Les Rois Mages manifestent Notre-​Seigneur aux païens

Que les Rois Mages inter­cèdent pour nous et nous aident à mani­fes­ter Jésus-​Christ, dans ce monde de plus en plus païen.

Nous fête­rons l’Épiphanie le 6 jan­vier. Ce mot est syno­nyme de mani­fes­ta­tion ; Dieu mani­feste Jésus-​Christ aux païens. Mais com­ment s’y prend-​il ? Nous vou­drions répondre à cette ques­tion, en reli­sant l’Évangile et en nous appuyant sur saint Thomas d’Aquin et saint Jean Chrysostome.

Saint Thomas donne d’abord un prin­cipe géné­ral : Dieu ne se mani­feste pas de la même façon à tous ; mais II donne tou­jours ses secrets et ses bien­faits immé­dia­te­ment à quelques pri­vi­lé­giés, qui ont alors mis­sion de les répandre à leur tour. Notre-​Seigneur a ain­si été mani­fes­té en pre­mier lieu à la Très Sainte Vierge et à Saint Joseph, pour qu’ils puissent Le véné­rer dès le sein mater­nel et dès sa nais­sance. Mais cette seule mani­fes­ta­tion n’est pas suf­fi­sante. Il s’agit des parents. S’ils parlent, seuls, de la gran­deur de leur enfant, ils ne seront pas cré­dibles. La nais­sance de Notre-​Seigneur devait donc être mani­fes­tée aus­si à des étran­gers impar­tiaux. De plus, comme le Christ venait pour tous les hommes, il conve­nait qu’il soit annon­cé à des hommes de toute condi­tion. Il est ain­si mani­fes­té à des ber­gers qui étaient Israélites, igno­rants, rustres et habi­tant tout près de Bethléem. Il est aus­si révé­lé à des Mages qui venaient de loin, qui étaient des princes, des savants, des païens.

Saint Thomas d’Aquin ajoute une pré­ci­sion de temps : Notre-​Seigneur n’a pas tar­dé à se mani­fes­ter aux Juifs puis aux païens. Sa nais­sance est annon­cée la nuit même aux ber­gers, car ceux-​ci sont les pré­mices du peuple juif. L’œuvre de salut devait s’inaugurer dans ce peuple. Ensuite, les Mages arri­vèrent assez tôt pour encore trou­ver l’Enfant à Bethléem. Ils repré­sentent alors la masse des Nations aux­quelles la foi serait annon­cée plus tard. Il était juste que le monde païen ait aus­si de bonne heure ses repré­sen­tants auprès de Celui qui appor­tait le salut à tous les hommes. Ludolphe le Chartreux, dans sa Vie de Jésus-​Christ, dit que les Mages sont trois, des­cen­dants des trois grandes races issues de Noé.

Mais com­ment les Mages ont-​ils trou­vé l’Enfant Jésus ? Nous le savons, par une étoile. Saint Thomas dit : par un signe qui leur était fami­lier. Ils étaient en effet ver­sés dans la connais­sance des astres, et connais­saient cer­tai­ne­ment la pro­phé­tie de Balaam : Une étoile sor­ti­ra de Jacob et un sceptre s’élèvera d’Israël (Nb 24, 17). Le doc­teur angé­lique explique que Dieu peut envoyer des signes appro­priés. Pour les ber­gers, Il envoie un ange dont l’intervention était connue du peuple juif. Dans l’Évangile, nous voyons Notre-​Seigneur faire de même. Pour des pêcheurs de lac, Il pro­pose une pêche mira­cu­leuse ; pour des malades, Il mul­ti­plie les gué­ri­sons ; pour des doc­teurs de la Loi, Il explique les Écritures.

L’étoile envoyée aux Mages montre le che­min, comme la colonne de nuée qui gui­dait les Hébreux dans le désert. Encore faut-​il la suivre, être prêt à tout quit­ter pour cela. Puis elle dis­pa­raît aux abords de Jérusalem. Cela est pro­vi­den­tiel : les Mages sont obli­gés d’entrer dans la ville et de répandre la nou­velle : Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? (Mt 2, 2) Saint Jean Chrysostome dit qu’ils n’ont pas peur de confes­ser le Christ devant le plus cruel des tyrans. Ils en sont récom­pen­sés en enten­dant la réponse même don­née par l’Écriture : A Bethléem de Juda ; car il a été ain­si écrit par le pro­phète : Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es cer­tai­ne­ment pas le plus petit des chefs-​lieux de Juda, car c’est de toi que sor­ti­ra le chef qui régi­ra Israël mon peuple (Mt 2, 5–6). Et Saint Jean Chrysostome inter­roge : Hérode croit-​il aux Écritures ? Non, mais il est pres­sé par le démon, qui sait que les Écritures ne peuvent men­tir. Et saint Augustin de remar­quer que les Juifs citent la pro­phé­tie, mais ne se déplacent pas ; ils sont sem­blables aux ouvriers construi­sant l’arche de Noé, mais sans pen­ser à s’y réfugier…

Avant de reprendre leur route, les Mages entendent encore Hérode leur dire : Informez-​vous de l’Enfant (Mt 2, 8). Il ne dit pas : renseignez-​vous sur ce roi. Car, com­mente encore saint Chrysostome, « sous un man­teau d’hypocrisie, il aiguise son glaive ». Lorsque les Mages quittent Jérusalem, l’étoile paraît de nou­veau, pro­vo­quant une grande joie. Notons que les Mages n’ont désor­mais plus besoin de l’étoile, mais c’est la bon­té de Dieu qui le veut. Elle est là pour réjouir les Mages après leur épreuve devant Hérode. Un Psaume fait dire à Dieu : Selon la mul­ti­tude des dou­leurs de mon cœur, vos conso­la­tions ont rem­pli de joie mon âme (Ps 93, 19).

Arrivés à Bethléem, les Mages virent l’Enfant avec Marie, sa mère (Mt 2, 11). « Devant cet enfant pauvre, com­mente tou­jours Chrysostome, ils ne sont pas déçus, car ils cher­chaient le roi du Ciel et non un roi de la terre. C’est l’étoile qui témoigne pour cet enfant, l’Esprit Saint qui leur fait comprendre. »

Puis les Mages mani­festent les gran­deurs de cet Enfant par leurs cadeaux. Ils offrent de l’or car II est roi, de l’encens car II est Dieu, et de la myrrhe pour signi­fier que c’est aus­si un homme mor­tel. Enfin, ils sont pré­ve­nus en songe de ne pas retour­ner à Jérusalem (Mt 2, 12). Ce détail montre le soin que Dieu prend de ceux qui Le servent. Notre-​Seigneur se mani­feste aus­si comme la divine Providence… Alors, ils revinrent par un autre che­min (Mt 2, 12). De retour chez eux, explique l’intarissable Chrysostome, ils se mon­trèrent plus que jamais ado­ra­teurs fidèles du vrai Dieu, en ins­trui­sant un grand nombre par leur prédication.

Monseigneur Gaume, dans ses Biographies évan­gé­liques, écrit qu’en l’an 44, l’apôtre saint Thomas, par­tant pour les Indes, tra­ver­sa l’Arabie. Il trou­va les trois Rois Mages, les bap­ti­sa et leur confia l’apostolat de leur nation. « Ils s’en acquit­tèrent avec un zèle pro­por­tion­né aux grâces pri­vi­lé­giées dont ils avaient été l’objet. » Ils furent mar­ty­ri­sés dans la ville de Sessania des Adrumètes, aujourd’hui détruite. Leurs corps, recueillis par les chré­tiens, furent trans­por­tés plus tard à Constantinople, dans l’église Sainte-​Sophie, puis à Milan où ils furent véné­rés pen­dant 600 ans. En 1164, devant l’imminence du sac de Milan, leurs reliques furent confiées à l’archevêque de Cologne. C’est dans cette ville que l’on célèbre désor­mais saint Gaspard (le 1er jan­vier), saint Melchior (le 6) et saint Balthasar (le 11).

Que les Rois Mages inter­cèdent pour nous et nous aident à mani­fes­ter Jésus-​Christ, dans ce monde de plus en plus païen.

Source : Lou Pescadou n° 217