Lettre n° 74 de Mgr Bernard Fellay aux Amis et Bienfaiteurs de la FSSPX d’avril 2009

+Ave Maria !
Chers Amis et Bienfaiteurs,

u moment où nous lan­cions une nou­velle croi­sade du Rosaire, lors de notre pèle­ri­nage à Lourdes en octobre der­nier, nous ne comp­tions cer­tai­ne­ment pas sur une réponse si rapide du Ciel à notre demande ! En effet, comme pour notre pre­mière sup­plique à laquelle notre bonne Mère du Ciel avait répon­du si effi­ca­ce­ment par l’intermédiaire du Vicaire du Christ et de son Motu Proprio sur la messe tra­di­tion­nelle, il a plu à la Vierge Marie de nous octroyer une deuxième grâce avec plus de rapi­di­té encore : dans la même visite à Rome, au mois de jan­vier, où je dépo­sais le bou­quet des 1.703.000 cha­pe­lets à l’intention du Souverain Pontife, je rece­vais des mains du Cardinal Castrillón Hoyos le décret de remise des « excommunications ».

Nous avions deman­dé cela, dès l’an 2001, comme signe de bien­veillance de la part du Vatican envers le mou­ve­ment tra­di­tion­nel. Car depuis le Concile, tout ce qui est et veut être tra­di­tion­nel dans la sainte Eglise sup­porte bri­made sur bri­made, jusqu’au refus du droit de cité. Cela a bien évi­dem­ment détruit, en par­tie voire tota­le­ment, la confiance envers les auto­ri­tés romaines. Tant que cette confiance n’est pas par­tiel­le­ment réta­blie, disais-​je alors, nos rela­tions res­te­ront mini­males. La confiance n’est pas seule­ment un bon sen­ti­ment, elle est le fruit qui naît natu­rel­le­ment lorsque nous recon­nais­sons dans ces auto­ri­tés des pas­teurs qui ont à cœur le bien de tout ce que nous appe­lons la Tradition. Et nos demandes préa­lables furent for­mu­lées dans ce sens. De fait, il est impos­sible de com­prendre notre posi­tion et notre atti­tude envers le Saint Siège, si on ne veut pas inclure la per­cep­tion de l’état de crise dans lequel se trouve l’Eglise. Il ne s’agit pas là d’un évé­ne­ment super­fi­ciel, ni d’une vision per­son­nelle. Il s’agit d’une réa­li­té indé­pen­dante de notre per­cep­tion, recon­nue par ces mêmes auto­ri­tés de temps en temps, et véri­fiée tant de fois dans les faits. Cette crise a des aspects mul­tiples, variés, par­fois pro­fonds, par­fois cir­cons­tan­ciels, et nous en souf­frons tous. Les fidèles sont sur­tout frap­pés par les céré­mo­nies de la nou­velle litur­gie – hélas très sou­vent scan­da­leuses ! -, par la pré­di­ca­tion ordi­naire où sont prises des posi­tions sur la morale en totale contra­dic­tion avec l’enseignement plu­ri­sé­cu­laire de l’Eglise et l’exemple des saints. Les parents ont eu très sou­vent la dou­leur immense de consta­ter la perte de la foi chez leurs enfants confiés à des ins­ti­tuts d’éducation catho­liques, ou de déplo­rer leur igno­rance presque totale de la doc­trine catho­lique faute de caté­chisme sérieux. Les reli­gieux, en nombre incal­cu­lable, mani­festent depuis les révi­sions de leurs consti­tu­tions, et après les recy­clages post­con­ci­liaires, une perte de l’esprit évan­gé­lique, en par­ti­cu­lier celui du renon­ce­ment, de la pau­vre­té, du sacri­fice ; perte qui a eu pour consé­quence presque immé­diate une dimi­nu­tion telle des voca­tions que plu­sieurs ordres et congré­ga­tions ferment leurs cou­vents les uns après les autres, lorsqu’ils ne dis­pa­raissent pas pure­ment et sim­ple­ment. La situa­tion de nom­breux dio­cèses est pareille­ment dramatique.

Tout cela forme un ensemble cohé­rent et n’est pas arri­vé par hasard, mais à la suite d’un concile qui s’est vou­lu réfor­ma­teur, en pré­ten­dant mettre l’Eglise au goût du jour. On nous accuse soit de voir une crise là où il n’y en aurait pas, soit d’attribuer faus­se­ment à ce concile les résul­tats pour­tant désas­treux et extrê­me­ment graves que cha­cun peut consta­ter, soit encore de pro­fi­ter de cette situa­tion pour jus­ti­fier une atti­tude incor­recte de rébel­lion ou d’indépendance.

Pourtant, que l’on prenne les textes des Pères de l’Eglise, du Magistère, de la litur­gie, de la théo­lo­gie à tra­vers tous les temps : nous trou­vons une uni­té à laquelle nous adhé­rons de tout notre cœur. Et cette uni­té doc­tri­nale est for­te­ment contre­dite, bles­sée, amoin­drie dans la pra­tique par les lignes de conduite actuelles. Nous n’inventons pas une rup­ture, elle existe bien mal­heu­reu­se­ment, et il n’est qu’à voir la manière dont cer­tains épis­co­pats nous traitent, même après le retrait des excom­mu­ni­ca­tions, pour consta­ter com­bien est pro­fond le rejet des modernes vis-​à-​vis de tout ce qui a saveur de Tradition, au point qu’il est impos­sible de ne pas don­ner à ce rejet le nom de rup­ture avec le passé.

Oui, autant nous avons été sur­pris par la paru­tion du décret du 21 jan­vier, autant nous l’avons été aus­si par la vio­lence de la réac­tion des pro­gres­sistes et de la gauche en géné­ral à notre encontre. Il est vrai qu’ils ont trou­vé une occa­sion en or dans les mal­heu­reuses paroles de Mgr Williamson, qui leur ont per­mis par un amal­game fort injuste de mal­trai­ter notre Fraternité consi­dé­rée comme un bouc émis­saire. En fait, nous avons été ins­tru­men­ta­li­sés dans une lutte encore beau­coup plus impor­tante : celle de l’Eglise, qui porte bien son nom de mili­tante, contre ces esprits mau­vais qui rôdent dans les airs, comme dit saint Paul. Oui, nous n’hésitons pas à ins­crire notre petite his­toire dans la grande his­toire de l’Eglise, dans celle de cette lutte tita­nesque pour le salut des âmes annon­cée dès la Genèse, et décrite de manière si sai­sis­sante dans l’Apocalypse de saint Jean. Souvent cette lutte reste au niveau spi­ri­tuel ; de temps en temps, du niveau des esprits et des âmes elle des­cend au niveau des corps et devient visible, comme dans les per­sé­cu­tions ouvertes.

Il faut savoir recon­naître, à tra­vers ce qui s’est pas­sé ces der­niers mois, un moment plus intense de cette lutte. Et il est bien clair que celui qui en fin de compte est visé, c’est le Vicaire du Christ dans son effort de com­men­cer une cer­taine res­tau­ra­tion de l’Eglise. On craint un rap­pro­che­ment entre la tête de l’Eglise et notre mou­ve­ment, on craint une perte des acquis de Vatican II, et on met tout en œuvre pour neu­tra­li­ser cela. Qu’en pense vrai­ment le pape ? Où se situe-​t-​il ? Juifs et pro­gres­sistes le somment de choi­sir entre Vatican II et nous…, au point que pour les ras­su­rer la Secrétairerie d’Etat n’a rien trou­vé de mieux que de poser comme condi­tion néces­saire à notre exis­tence cano­nique l’ac­cep­ta­tion com­plète de ce que nous consi­dé­rons comme la source prin­ci­pale des pro­blèmes actuels et à quoi nous nous oppo­sons depuis tou­jours. … Cependant, eux comme nous sont tenus par le ser­ment anti-​moderniste et toutes les autres condam­na­tions de l’Eglise. C’est ain­si que nous n’acceptons pas d’aborder Vatican II autre­ment qu’à la lumière de ces solen­nelles décla­ra­tions (pro­fes­sion de foi et ser­ment anti­mo­der­niste) faites devant Dieu et l’Eglise. Et si cela paraît incom­pa­tible, alors for­cé­ment ce sont les nou­veau­tés qui ont tort. Nous comp­tons sur les dis­cus­sions doc­tri­nales annon­cées pour tirer au clair aus­si pro­fon­dé­ment que pos­sible ces points.

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Profitant de la nou­velle situa­tion après le décret sur l’excommunication, qui n’a rien chan­gé au sta­tut cano­nique de la Fraternité, maints évêques essaient de nous impo­ser un cercle car­ré en exi­geant de nous l’obéissance à la lettre du Droit Canon, en tout point, comme si nous étions par­fai­te­ment en ordre, alors qu’en même temps ils nous déclarent cano­ni­que­ment inexis­tants ! Déjà un évêque alle­mand a annon­cé qu’avant la fin de l’année, la Fraternité serait de nou­veau hors de l’Eglise… Charmante pers­pec­tive ! La seule solu­tion viable, celle d’ailleurs que nous avions deman­dée, est celle d’une situa­tion inter­mé­diaire, for­cé­ment incom­plète et impar­faite au plan cano­nique, mais qui soit accep­tée comme telle sans constam­ment nous jeter à la face l’accusation de déso­béis­sance ou de rébel­lion, sans lan­cer à notre égard des inter­dic­tions inte­nables. Car en fin de compte, l’état anor­mal dans lequel se trouve l’Eglise et que nous appe­lons état de néces­si­té, se voit prou­vé une fois de plus dans l’attitude et les paroles de cer­tains évêques à l’égard du pape et de la Tradition.

Comment les choses vont-​elles évo­luer ? nous n’en savons rien. Nous main­te­nons notre pro­po­si­tion d’accepter notre situa­tion actuelle impar­faite comme pro­vi­soire, tout en abor­dant enfin les dis­cus­sions doc­tri­nales annon­cées, en espé­rant qu’elles por­te­ront de bons fruits.

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Mais sur ce che­min si dif­fi­cile, devant les oppo­si­tions si vio­lentes, nous vous deman­dons, chers fidèles, encore une fois, de recou­rir à la prière. Il nous semble que le moment est venu de lan­cer une offen­sive d’envergure, pro­fon­dé­ment ancrée sur le mes­sage de Notre Dame à Fatima, dont elle-​même a pro­mis l’heureuse issue, puisqu’elle annonce qu’à la fin son Cœur Immaculé triom­phe­ra. C’est ce triomphe que nous Lui deman­dons, par les moyens qu’elle demande elle-​même, la consé­cra­tion de la Russie à son Cœur Immaculé par le Pasteur Suprême et tous les évêques du monde catho­lique, et la pro­pa­ga­tion de la dévo­tion à son Cœur dou­lou­reux et imma­cu­lé. C’est pour­quoi nous vou­lons lui offrir dans ce but, d’ici le 25 mars 2010, un bou­quet de 12 mil­lions de cha­pe­lets, comme une cou­ronne d’autant d’étoiles autour de sa per­sonne, accom­pa­gné d’une somme équi­va­lem­ment impor­tante de sacri­fices quo­ti­diens que nous aurons soin de pui­ser avant tout dans l’accomplissement fidèle de notre devoir d’état, et avec la pro­messe de pro­pa­ger la dévo­tion à son Cœur Immaculé. Elle-​même pré­sente cela comme le but de ses appa­ri­tions à Fatima. Nous sommes inti­me­ment per­sua­dés que si nous sui­vons avec atten­tion ce qu’elle nous demande, nous obtien­drons beau­coup plus que tout ce que nous n’oserions jamais espé­rer, et sur­tout que nous assu­re­rons notre salut en béné­fi­ciant des grâces qu’elle nous a promises.

Nous deman­dons par consé­quent à nos prêtres aus­si un effort par­ti­cu­lier pour faci­li­ter aux fidèles cette dévo­tion, en met­tant l’accent non seule­ment sur la com­mu­nion répa­ra­trice des pre­miers same­dis du mois, mais encore en inci­tant les fidèles à vivre dans une inti­mi­té très pro­fonde avec Notre Dame en se consa­crant à son Cœur Immaculé. Il serait bon aus­si de mieux connaître et d’approfondir la spi­ri­tua­li­té du grand héraut de l’Immaculée, le Père Maximilien Kolbe.

Notre Fraternité s’est consa­crée au Cœur Immaculé il y a 25 ans cette année. Nous vou­lons renou­ve­ler cette heu­reuse ini­tia­tive de M. l’abbé Schmidberger en y met­tant toute notre âme, en ravi­vant nos cœurs dans cet esprit. Il est bien évident que nous n’avons pas l’intention de com­man­der à la divine Providence ce qu’elle devrait faire, mais nous avons appris dans les exemples des saints et de l’Ecriture Sainte elle-​même que les grands dési­rs peuvent faire hâter de façon impres­sion­nante les des­seins du bon Dieu. C’est avec cette audace que nous dépo­sons aujourd’hui auprès du Cœur Immaculé de Marie cette inten­tion en Lui deman­dant de vous prendre tous sous sa mater­nelle protection.

Dieu vous bénisse abondamment !

En la fête de la Résurrection glo­rieuse de Notre Seigneur Jésus Christ,
Winona, Pâques 2009.

+ Bernard Fellay

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FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.