Mes bien chers frères,
Mes bien chers amis qui allez dans quelques instants revêtir l’habit religieux, nous nous réjouissons tous ici présents de vous entourer à l’occasion de cette belle cérémonie sous la protection de saint Michel Archange.
Et à cette occasion je voudrais vous parler, pendant quelques instants, de cette vie religieuse à laquelle vous êtes appelé et que vous réalisez par l’accomplissement de vos vœux.
En effet si l’on ouvre le livre du Droit canon pour savoir ce qu’est la vie religieuse, il est dit : l’état religieux est un état de tendance à la perfection chrétienne par l’accomplissement des trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, reçus publiquement par l’Église.
C’est un état. État stable par conséquent, état qui représente l’engagement de toute notre vie, état de tendance à la perfection chrétienne. Oui, en effet, en entrant dans la vie religieuse, vous faites profession de tendre à la perfection chrétienne. Et pour y arriver plus facilement, selon les conseils de Notre Seigneur Lui-même et les conseils de l’Église, vous vous engagez par ces trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance.
Et vous le faites dans les mains de l’Église, publiquement. C’est ce que vous allez renouveler, mes chers frères, vous qui avez déjà fait profession, aujourd’hui, et pour vous mes chers amis, qui allez prendre l’habit religieux aujourd’hui, eh bien vous entrez dans le noviciat qui va vous préparer à cette profession religieuse, publique.
Dans la Fraternité qui est un institut de vie commune sans vœux, les membres qui se destinent au sacerdoce et pour les membres qui sont prêtres, il a été prévu dans les constitutions mêmes de notre Fraternité, qu’il y aurait des frères et des frères qui seraient religieux.
Ceci est tout de même notable et instructif pour vous, mes chers frères. Puisque nos constitutions ont été approuvées officiellement par l’Église – même si, hélas, après, elles ont été annulées illégalement – cependant elles ont été approuvées, non seulement par l’évêque de Fribourg, mais aussi par Rome. Et donc l’institution des frères a été également approuvée par Rome. Ce n’est pas sans importance. C’est une bénédiction particulière du Bon Dieu, qui descend sur l’institution des frères religieux.
Et quelles sont les directives que l’Église donne à ses religieux pour être de bons et fervents religieux ? Elle insiste sur trois points en particulier qu’elle appelle la ratio vivendi, la ratio orandi et la ratio operandi.
Qu’est-ce que cela veut dire ? Eh bien l’Église donne des conseils, des directives à ses religieux sur la manière de se comporter dans leur vie habituelle ; sur la manière de se comporter dans leur vie de prière et sur la manière de se comporter dans leur travail.
Que signifie la ratio vivendi ? C’est la manière, pour les frères, de se comporter dans leur journée habituelle en ce qui concerne leur habitation ; en ce qui concerne leur habillement ; en ce qui concerne leur nourriture ; en ce qui concerne leur repos, leurs loisirs, leur sommeil, que sais-je. Cette ratio vivendi doit être tout entière faite et exercée précisément selon les trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance qui s’exercent particulièrement dans cette ratio vivendi.
Observer la pauvreté dans la manière de se comporter, dans la manière de se comporter, dans la manière de s’habiller, dans la manière de vivre, dans ce qui concerne votre cellule, votre habitation, que tout ait un caractère de pauvreté, de simplicité, de détachement des choses de ce monde, dans votre nourriture, que la nourriture soit simple, sobre ; dans vos loisirs, dans votre repos, que tout soit conforme à cet esprit religieux, esprit de détachement des choses de ce monde, esprit de séparation du monde, esprit d’abandon de tout ce qui fait le souci des gens du monde et particulièrement de ceux qui ne sont pas chrétiens et recherchent des loisirs, hélas souvent défendus.
Alors, vous devez faire un effort, si vous voulez tendre à la perfection chrétienne, dans l’application de ces vertus dont vous avez fait la promesse solennelle, dans votre vie habituelle. Que ce soit là un objet d’examen pour vous, à l’occasion du renouvellement de vos vœux.
Et puis, l’Église insiste aussi, pour les religieux sur la ratio orandi. Pourquoi faites-vous des vœux de religion ? Pour tendre à la perfection chrétienne, qui ne consiste pas en autre chose que de vous unir au Bon Dieu, par Notre Seigneur Jésus-Christ, en Notre Seigneur Jésus-Christ, avec Notre Seigneur Jésus-Christ. Cette ratio orandi doit être le cœur de votre vie religieuse ; doit être le but essentiel de votre vie religieuse : vous unir à Dieu ; C’est l’essentiel de la vie chrétienne, de toute vie chrétienne.
Mais puisque vous faites profession précisément de tendre à une perfection chrétienne plus grande que les autres, vous devez aussi chercher dans votre vie de prière, à vous unir toujours plus profondément à Notre Seigneur Jésus-Christ, à Dieu.
Et comment le ferez-vous dans la pratique ? En réalisant, en faisant vos exercices de piété avec dévotion, avec amour, avec un grand désir de vous unir au Bon Dieu et vous le ferez particulièrement dans la prière liturgique.
Il n’est certes pas défendu d’avoir des dévotions particulières, de prier particulièrement tel ou tel saint Patron, vers lequel vous êtes plus attiré, mais cependant, ayez ce souci de suivre en cela l’esprit de l’Église. L’Église nous a composé tout un ensemble de prières, tout au long du cours de l’année, des prières magnifiques, qui tournent toutes – et vous pouvez le remarquer, vous le savez bien – qui tournent toutes autour du Vendredi Saint, de la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ sur sa Croix. C’est là, le centre, le cœur de la vie liturgique. Tout y prépare et tout en découle : le Vendredi Saint. Et qu’est-ce que le Vendredi Saint, sinon la Croix de Jésus sur le Calvaire ? Et cette Croix de Jésus sur le Calvaire, où se réalise-t-elle ; où se reproduit-elle dans votre vie quotidienne ? Dans la Sainte Messe.
Par conséquent, la Sainte Messe doit être pour vous, le cœur de votre vie spirituelle. Vous devez vous unir à Notre Seigneur Jésus-Christ, de tout votre cœur, de toute votre âme, dans son Sacrifice quotidien et Le recevoir comme Victime et vous faire victime avec Lui. Voilà l’idéal de votre ratio orandi. Que toute cette année liturgique vous ramène à Notre Seigneur Jésus-Christ sur la Croix et ensuite Notre Seigneur Jésus-Christ ressuscité et monté au Ciel.
Est-ce que votre vie religieuse, est-ce que votre ratio orandi est au service de votre ratio operandi ? C’est-à-dire, est-ce que votre vie de prière est au service, est un moyen pour mieux accomplir votre apostolat, pour mieux accomplir les charges qui vous sont données ?
Qu’allez-vous répondre, chers frères ? Eh bien non, ce n’est pas un moyen, c’est une fin principale la ratio orandi. Mais dans la mesure où précisément on se réunit à Dieu, alors cette ratio orandi deviendra la source et non pas le moyen, mais la source de votre apostolat, la source de votre amour du prochain, la source de l’accomplissement de vos charges, n’importe lesquelles, aussi humbles et simples qu’elles soient. Votre esprit de prière, votre amour de Dieu sera la source de cet amour du prochain que vous réaliserez dans les actions quotidiennes de vos charges qui vous sont données par vos supérieurs ; qui vous sont données par la Providence.
Ce n’est pas la même chose. La foi de votre vie religieuse n’est pas un but apostolique, mais le but apostolique ne peut pas être une fin. L’amour du prochain, n’est pas la fin ultime de vos vies. La fin ultime de nos vies, c’est l’amour de Dieu. L’amour du prochain fait partie de cet amour de Dieu. Il se répand en quelque sorte comme par l’abondance de votre amour du Bon Dieu, vous répandez aussi votre amour sur le prochain. En faisant tout pour que votre prochain aille à Dieu, comme vous vous efforcez de le faire vous-même pour votre vie religieuse.
Alors, que ce soit là, voyez, l’orientation de votre vie religieuse : sanctifier votre ratio vivendi, sanctifier vos journées par la prière, par l’union à Dieu, par l’amour de Dieu, par la vraie dévotion, par les vraies dévotions de l’Église. Regardez comme l’Église a organisé toute l’année autour de cette grande Semaine, de la Semaine Sainte.
Et regardez comme l’Église a émaillé – je dirai – toute l’année des fêtes de Notre Seigneur JésusChrist bien sûr d’abord, et puis des fêtes de la Sainte Vierge, des fêtes des saints comme aujourd’hui la fête de l’Archange saint Michel, la fête des saints Anges, la fête de tous ceux qu’elle a jugé bon de nous donner comme modèles, en les canonisant.
Voilà quelles doivent être vos vraies dévotions. Cela, encore une fois, ne vous empêche pas d’avoir quelques dévotions particulières, mais que ces dévotions particulières ne prennent pas le pas sur la dévotion liturgique. Ce serait une erreur. Ce ne serait pas vivre la vie de l’Église. Ce ne serait pas vivre la vie de l’union au Bon Dieu telle que l’Église le désire pour vous et pour tous les fidèles d’ailleurs.
Alors attachez-vous à cette vie liturgique. Aimez à préparer vos messes, à dire les prières de la Sainte Messe même avant d’y assister, afin de vous pénétrer des pensées de l’Église.
Et puis, donnez-vous de tout cœur à vos tâches apostoliques, quelles qu’elles soient. Toutes, même les plus humbles représentent l’exercice de la charité envers le prochain. Toutes, peu importe l’œuvre qui est réalisée. Ce qui importe, c’est votre disposition intérieure, la disposition de faire cela par amour du Bon Dieu.
Car il n’y a qu’un seul amour. En définitive il n’y a pas un amour du prochain pour le prochain. Il y a l’amour du prochain pour Dieu. C’est le même amour qui nous incite à travailler pour le prochain : c’est l’amour de Dieu. Il ne doit pas y en avoir d’autre. Nous n’avons qu’un seul amour ici-bas, l’amour du Bon Dieu qui se répand sur notre prochain et qui cherche à attirer notre prochain vers le Bon Dieu.
Voilà, mes chers frères, votre belle vie religieuse. Elle est magnifique. Elle peut vous unir au Bon Dieu, vous donner des consolations infinies. Soyez-en persuadés.
Et je suis bien sûr, que quelquefois parmi vos confrères qui sont prêtres et qui sont dans l’apostolat, ils vous envient, non pas parce qu’ils ne voudraient plus célébrer la Sainte Messe pour être heureux comme vous – ils sont tellement heureux de célébrer la Sainte Messe sans doute – mais ils vous envient dans le cadre de votre vie, dans ce cadre silencieux, dans ce cadre régulier, dans ce cadre qui favorise l’union à Dieu. Tandis que leur apostolat bien souvent les dissipe. Ils sentent qu’il y a un danger pour eux de dissipation de leur vie spirituelle, de dispersion des activités, de contact aussi avec le monde et par conséquent, ils sentent ce danger qui les guette toujours. Et ils vous envient de vous trouver dans nos maisons, dans le cadre, dans le silence, dans le travail et ce qui facilite l’union à Dieu.
Alors réjouissez-vous des grâces particulières que le Bon Dieu vous donne. Et aujourd’hui, tous ensemble, nous allons prier d’une manière particulière pour vous et demander au Bon Dieu qu’il y ait de nombreuses vocations de frères.
Enfin, nous sommes heureux de vous voir venir nombreux ici, frères profès pour renouveler vos vœux, autour des quatre aspirants à la vie religieuse qui vont bientôt revêtir l’habit religieux et qui par cet habit, manifesteront qu’ils sont religieux et qu’ils se sont donnés à Dieu pour toujours.
Nous prierons particulièrement aujourd’hui, saint Michel Archange de vous garder dans votre vie religieuse. Que vous ayez cette inspiration fondamentale de saint Michel Archange dont le nom signifie : Qui est comme Dieu ? Et vous aussi, que votre vie soit ainsi : Qui est comme Dieu. Pour que nous L’aimions, pour que nous Le suivions ; pour que nous Le défendions ; pour que nous luttions contre tout ce qui se ligue contre Dieu : Qui est comme Dieu ?
Tel doit être l’élan naturel de nos cœurs et surnaturel.
Et puis demandons à saint Joseph dont la vie est celle peut-être qui ressemble le plus… qui était un modèle pour vous. Ce qu’il a fait dans le silence, son travail de charpentier, en compagnie de Notre Seigneur Jésus-Christ. Quelle vie extraordinaire : Trente ans avec Dieu, avec Dieu travaillant sous ses ordres. Est-ce possible qu’un homme ait été choisi pour cette tâche particulière ? Eh bien unissez-vous à saint Joseph. Demandez-lui de vous donner les sentiments qu’il avait lorsqu’il travaillait à côté de Notre Seigneur, qu’il savait être son Dieu, son Créateur. Et pourtant il avait le pouvoir de lui commander. Demandez à saint Joseph de vous donner ces sentiments.
Et demandez-le aussi à la très Sainte Vierge Marie, elle qui a vécu également dans l’intimité de la maison de Nazareth avec Notre Seigneur. Que le travail qu’elle accomplissait dans la simplicité, préparant les repas de saint Joseph et de Notre Seigneur, aménageant la maison, comme vous le faites quelquefois dans nos maisons, demandez à la Vierge Marie de vous donner aussi les sentiments qu’elle avait dans son cœur, pour le service du prochain et le service de Dieu.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.