La liturgie des jours Saints

Quelques expli­ca­tions afin de mieux pro­fi­ter des céré­mo­nies du Triduum sacré, tel­le­ment inha­bi­tuelles et riches en symbolisme.

Chaque année, au terme du Carême, la litur­gie de l’Église ramène à notre esprit la pen­sée de ce que Notre Seigneur Jésus-​Christ a fait pour nous et pour notre salut. Partout et de tout temps, les églises se sont rem­plies durant le Triduum sacré, comme jamais durant toute l’année litur­gique. Profitant de ce temps de grâce, de nom­breux chré­tiens font une bonne confes­sion et satis­font à l’obligation de la Communion pascale.

Malheureusement, les céré­mo­nies de ces trois jours saints sont tel­le­ment inha­bi­tuelles et riches en sym­bo­lisme que nous sommes sou­vent sub­mer­gés et dépas­sés par leur nou­veau­té et leur complexité.

Essayons donc de situer en quelques mots et par avance les arti­cu­la­tions prin­ci­pales et les ensei­gne­ments impor­tants de ces céré­mo­nies afin de mieux en pro­fi­ter le moment venu.

La liturgie du Jeudi Saint

Le Jeudi Saint en fin d’après-midi a lieu la Messe « in cœna Domini ». Ce jour-​là, il n’est per­mis de dire qu’une seule Messe par église ou cha­pelle et les prêtres qui n’auraient pas à la célé­brer assis­te­raient et com­mu­nie­raient à cette unique, messe. C’est une manière pour l’Église de nous rap­pe­ler l’unicité du sacer­doce et l’unicité du sacri­fice du Christ.

Ce rap­pel de l’institution du sacre­ment de l’Ordre et du sacre­ment de l’Eucharistie (deux sacre­ments inti­me­ment liés) se fait avec un cer­tain appa­rat : la croix de l’autel est voi­lée de blanc, l’autel est orné de fleurs, on chante le Gloria qu’on n’avait pas enten­du durant le Carême, l’orgue se fait entendre jusqu’au Gloria.

Le choix des lec­tures et la céré­mo­nie du lave­ment des pieds nous rap­pellent l’héritage que Notre Seigneur nous a lais­sé. Dans l’Epître, 8. Paul, ins­truit par la Tradition, nous rap­pelle l’institution du sacer­doce (« Faites ceci en mémoire de moi ») et l’institution du sacri­fice de l’Autel (« Ceci est mon corps, ceci est mon sang qui a été livré pour vous »).

Appelés à nous unir au Christ et à son sacri­fice par la com­mu­nion, nous sommes invi­tés à le faire dans de bonnes dis­po­si­tions. Aussi l’Église supprime-​t-​elle en ces jours le Confiteor avant la com­mu­nion, esti­mant que l’avertissement de S. Paul conte­nu dans l’épître est suffisant.

L’Évangile et la céré­mo­nie du lave­ment de pieds insistent sur le pré­cepte de la cha­ri­té, qui est le signe dis­tinc­tif du chré­tien, et sur la néces­si­té de l’hu­mi­li­té pour vivre de la cha­ri­té. Seul celui qui recon­naît son néant peut espé­rer être rem­pli de grâce et de charité.

La céré­mo­nie du Jeudi Saint se ter­mine avec la pro­ces­sion solen­nelle au repo­soir où les chré­tiens fidèles accom­pa­gne­ront par la prière le Christ au jar­din des oli­viers, tan­dis que les autels (qui repré­sentent le Christ) sont dépouillés comme notre Sauveur l’a été le Vendredi Saint.

La liturgie du Vendredi Saint

La litur­gie du Vendredi Saint a conser­vé une forme très ancienne. Elle compte aujourd’hui quatre par­ties prin­ci­pales : les lec­tures, les grandes orai­sons, l’adoration de la croix et la Communion.

L’Église fait débu­ter l’office du Vendredi Saint avec trois lectures :

  • La pre­mière tirée du pro­phète Osée nous fait remar­quer l’inutilité d’un retour à Dieu qui serait super­fi­ciel et sans len­de­main. Nos efforts de Carême ne pro­dui­ront de fruits salu­taires que s’ils perdurent.
  • La deuxième lec­ture, tirée de l’Exode, remet devant nos yeux la signi­fi­ca­tion ori­gi­nelle de la Pâques. C’est au moment d’être libé­rés d’Égypte que les juifs immo­lèrent l’agneau pas­cal, qu’il consom­mèrent avant de se mettre en route, et dont ils badi­geon­nèrent le lin­teau des portes pour être pro­té­gés de l’ange exter­mi­na­teur. L’application au chré­tien, sur le point d’être libé­ré des chaînes du péché par le sacri­fice du Christ et pré­ser­vé de la mort éter­nelle, est facile.
  • La troi­sième lec­ture est la Passion selon S. Jean.

Ceci étant fait, l’Église se met en prière. Les grandes orai­sons du Vendredi Saint nous mani­festent l’universalité du salut et les grandes inten­tions de l’Église. Qu’il s’agisse de sa hié­rar­chie ou du peuple chré­tien, des caté­chu­mènes ou des auto­ri­tés poli­tiques, des héré­tiques ou des schis­ma­tiques, des juifs ou des païens, rien n’échappe à sa prière fer­vente en ce jour.

Le dévoi­le­ment de la croix et son ado­ra­tion par le cler­gé et les fidèles mettent devant les yeux de tous la source de toute grâce et de tout salut : la croix du Sauveur. Malgré les infi­dé­li­tés des hommes (rap­pe­lées dans les Improprères), le Sauveur ne cesse de nous pré­sen­ter sa croix comme l’instrument de notre salut.

Pour finir, l’Église nous offre la pos­si­bi­li­té de com­mu­nier, en ce jour où aucune Messe n’est célé­brée. Le Jeudi Saint, Notre Seigneur avait offert par avance le sacri­fice du Calvaire. La com­mu­nion de Ce jour sou­ligne ce lien entre la Messe, la com­mu­nion et la mort du Christ.

La liturgie du Samedi Saint

La Vigile pas­cale com­mence par pla­cer au milieu de l’église enté­né­brée le Christ res­sus­ci­té, sym­bo­li­sé par le Cierge pas­cal. Béni en-​dehors de l’église, le Cierge pas­cal est ame­né en grande solen­ni­té au milieu du chœur où il sera l’objet de nom­breuses marques de véné­ra­tions (encen­se­ment, louanges dans l’Exsultet).

Afin de nous ame­ner à entre­voir les rap­ports entre le Christ res­sus­ci­té et le bap­ti­sé, la litur­gie remet devant nos yeux le des­sein sal­vi­fique de Dieu, com­men­cé avec Israël et conti­nué aujourd’hui avec l’Église.

Voilà pour­quoi les quatre lec­tures rap­pellent successivement :

  • la création,
  • la libé­ra­tion d’Égypte,
  • l’appel à la sainteté
  • les graves devoirs de celui qui est appe­lé à ren­trer dans la Terre Promise.

L’application au bap­ti­sé est aisée : lui aus­si a été recréé par la grâce sanc­ti­fiante, libé­ré de l’esclavage du péché, appe­lé à la sain­te­té et à l’accomplissement de ses devoirs comme enfants adop­tifs de Dieu.

Suivent ensuite les rites de béné­dic­tion de l’eau bap­tis­male et de renou­vel­le­ment des pro­messes de bap­tême, enca­drés par le chant de la Litanie des saints. C’est par la fidé­li­té à leur grâce bap­tis­male que les saints sont entrés au Ciel.

La Vigile pas­cale se ter­mine avec la Messe qui conti­nue à mettre le Christ res­sus­ci­té, sym­bo­li­sé par le Cierge pas­cal, à la pre­mière place. Nul besoin de lumi­naire pour accom­pa­gner le chant de l’Évangile : le Cierge pas­cal y pour­voit. Nul besoin de chan­ter l’Agnus Dei : l’Agneau de Dieu est par­mi nous avec le Cierge pas­cal. Nul besoin de bai­ser de paix : le Christ res­sus­ci­té nous la donne par sa pré­sence symbolique.

La Messe de la Vigile se ter­mine avec le chant des Laudes qui rem­placent l’antienne de Communion. En célé­brant la Vigile pas­cale, le prêtre aura ain­si satis­fait à la réci­ta­tion des Matines et des Laudes. La Messe peut alors se conclure avec l’Ite mis­sa est, allé­luia, allé­luia qui nous accom­pa­gne­ra durant toute l’Octave de Pâques.

Source : La lettre de Notre-​Dame du Très Saint Rosaire n° 136