Que reproche l’Eglise à la contraception ?

Image : Jacques Gamelin, Le mariage de Tobie et de Sara

L’article pré­cé­dent a énon­cé les dif­fé­rentes condam­na­tions de l’Eglise contre la contra­cep­tion. Quel en est le fondement ?

9. Que reproche l’Église à ces méthodes ?

Elles s’opposent à la nature du mariage.

On pré­tend par la contra­cep­tion sépa­rer arti­fi­ciel­le­ment les deux fins du mariage (procréation/​éducation des enfants – sou­tien mutuel). Or, ces deux fins sont conjointes et hié­rar­chi­sées et il n’appartient pas à l’homme de les sépa­rer et de les oppo­ser dia­lec­ti­que­ment sans faute grave [1]). Que l’homme ne sépare donc point ce que Dieu a uni !

Chez les ani­maux sans rai­son, la contra­cep­tion n’existe pas : pour eux union et géné­ra­tion sont indis­so­lu­ble­ment liées sans qu’ils le sachent. Pour les hommes, ce lien qu’ils connaissent peut être bri­sé par la liber­té humaine. Or, bri­ser par la liber­té l’œuvre de Dieu, c’est pécher. Nous pou­vons donc conclure que la contra­cep­tion s’oppose à tout mariage, natu­rel ou chrétien.

Elles conduisent à un abus peccamineux des satisfactions sensibles.

Pour que nous satis­fas­sions aux néces­si­tés de notre nature (ex : nour­ri­ture, géné­ra­tion, etc… ), Dieu a atta­ché à cer­tains devoirs une satis­fac­tion sen­sible, un plai­sir cor­po­rel. Celui-​ci sera d’autant plus intense que le devoir à accom­plir sera plus grave [2]). On remarque ain­si que ceux qui ont per­du le sens du goût n’ont plus envie de se nour­rir. Bien qu’ils connaissent théo­ri­que­ment la néces­si­té pour l’homme de se sus­ten­ter, en l’absence de tout plai­sir sen­sible, ce devoir leur devient très oné­reux [3]).

Il est donc contraire à l’ordre des choses de sépa­rer le plai­sir de l’accomplissement du devoir qu’il est sen­sé favo­ri­ser. Or, c’est bien là la carac­té­ris­tique de toute contra­cep­tion. Que tous les actes conju­gaux en ne soient pas féconds, cela dépend des dis­po­si­tions de la nature. Mais que l’acte conju­gal soit vicié par des pré­cau­tions anté­rieures ou pos­té­rieures, cela dépend de la liber­té de l’homme et c’est là où le péché s’insinue. La contra­cep­tion est donc un péché même pour les gens non mariés. C’est pour eux un péché sup­plé­men­taire qui se rajoute à celui des rap­ports sexuels hors d’une union légitime.

Elles engendrent un esprit contraceptif.

Le prin­cipe fon­da­men­tal de l’esprit contra­cep­tif s’énonce ain­si : le plai­sir à tout prix. Par la tech­nique, l’homme pré­tend se libé­rer de ses res­pon­sa­bi­li­tés. Il aug­mente ses satis­fac­tions sen­sibles sans être expo­sé jamais à subir les consé­quences de ses actes : ici la géné­ra­tion éven­tuelle consé­cu­tive aux actes conju­gaux posés. Cet esprit contra­cep­tif du plai­sir à tout prix conduit logi­que­ment à admettre ensuite l’avortement, l’homosexualité et toutes les pra­tiques contre-​nature. Si le seul cri­tère d’action est la satis­fac­tion propre, tout devient per­mis pour­vu que le plai­sir soit au bout.

Certes, par­mi ceux qui admettent la contra­cep­tion, beau­coup refusent l’avortement et les autres pra­tiques contre-​nature. Mais ils ont mis le doigt dans un engre­nage qui les condui­ra logi­que­ment à admettre, qu’ils le veuillent ou non, en réa­li­té ou en pen­sée, tôt ou tard, toutes les dépra­va­tions morales ou du moins à ne plus pou­voir s’y opposer.

10. Quelles sont les autres conséquences de la contraception ?

Certains contraceptifs ont des effets abortifs.

Quelques contra­cep­tifs (ex : la pilule abor­tive R.U.486, le sté­ri­let, la pilule dite du len­de­main) ont un effet abor­tif cer­tain : c’est d’ailleurs uni­que­ment à ce titre qu’ils sont uti­li­sés en tant que moyens de contra­cep­tion. Dans ces cas-​là, l’avortement pré­coce est direc­te­ment recher­ché et c’est un homi­cide direct (même si on ne peut déter­mi­ner avec cer­ti­tude com­bien de fois il a été commis).

Quant aux pilules anti-​conceptionnelles, leur action est diverse : cer­taines sus­pendent l’ovulation (sous l’effet des œstro­gènes) ; d’autres empêchent la ren­contre du sper­ma­to­zoïde et de l’ovule en pro­dui­sant une glaire qui y fait obs­tacle ou rendent la matrice inapte à la nida­tion d’un ovule éven­tuel­le­ment fécon­dé (sous l’effet des pro­ges­ta­tifs). Aussi, la der­nière ‘sécu­ri­té’ pro­cu­rée par cer­taines pilules oestro-​progestatives provoque-​t-​elle l’avortement de l’ovule éven­tuel­le­ment fécon­dé. Dans ce der­nier cas, la pilule est donc un mau­vais refuge pour les bonnes consciences qui pro­clament qu’elles évitent l’avortement grâce aux contraceptifs.

La contraception est un tremplin pour l’acceptation de l’avortement.

La men­ta­li­té contra­cep­tive dont nous avons par­lé ci-​dessus (9–3) condui­ra à mépri­ser la vie réelle du fœtus déjà for­mé après avoir mépri­sé la vie en puis­sance par la contra­cep­tion. On sait que les cam­pagnes en faveur de l’avortement ne sont lan­cées que lorsque 25% des femmes usent déjà de la pilule. L’enfant n’est plus dési­ré, il devient un dan­ger, un poids mort, une plaie. Et ce dan­ger est écar­té plus sûre­ment par l’avortement que par la contra­cep­tion [4]).

La contraception détruit l’amour humain.

L’amour vrai, qui dif­fère de la satis­fac­tion tem­po­raire de ses pas­sions, se fonde sur la res­pon­sa­bi­li­té. L’amour est un don réci­proque de soi à l’autre. Il exige renon­ce­ment à soi-​même, sacri­fice de ses propres aises pour faire plai­sir à celui qu’on aime. D’autre part, l’amour ne trouve pas son expres­sion uni­que­ment au plan cor­po­rel ; il est aus­si et sur­tout union des cœurs et des esprits. Que retrouve-​t-​on de tout cela dans le com­por­te­ment de ceux qui uti­lisent la contra­cep­tion ? On dit qu’avant l’invention de la contra­cep­tion, les hommes étaient irres­pon­sables et que toute la res­pon­sa­bi­li­té de la mater­ni­té retom­bait sur la femme. Maintenant, grâce à la contra­cep­tion, même la femme devient irres­pon­sable. Est-​ce un progrès ?

La contraception conduit au mépris de la femme, épouse et mère.

La contra­cep­tion enlève à la femme ce pour quoi elle est faite phy­sio­lo­gi­que­ment, psy­cho­lo­gi­que­ment, spi­ri­tuel­le­ment. Dans toutes les civi­li­sa­tions, le res­pect et l’honneur ren­dus à la femme décou­laient de son rang d’épouse et de mère, au point que celle qui ne pou­vait être mère était mépri­sée. Enlever à la femme ce qui fait sa gloire et son hon­neur, c’est la réduire au rang d’un objet de plai­sir, même si elle use volon­tai­re­ment de la contraception.

La pilule a‑t-​elle vrai­ment libé­ré la femme de ce mal ? Non, « la contra­cep­tion n’a pas libé­ré la femme, elle a libé­ré les hommes et char­gé la femme d’une res­pon­sa­bi­li­té per­ma­nente. » [5] Au même titre que la théo­lo­gie de la libé­ra­tion est une idéo­lo­gie fabri­quée dans les pays riches et appli­quées dans les pays pauvres, ain­si la libé­ra­tion de la femme par la contra­cep­tion est-​elle une idéo­lo­gie for­gée par des hommes et impo­sée aux femmes.

La contraception est le signe d’une société sénile.

La men­ta­li­té contra­cep­tive mani­feste le vieillis­se­ment d’une socié­té. On vit alors dans une socié­té de vieux avant l’âge pour de vieux égoïstes, d’où tout risque est éli­mi­né, d’où toute œuvre d’éducation est ban­nie. On reste entre soi et on se tient chaud en atten­dant de mou­rir…… le plus tard pos­sible. Or, c’est par ses enfants qu’une socié­té se pro­jette dans l’avenir. C’est le dyna­misme de la vie qui enlève à l’homme cette peur du len­de­main et qui l’engage à prendre des risques aujourd’hui pour les hommes de demain.

Source : Abbé François Knittel, Cahiers Saint Raphaël n°86 (ACIM)

Notes de bas de page
  1. « Qu. : Peut-​on admettre l’opinion de cer­tains modernes qui nient que la fin pre­mière du mariage soit la pro­créa­tion et l’éducation, ou qui enseignent que les fins secon­daires ne sont pas essen­tiel­le­ment subor­don­nées à la fin pri­maire, mais sont éga­le­ment prin­ci­pales et indé­pen­dantes ? Rép. : Non. » (Décret du Saint-​Office, 1er avril 1944 ; D.S. 3838[]
  2. « Les plai­sirs sont d’autant plus vio­lents qu’ils accom­pagnent des opé­ra­tions plus natu­relles. » (II-​II, 141, 4 c[]
  3. « La nature a uni cer­tains plai­sirs aux actes véné­riens afin que les ani­maux ne se dis­pensent pas par paresse des actes néces­saires à la nature : ce qui arri­ve­rait s’ils n’y étaient por­tés par quelque plai­sir. » (C.G., IV, 83, n°4180[]
  4. « La pré­ven­tion de la contra­cep­tion ; quel qu’en soit le pro­cé­dé, oblige le couple à une vigi­lance sans défaut. (…) L’avortement, dans la mesure où il est léga­li­sé et favo­ri­sé, appa­raît comme une solu­tion aisée. Il est moins contrai­gnant de dire un jour oui à l’avortement que tous les jours non à la pro­créa­tion. » (Régine Gablay, Réalités, avril 1973[]
  5. Dr Germaine Stag, Le Monde, 5 avril 1978[]