Quel est le but du mariage ?

1. Le mariage est-​il nécessaire ?

Le petit homme, à l’inverse des petits ani­maux, est dépour­vu de moyens pour assu­rer seul sa nour­ri­ture, son loge­ment, sa défense contre les attaques des intem­pé­ries et des pré­da­teurs [1]. Son intel­li­gence est comme une table rase et ce sera l’œuvre d’une longue édu­ca­tion de per­mettre au petit homme de deve­nir grand et auto­nome [2]. D’où la néces­si­té d’une ins­ti­tu­tion capable d’engendrer et d’éduquer l’enfant et revê­tue de ces deux carac­té­ris­tiques essen­tielles : l’unité et l’indissolubilité.
L’enfant a besoin d’un milieu stable et équi­li­bré pour gran­dir har­mo­nieu­se­ment au plan phy­sique, intel­lec­tuel, moral et spi­ri­tuel [3]. Le mariage un et indis­so­luble est donc une néces­si­té de la nature. La faillite des socié­tés modernes fon­dées sur le divorce, l’union libre et la famille mono­pa­ren­tale en la meilleure contre-preuve.

2. Dieu a‑t-​il manifesté dans la Sainte Ecriture sa volonté de fonder le mariage ?

Oui, plu­sieurs textes nous parlent de cela :

« Dieu créa l’homme. Il le créa à l’image divine, il le créa mâle et femelle. Dieu les bénit : Soyez féconds, dit-​il, mul­ti­pliez, rem­plis­sez la terre et soumettez-​la » (Gen 1, 28)
« N’avez-vous pas lu, qu’à l’origine, celui qui fit la race humaine les fit mâle et femelle, et qu’il a dit : Ainsi donc l’homme quit­te­ra son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule chair ? Ainsi ils ne seront plus deux mais une seule chair. Eh bien, ce que Dieu a uni, l’homme ne doit pas le sépa­rer. » (Mt 19, 4–6 ; cf. Gen.2, 18–25).
Le Christ lui-​même sanc­ti­fie­ra par sa pré­sence les noces de Cana (Jo 2, 1–11)
Saint Paul exal­te­ra l’union l’homme et la femme dans le mariage en la com­pa­rant à l’union du Christ et de l’Église. (Eph 5, 21–33).
Concluons donc que le mariage est à la fois une ins­ti­tu­tion natu­relle à l’homme [4] et vou­lue par Dieu. Les lois essen­tielles du mariage sont donc com­munes aux croyants et aux incroyants, aux catho­liques et aux non-catholiques.

3. Quel est le but du mariage ?

Poser la ques­tion du but du mariage, c’est poser la ques­tion de sa nature. La nature, c’est ce que nous rece­vons par la nais­sance, c’est ce que la chose est et ce que pour quoi elle est faite. Demander nature d’une chose, c’est deman­der pour quoi elle est faite, pour quelle fin.
À quelle fin s’ordonne le mariage, quelle est sa nature ?
Permettre de trans­mettre la vie, c’est-à-dire la don­ner et le faire gran­dir har­mo­nieu­se­ment. De même que l’œil a pour fin de faire voir, que les jambes ont pour fin de nous mou­voir, de même les organes géni­taux ont pour fin de trans­mettre la vie [5]. Mais il ne suf­fi­ra pas de trans­mettre fur­ti­ve­ment la vie, il fau­dra aus­si ame­ner ce nou­vel être à un degré de déve­lop­pe­ment suf­fi­sant. C’est pour­quoi, la fin pri­maire du mariage est la pro­créa­tion et l’éducation des enfants.
À cette pre­mière fin du mariage se rat­tache et se subor­donne une deuxième fin : le sou­tien mutuel des époux. Dans cette œuvre de géné­ra­tion et d’éducation où ils se font les coopé­ra­teurs de Dieu, les époux devront se sou­te­nir l’un l’autre. Ils che­mi­ne­ront l’un avec l’autre vers le Ciel. Ces enfants qu’ils feront naître et qu’ils édu­que­ront seront en quelque sorte pour la vie pré­sente et l’éternité le sou­ve­nir vivant de leur amour.
Si la Providence divine pri­vait les époux de don­ner la vie, si la sté­ri­li­té ren­dait la fin pri­maire inac­ces­sible, leur mariage res­te­rait plein de sens grâce à la fin seconde ; Le sou­tien mutuel des époux, aide réci­proque dans l’œuvre de la sanc­ti­fi­ca­tion personnelle.

Source : Abbé François Knittel, Cahiers Saint Raphaël n°86 (ACIM)

Notes de bas de page
  1. « L’homme est natu­rel­le­ment un ani­mal social et poli­tique, vivant en socié­té, plus que tous les autres ani­maux comme le démontre la néces­si­té natu­relle. En effet, la nature a pour­vu les autres ani­maux de nour­ri­ture, de poils, de défenses (comme les dents, les cornes, les griffes) ou au moins de vitesse pour s’enfuir. Or, l’homme n’est pour­vu par la nature de rien de sem­blable, car à la place il a reçu la rai­son qui lui per­met d’acquérir tout cela par le tra­vail de ses mains, encore qu’un homme seul ne puisse y par­ve­nir. Un homme seul ne pour­rait suf­fire à tra­cer son che­min. Il est donc natu­rel pour l’homme de vivre en socié­té.
    « Les autres ani­maux pos­sèdent un ins­tinct qui leur per­met de recon­naître ce qui leur est utile ou nocif ; ain­si la bre­bis reconnaît-​elle natu­rel­le­ment le loup comme son enne­mi. D’autres ani­maux recon­naissent par ins­tinct les herbes médi­ci­nales et tout ce qui est néces­saire à la vie. Quant à l’homme, il n’acquiert la connais­sance natu­relle de tout ce qui est néces­saire à la vie que par la socié­té. Ainsi, parvient-​il par sa rai­son à pas­ser des prin­cipes uni­ver­sels aux conclu­sions par­ti­cu­lières pour ce qui est néces­saire à sa vie. Il est impos­sible qu’un homme seul par­vienne par sa rai­son à la connais­sance de tout ce qui lui est néces­saire. Il faut donc que l’homme vive en socié­té afin que l’un aide l’autre et que cha­cun déve­loppe une par­tie du champ de la science, l’un en méde­cine, l’autre ailleurs. » (De Regno, I, 1, n°741–742)
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  2. « Le petit pous­sin brise sa coquille et se met à cou­rir.
    « Peu de choses lui manque pour crier : ‘Je suis libre.’
    Au petit homme, il manque tout. Bien avant de cou­rir, il a besoin d’être tiré de sa mère, lavé, cou­vert, nour­ri. Avant que d’être ins­truit des pre­miers pas, des pre­miers mots, il doit être gar­dé de risques mor­tels. Le peu qu’il a d’instinct est impuis­sant à lui pro­cu­rer les soins néces­saires, il faut qu’il les reçoive, tout ordon­nés, d’autrui.
    « Il est né. Sa volon­té n’est pas née, ni son action pro­pre­ment dite. Il n’a pas dit Je ni Moi, et il en est fort loin, qu’un cercle de rapides actions pré­ve­nantes s’est des­si­né autour de lui. Le petit homme presque inerte, qui péri­rait s’il affron­tait la nature brute, est reçu dans l’enceinte d’une autre nature empres­sée, clé­mente et humaine : il ne vit que parce qu’il en est le petit citoyen. […]
    « C’est une entraide pour la vie qu’offre la Nature au petit hôte nu, affa­mé, éplo­ré, qui n’a même pas en bouche une obole qui lui paye sa bien­ve­nue. La Nature ne s’occupe que de le secou­rir. Il est en larmes, elle le caresse et le berce, et elle s’efforce de le faire sou­rire. […]
    Mais le petit homme gran­dit : il conti­nue dans la même voie royale du même béné­fice indu, lit­té­ra­le­ment indu ; il ne cesse de rece­voir. Outre qu’on lui a incul­qué une langue, par­fois riche et savante, avec le grave héri­tage spi­ri­tuel qu’elle apporte, une nou­velle mois­son qu’il n’a point semée est récol­tée de jour en jour : l’instruction, l’initiation et l’apprentissage. » (Charles Maurras, Mes idées poli­tiques, Paris, Albatros, 1986, p. 17–22)
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  3. « Chez l’homme, l’enfant a besoin d’être sui­vi par ses parents pen­dant un temps consi­dé­rable : aus­si l’union entre l’homme et la femme doit-​elle être de longue durée » (Suppl., 41, 1, ad 1) « Il est mani­feste que dans l’espèce humaine la femme seule ne sau­rait suf­fire à l’éducation de sa pro­gé­ni­ture. En effet, les besoins de la vie humaine exigent beau­coup de choses qu’une seule per­sonne ne sau­rait pro­cu­rer. Il est donc conve­nable pour la nature humaine que l’homme demeure avec la femme après leur rap­port et ne s’en aille pas, indif­fé­rent à ce qui pour­rait se pas­ser, comme on le voit chez les for­ni­ca­teurs. » (C.G., III, 122, n°2952d)[]
  4. « Le mariage est natu­rel à l’homme et la rela­tion de for­ni­ca­tion qui s’en dis­tingue est contraire au bien de l’homme. Aussi est-​ce un péché. » (C.G., III, 122, n°2954 in fine) « Est natu­rel ce vers quoi la nature incline mais qui est réa­li­sé par une inter­ven­tion de la volon­té : ain­si les ver­tus sont-​elles dites natu­relles. En ce sens-​là, le mariage est dit natu­rel car la rai­son natu­relle y incline de deux façons. » (Suppl., 41, 1 c)[]
  5. « L’homme est le seul être vivant qui sache qu’il existe, entre l’amour et la pro­créa­tion, une uni­té de nature, et cela n’est pas une idée sim­ple­ment chré­tienne. Les païens repré­sen­taient le Dieu-​amour sous les traits d’un enfant. Cette connais­sance fait appel au cœur et à l’intelligence, et c’est elle qui donne sa digni­té au com­por­te­ment sexuel de l’homme » (Pr. Jérôme Lejeune)[]