péché : le NOM ne contient plus les prières de l’Indulgentiam, de l’Aufer a nobis, de l’Oramus te, du Deus qui huma­nœ, du sus­cipe sancte Pater qui toutes, rap­pe­laient la condi­tion péche­resse de l’homme.

Le mépris des choses de ce monde : « On a chan­gé dans ce mis­sel nou­veau toutes les orai­sons, toutes les prières qui parlent du mépris des choses de ce monde pour nous atta­cher aux choses célestes. Quelle idée ont eue ceux qui ont chan­gé ces choses-​là ? Est-​ce que vrai­ment les choses célestes ne sont pas telles que nous devons mépri­ser les choses ter­restres, qui sont pour nous une occa­sion de péché »[14] ?

Le com­bat spi­ri­tuel : « On a sup­pri­mé dans les orai­sons tout ce qui indi­quait la lutte, le com­bat spi­ri­tuel. Les termes “per­sé­cu­teurs, enne­mis” , tout cela est sup­pri­mé sans rai­son. Par exemple saint Jean de Capistran : “[Dieu qui…] avez fait triom­pher [vos fidèles] des enne­mis de la Croix (…) faites, nous vous en prions, que, par son inter­ces­sion, ayant vain­cu les pièges de nos enne­mis spi­ri­tuels” »[15].

Le mys­tère de la Rédemption : on parle de « salut » d’une manière très vague.

La vir­gi­ni­té per­pé­tuelle de la Vierge Marie : dans le NOM, il est pos­sible (sui­vant le choix des prières pro­po­sées) de ne pas par­ler de la Vierge Marie. Et l’on sait que la vir­gi­ni­té per­pé­tuelle de Marie est une pierre d’achoppement pour les pro­tes­tants… Du reste, le mot « per­pé­tuelle » n’est pré­sent que dans une seule des quatre prières eucha­ris­tiques. À l’inverse, l’ancien rite répé­tait ce dogme au moins cinq fois.

La Royauté du Christ-​Roi : « À pro­pos du Christ-​Roi, on a sup­pri­mé deux strophes qui parlent du Règne social de Notre Seigneur Jésus-​Christ »[16].

La foi dans les fins der­nières : « Le rite des défunts a été modi­fié. Le mot ani­ma a fré­quem­ment dis­pa­ru de nom­breuses orai­sons pour les défunts, parce qu’avec les nou­velles phi­lo­so­phies on ne sait plus vrai­ment s’il y a une dis­tinc­tion réelle entre l’âme et le corps. Alors il ne faut plus par­ler d’âme. C’est incroyable, inima­gi­nable ! Il n’y a plus de dévo­tion pour les défunts, il n’y a plus le sens du pur­ga­toire »[17].

2. Quant à l’aspect sacré des mystères

Les rubriques mêmes du mis­sel ins­ti­tu­tion­na­lisent cette perte du sens du sacré à tra­vers la muta­bi­li­té per­ma­nente du rite et un relâ­che­ment litur­gique général.

La muta­bi­li­té per­ma­nente du rite déna­ture son carac­tère sacré, ne serait-​ce que par la diver­si­té des messes : la pre­mière par­tie de la messe compte 3 for­mules, la deuxième 3, et le canon 4. On peut donc construire « sa » messe selon 3x3x4 pos­si­bi­li­tés. Cela en se limi­tant aux paroles, sans par­ler des gestes et autres céré­mo­nies que l’on peut ajou­ter et inven­ter à sa guise au gré des conseils parois­siaux. Donner au prêtre et à son conseil parois­sial une liber­té de gestes quasi-​totale et une très large part à l’initiative col­lec­tive pour les textes de la messe engendre méca­ni­que­ment une perte du res­pect dû au rite lui-​même. Il est rare que l’imagination ou la fan­tai­sie aille de pair avec le sens du respect.

À l’inverse, l’utilisation d’un rite sta­bi­li­sé depuis une quin­zaine de siècles et codi­fié dans le détail de ses paroles et de ses gestes engendre un pro­fond res­pect du prêtre et des fidèles. La moindre des règles péda­go­giques pour ensei­gner le carac­tère sacré d’un objet, c’est de ne pas le mettre entre toutes les mains et d’interdire de le trans­for­mer à son gré.

Un relâ­che­ment litur­gique géné­ral engen­dré par l’abandon et la sup­pres­sion d’une grande par­tie des marques de res­pect, en particulier :

♦ De l’obligation de la pierre d’autel, ain­si que du carac­tère pré­cieux des vases sacrés, d’une des trois nappes d’autel ou encore de cer­tains orne­ments (le mani­pule, l’amict, le cor­don, le voile de calice et la bourse voire la cha­suble elle- même) ;

  • Des génu­flexions dont le nombre passe de 12 à 2, des signes de croix qui passent de 47 à 7–8,
  • Du nombre de prières qui réduisent le temps de la messe – en pre­nant au plus court – à 10/​12 minutes.

Lucide, Mgr Lefebvre l’observait : « La désa­cra­li­sa­tion a lieu d’abord par la langue ver­na­cu­laire. La sup­pres­sion de la langue sacrée qu’était le latin a en quelque sorte ren­du pro­fane la sainte messe et en a fait quelque chose qui n’est plus vrai­ment sacré.

Par la pro­non­cia­tion de cette tra­duc­tion à haute voix pen­dant toute la sainte messe. Il n’y a plus de moment silen­cieux, il n’y a plus de paroles dites à voix basse par le prêtre (…) qui invitent à la médi­ta­tion sur le grand mys­tère qui s’y réalise.

Par l’introduction de la table au lieu de l’autel. (…)

Par la posi­tion du prêtre. La messe face au peuple n’invite pas du tout au recueille­ment face au mys­tère qui se déroule. Le prêtre est lui-​même dis­trait par les per­sonnes qu’il a devant lui. Et les gens sont dis­traits par le prêtre, sur­tout si celui-​ci agit d’une manière un peu vive, un peu désor­don­née, ou d’une manière qui n’est pas très respectueuse. (…)

Par la dis­tri­bu­tion de l’Eucharistie par les fidèles »[18].

3. Suppression de l’aspect sacrificiel

« La messe n’est pas un sacri­fice… appelons-​la béné­dic­tion, eucha­ris­tie, cène du Seigneur… qu’on lui donne tout autre titre qu’on vou­dra, pour­vu qu’on ne la souille pas du titre de sacri­fice. Cette abo­mi­na­tion (…) qu’on appelle Offertoire. C’est de là qu’à peu près tout résonne et res­sent le sacri­fice. » Luther[19]

Malheureusement, le NOM s’infléchit dans le sens d’un repas et non d’un sacri­fice. Cette évo­lu­tion se tra­duit de quatre manières :

a) Par la sup­pres­sion de l’offertoire.

Dans la doc­trine catho­lique, l’offertoire a pour fina­li­té de pré­ci­ser le but sacri­fi­ciel de la messe, à savoir l’offrande du Corps et du Sang en expia­tion de nos péchés. L’offertoire est ain­si l’offrande (1) anti­ci­pée du Corps et du Sang de Jésus-​Christ (2) faite à Dieu le Père (3), pré­sen­tée par le prêtre (4) en expia­tion de nos péchés (5). C’est pour­quoi l’offertoire tra­di­tion­nel déve­loppe ces 5 points sans aucune équi­voque pos­sible. Ce n’est plus le cas du nou­vel offer­toire qui n’est pas l’offrande anti­ci­pée du corps et du sang du Christ mais une prière conçue à par­tir d’un béné­di­ci­té juif[20].

b) Par la sup­pres­sion de la men­tion de sacri­fice propitiatoire. 

« Les prières qui expri­maient expli­ci­te­ment l’idée de pro­pi­tia­tion comme celles de l’offertoire et celles pro­non­cées par le prêtre avant la com­mu­nion ont été sup­pri­mées (…)[21] Le terme de sacri­fice est tota­le­ment absent du Canon n° 2, dit de saint Hippolyte[22]

La dimi­nu­tion de la notion du sacri­fice est donc évi­dente dans le nou­veau rite, car le terme lui-​même de sacri­fice est rare­ment employé, et quand il est employé, il l’est à la manière des pro­tes­tants, parce que les pro­tes­tants acceptent le terme de sacri­fice pour la messe, mais uni­que­ment comme sacri­fice de louange ou eucha­ris­tique, mais sur­tout pas pro­pi­tia­toire. »[23]

c) Par le style nar­ra­tif de la consé­cra­tion fai­sant pen­ser davan­tage à un récit com­mé­mo­ra­tif qu’à une action liturgique.

d) Par les gestes litur­giques eux- mêmes

« Par ailleurs, pour ana­ly­ser le nou­veau rite, je pense qu’il ne faut pas consi­dé­rer seule­ment les textes, il faut prendre en compte éga­le­ment toutes les atti­tudes, les gestes nou­veaux qui sont com­man­dés : les génu­flexions, les signes de la croix, les incli­na­tions (…) et même le chan­ge­ment dans les objets »[24]. « Tout a été trans­for­mé ! Plus de génu­flexions, plus de signe de croix ! C’est abo­mi­nable ! Le signe de croix mon­trait bien qu’il s’agissait du sacri­fice de la Croix. Ne disons pas que ce sont des détails. Ce ne sont pas des détails. Ce sont des gestes qui ont leur signi­fi­ca­tion, qui ont leur valeur. »[25]

4. Diminution de la foi dans la présence réelle

«… Il est impos­sible de ne pas remar­quer l’a­bo­li­tion ou l’al­té­ra­tion des gestes par les­quels s’ex­prime spon­ta­né­ment la foi en la Présence réelle. Le nou­vel Ordo Missae élimine :

  • les génu­flexions, dont le nombre est réduit à trois pour le prêtre célé­brant, et à une seule (non sans excep­tions) pour l’as­sis­tance, au moment de la consécration ;
  • la puri­fi­ca­tion des doigts du prêtre au-​dessus du calice et dans le calice ;
  • la pré­ser­va­tion de tout contact pro­fane pour les doigts du prêtre après la consécration ;
  • la puri­fi­ca­tion des vases sacrés, qui peut être dif­fé­rée et faite hors du corporal ;
  • la pale pro­té­geant le calice ;
  • la dorure inté­rieure des vases sacrés (…)
  • la consé­cra­tion de l’au­tel mobile ;
  • les trois nappes d’au­tel, réduites à une seule ;
  • l’ac­tion de grâces à genoux (…) ;
  • les pres­crip­tions concer­nant le cas où une Hostie consa­crée tombe à terre, réduites au numé­ro 239 à un « reve­ren­ter acci­pia­tur » presque sarcastique.

Toutes ces sup­pres­sions ne font qu’ac­cen­tuer de façon pro­vo­cante la répu­dia­tion impli­cite du dogme de la Présence réelle »[26].

5. Diminution de la foi dans la présence réelle

Cet appau­vris­se­ment doc­tri­nal – en par­ti­cu­lier cet affai­blis­se­ment de la notion de messe sacri­fice au pro­fit de l’idée d’une messe repas – conduit logi­que­ment à une dimi­nu­tion de la place du prêtre. La messe devient une réunion pré­si­dée par un prêtre qui est moins sacri­fi­ca­teur qu’animateur d’une assem­blée réunie pour faire mémoire à tra­vers un repas sym­bo­lique. Ce nou­veau gau­chis­se­ment se mani­feste par :

  • La sup­pres­sion de prières réci­tées uni­que­ment par le prêtre ou au nom du prêtre comme le confi­teor qui est désor­mais réci­té en com­mun. De même, des prières for­mu­lées avec un « je » ont dis­pa­ru ou ont été modifiées.
  • La sup­pres­sion de prières réci­tées à voix basse par le prêtre. Tout est réci­té à voix haute signi­fiant par là que le peuple doit pou­voir entendre ce que dit le prêtre afin de faire cette offrande en même temps que lui. Or, cela était pré­ci­sé­ment un vœu des pro­tes­tants, puisque ces der­niers nient le carac­tère propre du prêtre et insistent sur l’offrande com­mu­nau­taire de la cène.

D’une manière habile, la dis­tinc­tion, au lieu, d’être niée, se fait par un simple silence, qui, à terme, conduit à occul­ter la dis­tinc­tion essen­tielle entre le prêtre et le fidèle.

6. Une nouvelle définition

Parmi les aspects révé­la­teurs du chan­ge­ment d’orientation doc­tri­nale du nou­veau rite figure la pre­mière défi­ni­tion du NOM, pré­sente dans la pré­sen­ta­tion géné­rale du nou­veau mis­sel au n°7. Cette défi­ni­tion est un modèle du genre de l’hérésie par défaut.

Voici cette défi­ni­tion de la messe : « La cène du Seigneur, autre­ment dit la messe, est une synaxe sacrée, c’est-​à-​dire le ras­sem­ble­ment du peuple de Dieu, sous la pré­si­dence du prêtre, pour célé­brer le mémo­rial du Seigneur. C’est pour­quoi le ras­sem­ble­ment local de la Sainte Église réa­lise de façon émi­nente la pro­messe du Christ : “Lorsque deux ou trois sont ras­sem­blés en mon nom, je suis là, au milieu d’eux ”

On peut voir que :

  • nulle men­tion n’est faite du sacri­fice tan­dis qu’on y parle de la « cène » du « ras­sem­ble­ment du peuple de Dieu » et du mémorial ;
  • le prêtre est pré­sen­té comme un pré­sident et non un sacri­fi­ca­teur : « sous la pré­si­dence du prêtre » ;
  • la pré­sence du Christ est une pré­sence spi­ri­tuelle comme celle d’une simple prière com­mune : « le ras­sem­ble­ment local de la Sainte Église réa­lise de façon émi­nente la pro­messe du Christ : “Lorsque deux ou trois sont ras­sem­blés en mon nom, je suis là, au milieu d’eux” » ;
  • cette défi­ni­tion cor­res­pond s’applique fort exac­te­ment au nou­veau rite.

En par­lant de l’Institutio Generalis ou pré­sen­ta­tion géné­rale de cette nou­velle ins­ti­tu­tion litur­gique, Bugnini décla­rait que ce docu­ment consti­tuait « un ample expo­sé théo­lo­gique, pas­to­ral, caté­ché­tique et litur­gique, une intro­duc­tion à la com­pré­hen­sion et à la célé­bra­tion de la messe »[27]. Quant au car­di­nal Villot, par­lant au nom de Paul VI, il y voyait « une syn­thèse des prin­cipes théo­lo­giques, ascé­tiques et pas­to­raux indis­pen­sables tant pour la divine doc­trine que la célé­bra­tion, la caté­chèse et la pas­to­rale de la messe »[28].

Ce texte déclen­cha cepen­dant une telle levée de bou­cliers que cette défi­ni­tion fut modi­fiée sans pour autant que le sens fût véri­ta­ble­ment satisfaisant.

« Mgr Bugnini qui en était l’auteur l’a dit lui-​même : – “On a vou­lu nous faire chan­ger quelque chose à la défi­ni­tion de la messe. Certains ont pro­tes­té contre cette défi­ni­tion. C’est ridi­cule. Cette défi­ni­tion n’était pas du tout pro­tes­tante ». Mgr Bugnini a essayé de s’excuser et il a dit : – « La nou­velle défi­ni­tion qui a été faite ne change rien à l’essentiel » »[29].[30]

Conclusion

En somme, c’est l’ensemble des grandes véri­tés de la foi qui sont dimi­nuées, occul­tées, esca­mo­tées dans le rite de la messe ; le mys­tère de la Rédemption, le péché, l’âme immor­telle, la Virginité de Marie, le sacer­doce, la néces­si­té de l’expiation, tout cela est alté­ré par ce nou­veau rite.

Il n’est donc pas exa­gé­ré de conclure que cette nou­velle messe est cor­ro­sive pour la foi des prêtres qui la célèbrent et des fidèles qui la suivent, comme hélas, cin­quante ans de réforme litur­gique le mani­festent aisément.

Ses auteurs

1. Paul VI

La messe dite de Paul VI porte son nom. Malgré toutes les pres­sions pos­sibles, le NOM est signé de Paul VI, daté du pon­ti­fi­cat de Paul VI. Il en est le pre­mier res­pon­sable, il en est l’auteur authentique.

Il faut d’ailleurs écar­ter l’idée d’un Paul VI signant en aveugle les textes sur la réforme liturgique.

« Pour mon­trer que la réforme litur­gique a été menée en étroite col­la­bo­ra­tion avec Paul VI, Mgr Bu- gni­ni précisera :

« “Combien d’heures en soi­rée j’ai pas­sées avec lui, étu­diant ensemble les nom­breux, et sou­vent volu­mi­neux, dos­siers qui s’empilaient sur son bureau ! Il lisait et exa­mi­nait ligne par ligne, mot par mot, anno­tant tout en noir, rouge ou bleu, cri­ti­quant au besoin avec sa dia­lec­tique qui réus­sis­sait à for­mu­ler dix inter­ro­ga­tions sur un même point.” « Mais cette des­crip­tion vaut sur­tout pour les années 1968–1969, après le départ de Lercaro et pen­dant la phase la plus intense de la pré­pa­ra­tion du nou­vel Ordo Missœ. »[31]

2. Mgr Bugnini

La che­ville ouvrière de la « réforme » du mis­sel romain reste cepen­dant Mgr Hannibal Bugnini comme le rap­pelle Mgr Lefebvre : « La réforme litur­gique a été opé­rée, on le sait, par un père bien connu : le père Bugnini, qui avait pré­pa­ré cela bien long­temps à l’avance. Déjà en 1955, il fai­sait tra­duire les textes pro­tes­tants par Mgr Pintonello, (…) qui m’a dit à moi-​même qu’il avait tra­duit les livres litur­giques pro­tes­tants pour le père Bugnini, qui, à ce moment-​là, n’était qu’un petit membre d’une com­mis­sion litur­gique. Il n’était rien. Après il a été pro­fes­seur de litur­gie au Latran. Le pape Jean XXIII l’en a fait par­tir à cause de son moder­nisme, de son pro­gres­sisme. Eh bien, il s’est retrou­vé pré­sident de la Commission de la réforme de la litur­gie. C’est tout de même invrai­sem­blable ! J’ai eu l’occasion de consta­ter moi-​même quelle était l’influence du père Bugnini. On se demande com­ment une chose comme celle-​ci a pu se pas­ser à Rome. »[32]

La présentation de la nouvelle messe par Mgr Bugnini

« J’étais, en ce temps-​là, tout de suite après le concile, Supérieur géné­ral de la Congrégation des pères du Saint-​Esprit et nous avions à Rome une asso­cia­tion des Supérieurs géné­raux. Nous avons deman­dé au père Bugnini de nous expli­quer ce qu’était sa nou­velle messe, parce qu’enfin tout de même, ce n’était pas un petit évé­ne­ment. (…) Alors, nous avons deman­dé au père Bugnini de bien vou­loir l’expliquer lui-​même aux quatre-​vingt-​quatre Supérieurs géné­raux qui se sont réunis, au nombre des­quels j’étais, par conséquent.

Le père Bugnini, avec beau­coup de bon­ho­mie, nous a expli­qué ce qu’était la messe nor­ma­tive. On va chan­ger ça, on va chan­ger ça, on va mettre un autre offer­toire, on pour­ra choi­sir les Canons, on pour­ra réduire les prières de la com­mu­nion, on pour­ra avoir plu­sieurs sché­mas pour le début de la messe. On pour­ra dire la messe en langue ver­na­cu­laire. Nous nous regar­dions en nous disant : ce n’est pas possible !

Il par­lait abso­lu­ment comme s’il n’y avait jamais eu de messe dans l’Eglise avant lui. Il par­lait de sa messe nor­ma­tive comme d’une inven­tion nouvelle.

Personnellement, j’ai été tel­le­ment bou­le­ver­sé, alors que je prends d’habitude assez faci­le­ment la parole pour m’opposer à ceux avec les­quels je ne suis pas d’accord, que je suis res­té muet. Je ne pou­vais pas sor­tir un mot. Ce n’est pas pos­sible que ce soit à cet homme qui est là devant moi qu’est confiée toute la réforme de la litur­gie catho­lique, du saint sacri­fice de la messe, des sacre­ments, du bré­viaire, de toutes nos prières. Où allons-​nous ? Où va l’Eglise ?

Deux Supérieurs géné­raux ont eu le cou­rage de se lever. Et l’un d’eux a ques­tion­né le père Bugnini : – « Est-​ce une par­ti­ci­pa­tion active, est-​ce une par­ti­ci­pa­tion cor­po­relle, c’est-à-dire des prières vocales, ou bien est-​ce que c’est la par­ti­ci­pa­tion spi­ri­tuelle ? En tout cas, vous avez tel­le­ment par­lé de la par­ti­ci­pa­tion des fidèles, qu’il semble que vous ne jus­ti­fiez plus la messe sans fidèles puisque toute votre messe a été faite en fonc­tion de la par­ti­ci­pa­tion des fidèles. Nous, béné­dic­tins, nous célé­brons nos messes sans fidèles. Alors est-​ce que nous devons conti­nuer à dire nos messes pri­vées, puisque nous n’avons pas de fidèles qui y participent ? »

Je vous répète exac­te­ment ce qu’a dit le père Bugnini, je l’ai encore dans les oreilles tant cela m’a frap­pé : – « À vrai dire, on n’y a pas pen­sé », a‑t-​il dit ! Après, un autre s’est levé et a dit : – « Mon révé­rend père, vous avez par­lé : on va sup­pri­mer ceci, sup­pri­mer cela, rem­pla­cer ceci par cela, et tou­jours des prières plus courtes, j’ai l’impression que votre nou­velle messe on va la dire en dix, douze minutes, un petit quart d’heure, ce n’est pas rai­son­nable, ce n’est pas res­pec­tueux pour un tel acte de l’Église. » Eh bien, il lui a répon­du ceci : – « On pour­ra tou­jours ajou­ter quelque chose. » Est-​ce sérieux ? Je l’ai enten­du moi-​même. Si quelqu’un me l’avait racon­té, j’aurais presque dou­té, mais je l’ai enten­du moi-​même. »[33]

3. Les autres experts

A Bugnini, bien d’autres experts se trou­vaient mêlés, Dom Botte et Dom Beauduin O.S.B., les jésuites Doncœur et Daniélou, le P. Bouyer, de l’Oratoire, le P. Gy, O.R, ou encore Mgr Dwyer, membre du Consilium de litur­gie, arche­vêque de Birmingham, qui recon­nais­sait l’importance de cette réforme (confé­rence de presse, 23 octobre 1967) : « C’est la litur­gie qui forme le carac­tère, la men­ta­li­té des hommes affron­tés aux pro­blèmes… La réforme litur­gique est dans un sens la clé de l’aggiornamento, ne vous y trom­pez pas, c’est là que com­mence la révo­lu­tion… [34]»

4. Les experts protestants

Outre Mgr Bugnini et les experts catho­liques du Consilium, six pas­teurs pro­tes­tants par­ti­ci­pèrent à cette « réforme », comme le numé­ro 1562, du 3 mai 1970, de la Documentation Catholique (qui nous en pré­sente la pho­to) en fait foi. Ces pas­teurs, au dire de Mgr Baum, res­pon­sable pour les affaires œcu­mé­niques de la confé­rence épis­co­pale mexi­caine, « …ne sont pas là seule­ment en obser­va­teurs, mais aus­si en consul­teurs. Ils par­ti­cipent plei­ne­ment aux dis­cus­sions sur le renou­veau litur­gique catho­lique. Cela n’aurait pas beau­coup de sens s’ils se conten­taient d’écouter, mais ils contri­buent[35].

Du reste, s’adressant à tous les membres du Consilium (les pas­teurs étant pré­sents), le pape Paul VI leur adres­sait une allo­cu­tion finale le 10 avril où il s’exprimait de la sorte : « Nous tenons à vous remer­cier très vive­ment pour tout le tra­vail que vous avez accom­pli ces der­nières années. En effet, vous vous êtes acquit­tés avec dili­gence et com­pé­tence d’une tâche com­plexe et très dif­fi­cile, sans attendre d’autre récom­pense que celle de savoir que vous tra­vailliez pour le bien de l’Eglise. »[36]

Epilogue

Une anec­dote lamen­table sur la rédac­tion des nou­veaux textes litur­giques laisse rêveur sur le pro­fes­sion­na­lisme des « réfor­ma­teurs » et leur dévo­tion pour le tré­sor de l’Église.

« Mgr Bugnini recon­naî­tra qu’une de ces nou­velles prières eucha­ris­tiques (qui devien­dra la IVe prière eucha­ris­tique) fut com­po­sée à la hâte, “par un tra­vail qua­si­ment à marche for­cée”. Un des consul­teurs de la sous-​commission, le Père Bouyer, a décrit la même chose, non sans humour et iro­nie, pour la rédac­tion de la IIe prière eucha­ris­tique, qu’il a rédi­gée avec Dom Botte, grand spé­cia­liste de saint Hippolyte. Il a dû la com­po­ser en urgence, en vingt-​quatre heures : « “Entre des fana­tiques archéologi- sant à tort et à tra­vers, qui auraient vou­lu ban­nir de la prière eucha­ris­tique le Sanctus et les inter­ces­sions, en pre­nant telle quelle l’eucharistie d’Hippolyte, et d’autres, qui se fichaient pas mal de sa pré­ten­due Tradition apos­to­lique, mais qui vou­laient seule­ment une messe bâclée, Dom Botte et moi nous fumes char­gés de rape­tas­ser son texte, de manière à y intro­duire ces élé­ments, cer­tai­ne­ment plus anciens, pour le len­de­main ! Par chance je décou­vris, dans un récit sinon d’Hippolyte lui-​même, assu­ré­ment dans son style, une heu­reuse for­mule sur le Saint-​Esprit qui pou­vait faire une tran­si­tion, du type Vere Sanctus, vers la brève épi­clèse. Botte, pour sa part, fabri­qua une inter­ces­sion plus digne de Paul Reboux et de son “A la manière de…” que de sa propre science. Mais je ne puis relire cette invrai­sem­blable com­po­si­tion sans repen­ser à la ter­rasse du bis­trot du Transtévère où nous dûmes figno­ler notre pen­sum, pour être en mesure de nous pré­sen­ter avec lui à la porte de Bronze à l’heure fixée par nos régents !” » [37]

Intention et validité du nouveau rite

Un sacre­ment peut être inva­lide si la matière (par exemple du riz au lieu de pain), la forme (par exemple dire : « ceci est le corps du Christ ») ou le ministre (un laïc au lieu d’un prêtre) font défaut ou éga­le­ment si l’intention de ministre est faus­sée. Pour que l’intention du ministre suf­fise à la vali­di­té d’un sacre­ment, il doit avoir l’intention de faire ce que fait l’Église. Or, ce que fait l’Église dans la messe tra­di­tion­nelle est sans aucune ambi­guï­té : de toute évi­dence, l’Église entend offrir un sacri­fice propitiatoire.

Mais tout le pro­blème du nou­veau rite est qu’il signi­fie d’une manière ambi­guë la pré­sence réelle ain­si que l’offrande d’un sacri­fice, et ce sous une claire influence protestante.

Des pro­tes­tants l’ont remar­qué : le nou­veau rite est tel­le­ment ambi­va­lent qu’on peut lui prê­ter une signi­fi­ca­tion pro­tes­tante comme une signi­fi­ca­tion catho­lique[38]. En d’autres termes, l’intention expri­mée par le NOM est dou­teuse. Tout dépen­dra donc de l’intention sub­jec­tive du célé­brant à défaut d’une inten­tion objec­tive du rite.

« C’est par l’offertoire que le prêtre exprime clai­re­ment son inten­tion. Or cela n’existe plus dans le nou­vel ordo. La nou­velle messe peut donc être valide ou inva­lide selon l’intention du célé­brant, alors que dans la messe ancienne, il est impos­sible pour quelqu’un qui a la foi de ne pas avoir l’intention pré­cise de faire le sacri­fice et de le faire selon les fins pré­vues par la sainte Église. »[39]

Et là se pose un nou­veau pro­blème : la défor­ma­tion du cler­gé est telle, les héré­sies sont tel­le­ment répan­dues dans l’Église qu’un doute demeure sur l’intention authen­ti­que­ment catho­lique des prêtres qui célèbrent la messe. Quand on voit, par exemple, la légè­re­té avec laquelle nombre de prêtres traitent les hos­ties « consa­crées », on est en droit de dou­ter de leur foi en la pré­sence réelle et donc de leur inten­tion catho­lique quand ils célèbrent « l’eucharistie ».

« Tous ces chan­ge­ments dans le nou­veau rite sont vrai­ment périlleux, parce que peu à peu sur­tout pour les jeunes prêtres qui n’ont plus l’idée du sacri­fice, de la pré­sence réelle, de la trans­sub­stan­tia­tion et pour les­quels tout cela ne signi­fie plus rien, ces jeunes prêtres perdent l’intention de faire ce que fait l’Église et ne disent plus de messes valides. Certes, les prêtres âgés, quand ils célèbrent selon le nou­veau rite, ont encore la foi de tou­jours. Ils ont dit la messe avec l’ancien rite durant tant d’années, ils en gardent les mêmes inten­tions, on peut croire que leur messe est valide. Mais, dans la mesure où ces inten­tions s’en vont, dis­pa­raissent, dans cette mesure les messes ne seront plus valides, »[40]

C’est aus­si le sens de la cri­tique adres­sée au pape Paul VI par les car­di­naux Ottaviani et Bacci dès 1969 : « La por­tée des paroles de la consé­cra­tion telles qu’elles figurent dans le Novus ordo y est condi­tion­née par tout le contexte. (…) Il se peut donc que ces paroles n’assurent pas la vali­di­té de la consé­cra­tion. Les prêtres qui dans un proche ave­nir n’auront pas reçu la for­ma­tion tra­di­tion­nelle et qui se fie­ront au Novus ordo pour faire ce que fait l’Église, consacreront-​ils vali­de­ment ? Il est légi­time d’en dou­ter »[41].

Il est donc abu­sif de dire que la messe de Paul VI est valide. Elle est en soi dou­teuse. Elle n’est valide que si l’intention sub­jec­tive du ministre est catho­lique. Et mal­heu­reu­se­ment, celle-​ci n’est pas tou­jours avérée.

Conclusion : notre attitude face à la nouvelle messe

Si l’on ras­semble les dif­fé­rents élé­ments de ce dos­sier, on peut sur­tout y voir :

  • une pro­tes­tan­ti­sa­tion très nette de ce nou­veau rite de la messe avec une désa­gré­ga­tion de la foi : « le nou­vel ordo missæ, écri­vaient au pape les car­di­naux Ottaviani et Bacci, si l’on consi­dère les élé­ments nou­veaux, sus­cep­tibles d’ap­pré­cia­tions fort diverses, qui y paraissent sous-​entendus ou impli­qués, s’é­loigne de façon impres­sion­nante, dans l’en­semble comme dans le détail, de la théo­lo­gie catho­lique de la Sainte Messe, telle quelle a été for­mu­lée à la XXe ses­sion du Concile de Trente. »[42] Cette messe pro­tes­tan­ti­sée engendre natu­rel­le­ment chez ceux qui la suivent régu­liè­re­ment une perte du sens de la foi[43].
  • un dan­ger d’invalidité.

Ces deux défauts engendrent deux conclusions :

  • une messe qui éloigne les âmes de la foi ne peut venir du Saint-​Esprit et lui est même oppo­sée. Elle n’est pas catholique ;
  • dès lors, il est requis de ne pas y par­ti­ci­per, non seule­ment pour ne pas se lais­ser gan­gre­ner mais aus­si pour ne pas coopé­rer à un rite qui détruit la foi dans l’Église et par­ti­ci­per à une pro­fes­sion de foi équi­vo­quée. « Cette messe est empoi­son­née. Cette messe est mau­vaise, elle fait perdre peu à peu la foi, alors on est bien obli­gé de la refu­ser »[44].

« Au sujet de la nou­velle messe, détrui­sons immé­dia­te­ment cette idée absurde : si la messe nou­velle est valide, on peut y par­ti­ci­per. L’Eglise a tou­jours défen­du d’assister aux messes des schis­ma­tiques et des héré­tiques, même si elles sont valides. Il est évident qu’on ne peut par­ti­ci­per à des messes sacri­lèges, ni à des messes qui mettent notre foi en dan­ger »[45].

Conséquence pratique

« Les catho­liques fidèles doivent tout faire pour gar­der la foi catho­lique intacte et intègre : donc se rendre quand ils le peuvent, ne serait-​ce qu’une fois par mois, à la messe de tou­jours ; appor­ter leur col­la­bo­ra­tion active pour aider les prêtres fidèles dans la célé­bra­tion de ces messes de tou­jours, avec les sacre­ments selon les anciens rites et les anciens catéchismes.

Que ceux qui ne peuvent se rendre à ces messes lisent la messe dans leur mis­sel le dimanche, en famille si pos­sible, comme le font les chré­tiens des pays de mis­sions, qui ne sont visi­tés par le prêtre que deux ou trois fois dans l’année, par­fois une seule fois par an !

Ces direc­tives sont don­nées afin que cha­cun puisse prendre la ligne de conduite la plus favo­rable pour la pré­ser­va­tion de la Foi. Il va de soi que le pré­cepte domi­ni­cal oblige lorsqu’il y a une messe de tou­jours acces­sible normalement.

C’est l’époque de l’héroïsme ; n’est-ce pas une grâce de Dieu de vivre en ces temps de trouble, afin de retrou­ver la Croix de Jésus, son sacri­fice rédemp­teur, d’estimer à sa juste valeur cette source de sain­te­té de l’Église, de la remettre en hon­neur, de mieux appré­cier la gran­deur du sacer­doce ? Mieux com­prendre la Croix de Jésus, c’est s’élever dans le Ciel et appro­fon­dir la vraie spi­ri­tua­li­té catho­lique du sacri­fice, du sens de la souf­france, de la péni­tence, de l’humilité et de la mort. »[46]

Pour en savoir plus…

  • Mgr Lefebvre, La messe de tou­jours, Clovis ;
  • Collectif, La rai­son de notre com­bat, Clovis ;
  • Abbé G. Célier, La dimen­sion œcu­mé­nique de la nou­velle litur­gie, Fideliter ;
  • M. Davies, La réforme angli­cane, Clovis ;
  • Abbés Calderon et de La Rocque, Le pro­blème de la Réforme litur­gique, Clovis, 2001 ;
  • R.E de Chivré O.E, La messe de saint Pie V, com­men­taires théo­lo­giques et spi­ri­tuels, Touraine micro édi­tion, 2006 ;
  • R.E Calmel O.E, Si tu savais le don de Dieu…, T.1 la messe, NEL, 2007 ;
  • La messe en ques­tion, Actes du Ve congrès théo­lo­gique de Si Si No No, Paris, 2002 ;
  • La messe a‑t-​elle une his­toire ?, éd du MJCF, 2002 ;
  • Amaldo Xavier da Silveira, La nou­velle messe de Paul VI, qu’en pen­ser ?, DEF 1975.
  • Abbé Didier Bonneterre, Le Mouvement litur­gique, Fideliter, 1980.
  • Louis Salleron, La Nouvelle Messe, Collection Itinéraires, NEL, 1976.

Source : Le Chardonnet n° 346 – mars 2019

Notes de bas de page
  1. Cité par Cristiani, Du luthé­ra­nisme au pro­tes­tan­tisme, 1910.[]
  2. Toutes ces cita­tions sont tirées de La messe a‑t-​elle une his­toire ? , éd du MJCF, 2002, p. 134, que nous ne sau­rions trop recom­man­der.[]
  3. Revenu depuis à L’Église catho­lique et ordon­né prêtre.[]
  4. « De même que les anciens Pères ont été sau­vés par la foi dans le Christ à venir, ain­si sommes-​nous sau­vés par la foi au Christ qui, main­te­nant, est né et a souf­fert. Les sacre­ments sont des signes pro­fes­sant cette foi qui jus­ti­fie. » Ilia, 61,4, c.[]
  5. Mgr Marcel Lefebvre, Lettre aux catho­liques per­plexes, 1984, pp. 45–46.[]
  6. A. Bugnini, confé­rence de presse du 4 jan­vier 1967, cité dans La messe a‑t-​elle une his­toire ? p. 131, note 1.[]
  7. Bulle Auctorem Fidei, 28 août 1794, Dz 2629[]
  8. Novus Ordo Missæ, c’est-​à-​dire le nou­veau rite de la Messe. Nous uti­li­se­rons cette abré­via­tion dans le reste de notre docu­ment.[]
  9. Cité dans La messe a‑t-​elle une his­toire ?, éd. du MJCF, p.84.[]
  10. Léon Cristiani, Du luthé­ra­nisme au pro­tes­tan­tisme, p. 312.[]
  11. Mgr Lefebvre, La messe de Luther, dans La messe tra­di­tion­nelle, Trésor de l’Église, Fideliter p.33–34[]
  12. Si tu savais le don de Dieu…, 1.1 la messe, NEL, 2007, p.95–96, 98, 114–115, 118[]
  13. Abbé Didier Bonneterre, Le Mouvement litur­gique, Fideliter, 1980, p. 135.[]
  14. Mgr Marcel Lefebvre, Mantes-​la-​Jolie, 2 juillet 1977.[]
  15. Mgr Marcel Lefebvre, Conférence spi­ri­tuelle, Écône, 25 juin 1981.[]
  16. Ibidem[]
  17. Ibidem[]
  18. Le 1er octobre 1979.[]
  19. Formulæ missæ et com­mu­niants, 1523.[]
  20. C’est la fameuse prière : « Tu es béni, Dieu de l’univers pour le pain, fruit de la terre et du tra­vail des hommes », etc.[]
  21. Mgr Marcel Lefebvre, Conférence spi­ri­tuelle, Écône, 26 octobre 1979.[]
  22. Le NOM laisse le choix entre quatre Canons dont celui dit de saint Hyppolite. Mgr Marcel Lefebvre Lettre aux catho­liques per­plexes, p. 33.[]
  23. Mgr Marcel Lefebvre, Conférence spi­ri­tuelle, Écône, 26 octobre 1979.[]
  24. Mgr Marcel Lefebvre, Conférence spi­ri­tuelle, Écône, 25 juin 1981.[]
  25. Mgr Marcel Lefebvre, Retraite, Avrilié, 18 octobre 1989.[]
  26. Bref Examen Critique du NOM des car­di­naux Bacci et Ottaviani.[]
  27. Dans une confé­rence géné­rale de l’é­pis­co­pat latino-​américano du 30 août 1968.[]
  28. D.C. 1594 p. 866[]
  29. « Puisqu’il est dit et redit offi­ciel­le­ment qu’on n’a trou­vé aucune erreur doc­tri­nale dans la rédac­tion ori­gi­nale et que les chan­ge­ments intro­duits ne visent qu’à cou­per court à d’i­nu­tiles dif­fi­cul­tés, on peut conti­nuer de s’ap­puyer sur le texte de 1969. Il repré­sente la pen­sée de l’Institutio gene­ra­lis comme à l’é­tat pur, en deçà des com­pro­mis « impo­sés » » Jean-​Marie R. Pillard, « La réforme litur­gique et le rap­pro­che­ment des Églises », in Liturgia opé­ra divi­na e uma­na. Studi sul­la rifor­ma litur­gi­ca offer­ti a S.E. Mgr Annibale Bugnini, Edizioni Liturgiche, 1982, p. 223.[]
  30. Mars 1986[]
  31. Yves Chiron, Mgr Bugnini [1912–1982), Réformateur de la litur­gie, Desclée de Brouwer, 2016, p. 120–121.[]
  32. L’Église infil­trée par le moder­nisme, p. 31.[]
  33. LÉglise infil­trée parle moder­nisme, pp. 32–34.[]
  34. Cité par Mgr Lefebvre dans sa Lettre au car­di­nal Seper, 26 février 1978[]
  35. Cité dans La messe a‑t-​elle une his­toire ? p. 91[]
  36. D.C. 1970, n°1562, p. 416[]
  37. Yves Chiron, Mgr Bugnini (1912–1982), Réformateur de la litur­gie, Desclée de Brouwer, 2016, pp. 146–147.[]
  38. En 1973, le Consistoire Supérieur de l’Église de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine publiait une Déclaration offi­cielle dans laquelle figu­raient ces lignes : « Etant don­nées les formes actuelles de la célé­bra­tion eucha­ris­tique dans l’Église catho­lique et en rai­son des conver­gences théo­lo­giques pré­sentes, beau­coup d’obstacles qui auraient pu empê­cher à un pro­tes­tant de par­ti­ci­per à sa célé­bra­tion eucha­ris­tique semblent aujourd’hui en voie de dis­pa­ri­tion. Il devrait être pos­sible, aujourd’hui, à un pro­tes­tant de recon­naître dans la célé­bra­tion eucha­ris­tique la cène ins­ti­tuée par le Seigneur (c’est-​à-​dire la cène pro­tes­tante)… Nous tenons à l’utilisation des nou­velles prières litur­giques dans les­quelles nous nous retrou­vons, et qui ont l’avantage de nuan­cer la théo­lo­gie du sacri­fice que nous avions l’habitude d’attribuer au catho­li­cisme ».[]
  39. Conférence spi­ri­tuelle, Écône, 28 février 1975.[]
  40. Mgr Lefebvre, confé­rence du 15 février 1975, La Messe de Luther, Éditions Saint- Gabriel, p. 10.[]
  41. Cardinaux Ottaviani et Bacci, Bref exa­men cri­tique, Rééd. Écône, note 15, page 30.[]
  42. Bref Examen cri­tique, n°1[]
  43. Ceci se voit notam­ment dans la concep­tion œcu­mé­nique et sal­vi­fique du salut. Pour ceux qui, habi­tuel­le­ment suivent la nou­velle messe, les âmes peuvent conti­nuer à pra­ti­quer leur reli­gion même s’il serait meilleur de se conver­tir. Quoi qu’il arrive, elles iront au ciel, comme la très grande majo­ri­té des âmes.[]
  44. Mgr Lefebvre, Conférence spi­ri­tuelle, Ecône, 21 jan­vier 1982.[]
  45. Mgr Lefebvre Le 8 novembre 1979. Note sur le NOM et le pape.[]
  46. Mgr Lefebvre Le 20 jan­vier 1978.[]

FSSPX

M. l’ab­bé François-​Marie Chautard est l’ac­tuel rec­teur de l’Institut Saint Pie X, 22 rue du cherche-​midi à Paris.